15 ans et plus ont utilisé l’internet à la maison, au travail ou ailleurs contre 18 %, six ans avant –,
les inégalités n’avaient pas pour autant été supprimées. Les personnes qui utilisent l’internet sont
en général plus jeunes, ont des revenus plus élevés et sont plus instruites que celles qui ne
l’utilisent pas. Les hommes sont encore plus nombreux que les femmes. En outre, les
francophones ne rattrapent pas leur retard sur les anglophones, tandis que les habitants des
régions rurales du Canada restent moins enclins que les citadins à se brancher. Au Québec,
l’étude NETendances 2002 met l’accent sur le fait que, à l’instar de ce qui s’est passé l’année
précédente, «!ce sont toujours les hommes, les plus jeunes, les mieux nantis, les plus scolarisés,
les habitants des grands centres urbains, les professionnels et… les non-francophones qui sont les
plus grands utilisateurs d’Internet!» [2, p. 10]. À la question suivante!: «!Le fossé numérique
bientôt comblé au Québec!?!», la réponse à court terme est négative!: «!plus on mesure le
phénomène et moins les écarts semblent se combler!» (ibid., p.10). Combler le fossé numérique
pourrait donc prendre bien des années.
Dans certains cas, les affirmations sur les tendances à l’œuvre sont moins nettes. Ainsi,
peut-on lire dans le rapport mondial sur le développement humain du Programme des Nations
unies pour le développement (PNUD) de 2001 que, si dans les pays en développement des
millions de personnes n’ont pas les moyens d’utiliser l’internet, c’est avant tout pour des raisons
économiques mais aussi technologiques [14, p. 35 et suiv.]. En conséquence, 79 % des
internautes vivent dans la zone dite «!OCDE!» (Organisation pour la coopération et le
développement économiques) qui ne représente pourtant que 14 % de la population mondiale,
mais qui comprend la quasi-totalité des trente pays les plus riches de la planète. Alors que le
téléphone est dorénavant plus que centenaire, il y a une ligne pour quinze personnes dans les pays
en voie de développement et une ligne pour deux cents personnes dans les pays les moins
avancés. En revanche, il y a plus d’une ligne pour deux habitants dans les pays de l’OCDE. «!De
telles disparités freinent l’accès à l’internet et au monde numérique en général!» (ibid., p. 42) et,
«!dans ces conditions, il faudra des années pour réduire la fracture numérique!» (ibid., p. 39).
Parfois, les propos sont moins pessimistes. Ainsi, est-il précisé que l’internet «!connaît une
croissance exponentielle!» (ibid., p. 35) grâce à la progression des raccordements, et ce même
dans de nombreux pays en développement – comme au Brésil, en Inde ou en Thaïlande – où des
entreprises ont développé des logiciels pour des utilisateurs analphabètes et des systèmes de
branchement sans fil qui fonctionnent à l’énergie solaire. Il importe toutefois de faire attention
aux taux de croissance dans ces pays, les chiffres de départ étant très faibles. De plus, «!la
diffusion d’Internet est [...] inégale au sein d’un même pays. Elle concerne surtout les zones
urbaines, les hommes jeunes et les couches les plus nanties et les plus instruites!» (ibid., p. 42).
Enfin, certains propos peuvent sembler ambivalents. Ainsi, d’un côté, on affirme que la
téléphonie mobile permet de s’affranchir de certaines contraintes liées à l’infrastructure mais, de
l’autre, on précise que la croissance de ce secteur est encore plus importante au sein des pays les
plus riches et que la fracture augmente en conséquence.
On retrouve aussi ce double discours dans d’autres rapports qui sont consacrés aux
situations dans les pays occidentaux. Intéressons-nous, par exemple, à une recherche récente
effectuée par Statistique Canada. On peut lire, au début de cette étude, que «!la commercialisation
d’Internet et la convergence des TIC ont suscité de l’intérêt pour de nouveaux sujets de
recherche!» et que l’un d’entre eux, «!celui de la fracture numérique est cruciale!» [18, p. 1]. On
apprend, par la suite, que «!le taux de pénétration de plusieurs TIC dans les ménages augmente