VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2016 - Thèse n°070 TROUBLES COMPULSIFS ASSOCIES A L’EPILEPSIE IDIOPATHIQUE CHEZ LE CHIEN : ETUDE RETROSPECTIVE A PARTIR DE 50 CAS DIAGNOSTIQUES AU SERVICE DE NEUROLOGIE DE VETAGROSUP THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 28 octobre 2016 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par GARRONE Manon Née le 22 août 1991 à Toulon (83) 2 VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2016 - Thèse n°070 TROUBLES COMPULSIFS ASSOCIES A L’EPILEPSIE IDIOPATHIQUE CHEZ LE CHIEN : ETUDE RETROSPECTIVE A PARTIR DE 50 CAS DIAGNOSTIQUES AU SERVICE DE NEUROLOGIE DE VETAGROSUP THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 28 octobre 2016 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par GARRONE Manon Née le 22 août 1991 à Toulon (83) 2 LISTE DES ENSEIGNANTS DU CAMPUS VÉTÉRINAIRE DE LYON Mise à jour le 09 juin 2015 Civilité M. M. Mme M. M. Mme Mme Mme M. M. Mme Mme Mme M. M. M. M. M. M. M. Mme M. M. Mme M. Mme Mme M. Mme Mme Mme M. Mme M. M. Mme M. Mme M. Mme M. Mme M. M. M. Mme M. Mme Mme Mme Mme Mme M. Mme M. M. M. M. Mme Mme Mme Mme Mme Mme M. M. M. M. Mme Mme Mme M. M. M. Mme M. Nom ALOGNINOUWA ALVES-DE-OLIVEIRA ARCANGIOLI ARTOIS BARTHELEMY BECKER BELLUCO BENAMOU-SMITH BENOIT BERNY BERTHELET BONNET-GARIN BOULOCHER BOURDOISEAU BOURGOIN BRUYERE BUFF BURONFOSSE CACHON CADORE CALLAIT-CARDINAL CAROZZO CHABANNE CHALVET-MONFRAY COMMUN DE BOYER DES ROCHES DELIGNETTE-MULLER DEMONT DESJARDINS PESSON DJELOUADJI ESCRIOU FAU FOURNEL FREYBURGER FRIKHA GILOT-FROMONT GONTHIER GRAIN GRANCHER GREZEL GUERIN HUGONNARD JUNOT KECK KODJO LAABERKI LACHERETZ LAMBERT LATTARD LE GRAND LEBLOND LEFRANC-POHL LEPAGE LOUZIER MARCHAL MOUNIER PEPIN PIN PONCE PORTIER POUZOT-NEVORET PROUILLAC REMY RENE MARTELLET ROGER SABATIER SAWAYA SCHRAMME SEGARD SERGENTET SONET THIEBAULT TORTEREAU VIGUIER VIRIEUX-WATRELOT ZENNER Prénom Théodore Laurent Marie-Anne Marc Anthony Claire Sara Agnès Etienne Philippe Marie-Anne Jeanne-Marie Caroline Gilles Gilles Pierre Samuel Thierry Thibaut Jean-Luc Marie-Pierre Claude Luc Karine Loic Alice Marie-Laure Pierre Isabelle Zorée Catherine Didier Corinne Ludovic Mohamed-Ridha Emmanuelle Alain Françoise Denis Delphine Pierre Marine Stéphane Gérard Angeli Maria-Halima Antoine Véronique Virginie Dominique Agnès Anne-Cécile Olivier Vanessa Thierry Luc Michel Didier Frédérique Karine Céline Caroline Denise Magalie Thierry Philippe Serge Serge Emilie Delphine Juliette Jean-Jacques Antonin Eric Dorothée Lionel UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP UP Unités pédagogiques Pathologie du bétail Gestion des élevages Pathologie du bétail Santé Publique et Vétérinaire Anatomie Chirurgie (ACSAI) Pathologie du bétail Pathologie morphologique et clinique des animaux Equine Biologie fonctionnelle Biologie fonctionnelle Anatomie Chirurgie (ACSAI) Biologie fonctionnelle Anatomie Chirurgie (ACSAI) Santé Publique et Vétérinaire Santé Publique et Vétérinaire Biotechnologies et pathologie de la reproduction Biotechnologies et pathologie de la reproduction Biologie fonctionnelle Anatomie Chirurgie (ACSAI) Pathologie médicale des animaux de compagnie Santé Publique et Vétérinaire Anatomie Chirurgie (ACSAI) Pathologie médicale des animaux de compagnie Biologie fonctionnelle Gestion des élevages Gestion des élevages Biologie fonctionnelle Santé Publique et Vétérinaire Equine Santé Publique et Vétérinaire Pathologie médicale des animaux de compagnie Anatomie Chirurgie (ACSAI) Pathologie morphologique et clinique des animaux Santé Publique et Vétérinaire Pathologie du bétail Santé Publique et Vétérinaire Santé Publique et Vétérinaire Gestion des élevages Gestion des élevages Santé Publique et Vétérinaire Biotechnologies et pathologie de la reproduction Pathologie médicale des animaux de compagnie Anatomie Chirurgie (ACSAI) Biologie fonctionnelle Santé Publique et Vétérinaire Santé Publique et Vétérinaire Santé Publique et Vétérinaire Gestion des élevages Biologie fonctionnelle Pathologie du bétail Santé Publique et Vétérinaire Equine Equine Biologie fonctionnelle Pathologie morphologique et clinique des animaux Gestion des élevages Santé Publique et Vétérinaire Pathologie morphologique et clinique des animaux Pathologie médicale des animaux de compagnie Anatomie Chirurgie (ACSAI) Anatomie Chirurgie (ACSAI) Biologie fonctionnelle Anatomie Chirurgie (ACSAI) Santé Publique et Vétérinaire Anatomie Chirurgie (ACSAI) Biologie fonctionnelle Anatomie Chirurgie (ACSAI) Equine Anatomie Chirurgie (ACSAI) Santé Publique et Vétérinaire Anatomie Chirurgie (ACSAI) Biologie fonctionnelle Pathologie morphologique et clinique des animaux Anatomie Chirurgie (ACSAI) Pathologie morphologique et clinique des animaux Santé Publique et Vétérinaire de compagnie de compagnie de compagnie de compagnie de compagnie de compagnie Grade Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Professeur Maître de conférences Professeur associé Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Maître de conférences Professeur Maître de conférences Professeur Contractuel Contractuel stagiaire Contractuel Contractuel stagiaire Contractuel 3 4 REMERCIEMENTS A Monsieur le Professeur Sylvain RHEIMS, de la Faculté de médecine de Lyon, Qui nous a fait l’honneur d’accepter la présidence de notre jury de thèse, Hommages respectueux. A Madame le Docteur Catherine Escriou, de VetAgro Sup, Pour avoir accepté de m’accompagner sur ce sujet, Pour votre confiance, vos conseils, vos corrections, Sincères remerciements. A Monsieur le Docteur Jean-Jacques THIEBAULT, de VetAgro Sup, Qui nous a fait l’honneur de juger notre travail et de faire partie de notre jury de thèse, Sincères remerciements. A tous les propriétaires de chiens Pour avoir accepté de me répondre, Pour votre sympathie, Sincères remerciements. 5 6 TABLE DES MATIERES TABLEDESANNEXES.............................................................................................................................13 TABLESDESILLUSTRATIONS..................................................................................................................15 LISTEDESABREVIATIONS......................................................................................................................19 INTRODUCTION.....................................................................................................................................21 PARTIE1:ETUDEBIBLIOGRAPHIQUE...................................................................................................23 ETUDEGENERALE:L’EPILEPSIEIDIOPATHIQUEETLESTROUBLESCOMPULSIFSCHEZLECHIEN...............................25 L’EPILEPSIEIDIOPATHIQUEDUCHIEN..........................................................................................27 IGénéralités..............................................................................................................................................................27 A) Définitionsetmanifestationscliniques.....................................................................................................27 1) Crisesd’épilepsie..................................................................................................................................27 2) Epilepsie...............................................................................................................................................27 3) Crisesfocales........................................................................................................................................28 4) Crisesgénéralisées...............................................................................................................................28 5) Crisesgroupées....................................................................................................................................30 6) Statusépilepticus.................................................................................................................................30 B) Classification..............................................................................................................................................30 1) Epilepsieidiopathique..........................................................................................................................31 2) Epilepsiestructurale.............................................................................................................................32 3) Crisesréactionnelles............................................................................................................................32 C) Physiologieetpathogénie.........................................................................................................................32 1) Généralités...........................................................................................................................................32 2) Excitabilitédesneurones.....................................................................................................................33 3) Lesprincipauxneurotransmetteursimpliqués.....................................................................................33 4) Propagationdel’activitéépileptique...................................................................................................34 D) Epidémiologie............................................................................................................................................34 E) Diagnostic..................................................................................................................................................35 F) Pronostic....................................................................................................................................................36 G) Traitement.................................................................................................................................................36 1) Principeetobjectifs..............................................................................................................................37 a) Principedutraitementantiépileptique(AE)...................................................................................37 b) Initiationdutraitement..................................................................................................................37 c) Suivietadaptation..........................................................................................................................38 2) Moléculesantiépileptiques(AE)...........................................................................................................38 a) Phénobarbital.................................................................................................................................39 b) BromuredePotassium....................................................................................................................40 c) Imépitoïne.......................................................................................................................................41 7 d) Lévétiracétam.................................................................................................................................42 e) Zonisamide......................................................................................................................................42 f) Diazépametmidazolam..................................................................................................................43 IIParticularitésdel’épilepsieidiopathiqueduchien................................................................................................44 A) Prédispositionsraciales.............................................................................................................................44 B) Génétiquedel’épilepsieidiopathique.......................................................................................................45 C) Importancedesparticularitésracialesdel’épilepsieidiopathique...........................................................47 LESTROUBLESCOMPULSIFSCHEZLECHIEN................................................................................49 IDéfinitions...............................................................................................................................................................49 IISymptomatologie...................................................................................................................................................50 IIIAnalogieaveclesTOCchezl’homme....................................................................................................................51 A) PrésentationdesTOCchezl’homme.........................................................................................................51 1) Généralités...........................................................................................................................................51 2) Epidémiologie.......................................................................................................................................51 3) Approchebiologique............................................................................................................................52 B) TroublescompulsifsduchienetTOCdel’homme....................................................................................52 IVApprochesétiologiques.........................................................................................................................................53 A) Généralités................................................................................................................................................53 B) Facteursderisques....................................................................................................................................54 C) Crisesd’épilepsiefocales?........................................................................................................................55 VPhysiologieetpathogénie:différentsessaisthérapeutiques...............................................................................55 VIDémarchediagnostique........................................................................................................................................57 A) Médicale....................................................................................................................................................57 B) Comportementale.....................................................................................................................................58 VIIPronostic..............................................................................................................................................................58 VIIITraitements.........................................................................................................................................................59 A) Approchecomportementale.....................................................................................................................59 B) Approchemédicale....................................................................................................................................60 1) Lesinhibiteursdelarecapturedelasérotonine..................................................................................60 2) LesantagonistesauxrécepteursNMDA..............................................................................................60 3) Lesantagonistesmorphiniques............................................................................................................61 4) Lesinhibiteursdesmonoaminesoxydases..........................................................................................61 5) Lesantiépileptiques.............................................................................................................................61 IXParticularitésraciales............................................................................................................................................63 A) Prédispositionsraciales.............................................................................................................................63 B) Originegénétiquedestroublescompulsifs...............................................................................................64 ETUDESPECIFIQUETROUBLESCOMPORTEMENTAUXASSOCIESAL’EPILEPSIE:CASPARTICULIERDESTROUBLES COMPULSIFS.........................................................................................................................................65 ITroublescomportementauxetépilepsiechezl’homme.........................................................................................67 8 A) Généralités................................................................................................................................................67 B) Lienentrel’épilepsieetlestroublescomportementaux...........................................................................67 1) Lienavecl’épilepsiedulobetemporaletl’épilepsieidiopathiquegénéralisée...................................68 2) Lienavecd’autresépilepsies................................................................................................................69 C) Elémentsdephysiologieetpathogénie....................................................................................................69 1) Unelocalisationanatomiquecommune..............................................................................................70 2) Desdysfonctionnementscommuns.....................................................................................................71 IITroublescomportementauxetépilepsiechezlechien..........................................................................................72 A) Unecomorbiditédestroublescomportementauxetdel’épilepsiechezlechien....................................72 B) Uneoriginegénétiquecommune..............................................................................................................73 PARTIE2:ETUDEEXPERIMENTALE.....................................................................................................75 IObjectif....................................................................................................................................................................77 IIMatérielsetméthodes...........................................................................................................................................77 A) Critèresd’inclusion....................................................................................................................................77 1) Chiensépileptiques..............................................................................................................................77 2) Chienstémoins.....................................................................................................................................77 B) Protocoleexpérimental.............................................................................................................................78 1) Recueildedonnées..............................................................................................................................78 a) Sexedeschiens...............................................................................................................................78 b) Statutcastréounoncastrédeschiens...........................................................................................79 c) Agedeschiensaumomentdel’étude............................................................................................80 d) Agedeschiensépileptiqueslorsdeleurpremièrecrise.................................................................80 e) Racesdeschiens.............................................................................................................................81 2) Appelstéléphoniques...........................................................................................................................82 3) Questionnaire.......................................................................................................................................83 4) Analysesstatistiques............................................................................................................................84 IIIRésultats................................................................................................................................................................87 A) Absencededonnée...................................................................................................................................87 B) Prévalencedestroublescompulsifs..........................................................................................................87 1) Troublescompulsifslocomoteurs........................................................................................................89 a) Tournerenrond..............................................................................................................................90 b) Chassersaqueue............................................................................................................................90 c) Déambuler......................................................................................................................................90 d) Chasserleslumièreset/oulesombres...........................................................................................91 e) Hochementdetête.........................................................................................................................92 2) Troublescompulsifsoraux...................................................................................................................93 a) Léchagedel’airet/oudunez..........................................................................................................93 b) Léchagedesobjetset/oudesgens.................................................................................................93 c) Polyphagieet/oupolydipsie...........................................................................................................94 d) Pica..................................................................................................................................................95 3) Troublescompulsifsautodirigés..........................................................................................................95 a) Semordre,s’attaquer.....................................................................................................................96 9 b) Automutilation................................................................................................................................97 c) Sefrotterlaface..............................................................................................................................97 d) Selécherl’ensembleouunepartieducorps..................................................................................98 e) Semordillerlesgriffes....................................................................................................................99 f) Succionduflanc..............................................................................................................................99 g) Inspectiondel’arrièretrain............................................................................................................99 4) Troublescompulsifsdevocalisation..................................................................................................100 a) Aboiements...................................................................................................................................100 b) Gémissements...............................................................................................................................100 c) Hurlements...................................................................................................................................101 5) Troublescompulsifshallucinatoires...................................................................................................101 a) Claquementsdemâchoire............................................................................................................102 b) Momentsd’absence,defixité.......................................................................................................102 c) Réveilsbrutauxavecagression.....................................................................................................102 d) Attaqued’objetsinanimés............................................................................................................103 e) Agressionsimprévisiblesenversl’homme....................................................................................104 6) C) Conclusions........................................................................................................................................104 Etuded’autresparamètrespouvantinfluencerlaprésencedetroublescompulsifs..............................105 1) Chezleschienstémoins.....................................................................................................................105 a) Influencedel’âge..........................................................................................................................105 b) Influencedusexe..........................................................................................................................106 c) Influencedelastérilisation...........................................................................................................106 2) 3) Chezleschiensépileptiques...............................................................................................................107 a) Influencedelarésistanceautraitementantiépileptique.............................................................107 b) Influencedelaprésencedecrisesgroupées................................................................................108 c) Influencedelaprésencedecrisesgénéralisées...........................................................................108 d) Influencedel’âgeàlapremièrecrise...........................................................................................108 e) Influencedeladuréedel’épilepsie..............................................................................................108 Conclusions........................................................................................................................................108 IVDiscussion............................................................................................................................................................109 A) Lestroublescompulsifs...........................................................................................................................109 1) Uneprévalencenonnégligeabledanslapopulationgénérale..........................................................109 2) Epidémiologiedestroublescompulsifs..............................................................................................109 B) Associationentretroublescompulsifsetépilepsie.................................................................................110 1) Unecomorbiditéétablie....................................................................................................................110 2) Destroublescompulsifssignificativementplusprésentschezleschiensépileptiques.....................110 3) Influencedutyped’épilepsie.............................................................................................................111 4) Unparallèleavecl’épilepsiehumainepossible?...............................................................................112 C) 10 Limitesdel’étude....................................................................................................................................112 1) Sélectiondelapopulationépileptique..............................................................................................112 2) Choixdeschienstémoins...................................................................................................................113 3) Choixdelapérioded’étude...............................................................................................................114 D) 4) Choixdelaméthoded’investigation..................................................................................................114 5) Utilisationdetestsstatistiques..........................................................................................................115 Perspectives.............................................................................................................................................115 CONCLUSION.......................................................................................................................................117 BIBLIOGRAPHIE....................................................................................................................................119 ANNEXES.............................................................................................................................................129 11 12 TABLE DES ANNEXES Annexe 1 : Présentation des 50 chiens épileptiques inclus dans l'étude .................................129 Annexe 2 : Présentation des 100 chiens témoins inclus dans l'étude......................................131 Annexe 3 : Réponses au questionnaire concernant les 50 chiens épileptiques .......................134 Annexe 4 : Réponses au questionnaire concernant les 100 chiens témoins ...........................136 13 14 TABLES DES ILLUSTRATIONS Table des figures Figure 1 : Classification des crises d’épilepsie ....................................................................................................... 31 Figure 2 : Comparaison du sexe des chiens épileptiques et des chiens témoins..................................................... 79 Figure 3 : Comparaison du statut castré ou non des chiens de l’étude ................................................................... 79 Figure 4 : Comparaison de l’âge (en années) des chiens épileptiques et des chiens témoins................................. 80 Figure 5 : Répartition des chiens épileptiques selon l'âge à la première crise d’épilepsie ..................................... 81 Figure 6 : Comparaison des prévalences de troubles compulsifs entre les deux populations ................................ 88 Figure 7 : Répartition du nombre de troubles compulsifs présents chez les chiens épileptiques et les chiens témoins .......................................................................................................................................................... 89 Figure 8 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif de déambulation entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ................................................................................................................. 91 Figure 9 : Comparaison de la présence ou de l’absence de hochements de tête entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ............................................................................................................................................... 92 Figure 10 : Comparaison de la présence ou de l’absence de polyphagie/polydipsie entre les chiens épileptiques et les chiens témoins.......................................................................................................................................... 94 Figure 11 : Comparaison de la présence ou de l’absence de pica entre les chiens épileptiques et les chiens témoins .......................................................................................................................................................... 95 Figure 12 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif « se mordre, s’attaquer » entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ...................................................................................................... 96 Figure 13 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif «se frotter la face» entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ................................................................................................................. 97 Figure 14 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif « se lécher l’ensemble ou une partie du corps » entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ............................................................ 98 Figure 15 : Comparaison de la présence ou de l’absence de gémissements entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ............................................................................................................................................. 101 Figure 16 : Comparaison de la présence ou de l’absence des attaques d’objets inanimés entre les chiens épileptiques et les chiens témoins ............................................................................................................... 103 Figure 17 : Comparaison de la présence ou de l’absence des moments de fixité en fonction de la stérilisation . 106 Figure 18 : Comparaison de la présence ou de l’absence du léchage de l’air et/ou du nez en fonction de la résistance au traitement antiépileptique ...................................................................................................... 107 15 16 Table des tableaux Tableau I : Prévalences de l'épilepsie idiopathique au sein de certaines races et populations canines .................. 44 Tableau II : Base génétique présumée de l'épilepsie idiopathique chez le chien (Ekenstedt et al., 2012) ............. 46 Tableau III : Caractéristiques de l'épilepsie idiopathique dans différentes races étudiées ..................................... 48 Tableau IV : Troubles compulsifs décrits chez le chien (Luescher et al., 1991) (Luescher, 2003) (Landsberg et al., 2013) ........................................................................................................................................................ 50 Tableau V : Molécules utilisables dans le traitement des troubles compulsifs chez le chien (Landsberg et al., 2013).............................................................................................................................................................. 62 Tableau VI : Troubles compulsifs et prédispositions raciales chez le chien (Landsberg et al., 2003) ................... 63 Tableau VII : Répartition des chiens de l'étude par sexe ........................................................................................ 79 Tableau VIII : Répartition des chiens de l'étude selon le statut castré ou non castré ............................................. 79 Tableau IX : Age des chiens de l’étude (en années) ............................................................................................... 80 Tableau X : Répartition des chiens en fonction de leur classe d’âge (en années) .................................................. 80 Tableau XI : Age des chiens épileptiques lors de leur première crise d’épilepsie (en mois) ................................. 81 Tableau XII : Répartition des chiens en fonction de leur âge à la première crise d’épilepsie (en années) ............ 81 Tableau XIII : Races des chiens inclus dans l'étude ............................................................................................... 82 Tableau XIV : Questionnaire .................................................................................................................................. 84 Tableau XV : Prévalences du trouble compulsif "tourner en rond" ....................................................................... 90 Tableau XVI : Prévalences du trouble compulsif "chasser sa queue" .................................................................... 90 Tableau XVII : Prévalences du trouble compulsif de déambulation ...................................................................... 90 Tableau XVIII : Odds ratio concernant le trouble compulsif de déambulation ...................................................... 91 Tableau XIX : Prévalences du trouble compulsif "chasser les lumières et/ou les ombres" ................................... 91 Tableau XX : Prévalences de hochements de tête .................................................................................................. 92 Tableau XXI : Odds ratio concernant les hochements de tête ................................................................................ 92 Tableau XXII : Prévalences de léchage de l'air et/ou du nez .................................................................................. 93 Tableau XXIII : Prévalences de léchage des objets et/ou des gens ........................................................................ 93 Tableau XXIV : Prévalences de polyphagie/polydipsie ......................................................................................... 94 Tableau XXV : Odds ratio concernant la polyphagie/polydipsie ........................................................................... 94 Tableau XXVI : Prévalences du pica ...................................................................................................................... 95 Tableau XXVII : Odds ratio concernant le pica ..................................................................................................... 95 Tableau XXVIII : Prévalences du trouble compulsif "se mordre, s'attaquer" ........................................................ 96 17 Tableau XXIX : Odds ratio concernant le trouble compulsif "se mordre, s'attaquer" ............................................ 96 Tableau XXX : Prévalences d'automutilation ......................................................................................................... 97 Tableau XXXI : Prévalences du trouble compulsif "se frotter la face" .................................................................. 97 Tableau XXXII : Odds ratio concernant le trouble compulsif "se frotter la face".................................................. 97 Tableau XXXIII : Prévalences du trouble compulsif "se lécher l'ensemble ou une partie du corps"..................... 98 Tableau XXXIV : Odds ratio du trouble compulsif "se lécher l'ensemble ou une partie du corps" ....................... 98 Tableau XXXV : Prévalences du trouble compulsif "se mordiller les griffes" ...................................................... 99 Tableau XXXVI : Prévalences du trouble compulsif de succion du flanc ............................................................. 99 Tableau XXXVII : Prévalences du trouble compulsif « inspecter son arrière train » ............................................ 99 Tableau XXXVIII : Prévalences des aboiements ................................................................................................. 100 Tableau XXXIX : Prévalences des gémissements ................................................................................................ 100 Tableau XL : Odds ratio concernant les gémissements ........................................................................................ 101 Tableau XLI : Prévalences des hurlements ........................................................................................................... 101 Tableau XLII : Prévalences des claquements de mâchoire .................................................................................. 102 Tableau XLIII : Prévalences des moments d'absence, de fixité ........................................................................... 102 Tableau XLIV : Prévalences des réveils brutaux avec agression ......................................................................... 102 Tableau XLV : Prévalences des attaques d'objets inanimés ................................................................................. 103 Tableau XLVI : Odds ratio concernant les attaques d'objets inanimés ................................................................ 103 Tableau XLVII : Prévalences des agressions imprévisibles envers l'homme ....................................................... 104 Tableau XLVIII : Prévalences des moments de fixité en fonction de la stérilisation ........................................... 106 Tableau XLIX : Prévalences de léchage de l’air et/ou du nez en fonction de la résistance au traitement antiépileptique ............................................................................................................................................. 107 18 LISTE DES ABREVIATIONS AE : Anti Epileptique AIC : Critère d’Information d’Akaiké ALAT : Alanine-Amino-Transférase CHEVAC : Centre Hospitalier d’Enseignement Vétérinaire des Animaux de Compagnie EEG : Electroencéphalogramme FLE : Epilepsie du Lobe Frontal GABA : acide Gamma-Aminobutyrique IGE : Epilepsie Idiopathique Généralisée ILAE : International Ligue Against Epilepsy IRM : Imagerie par Résonnance Magnétique KBr : Bromure de Potassium LCR : Liquide Céphalo-Rachidien NMDA : acide N-méthyl-D-aspartique OCS : Symptôme Obsessionnel Compulsif OR : Odds Ratio PAL : Phosphatases Alcalines SSRI : Inhibiteur de recapture de la sérotonine TCA : Antidépresseurs Tricycliques TOC : Trouble Obsessionnel Compulsif TSH : Thyréostimuline T4 : Thyroxine 19 20 INTRODUCTION L’épilepsie représente le motif de consultation le plus fréquent en neurologie. C’est une affection chronique se caractérisant par la récurrence de crises d’épilepsie. Chez le chien, les connaissances concernant cette maladie se sont considérablement développées au cours des dernières années. L’épilepsie idiopathique est la cause la plus fréquente d’épilepsie chez le chien (53%). Les troubles compulsifs sont, quant à eux, bien souvent sous-diagnostiqués. La grande variabilité dans la présentation clinique, l’évolution, le niveau d’altération de la vie quotidienne engendré par ces comportements chez le chien, rend compte de la complexité de ces affections. En médecine humaine, il y a, depuis longtemps, une association qui est faite entre l’épilepsie, notamment l’épilepsie du lobe temporal, et les manifestations psychiatriques. Depuis quelques années, la médecine vétérinaire commence à s’intéresser au développement de troubles comportementaux chez les chiens atteints d’épilepsie idiopathique, cependant peu d’études existent encore à ce sujet. Chez l’homme, la manifestation comportementale la plus décrite, en lien avec l’épilepsie, est la présence de TOC. Chez le chien, aucune donnée n’existe encore à ce sujet. C’est pourquoi, le but de notre étude va être de comparer la présence de troubles compulsifs entre une population de chiens épileptiques et une population témoin. Dans une première partie bibliographique, nous aborderons les notions indispensables à la compréhension de l’épilepsie idiopathique chez le chien, pour détailler ensuite les troubles compulsifs rencontrés dans cette espèce. Nous terminerons par l’analyse des données existantes tendant à démontrer un lien entre l’épilepsie et les troubles compulsifs, chez l’homme et chez le chien. Dans une seconde partie expérimentale, nous exposerons les résultats de notre étude menée sur 50 chiens diagnostiqués comme atteints d’épilepsie idiopathique et 100 chiens témoins au service de Neurologie de VetAgro Sup. Cette étude a pour but d’évaluer si la prévalence de troubles compulsifs est plus élevée chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins. 21 22 PARTIE 1 : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE 23 24 Etude générale : L’épilepsie idiopathique et les troubles compulsifs chez le chien 25 26 L’EPILEPSIE IDIOPATHIQUE DU CHIEN I Généralités A) Définitions et manifestations cliniques Les définitions ont beaucoup évolué ces dernières années, c’est pourquoi nous reprendrons ici les derniers consensus paru début 2016. Nous les complèterons par d’autres définitions, plus anciennes mais encore d’actualité. 1) Crises d’épilepsie Une crise d’épilepsie est « la manifestation clinique d’une activité électrique cérébrale excessive et hypersynchrone, d’apparition épisodique » (Fischer et al., 2015) Elle est définie par son caractère soudain, transitoire et paroxystique. Elle peut engendrer des troubles de la conscience, des troubles moteurs, sensoriels, autonomiques ou comportementaux (March, 1998). La crise d’épilepsie n’est pas une maladie mais une manifestation clinique (Berendt, 2008). Elle est susceptible d’avoir une origine épileptique (Mariani, 2013). 2) Epilepsie Elle est définie comme une maladie du cerveau caractérisée par une prédisposition à développer des crises d’épilepsie. On peut parler d’ « épilepsie » à partir du moment où au moins 2 crises ont eu lieu en plus de 24 heures. (Berendt et al., 2015). L’épilepsie est la manifestation de plusieurs crises d’épilepsie (au moins deux). C’est une affection chronique caractérisée par la répétition de paroxysmes dus à des décharges épileptiques, c'est-à-dire à l’activation subite, simultanée et anormalement intense d’un grand nombre de neurones cérébraux. Elle est la conséquence d’un déséquilibre entre les mécanismes excitateurs et inhibiteurs du cerveau (Berendt, 2008). Cependant, l’épilepsie ne représente pas qu’une seule maladie, c’est un ensemble de troubles caractérisés par de nombreux signes cliniques dont les causes peuvent être multiples. 27 Ce n’est qu’en cas d’épilepsie idiopathique qu’il est question d’une maladie à part entière génétiquement déterminée. L’épilepsie idiopathique est « l’apparition répétée de crises épileptiformes focales et/ou généralisées sans cause décelable, se manifestant sur un terrain de prédisposition génétique ». C’est une affection pouvant, la plupart du temps, persister toute une vie. Ce type d’épilepsie est provoquée par des modifications génétiquement déterminées de l’excitabilité de populations neuronales et de réseaux neuronaux. Cependant, elle repose aussi sur le concours entre des facteurs génétiques et l’influence de l’environnement. (Fischer et al., 2015) 3) Crises focales Lors d’une crise focale, les signes sont latéralisés et/ou régionaux (moteurs, autonomiques ou comportementaux, indépendamment ou simultanément) (Berendt et al., 2015). L’activité épileptique est limitée à un groupe de neurones dans le cortex cérébral. Les manifestations cliniques sont directement en lien avec la zone touchée. Ce type de crise peut avoir trois présentations (Berendt et al., 2015): - Motrice : phénomène moteur épisodique focal comme des mouvements de tête, tremblements d’un membre ou des tics musculaires de la face. - Autonomique : avec des composantes parasympathiques et épigastriques comme une mydriase, une hypersalivation ou des vomissements. - Comportementale : crises psychiques et/ou sensorielles pouvant aboutir à un changement épisodique du comportement comme une inquiétude, de l’agitation ou de la crainte. Une crise focale peut devenir secondairement généralisée. 4) Crises généralisées Lors de crises convulsives généralisées, ce sont les deux hémisphères du cerveau qui sont atteints, c’est-à-dire une grande proportion du cortex. Il en résulte une perte de conscience avec atteinte du système neuro-végétatif (ptyalisme, miction, défécation). 28 On distingue plusieurs phases lors d’une crise généralisée (Berendt, 2008) : - Les prodromes : ce sont des modifications comportementales de l’animal durant les quelques minutes à quelques jours qui précèdent la crise, sans qu’il soit question d’une activité électrique anormale du cerveau, l’EEG ne montre aucune anomalie. Cette phase n’est généralement pas remarquée par les propriétaires car elle est très discrète. L’animal peut manifester de l’agitation, de l’anxiété, de l’inquiétude, de l’agressivité, de la nervosité, une contemplation dans le vide, un flairage excessif ou des vocalisations anormales. - L’aura : ce sont des modifications plus importantes durant les quelques secondes qui précèdent la crise. Elles résultent d’une activité électrique anormale. Cette phase peut se traduire par des vomissements, des modifications pupillaires et par les premiers troubles moteurs ou psychiques. - L’ictus : c’est la crise en elle-même qui se caractérise par une perte de conscience, des mouvements involontaires tonico-cloniques et une atteinte du système neuro-végétatif. La durée de cette phase est très variable, elle peut aller de quelques secondes à quelques minutes. - Le post-ictus : c’est la phase de récupération pendant laquelle l’animal reprend conscience et le cerveau retrouve une activité normale. Cette phase peut durer quelques minutes à quelques jours. Les symptômes associés sont une cécité et/ou une surdité centrale passagère, une agressivité, une désorientation, une augmentation de la soif et/ou de l’appétit, de la fatigue, une excitation, des vocalisations anormales, une déambulation en cercle et une ataxie. En général, lors de l’ictus, les crises généralisées sont caractérisées par une succession de deux phases (March, 1998) : - Phase tonique : Elle se traduit par une contraction généralisée de tous les muscles. Le chien est en opisthotonos, avec les membres raides et tendus, la tête relevée en arrière. - Phase clonique : C’est une alternance de contractions et de relâchements de l’ensemble des muscles. Le chien présente alors des mouvements de pédalage incontrôlés. 29 Les crises généralisées peuvent être convulsives (toniques, cloniques, tonico-cloniques ou myocloniques) ou non-convulsives (atoniques se caractérisant par un effondrement soudain de l’animal) (Berendt et al., 2015). 5) Crises groupées Nous parlons de « crises groupées » ou « clusters » lorsque la fréquence d’apparition des crises est supérieure à la moyenne, sur une longue période, c’est-à-dire à partir de 2 crises en l’espace de 24 heures (Berendt et al., 2015). Cependant, l’animal doit avoir repris conscience entre chaque crise (qu’elle soit focale ou généralisée). 6) Status épilepticus On parle de « status épilepticus » lorsqu’il n’y a pas de signes cliniques d’arrêt de la crise ou lorsqu’il y a une récurrence de crises sans que l’animal ne revienne à un état normal entre chaque crise. C’est-à-dire lorsque la crise dure plus de 5 minutes, ou à partir de 2 crises d’épilepsie sans reprendre conscience entre chacune (Berendt et al., 2015). Lors d’un status épilepticus, le cerveau est dans un état de surstimulation persistant. Ce type de crise est extrêmement dangereux et peut être mortelle pour l’animal. B) Classification La classification se rapproche de la classification utilisée en humaine, créée par la ligue internationale de lutte contre l’épilepsie (International Ligue Against Epilepsy – ILAE). Cette dernière différencie l’épilepsie génétique, des causes structurales (ou lésionnelle), métaboliques et des causes inconnues, où aucun mécanisme explicatif ne peut être mis en évidence. Cependant, la terminologie de l’ILAE tend à évoluer au fil du temps. Ces dernières années, la classification canine n’a cessé d’évoluer. Nous utiliserons ici la dernière classification du consensus paru début 2016. 30 Elle diffère légèrement de la précédente puisqu’on distingue trois grandes catégories : l’épilepsie idiopathique (comprenant les causes génétiques, celles susceptibles d’être génétiques et les causes inconnues), l’épilepsie structurale (ou lésionnelle, résultant d’anomalies structurales du cerveau) et les crises réactionnelles (résultant d’anomalies métaboliques ou toxiques). La figure ci-contre résume la classification actuelle des crises d’épilepsie (Figure 1). Crises d'épilepsie Epilepsie Idiopathique Crises réactionnelles Structurale Figure 1 : Classification des crises d’épilepsie 1) Epilepsie idiopathique L’épilepsie idiopathique, parfois appelée essentielle ou génétique, est la cause la plus fréquente d’épilepsie chez le chien. C’est le terme le plus utilisé, les autres ayant été abandonnés. L’épilepsie idiopathique est plus fréquente chez les chiens de race, avec de fortes prévalences dans certaines races et des races prédisposées. Chez le chien, elle est fortement suspectée d’être d’origine génétique même si elle a toujours été définie comme une épilepsie où aucune cause ne peut être mise en évidence. La classification actuelle distingue trois soustypes (Berendt et al., 2015): - L’épilepsie génétique : une cause génétique a été identifiée - L’épilepsie suspectée d’être génétique : une influence génétique est fortement suspectée avec une prévalence de l’épilepsie supérieure à 2% dans la race, une analyse généalogique ou un fort taux d’épileptiques au sein d’une même famille. 31 - L’épilepsie de cause inconnue : la cause est inconnue et une épilepsie structurale est exclue. C’est ce type d’épilepsie qui va nous intéresser dans notre étude. 2) Epilepsie structurale Elle est caractérisée par des crises d’épilepsie provoquées par des causes cérébrales/intracrâniennes, comme un accident vasculaire, un phénomène infectieux ou inflammatoire, un traumatisme, une malformation (dysplasie corticale, lissencéphalie, porencéphalie ou hydrocéphalie), un processus néoplasique ou dégénératif confirmés par l’imagerie, l’analyse du LCR, un test génétique ou une autopsie (Berendt et al., 2015). 3) Crises réactionnelles La crise traduit une réponse normale d’un cerveau normal face à une perturbation passagère d’une fonction (de nature toxique ou métabolique), elle est réversible lorsque la perturbation est corrigée (Berendt et al., 2015). On peut citer l’hypoglycémie, des déséquilibres électrolytiques, des troubles de l’osmolarité du liquide extracellulaire, une hypoxie ou une encéphalopathie hépatique. C) Physiologie et pathogénie 1) Généralités Une crise d’épilepsie est la manifestation clinique d’une activité électrique excessive et/ou hypersynchrone du neurone au niveau du télencéphale et du thalamus (prosencéphale). Elle est la conséquence d’un déséquilibre entre l’excitation et l’inhibition de la population neuronale. Cette stimulation est réalisée par les neurotransmetteurs, qui sont soit excitateurs, soit inhibiteurs. Le déséquilibre peut être engendré par un excès d’excitation ou par un défaut d’inhibition. Le manque d’inhibition est considéré comme le mécanisme principal de développement des crises d’épilepsie. Une perte d’inhibition de 20 à 30 % suffit à créer un foyer épileptogène. Cela favorise la propagation de l’activité excessive hypersynchrone à 32 partir d’un ensemble de neurones vers la région voisine du cortex (comme lors de crises focales) ou vers les deux hémisphères cérébraux, par l’intermédiaire du thalamus (comme lors de crises généralisées) (Fischer et al., 2015). 2) Excitabilité des neurones Un neurotransmetteur excitateur va créer une dépolarisation du potentiel de membrane alors qu’un neurotransmetteur inhibiteur va créer une hyperpolarisation. Le potentiel de membrane du neurone est de -70 mV en temps normal, il est assuré par les canaux Na+/K+. C’est la somme des flux ioniques excitateurs (comme un flux entrant de calcium ou de sodium) et inhibiteurs (comme un flux entrant de chlore) qui détermine l’état d’excitation du neurone. La crise d’épilepsie se déclenche lorsque le seuil d’excitabilité est dépassé. Un chien épileptique a un seuil d’excitabilité plus bas qu’un chien sain (Chandler, 2006). 3) Les principaux neurotransmetteurs impliqués Il existe deux types de neurotransmetteurs : les excitateurs et les inhibiteurs. Cependant, l’effet du neurotransmetteur est déterminé par des récepteurs spécifiques au niveau de la membrane post-synaptique et par les neurones cibles. L’excitation des neurones se fait principalement par le neurotransmetteur glutamate et ses récepteurs. On peut aussi mentionner l’aspartate et l’acétylcholine. (Platt, 2007) L’inhibition des neurones est provoquée par le neurotransmetteur GABA (acide gammaaminobutyrique) et de ses récepteurs. La glycine, la taurine et la noradrénaline ont aussi des effets inhibiteurs. Les récepteurs des neurotransmetteurs sont des molécules polymériques complexes, pouvant avoir différentes conformations. Leur pouvoir inhibiteur ou excitateur est provoqué par l’ouverture de canaux ioniques, ce qui permet le flux entrant et sortant d’ions. De plus, il existe différents sites où peut s’effectuer l’action des médicaments antiépileptiques. (Fischer et al., 2015) 33 4) Propagation de l’activité épileptique La propagation de l’activité épileptique et la création de nouveaux foyers au sein de l’encéphale s’expliquent par le phénomène de « kindling » : les neurones instables vont recruter de nouveaux neurones environnants, qui deviendront épileptogènes à leur tour. Un autre phénomène participe à la création de nouveaux foyers dans l’encéphale, c’est l’effet « miroir » : un nouveau site épileptogène apparaît dans cette même région de l’hémisphère controlatéral. Ces deux phénomènes expliquent l’importance de la précocité de la mise en place du traitement (March, 1998). D) Epidémiologie L’épilepsie est le trouble neurologique le plus fréquemment rencontré chez le chien (Thomas, 2000) avec une prévalence comprise entre 0,5% et 5%, en fonction des populations cliniques et des critères d’inclusion. Une récente étude témoigne d’une prévalence de l’épilepsie idiopathique de 0,6% chez les chiens (Kearsley-Fleet et al., 2013). Elle est estimée entre 1% et 3% chez les humains (Ekenstedt, Oberbauer, 2013). Toutefois la prévalence dépend fortement des pays et des lignées, étant donnée l’origine génétique supposée. C’est ce qui définit l’épilepsie idiopathique en général, on n’est plus face à une seule maladie mais face à plusieurs épilepsies. L’épilepsie idiopathique concerne 53% des chiens épileptiques. La majorité des chiens atteints d’épilepsie idiopathique ont entre 2 et 5 ans au moment de la première crise d’épilepsie. Les mâles sont plus touchés que les femelles. La plupart du temps les crises sont généralisées tonico-clonique, la phase d’ictus durant entre 2 et 3 minutes. Les races les plus affectées dans l’épilepsie idiopathique sont le Beagle, le Teckel, le Berger Allemand, le Berger Australien, le Irish Wolfhound, le Cavalier King Charles, le Lagotto Romagnolo, le Spitz-loup, le Berger Belge, le Cocker, le Border Collie, le Golden retriever, le Setter irlandais, le Labrador retriever, le Schnauzer nain, le Caniche, le SaintBernard et l’Husky de Sibérie (Hülsmeyer et al., 2015). Une étude a montré que, lors de crises d’épilepsie, le diagnostic d’épilepsie idiopathique était statistiquement plus probable lorsque le chien avait entre 1 et 5 ans, lorsqu’il faisait partie des grandes races (plus de 15 kg), ou lorsque les deux premières crises étaient espacées d’au moins 4 semaines (Podell et al., 1995). 34 E) Diagnostic La démarche diagnostique face à des crises d’épilepsie est toujours la même. Celle de l’épilepsie idiopathique est un diagnostic d’exclusion : on cherche donc à exclure les causes lésionnelles et réactionnelles. Dans un premier temps, les commémoratifs et l’anamnèse sont très importants. L’analyse des crises d’épilepsie est primordiale dans la démarche diagnostique : il faut prendre en compte la durée, la fréquence et le type de crise. Le questionnement avec le propriétaire doit être minutieux, d’autant plus que ce dernier n’a probablement pas l’habitude de voir des crises d’épilepsie. Il faut utiliser des mots accessibles à tous et ainsi pouvoir différencier une crise généralisée d’une crise focale ainsi que des mouvements toniques des mouvements cloniques (Knowles, 1998). Il est aussi très important de bien différencier la crise de nombreuses autres pathologies pouvant se confondre avec une crise d’épilepsie comme une syncope, de la narcolepsie, une faiblesse musculaire, un trouble compulsif, une dyskinésie paroxystique ou des trémulations musculaires (De Risio et al., 2015). Il faut s’intéresser au nombre de crises (au moins 2 en plus de 24 heures), à l’âge de l’animal à la première crise (entre 6 mois et 6 ans lors d’épilepsie idiopathique). L’examen neurologique inter-ictal doit être normal. Pour mettre en évidence une cause métabolique, un bilan sanguin est indispensable et doit être exhaustif. On recherche par exemple une hypoglycémie, une insuffisance hépatique ou une hypocalcémie. Lorsqu’aucune cause métabolique ne peut être mise en évidence (bilan sanguin exhaustif dans les normes), les causes réactionnelles peuvent être exclues (De Risio et al., 2015). Pour mettre en évidence une cause structurale, l’examen de choix est l’imagerie. L’IRM (Imagerie par Résonnance Magnétique) de l’encéphale va permettre la visualisation du cortex cérébral. Si aucune anomalie n’est visible (tumeur, malformation, lésion), une épilepsie structurale est alors peu probable. Le diagnostic d’épilepsie idiopathique est un diagnostic d’exclusion, il peut être posé à partir du moment où les deux causes secondaires évoquées ci-dessus sont exclues. L’EEG est l’examen de choix en médecine humaine. Cependant cet examen est difficile à réaliser en médecine vétérinaire, on l’utilise encore peu. D’une part, les masses musculaires temporales sont un frein à la réalisation de cet examen. D’autre part, la nécessité d’une sédation de l’animal ne permet pas l’obtention de tracés exploitables. Toutefois, certains 35 laboratoires proposent des gammes vétérinaires avec un meilleur traitement du signal et des appareils plus faciles à utiliser. Ces améliorations tendent à développer le recours à l’EEG. F) Pronostic Le pronostic dépend de la race, du type d’épilepsie, de la fréquence, de l’âge d’apparition des crises et de la précocité de mise en place du traitement. Il est très variable d’un sujet à l’autre. La race est l’un des facteurs les plus déterminant dans le pronostic. Par exemple, l’épilepsie juvénile du Lagotto Romagnolo est bénigne, elle disparaît spontanément à l’âge de 8-13 semaines. L’épilepsie du Labrador est plus complexe, dans un premier temps le chien va bien répondre au traitement puis, dans un second temps, une résistance va apparaître. Le Berger Australien, lui, va mal répondre au traitement. Le pronostic est plus favorable lorsque des facteurs déclenchants peuvent être mis en évidence, comme lors d’œstrus par exemple. Il a en effet été montré que, chez les chiennes présentant des crises d’épilepsie lors d’œstrus, la stérilisation permettait la réduction de la fréquence des crises (Berendt, 2008). Une étude prospective sur 63 chiens a montré que l’âge moyen du décès d’un chien atteint d’épilepsie est de 7 ans. La durée de vie d’un chien euthanasié ou décédé pour cause d’épilepsie est significativement plus courte que celle d’un chien décédé pour d’autres raisons. Un chien épileptique vit en moyenne 2,3 ans après sa première crise d’épilepsie. Le type de crise (focale ou généralisée) n’a pas d’influence significative sur le temps de survie. La rémission spontanée est estimée à 15% (Berendt et al., 2007). G) Traitement C’est un traitement antiépileptique qui est mis en place lors d’épilepsie idiopathique. Pour les autres types d’épilepsie, un traitement de la cause doit y être associé. Nous ne parlerons ici que du traitement de l’épilepsie idiopathique. 36 1) Principe et objectifs a) Principe du traitement antiépileptique (AE) Le but du traitement est la stabilisation de l’épilepsie. Il faut trouver un juste équilibre entre la fréquence, l’intensité des crises et les effets secondaires des traitements afin d’offrir un confort de vie optimal aux propriétaires et au chien. L’observance du traitement est primordiale car le traitement s’instaure à long terme, voire à vie. Cela représente donc un investissement financier et personnel pour le propriétaire, qui doit en être informé avant d’initier le traitement. Les coûts peuvent atteindre 300 euros par mois, pour des gros chiens, en fonction des molécules utilisées. b) Initiation du traitement Pour mettre en place un traitement AE, il faut tenir compte de la clinique (fréquence, intensité, durée et type des crises), de la motivation des propriétaires et du confort de vie de l’animal. Il est inutile de mettre un traitement en place si le chien n’a présenté qu’une seule crise de faible intensité, par exemple. Un traitement doit être instauré si au moins l’un de ces cas de figure se présente (Bhatti et al., 2015): - Présence d’un status épilepticus ou de crises groupées - Présence d’au moins deux crises d’épilepsie sur 6 mois - Période post-ictale prolongée, sévère ou inhabituelle - Augmentation de la fréquence ou de la durée des crises (sur 3 crises) Il convient de garder à l’esprit qu’un traitement antiépileptique entrepris le plus tôt possible aura plus de chance de succès. Il faut débuter le traitement avec une seule molécule AE, pour en évaluer correctement son effet. L’idéal est de commencer à la dose minimale efficace, puis d’augmenter progressivement si aucune amélioration n’est notée. Lorsque la première est à la dose maximale mais que la stabilisation n’est pas satisfaisante, une seconde molécule peut être 37 ajoutée. Si aucune amélioration n’est notée, la première molécule peut alors être remplacée par une autre. c) Suivi et adaptation Le traitement de l’épilepsie doit être axé sur les résultats. L’élimination ou la réduction significative des crises et de leur sévérité ainsi que le maintien du confort de vie de l’animal et de son propriétaire sont des considérations importantes. Bien que de nombreux AE puissent fournir une efficacité initiale dans la gestion des crises, l’efficacité au long terme est dépendante de beaucoup de facteurs. Seuls 60 à 80% des patients épileptiques (autant les humains que les chiens) sont sensibles au traitement AE ; une grande part est donc encore réfractaire. Trois grandes causes peuvent être identifiées : la maladie du patient, la molécule utilisée et le patient (Podell, 2013). Les effets secondaires des traitements antiépileptiques peuvent être dérangeants pour les propriétaires, il faut donc les prendre en compte dans le suivi du traitement. Les doses peuvent être diminuées si les crises sont stabilisées depuis quelques temps, afin de diminuer ces effets secondaires. Des dosages sanguins doivent être réalisés pour vérifier que la dose sérique toxique de l’antiépileptique ne soit pas dépassée. En fonction de ce dosage, on pourra se permettre d’augmenter ou non les doses. 2) Molécules antiépileptiques (AE) Une étude a comparé les différents traitements antiépileptiques détaillés ci-dessous et a hiérarchisé une recommandation en fonction de leur efficacité qualité (Charalambous et al., 2014) : 38 - Première intention : phénobabital ou imépitoïne en monothérapie - Deuxième intention : bromure de potassium en complément - Troisième intention : lévétiracetam en complément - Quatrième intention : zonisamide ou autre molécule en complément et de leur a) Phénobarbital C’est l’une des molécules les plus utilisées, la plupart du temps prescrite en première intention. Elle appartient à la famille des barbituriques. Elle est sûre d’utilisation, peu coûteuse et bien tolérée chez le chien. Le phénobarbital prolonge l’ouverture du canal Cl- au récepteur GABAa. Elle est utilisée entre 2,5 mg/kg et 7,5 mg/kg deux fois par jour. La dose sérique toxique est de 40 µg/mL. Elle a une forte biodisponibilité, est rapidement absorbée dans les 2 heures après la prise et atteint sa concentration plasmatique maximale dans les 4 à 8 heures suivant l’administration orale. La grande majorité est métabolisée par le foie avec environ 1/3 excrété inchangé dans les urines. C’est un auto-inducteur de micro-enzymes hépatiques, ce qui peut progressivement réduire sa demi-vie d’élimination lors de traitement chronique. Cela nécessite donc une augmentation de dose pour maintenir une concentration sérique adéquate (Podell, 2013). La modification biologique la plus courante induite par ce traitement correspond à une augmentation des paramètres hépatiques. Cette modification n’est pas forcément le témoin d’une insuffisance hépatique. Les signes cliniques d’une hépatotoxicité incluent une anorexie, une sédation, de l’ataxie, un ictère et de l’ascite. Dans ce cas là, une augmentation plus importante des Alanine-Amino-Transférases (ALAT) et des Phosphatases Alcalines (PAL) est visible, ainsi qu’une élévation des acides biliaires et une augmentation de la concentration sérique du phénobarbital sans augmentation de la dose administrée. L’hépatotoxicité peut être réversible si elle est détectée précocement, le phénobarbital est alors retiré. Pour cela, il est préférable d’éviter d’associer le phénobarbital avec une autre molécule potentiellement hépatotoxique, comme la phénytoïne ou la primidone (Thomas, 2010). Le phénobarbital peut engendrer une hypertriglycéridémie ainsi qu’une pancréatite. Un traitement de la pancréatite doit alors être entrepris, et un sevrage doit alors être effectué. Cette molécule antiépileptique est généralement bien tolérée à des concentrations sériques thérapeutiques. Les effets secondaires fréquemment rencontrés sont de l’ataxie, une sédation, une polyphagie, une polyuro-polydipsie, une prise de poids, des changements de comportement tels que de l’hyperexcitabilité ou de l’agitation, qui peuvent se déclencher après la mise en place du traitement mais peuvent se résoudre après une semaine. Ces effets secondaires ne semblent pas être liés à la dose administrée. Une réaction plus particulière peut 39 se manifester : une cytopénie à médiation immune (anémie, neutropénie et thrombocytopénie) qui se déclenche dans les 6 premiers mois de traitement. Plus rare, des réactions hépatotoxiques peuvent se mettre en place, comme en témoigne une augmentation rapide des ALanine Amino-Transférases (ALAT) et des taux d’acides biliaires anormaux. Le traitement doit alors être arrêté immédiatement si une neutropénie ou une forte augmentation des ALAT est notée. L’animal doit alors être placé sous un second AE supplémentaire, comme le bromure de potassium (Podell, 2013). b) Bromure de Potassium Le bromure de potassium est efficace comme thérapie initiale chez les chiens et, plus souvent, comme thérapie complémentaire associée au phénobarbital lorsque ce dernier n’a pas une efficacité suffisante en monothérapie. Le bromure est librement filtré par les glomérules et réabsorbé par le rein en compétition avec le chlorure. A cause de cette forte réabsorption, la demi-vie d’élimination est lente (21 à 24 jours) et des concentrations stationnaires persistent jusqu’à 3 mois. La dose initiale est comprise entre 20 et 30 mg/kg, une fois par jour, pendant le repas. La concentration sérique idéale est de 1 à 2 mg/mL lorsque le bromure est associé au phénobarbital, de 1 à 3 mg/mL lorsqu’il est utilisé en monothérapie. Les dosages peuvent être réalisés 1 mois et 3 mois après le début du traitement. Les dosages à un mois de traitement seront approximativement équivalents à 50% de la concentration sérique stationnaire. Il est inutile de réaliser des dosages très réguliers car la concentration en bromure ne varie pas beaucoup au cours du temps. Une dose de charge peut être administrée pour atteindre des concentrations sériques thérapeutiques plus rapidement. Plusieurs protocoles existent, on peut par exemple administrer 600 mg/kg sur 48h, c’est-à-dire 75 mg/kg toutes les 6 heures pendant 2 jours. Cette dose de charge est utilisée si les crises sont trop fréquentes ou si le phénobarbital doit être retiré. Des vomissements sont fréquents lors de l’administration d’une dose de charge. Une dose de maintien est ensuite entreprise. Si après 3 mois, les crises sont contrôlées et que la concentration sérique du bromure est au moins de 1,5 mg/mL, la dose de phénobarbital peut alors être diminuée de 25% toutes les 2 à 4 semaines. Le KBr est excrété par voir rénale en compétition avec le chlorure, il ne faut donc pas modifier l’alimentation de l’animal pour ne pas créer des déséquilibres homéostatiques. Lors d’insuffisance rénale, les doses peuvent être modifiées. 40 Les effets secondaires du bromure sont relativement similaires à ceux du phénobarbital : on note fréquemment une sédation, une ataxie, de la faiblesse, une polyuro-polydipsie et de la polyphagie. Moins souvent, on peut rencontrer une rigidité des membres, de l’irritabilité, de l’agitation, du prurit ou de la toux. Des vomissements peuvent survenir suite à une irritabilité gastrique. Pour éviter cela il est préférable d’administrer la molécule lors de prise de nourriture (Thomas, 2010). Une intoxication au bromure peut engendrer un coma, de la cécité, un comportement inopportun, de l’ataxie, une para ou tétraparésie, des réflexes médullaires normaux à diminués, une dysphagie ou un mégaosoephage. La plupart du temps, une diminution de la dose administrée suffit à faire disparaître les signes cliniques. Dans les cas extrêmes, un arrêt du traitement au bromure est préféré et une mise sous fluidothérapie doit être envisagée. c) Imépitoïne L’imépitoïne est une molécule antiépileptique apparue récemment dans le traitement de l’épilepsie idiopathique. Elle agit comme un agoniste partiel de faible affinité du récepteur de la benzodiazépine. Elle inhibe les crises d’épilepsie par une potentialisation des effets inhibiteurs sur les neurones, via les récepteurs GABAa. De plus, l’imépitoïne exerce un faible effet de blocage des canaux calciques, qui pourrait contribuer à ses propriétés anticonvulsivantes. La dose administrée est comprise entre 10 et 30 mg/kg, deux fois par jour, pendant le repas. La dose initiale recommandée est de 10 mg/kg. L’imépitoïne est efficace dans la gestion des crises d’épilepsie généralisées, mais pas lors de crises groupées. Cette molécule est très bien tolérée : les effets secondaires sont rares et légers, ils se traduisent par de la polyphagie, de l’hyperactivité, de la polyurie, de la polydipsie, de la somnolence, de l’hypersalivation, des vomissements, de l’ataxie, de l’apathie de la diarrhée, un prolapsus de la membrane nictitante, une baisse de l’acuité visuelle et une sensibilité au bruit. Aucune augmentation des paramètres hépatiques ou autre toxicité d’organes n’ont été rapportées (Rundfeldt et al., 2015). L’absorption de la molécule est très bonne (supérieure à 92%), les concentrations sanguines maximales sont atteintes rapidement avec une concentration maximale de 18 µg/mL deux heures après l’administration de 30 mg/kg. Le volume de distribution est 41 relativement élevé (579 à 1548 mL/kg). L’imépitoïne est largement métabolisée par le foie avant son élimination rapide par voie fécale avec une demi-vie d’élimination de 2 heures (Rundfeldt et al., 2014). A ce jour, aucune interaction avec d’autres substances actives n’est rapportée. Ce traitement peut être arrêté relativement rapidement, il n’y a pas d’effet de sevrage, contrairement au phénobarbital. d) Lévétiracétam Bien que le mécanisme d’action de cette molécule ne soit pas clairement élucidé, il semblerait qu’elle agisse sur les récepteurs GABA ainsi que sur les canaux potassiques voltage-dépendants. Le lévétiracétam est un anticonvulsivant efficace chez le chien, présentant peu d’effets secondaires. Entre 70 à 90% de la molécule ingérée est éliminée sous forme inchangée dans les urines. La demi-vie d’élimination chez le chien est d’environ 3 à 4 heures, mais les effets anticonvulsivants semblent opérer plus longuement. Cette durée diminue à 1,7 heures lors de prise simultanée avec du phénobarbital. De la sédation peut être rapportée mais c’est un effet secondaire relativement rare. Le lévétiracétam est utilisé à 20 mg/kg en dose initiale, trois fois par jour. La dose peut être augmentée jusqu’à 80 mg/kg. C’est un bon choix de monothérapie lorsque les effets secondaires doivent être minimisés. Un suivi thérapeutique est possible mais pas nécessaire car cette molécule présente une large marge de sécurité, d’autant plus qu’il n’y a pas de corrélation évidente entre la concentration sérique et les effets cliniques (Thomas, 2010). Une étude sur 52 chiens atteints d’épilepsie idiopathique et traités uniquement avec du lévétiracétam a montré que, dans 69% des cas, une réduction d’au moins 50% de la fréquence des crises était rapportée, et qu’un arrêt complet des crises opérait dans 15% des cas. Les effets secondaires, la plupart du temps de faible intensité, sont rapportés dans 46% des cas avec de l’ataxie et une sédation (Packer et al., 2015). e) Zonisamide C’est une molécule antiépileptique humaine, dérivé du benzisoxazole, qui agit par de nombreux mécanismes (sur les canaux ioniques et les médiateurs excitateurs et inhibiteurs). 42 L’originalité de cette molécule réside dans sa capacité à réduire la production excessive de radicaux libres, ce qui lui confère un effet neuroprotecteur en plus de ses propriétés anticonvulsivantes (Czapiński et al., 2005). Elle peut être utilisée seule ou en polythérapie lors d’épilepsie réfractaire. Elle est utilisée pour la gestion des crises d’épilepsie partielles et généralisées. Une étude a montré que lors d’une monothérapie au zonisamide, 60% des cas répondaient favorablement au traitement avec une diminution de plus de 50% de la fréquence des crises chez le chien, pour une administration de 3,8 mg/kg deux fois par jour (Chung et al., 2012). En monothérapie, le zonisamide doit être commencé à 3 mg/kg, deux fois par jour. Les doses peuvent monter jusqu’à 10 mg/kg deux fois par jour. Les effets secondaires rapportés sont de l’ataxie, de la sédation et des vomissements (Dewey, 2006). En plus de son métabolisme hépatique, le zonisamide est en partie métabolisé par l’arylamine N-acétyltransférase, une enzyme métabolique dont le chien est déficient, ce qui explique sa demi-vie plus longue chez le chien que chez l’homme (Boothe, Perkins, 2008). f) Diazépam et midazolam Ce sont des benzodiazépines, elles agissent comme agonistes sur le récepteur GABAa et augmente la fréquence d’ouverture du canal, ce qui induit un renforcement du flux entrant de chlore dans la cellule et donc une diminution de l’excitabilité. En raison de la courte durée d’action de ces molécules et de la forte capacité d’accoutumance fonctionnelle, elles ne sont utilisées qu’en situation d’urgence, en cas de crises groupées ou de status épilepticus. En cas d’utilisation prolongée, une dépendance marquée pourrait se développer. 43 II Particularités de l’épilepsie idiopathique du chien Comme nous l’avons déjà indiqué, l’épilepsie idiopathique affecte de manière plus importante les chiens de race. De plus, il a été montré qu’en fonction des races affectées, les manifestations de l’épilepsie idiopathique n’étaient pas les mêmes. Certaines races en particulier sont affectées par des crises généralisées alors que d’autres sont affectées par des crises focales. Certaines présentent des épilepsies très sévère avec la présence de crises groupées et de status épilepticus, nécessitant parfois une procédure de fin de vie. D’autres races présentent des épilepsies plus bénignes très bien contrôlées par le traitement ou ne nécessitant aucun traitement. Ces observations ont, depuis longtemps, fait penser que chez le chien, l’épilepsie idiopathique avait une origine génétique. De manière générale, ces dix dernières années, la reconnaissance de maladies génétiques chez le chien, en particulier dans le domaine de la neurologie, a connu un développement exponentiel, grâce à l’apparition de techniques génétiques. Les modalités de sélection des chiens de race (surutilisation d’étalons champions, consanguinités marquées pour fixer des paramètres phénotypiques dans la race) ont conduit au développement de maladies génétiques, avec une forte prévalence dans l’espèce canine. C’est pourquoi nous allons aborder les particularités de l’épilepsie idiopathique du chien, en particulier sous l’angle de la génétique. A) Prédispositions raciales La prévalence de l’épilepsie, comprise entre 0,6 et 0,75% dans une population de chiens, est bien plus élevée chez certaines races (Berendt et al., 2015). Les prévalences peuvent différer en fonction des régions géographiques et des populations étudiées. Voici un tableau regroupant différentes prévalences de l’épilepsie idiopathique dans certaines races, lors de plusieurs études menées (Tableau I) : 44 Tableau I : Prévalences de l'épilepsie idiopathique au sein de certaines races et populations canines Race Berger Belge (Tervueren, Etats-Unis) (Famula et al., 1997) Tervueren et berger belge (Etats-Unis) (Oberbauer et al., 2003) Berger Belge (Groenendael et Tervueren, Danemark) (Berendt et al., 2008) Berger Belge (Groenendael et Tervueren, Danemark) (Berendt et al., 2009) Bouviers Bernois (Suisse) (Kathmann et al., 1999) Border Terrier (Allemagne) (Kloene, 2008) Labrador (Danemark) (Berendt et al., 2002) Irish Wolfhound (Etats-Unis) (Casal et al., 2006) Petit basset griffon vendéen (Danemark) (Gulløv et al., 2011) Prévalence 17% 12,2% et 12,7% 9,5% 33% au sein d’une grande famille 1,25% 13,1% 3,1% 18,3% 8,9% Toutefois, l’épilepsie idiopathique ne se limite pas aux chiens de race. Les chiens issus de croisement peuvent tout à fait développer cette maladie. B) Génétique de l’épilepsie idiopathique Depuis très longtemps, les modalités de transmission de l’épilepsie sont étudiées au sein d’une race donnée. Dans de nombreuses races, on observe une forte prévalence et une incidence familiale accrue. On suspecte, depuis bien longtemps, notamment par analogie avec la médecine humaine, une prédisposition génétique pour l’épilepsie idiopathique (Chandler, 2006). Cependant, il existe des modes de transmission différents, et parfois même au sein d’une seule et même race (Ekenstedt et al., 2012). Les modifications structurales à l’origine de l’épilepsie sont des mutations au niveau des canaux ioniques ou au niveau des récepteurs (Ekenstedt et al., 2011). 45 Le tableau ci-dessous regroupe les bases génétiques présumées de l’épilepsie idiopathique chez le chien (Tableau II). Tableau II : Base génétique présumée de l'épilepsie idiopathique chez le chien (Ekenstedt et al., 2012) Race Mode de transmission potentiel Berger Australien Beagle Berger Belge Effet fondateur d’un ascendant Effet fondateur d’un ascendant ; mâles surreprésentés Résultats variables quant au mode de transmission présumé (implication du gène ADAM23), indice d’héritabilité 0,77 Polygénique, mâles surreprésentés Mode de transmission autosomique récessif, complexe ou polygénique possible Effet fondateur d’un ascendant ; mâles surreprésentés Autosomique récessif avec pénétrance incomplète ou polygénique Autosomique récessif et multifactoriel, mâles surreprésentés Autosomique récessif avec pénétrance incomplète, risque accrue de la maladie chez les mâles, indice d’héritabilité 0,87 Polygénique récessif Autosomique récessif simple (mutation du gène LGI2) Autosomique récessif simple avec suspicion de pénétrance complète ou quasi complète Effet fondateur d’un ascendant, autosomique récessif simple Autosomique récessif, effet puissant d’un seul locus génétique (effet d’un gène majeur) ou polygénique ; mâles très légèrement surreprésentés Bouviers Bernois Border Collie Berger Allemand Springer Anglais Golden Retriever Irish Wolfhound Labrador Lagotto Romagnolo Caniche Royal Spitz-loup Braque Hongrois Plus récemment, pour deux races données on a pu mettre en évidence des mutations causales. Chez le Lagotto Romagnolo, on a réussi à identifier de manière certaine une mutation causale d’un gène de l’épilepsie, le gène LGI2 (Seppälä et al., 2011). D’autres études plus récentes ont permis de mettre en évidence une mutation, chez le Berger Belge, du gène ADAM23 (Koskinen et al., 2015). Les deux gènes étant impliqués dans la stabilisation de la synapse au niveau des connexions neuronales, l’un impliqué au cours du développement (le gène LGI2), l’autre impliqué à l’âge adulte (ADAM23). Pour les autres races, la recherche de gènes potentiellement impliqués ne donne pas de résultats satisfaisants même s’il existe des indications de prédisposition génétique, les données ne sont pas assez fiables. Cela peut résulter d’un mode de transmission polygénique complexe, d’une pénétrance variable du caractère ou d’un phénotypage insuffisant des groupes de patients (Ekenstedt et al., 2011). 46 C) Importance des particularités raciales de l’épilepsie idiopathique Beaucoup d’études se sont intéressées aux différentes épilepsies dans certaines races, elles ont montré que le type de crise, la gravité et le pronostic étaient très variables d’une race à l’autre. Pour l’Irish Wolfhound, le Berger Australien et le Border Collie, l’épilepsie est plutôt de mauvais pronostic, on peut même parler d’épilepsie réfractaire avec de très mauvaises réponses thérapeutiques. A l’inverse, pour le Caniche et le Malinois, l’épilepsie est plutôt bénigne et répond bien au traitement. Alors que le Labrador et le Golden Retriever, ont plutôt des épilepsies à prendre en compte, avec des chiens qui ne répondent pas toujours bien au traitement au long terme et nécessitent une prise en charge adaptée. La connaissance de ces épilepsies raciales est indispensable à la prise en charge de l’épilepsie canine. Cette diversité raciale peut être un frein dans la recherche clinique. Voici un tableau regroupant les différents types d’épilepsies retrouvés dans certaines races prédisposées génétiquement à cette maladie (Tableau III) (Hülsmeyer et al., 2015): 47 Tableau III : Caractéristiques de l'épilepsie idiopathique dans différentes races étudiées Races Age moyen d’apparition à la 1ère crise Prédisposition sexuelle Type de crises Gravité Réponse au traitement Berger australien (Holliday et al., 1970) Médiane 2,5 ans Mâle 36% G 26% FG 38% F+G 20% CG 12% SE Mauvaise (56%) 12% de rémission Berger belge (Berendt et al., 2008) Bouviers bernois (Kathmann et al., 1999) Border collie (Hülsmeyer et al., 2010) Border terrier (Kloene, 2008) Springer anglais (Patterson et al., 2005) Spitz finlandais (Viitmaa et al., 2006) Golden retriever (Lengweiler, Jaggy, 1999) Irish wolfhound (Casal et al., 2006) 6-96 mois Médiane 39,6 Femelle 18% G 25% F 53% FG 33% CG 2-70,5 mois Médiane 26,5 Mâle G prédominante Médiane 37,8 mois Aucune 8% G 78% FG Médiane 3,2 ans Médiane 3 ans Mâle 68% G 32% F Mâle Labrador (Heynold et al., 1997) Lagotto Romagnolo (Seppälä et al., 2011) Braque hongrois (Patterson et al., 2003) Petit basset griffon vendéen (Gulløv et al., 2011) Berger des Shetland (Morita et al., 2002) Caniche (Licht et al., 2007) Médiane 36 mois 8-56 mois Médiane 24,9 Mauvaise (71%) 47% G 33% F 20% FG 38% CG Moyen (47%), Mauvais (30%) 1% G 54% F 31% FG 16,2% CG 83% G Favorable (33%) au début G prédominante 65,8% de non réponse Aucune 24% G 70% F ou FG 30 à 40% de rémission 5-9 semaines Médiane 6,3 Aucune F préominantes 6-63 mois Médiane 3 ans Aucune 21% G 62% F 17% FG Médiane 24 mois Aucune 5% G 41% F 52% FG F 27,8 mois (6-84) M 33,9 mois (6-107) 5-91 mois Médiane : 30,6 Mâle 45% CG 4% SE 12-18 mois 6-90 mois Médiane 44,4 Bénigne, rémission Assez bon 79% répondant G prédominantes Aucune 38% G 62% F Bonne réponse G = Généralisées, FG = Focales secondairement génralisées, F+G = Focales et Généralisées CG = Crises groupées, SE = Status Epilepticus 48 LES TROUBLES COMPULSIFS CHEZ LE CHIEN I Définitions En médecine vétérinaire, la reconnaissance de comportements répétitifs anormaux n’est pas récente, cependant on trouve une terminologie extrêmement variée. On parle de « stéréotypies », « troubles compulsifs » ou encore « troubles obsessionnels compulsifs ». Les stéréotypies et les troubles compulsifs sont un comportement répétitif et invariant effetué sans lien avec le contexte, on parle également de « comportements avides » (Tynes, Sinn, 2014). Elles peuvent être bénignes ou réellement débilitantes. Cependant, elles interfèrent toujours avec le fonctionnement comportemental normal. Luescher insiste sur le fait que les stéréotypies peuvent évoluer au cours du temps dans leur présentation (Luescher et al., 1991). Selon Low, c’est un comportement répété en excès par rapport à sa nécessité fonctionnelle normale (Low, 2003). Les différentes définitions de stéréotypies dans la littérature sont peu discernables des troubles compulsifs. Le terme de « stéréotypie » est plutôt utilisé par les éthologues, notamment ceux travaillant sur les animaux en captivité. Plus récemment, le développement de la médecine comportementale vétérinaire a fait émerger le terme de « troubles compulsifs » en parallèle avec ce qui est décrit chez l’homme. Les « troubles obsessionnels compulsifs » chez l’homme se définissent par des pensées récurrentes qui poussent l’individu à effectuer des actes en réponse aux obsessions mentales intrusives répétitives. Cependant, l’impossibilité de démontrer que l’animal peut avoir des obsessions remet en question l’utilisation du terme de « troubles obsessionnels compulsifs » en médecine vétérinaire (Luescher, 2003). Nous faisons donc ici le choix de parler uniquement de « troubles compulsifs ». On pense que certains comportements compulsifs, au début de leur installation, pouvaient être un moyen de compensation pour l’animal. Cependant, lorsqu’ils persistent dans le temps, ils deviennent habituels et peuvent conduire à des modifications définitives du système nerveux central, affectant la santé et le bien-être de l’animal (Landsberg et al., 2013). 49 II Symptomatologie Les troubles compulsifs sont présents chez 3 à 4% des chiens (Low, 2003). Ils se déclenchent la plupart du temps pendant la période pré-pubère (entre 3 à 6 mois d’âge), avant la maturité sociale (entre 12 à 36 mois d’âge), ou après un épisode de stress. Les différents comportements sont parfois tellement répétitifs, exagérés et intenses qu’ils sont difficiles à interrompre (Landsberg et al., 2013). Les troubles compulsifs sont dérivés de comportements normaux, tels que le toilettage, l’ingestion, la prédation, la locomotion, bien que les troubles hallucinatoires soient difficiles à classer. Pour cela, les troubles compulsifs sont la plupart du temps répertoriés en différentes catégories : locomoteurs, oraux, autodirigés, vocaux et hallucinatoires. Le tableau suivant rassemble les troubles compulsifs observés chez le chien (Tableau IV): Tableau IV : Troubles compulsifs décrits chez le chien (Luescher et al., 1991) (Luescher, 2003) (Landsberg et al., 2013) Locomoteurs Tourner en rond (« circling », « spinning ») Chasser sa queue (« tail chasing ») Déambuler Chasser les lumières ou les ombres Hochement de tête (« head bobbing ») Oraux Léchage de l’air ou de la truffe Léchage des objets et des gens Polyphagie/Polydipsie Pica Autodirigés Grogner, mordre ou attaquer une partie de son corps Automutilation Se frotter ou se gratter la face Se lécher l’ensemble ou une partie du corps (dermatite de léchage, « acral lick dermatitis ») Se mordiller les griffes Inspection et/ou succion de l’arrière-train Vocalisations Aboiements Gémissements Hurlements Hallucinatoires Attraper des mouches imaginaires (« fly snapping ») Fixité, moments d’absence (« freezing ») Réveils brutaux associés à des agressions Attaque d’objets inanimés Agressions imprévisibles sur l’homme 50 III Analogie avec les TOC chez l’homme A) Présentation des TOC chez l’homme 1) Généralités C’est seulement en 1980 que le DSM-III (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) classe cette maladie dans les « troubles obsessionnels compulsifs » parmi le groupe des « troubles anxieux », après avoir appartenu à la catégorie des « troubles psychonévrotiques » en 1952 dans le DSM-I puis dans les « névroses obsessionnelles compulsives » en 1968 dans le DSM-II. La 5ème édition du DSM lui accorde une partie indépendante intitulée « Troubles obsessionnels compulsifs et troubles associés ». Le TOC est défini comme la présence d’obsessions et/ou de compulsions. On parle de TOC lorsque les symptômes font perdre au moins une heure par jour au patient ou entraîne une souffrance clinique significative ou une altération au niveau social, occupationnel ou dans un autre domaine important du fonctionnement. Les symptômes obsessionnels et compulsifs ne sont pas dus aux effets physiologiques d’une substance ou d’une affection médicale générale. Les symptômes ne peuvent pas être mieux expliqués par les symptômes d’une autre pathologie psychiatrique. Les compulsions sont des « actes mentaux ou des comportements stéréotypés et répétitifs, ayant pour but de prévenir ou diminuer l’anxiété engendrée par les obsessions ou d’empêcher un événement redouté » (Flores Alves dos Santos et al., 2013). 2) Epidémiologie C’est une maladie qui atteint 2 à 3% des humains, pour cela elle est considérée comme la 4ème maladie psychiatrique. Les premiers symptômes apparaissent soit à l’enfance, soit au début de l’âge adulte. La moitié des personnes concernées souffre d’une comorbidité psychiatrique comme des troubles dépressifs, d’anxiété généralisée, d’agoraphobie, de troubles de panique ou de phobie sociale (Abramowitz et al., 2009). Les troubles les plus rapportés concernent des phobies d’impulsions (obsessions sexuelles, violences ; c’est une peur de passer à l’acte), des obsessions de contaminations (lavages excessifs des mains, de l’environnement), des doutes permanents (vérification de fermeture 51 d’une porte, d’un robinet, peur de faire des erreurs, …), des superstitions (comportements superstitieux) ou des besoins d’organisation (de symétrie ou de rangement par exemple) (Katerberg et al., 2010). 3) Approche biologique L’héritabilité de cette maladie est estimée entre 27 et 49%, elle est proche de 65% chez les sujets dont les symptômes surviennent lors de l’enfance et de l’adolescence. La variance est attribuée aux différents facteurs environnementaux. L’implication de différents gènes étant retrouvée, un modèle polygénique du TOC, lié au système sérotoninergique, dopaminergique et glutamatergique, est fortement suspecté (Flores Alves dos Santos et al., 2013). B) Troubles compulsifs du chien et TOC de l’homme Le terme de « troubles obsessionnels compulsifs » est apparu pour la première fois dans la littérature vétérinaire en 1991 (Luescher et al., 1991). Un rapprochement entre les troubles comportementaux du chien et les TOC de l’homme, comme les stéréotypies de léchage et les lavages compulsifs des mains chez l’homme, peut sembler valable (Luescher, 2003). Certains considèrent même les troubles obsessionnels compulsifs dans l’espèce canine comme un modèle de pathologie spontané pour les TOC de l’homme (Overall, 2000). Cependant, tous les auteurs ne sont pas d’accord concernant l’analogie entre ces deux pathologies. La présence d’obsessions est très discutée chez le chien car il est actuellement impossible de prouver leur existence chez l’animal. Or, elles constituent la caractéristique principale chez l’homme car ce sont elles qui conduisent aux compulsions (Eilam et al., 2006). Pour cela, Low estime qu’il est injustifié de classer les stéréotypies parmi les troubles obsessionnels compulsifs (Low, 2003). En médecine vétérinaire, il est parfois difficile de distinguer les troubles compulsifs des crises d’épilepsie focales. D’autres auteurs emploient le terme de TOC pour les chiens lorsque les troubles comportementaux interfèrent considérablement avec leur fonctionnement normal et que leur besoin de les effectuer reste présent malgré les punitions ou les contraintes physiques. 52 IV Approches étiologiques A) Généralités Les troubles compulsifs pourraient être induits par la présence d’un conflit, d’une frustration, d’une privation, d’un besoin de compensation ou d’un dysfonctionnement du système nerveux central. Le conflit a lieu lorsque l’animal souhaite effectuer deux comportements opposés. La frustration apparaît lorsque l’animal souhaite faire une action qu’il ne parvient pas à réaliser. Cela peut se produire par exemple lorsque le chien est excité par d’autres animaux, des personnes ou des proies de l’autre côté de la fenêtre. Des animaux vivants dans une cour ou un jardin peuvent commencer à développer des comportements répétitifs en cas d’impossibilité d’accès aux différents stimuli (jeux, intrus territoriaux, proies). La privation maternelle peut, elle aussi, être à l’origine d’un comportement stéréotypé chez les jeunes ne pouvant pas téter ou ayant un contact social insuffisant. Alors que ces comportements peuvent être simplement transitoires et régresser par la suite, ils peuvent aussi persister à l’âge adulte. Cette privation maternelle peut ainsi amener l’animal à être plus anxieux, peureux ou stressé, ce qui peut potentialiser le risque de développer des troubles compulsifs lorsque ces animaux seront exposés à des facteurs de stress. A l’inverse, offrir à un animal un enrichissement social, des bonnes conditions de vie et un environnement adapté peut lui permettre d’éviter des comportements indésirables, notamment pour les chiens anxieux ou ceux nés dans un environnement pauvre (Latham, Mason, 2008). Le stress et le conflit peuvent apparaître lorsque le milieu ne respecte pas les besoins de l’animal, lorsque celui-ci n’est pas dans son milieu de vie naturel. Si ses besoins en nourriture, eau ou température ne sont pas respectés, l’état de stress est favorisé. Une punition incohérente peut aussi favoriser un état de frustration. Il suffit parfois de supprimer le stimulus qui a servi à créer la frustration et le développement du trouble compulsif. Cependant, l’attitude du propriétaire peut parfois aggraver le problème en renforçant le comportement de l’animal ou en favorisant un sentiment de peur ou d’anxiété suite à une punition mal adaptée. Le problème peut aussi être aggravé par les conséquences du comportement : certains troubles compulsifs poussent le chien à se faire mal et peuvent entrainer des douleurs et des blessures. Dans ces cas, une thérapie à la fois médicale et comportementale doit être mise en place. 53 Dans une étude comprenant 20 chiens atteints de dermatose de léchage où aucune cause sous-jacente n’a pu être mise en évidence, tous les chiens étaient décrits comme souffrant d’anxiété. Aucun des propriétaires ne jouait avec eux et 70% n’effectuaient pas de promenade régulière (Pereira et al., 2010). L’exposition répétée à ces genres de conflits contribue au développement d’un comportement compulsif et habituel. Pour permettre une amélioration de ces troubles, il faut pouvoir agir à la fois sur l’environnement et le comportement de l’animal mais aussi entreprendre une thérapie médicale. Une grande partie des animaux concernés sont caractérisés comme anxieux, certains facteurs génétiques ont été identifiés. Une récente étude a montré qu’un chien atteint de troubles compulsifs mettra plus de temps à apprendre l’extinction d’un comportement par rapport à un autre chien, sans que la motivation du chien ou un mauvais apprentissage puisse être remis en cause (Protopopova et al., 2014). B) Facteurs de risques Fournir un environnement riche et approprié peut permettre de minimiser le stress chez les animaux. Cependant, la race, les différences individuelles, les apports maternels, la période précoce et la socialisation jouent un rôle fondamental dans la gestion du stress de l’animal. Lorsque l’animal commence à exprimer un comportement inhabituel, il est important d’agir rapidement, en s’intéressant à la cause sous-jacente pour éviter que le comportement ne devienne compulsif. Plusieurs facteurs de risque concernant le développement de troubles compulsifs ont été mis en évidence (Landsberg et al., 2013) : 54 - Problème lors de la période précoce, y compris lors des soins maternels - Problème de socialisation et d’environnement - Enrichissement inadapté de l’environnement pour permettre un comportement normal - Emploi du temps instable - Entrainement et communication insuffisants - Punition inadaptée - Présence de conflits à la maison ou dans l’environnement - Frustration et incapacité à atteindre ses objectifs - Anxiété (déplacement d’un membre de la famille, disparition ou nouvelle arrivée d’un animal, déménagement, rénovations, etc…) - Présence d’une phobie ou d’une sensibilité C) Crises d’épilepsie focales ? Ces crises sont largement étudiées chez l’homme où plusieurs catégories sont discernables : les crises psychomotrices avec altération de la vigilance, avec une symptomatologie cognitive, affective, psychosensorielle, psychomotrice ou mixte (Colter, 1989). Cette classification est basée sur des critères subjectifs, comme les expériences émotionnelles, les aspects cognitifs ou les hallucinations, mais aussi sur des examens complémentaires permettant le diagnostic de certitude comme l’EEG. Chez le chien, cet examen complémentaire étant difficilement réalisable, le diagnostic de certitude ne peut être établi. Plusieurs études ont montré l’efficacité du phénobarbital dans le traitement des troubles compulsifs tels que le tournis du Bull Terrier ou les épisodes d’agressivité imprévisibles (Dodman et al., 1996) (Dodman et al., 1992). Ces éléments sont en faveur d’une origine épileptique avec la présence de crises d’épilepsie focales pour certains troubles compulsifs. V Physiologie et pathogénie : différents essais thérapeutiques Il est fort possible qu’un mécanisme commun soit à l’origine des troubles compulsifs. Cependant, il est également possible que le neurotransmetteur impliqué dans le processus soit différent en fonction de la présentation du trouble et de son évolution. Les troubles compulsifs locomoteurs se développent lors de conflits répétés tandis que les troubles compulsifs oraux peuvent se développer de façon plus aigue, une faible stimulation suffit à les déclencher. Il a été suggéré que le mécanisme à l’origine des troubles compulsifs oraux pourrait impliquer le circuit mésolimbique dopaminergique alors que celui à l’origine des troubles locomoteurs impliquerait le système nigrostrié dopaminergique (Cabib, 1993). Les comportements de type hallucinatoires impliqueraient différents mécanismes. 55 Si on se base sur la réponse à certaines thérapies, les béta-endorphines, la dopamine, le glutamate et la sérotonine semblent être impliqués dans le mécanisme à l’origine des troubles compulsifs. Cependant, d’autres molécules doivent elles aussi être prises en compte, comme l’acide gamma-aminobutyrique (GABA), les neuropeptides comme la cholécystokinine (CCK), le neuropeptide Y (NPY) ou les tachykinines (substance P notamment) (Korff, Harvey, 2006). Une étude sur 84 chiens avait pour but d’observer la corrélation entre le taux sanguin de prolactine et le taux d’anxiété chronique afin de déterminer le traitement le plus adapté. L’analyse de la corrélation entre la prolactinémie et le score EDED (échelle d’évaluation des troubles émotionnels du chien) montrait une corrélation positive significative. L'évaluation du traitement a montré une plus forte amélioration des troubles émotionnels avec la sélégiline chez les chiens avec des niveaux plus élevés de prolactinémie par rapport à ceux présentant de faibles taux de prolactine, qui étaient significativement plus améliorés par la fluoxétine (Pageat et al., 2007). Une autre piste concerne les récepteurs aux opioïdes. Une étude sur 11 chiens atteints de stéréotypies de léchage a testé l’efficacité de la naltrexone (1 mg/kg) et du nalméfène (1 à 4 mg/kg). Le temps de léchage était significativement diminué pour 7 chiens sur 11, le traitement était partiellement efficace chez 3 chiens et seulement un chien ne répondait pas au traitement (Dodman et al., 1988). De même les antagonistes au récepteurs NMDA semblent être efficaces dans le traitement des troubles compulsifs, comme la mémantine (0,3-1 mg/kg) efficace dans 64% des cas lors d’une étude sur 11 chiens (Schneider et al., 2009) ou le dextrométhorphane (2 mg/kg) efficace dans 11 cas sur 12 (Dodman et al., 2004). L’utilisation du terme de « troubles compulsifs » chez le chien est basée sur le modèle humain, où les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) sont bien plus largement étudiés et connus. La sérotonine semble impliquée comme étant à l’origine des troubles compulsifs chez l’homme. Ces troubles comportementaux répondent bien à certains traitements, notamment aux inhibiteurs de recapture de la sérotonine (Landsberg et al., 2013). Différentes études ont été menées chez l’animal. 56 Les molécules inhibitrices de la recapture de la sérotonine, comme la clomipramine, la fluoxétine et le citalopram, chez des chiens atteints de dermatite de léchage ont permis une amélioration des signes cliniques (Goldberger, Rapoport, 1991) (Wynchank, Berk, 1998). Alors que les molécules qui ont un effet sur la recapture de la noradrénaline, comme la désipramine, n’ont montré aucun effet (Rapoport et al., 1992). Différentes études sur le traitement des troubles compulsifs chez le chien ont montré que les molécules inhibitrices de la recapture de la sérotonine, en particulier la clomipramine et la fluoxétine, étaient particulièrement efficaces avec une diminution de 50 à 75% des comportements compulsifs, dans un délai de 4 semaines après l’initiation du traitement (Hewson et al., 1998) (Irimajiri et al., 2009). VI Démarche diagnostique A) Médicale Avant d’établir le diagnostic de « trouble compulsif » il faut, en priorité, exclure les causes organiques et fonctionnelles. Comme, par exemple, les comportements de léchage dus à une affection dermatologique ou à une neuropathie sensitive à l’origine d’une douleur, le comportement de léchage du sol ou de la truffe peut être associé à des gastropathies chroniques, les crises d’agression inexpliquées résultant de la manifestation de crises d’épilepsie focales. Un recours aux examens complémentaires peut parfois s’avérer nécessaire en fonction des origines supposées. Le diagnostic reste parfois compliqué à établir car certaines molécules (mémantine, doxépine, clonazépam, carbamazépine, gabapentine, prégabaline) peuvent avoir plusieurs effets (sur la douleur, les crises d’épilepsie, l’anxiété, les compulsions ou le prurit). Par exemple, le fait de chasser sa queue ou de s’automutiler peuvent avoir des causes neurologiques, dermatologiques, douloureuses ou comportementales. Ce trouble compulsif a notamment été décrit comme une douleur auto-induite répondant aux opioïdes, aux antidépresseurs ou un trouble équivalent à l’autisme chez l’humain (Landsberg et al., 2013). 57 B) Comportementale Lorsque toutes les causes médicales ont été exclues, contrôlées ou résolues et que le problème persiste, il faut alors s’intéresser de plus près à l’histoire du problème afin d’effectuer un diagnostic comportemental précis et adapter le plan thérapeutique. Pour cela, il faut aborder différentes informations concernant (Landsberg et al., 2013) : - L’acquisition de l’animal, sa période précoce, sa socialisation, ses comportements et ses éventuels problèmes de santé - La personnalité du chien, sa manière de répondre aux différents stimuli - Son éducation et les méthodes d’apprentissage utilisées - Son mode de vie, ses relations familiales, son environnement - Le problème : date et conditions d’apparition, son évolution, la fréquence, la durée et l’intensité des crises, s’il y a possibilité de l’interrompre, etc… - Autres problèmes comportementaux rapportés avec des signes somatiques pouvant être en faveur d’une cause sous-jacente Cependant, même si un problème médical peut être identifié, il est possible que la cause initiale soit comportementale. Si les signes surviennent uniquement en présence d’un conflit, alors le problème ne peut pas répondre à la définition de troubles compulsifs et le traitement peut se limiter à une simple approche comportementale visant à supprimer les conflits. Lorsque les comportements anormaux surviennent uniquement en présence du propriétaire, il est possible que les réactions du propriétaire entretiennent le problème par conditionnement ou renforcement par exemple. VII Pronostic Au vu du grand nombre de présentations cliniques possibles, le pronostic est variable. Lorsque l’apparition du problème a été favorisée par le comportement du propriétaire ou par une pathologie médicale sous-jacente pouvant être prise en charge, le pronostic est meilleur. Lorsqu’un diagnostic précis peut être établi, un traitement adapté peut permettre une amélioration du problème. Lorsque les troubles compulsifs ne sont pas compliqués par une 58 pathologie médicale, il faut souvent du temps afin de trouver une thérapie comportementale adaptée et efficace. Un traitement sur le long terme est souvent nécessaire, notamment lorsqu’une origine génétique est supposée (Landsberg et al., 2013). VIII Traitements A) Approche comportementale Le traitement des troubles compulsifs, d’un point de vue comportemental, met l’accent sur plusieurs points (Landsberg et al., 2013) : - Environnement adapté aux besoins de l’animal afin qu’il puisse avoir le contrôle sur ses activités quotidiennes (repos, jeux, etc…) - Préférer le renforcement positif pour favoriser les bons comportements plutôt que la punition afin d’éliminer les comportements indésirables - Environnement riche répondant aux besoins comportementaux de l’animal - Travailler les réactions du propriétaire face aux comportements pour éviter tout renforcement ou aggravation du problème - Prévenir la récidive du comportement en agissant sur l’environnement et la gestion du problème - Identifier, réduire ou éliminer les facteurs de stress favorisant l’apparition du conflit - Identifier, réduire ou éliminer les facteurs déclenchant qui précèdent le comportement - Enseigner un comportement souhaitable (de substitution) à l’aide du renforcement positif pour remplacer le comportement indésirable - Apprendre au propriétaire à interrompre le comportement indésirable correctement - Permettre au propriétaire d’identifier les facteurs déclenchant afin d’anticiper et empêcher les comportements indésirables Après avoir identifié toutes les facettes du problème, un programme spécifique comportemental peut être mis en place, afin de réduire l’apparition des comportements indésirables. Dans certains cas, les troubles étant bénins, un traitement n’est pas forcément nécessaire. Un traitement supplémentaire ne peut être justifié que si le comportement altère le 59 bien être de l’animal ou s’il dérange le propriétaire. D’autre part, si le comportement est à l’origine de troubles secondaires comme de la douleur, une inflammation ou une infection, une approche médicale sera nécessaire en plus de l’approche comportementale. B) Approche médicale 1) Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine Sur la base du modèle humain, les molécules inhibant la recapture de la sérotonine ont montré leur efficacité dans le traitement des troubles compulsifs chez le chien. La clomipramine est l’inhibiteur de la recapture de la sérotonine le plus sélectif de tous les antidépresseurs tricycliques (TCA). Plusieurs études ont montré l’efficacité de la clomipramine dans le traitement de certains troubles compulsifs (tourner en rond, chasser sa queue, dermatite de léchage) (Goldberger, Rapoport, 1991) (Hewson et al., 1998). Les autres molécules tricycliques n’ont pas encore prouvé leur efficacité car leur effet inhibiteur sur la recapture de la sérotonine est plus faible. Cependant, en plus de leur effet anxiolytique, ces molécules, comme la doxepine ou l’amitriptyline, peuvent réduire les douleurs neurologiques. Leur association avec du nortriptyline ou de la gabapentine est efficace dans la gestion de douleurs neuropathiques chez l’humain (Gilron et al., 2009). Les inhibiteurs de recapture de la sérotonine (SSRI) comme la paroxetine, la fluoxetine, la sertraline, la fluvoxamine ou le citalopram sont aussi efficaces dans le traitement des troubles compulsifs. Plusieurs études sur la dermatite de léchage ont montré l’implication et l’efficacité de la fluoxetine (Wynchank, Berk, 1998) et du citaloprem (66,7%) (Stein et al., 1998). Ces molécules sont bien tolérées. Si après 4 à 6 semaines de traitement, la réponse thérapeutique reste insuffisante, il est possible d’augmenter les doses. Lorsque le traitement fait ses preuves, il convient de le continuer sur une longue durée (6 mois au minimum). 2) Les antagonistes aux récepteurs NMDA L’utilisation d’antagonistes aux récepteurs NMDA peut être une option de traitement. Une étude sur 11 chiens a montré que la mémantine pouvait réduire la sévérité des troubles compulsifs dans 64% des cas après 2 semaines de traitement (Schneider et al., 2009). L’utilisation de la mémantine peut se faire en monothérapie ou associée à la fluoxétine. De 60 même, une étude sur 12 chiens a mis en évidence l’efficacité du dextrométorphane dans le traitement de stéréotypies de léchage et autodirigées (Dodman et al., 2004). Cependant, en raison de sa demi-vie courte et son absorption variable chez le chien, ce n’est pas une molécule fiable dans le traitement des troubles compulsifs canins. 3) Les antagonistes morphiniques Les antagonistes des opiacés, comme le naltrexone ou la naloxone ont, eux aussi, prouvé leur efficacité dans différentes études (Dodman et al., 1988). Une étude a testé l’efficacité du traitement à base de naltrexone sur 11 chiens atteints de dermatite de léchage. Dans 7 cas sur 11, le traitement a permis de réduire considérablement les symptômes. Cependant, ces chiens rechutaient juste après l’arrêt du traitement. Un seul chien a présenté des effets secondaires au traitement (notamment de la somnolence) (White, 1990). 4) Les inhibiteurs des monoamines oxydases La sélégiline, un inhibiteur des monoamines oxydases, permet l’inhibition de la dégradation des catécholamines et de la sérotonine. Elle semble être efficace chez les chiens présentant un stress chronique associé à une forte prolactinémie (Pageat et al., 2007). La sélégiline est autorisée en Europe dans le traitement de troubles émotionnels souvent associés à des états d’anxiété permanents pouvant altérer certains comportements normaux (prise de boisson, de nourriture, sommeil, etc…). 5) Les antiépileptiques Les antiépileptiques ont, eux aussi, montré de bons résultats dans le traitement des troubles compulsifs, notamment dans le tournis du Bull Terrier ou lors d’épisodes hallucinatoires. Dans une étude basée sur 13 chiens Bull Terrier (dont 5 témoins) présentant du tournis (6 chiens), des agressions imprévisibles (1 chien) et des peurs irrationnelles (1 chien), le traitement au phénobarbital a permis l’amélioration des symptômes dans 5 cas sur 7 (4 présentant du tournis et celui présentant des peurs irrationnelles). Les 8 chiens de l’étude présentaient également des anomalies à l’EEG (Dodman et al., 1996). 61 Voici un tableau résumant les molécules utilisables dans le traitement des troubles compulsifs chez le chien (Tableau V): Tableau V : Molécules utilisables dans le traitement des troubles compulsifs chez le chien (Landsberg et al., 2013) 62 Molécules Posologie Clonazepam 0,1 à 1 mg/kg toutes les 8 à 12h Amitriptyline 1 à 4 mg/kg toutes les 12h Clomipramine 1 à 3 mg/kg toutes les 12h Doxepine 2 à 5 mg/kg toutes les 12 à 24h Nortriptyline 0,5 à 2 mg/kg toutes les 12h Fluoxetine 1 à 2 mg/kg toutes les 24h Sertraline 1 à 3 mg/kg toutes les 24h Fluvoxamine 1 à 2 mg/kg toutes les 24h Citalopram 1 mg/kg toutes les 24h Paroxetine 0,5 à 2 mg/kg toutes les 24h Naltrexone 1 à 2,2 mg/kg toutes les 12h Carbamazepine 4 à 8 mg/kg toutes les 8 à 12h Phenobarbital 2 à 5 mg/kg toutes les 12h Gabapentine 10 à 30 mg/kg toutes les 8 à 12h Pregabaline 2 à 4 mg/kg toutes les 8h Bromure de potassium 10 à 20 mg/kg toutes les 12h Levetiracétam 5 à 30 mg/kg toutes les 8 à 12h Selegiline 0,5 à 1 mg/kg toutes les 24h, le matin Mémantine 0,3 à 1 mg/kg toutes les 24h Dextrométorphane 2 mg/kg toutes les 6 à 12h IX Particularités raciales A) Prédispositions raciales De même que pour l’épilepsie, il a été démontré depuis longtemps que certains troubles compulsifs étaient prédominants au sein de certaines races. Il y a plusieurs troubles compulsifs spécifiques de certaines races. Le tableau ci-dessous regroupe les troubles compulsifs ayant une forte incidence dans une race en particulier (Landsberg et al., 2003) (Tableau VI): Tableau VI : Troubles compulsifs et prédispositions raciales chez le chien (Landsberg et al., 2003) Troubles compulsifs Race prédisposée Tourner en rond (« circling », « spinning ») Bull Terrier, Doberman Chasser sa queue (« tail chasing ») Bull Terrier, Berger Allemand, Berger Australien Fixité (« freezing ») Bull Terrier Léchage d’une partie ou de l’ensemble du corps (dermatite de léchage, « acral lick dermatitis ») Grandes races : Labrador retriever, Pinsher, Akita, Dalmatien, Setter Anglais, Bichon Maltais, Shar Pei, Schnauzer, Braque de Weimar Succion du flanc (« flank sucking ») Doberman Pinscher Inspection de l’arrière train (« hind checking ») Schnauzer nain Claquement de mâchoire (« air biting ») / Attraper des mouches imaginaires (« fly snapping ») Cavalier King Charles, Bouviers Bernois Attaquer des objets inanimés Bull Terrier Agressions imprévisibles sur l’homme Bull Terrier 63 B) Origine génétique des troubles compulsifs Etant donné la forte prévalence de certains troubles compulsifs dans certaines races et la présence de troubles compulsifs spécifiques à ces races, des analyses génétiques ont été réalisées, permettant de comprendre l’origine de quelques troubles comportementaux. Un locus chromosomique à l’origine du comportement compulsif de léchage a été mis en évidence récemment chez le Doberman, plus particulièrement le gène CDH2 du locus chromosomique 7, codant pour un neurotransmetteur ayant un rôle dans la régulation de l’activité synaptique (Dodman et al., 2010). Plus récemment, encore une fois chez le Doberman, une étude a mis en évidence 4 gènes (CDH2, CTNNA2, ATXN1 et PGCP), codant pour des neurotransmetteurs ayant un rôle au sein de la synapse, ils sont significativement plus présents dans les races prédisposées aux troubles comportementaux (Tang et al., 2014). Il existe d’autres suppositions héréditaires comme le tournis ou le fait de chasser sa queue chez le Berger Allemand, le Bull Terrier, le Berger d’Anatolie et le Bouvier Australien (Blackshaw et al., 1994). Certains troubles compulsifs sont plus particulièrement retrouvés dans certaines races, comme la « succion du flanc » chez le Doberman, le « spinning » (tourner en rond) du Bull Terrier ou le gobage de mouches imaginaires chez le Cavalier King Charles. Cette corrélation entre le type de trouble comportemental et la race prédisposée suggère fortement la présence d’un support génétique pour les troubles compulsifs. Il semblerait que certaines races soient prédisposées à la fois à l’épilepsie et aux troubles compulsifs, ce qui laisse supposer la présence de mécanismes génétiques communs. 64 Etude spécifique Troubles comportementaux associés à l’épilepsie : cas particulier des troubles compulsifs 65 66 I Troubles comportementaux et épilepsie chez l’homme A) Généralités L’épilepsie est un des troubles neurologiques le plus fréquent chez l’adulte et peut atteindre 1 à 1,5% de la population (MacDonald et al., 2000). Dans 25% des cas, les crises d’épilepsie peuvent être réfractaires au traitement antiépileptique. Les patients réfractaires sont davantage sujets aux problèmes psychiatriques, notamment aux troubles du comportement comme les troubles de la personnalité, les troubles émotionnels ou encore les troubles de la mémoire. Ces problèmes psychiatriques confèrent un réel handicap dans la vie professionnelle et sociale des patients (Devinsky, 2003). Ils sont malheureusement bien souvent sous-diagnostiqués (Kaplan, 2010). B) Lien entre l’épilepsie et les troubles comportementaux Il y a, depuis longtemps, une association qui est faite entre l’épilepsie, les troubles du comportement et les troubles psychiatriques. De nombreux auteurs ont noté des associations plus spécifiques, en particulier entre la comorbidité des troubles psychiatriques et l’épilepsie focale chronique, notamment l’épilepsie réfractaire du lobe temporal, plutôt que chez les patients atteints d’épilepsie généralisée idiopathique (Monaco et al., 2005) (Ertekin et al., 2009). Les nombreuses études réalisées jusque là ont clairement établi une association entre l’épilepsie et les troubles obsessionnels compulsifs. Cependant, il existe différentes épilepsies. On peut citer par exemple l’épilepsie du lobe temporal, l’épilepsie idiopathique généralisée, l’épilepsie myoclonique juvénile, l’épilepsie du lobe frontal ou encore l’épilepsie limbique. Leur implication dans le développement des TOC à été étudiée. Même si l’épilepsie du lobe temporal (souvent réfractaire) sort du lot et reste l’épilepsie la plus associée au développement de troubles compulsifs, les autres épilepsies jouent aussi un rôle dans le développement de TOC. 67 1) Lien avec l’épilepsie du lobe temporal et l’épilepsie idiopathique généralisée L’épilepsie du lobe temporal, souvent réfractaire aux traitements antiépileptiques et fréquemment associée à une sclérose temporale mésiale, illustre le dysfonctionnement du système nerveux central mettant en relation l’épilepsie et la pathogénie des circuits limbiques impliqués dans le contrôle de l’humeur, le comportement et les émotions. En clair, les patients atteints d’épilepsie temporale ont des fréquences plus élevées de troubles psychiatriques (70%), de troubles de l’humeur (49,3%), d’anxiété (42,5%), de dépression (27,4%) et de troubles obsessionnels compulsifs (11%) (de Oliveira et al., 2010). Une autre étude basée sur 217 patients, met en évidence que 39% des patients atteints d’épilepsie chronique focale ont des troubles psychiatriques. Parmi les patients réfractaires au traitement antiépileptique, près d’un quart souffrent de TOC (Sperli et al., 2009). Les troubles obsessionnels en question concernent l’organisation, la symétrie, l’exactitude, le lavage des mains et la religiosité. L’étude de Ertekin, basée sur 29 patients atteints de TLE, 27 atteints d’IGE et 30 témoins a étudié la présence de troubles psychiatriques à l’aide de l’échelle Y-BOCS (Echelle d’Obsessions-Compulsions de Yale-Brown qui a pour but d’évaluer la gravité et le type de symptômes présents chez les patients souffrant de TOC). Les résultats montrent que 75,9% des patients atteints de TLE, 48,1% des IGE et 16,7% des témoins présentent au moins un trouble psychiatrique (de la dépression le plus souvent). Des symptômes obsessionnels compulsifs (OCS) sont observés chez 10 patients atteints de TLE, contre 3 chez les IGE, cette différence étant significative. Cependant, ces OCS ont été observés chez 9 patients sur 18 atteints de TLE latéralisée à gauche et seulement 1 patient sur 11 atteints de TLE latéralisée à droite. Cette comorbidité suggère que le lobe temporal joue potentiellement un rôle dans le développement de symptômes psychopathologiques spécifiques. Enfin, parmi les patients atteints de TLE, 10,3% présentaient des TOC, contre 0% parmi les témoins (Ertekin et al., 2009). De la même manière, plusieurs études prenant en compte des patients atteints d’épilepsie du lobe temporal, d’autres atteints d’épilepsie idiopathique généralisée (IGE) et des témoins, ont évalué pour chacun la présence de TOC à l’aide de l’échelle Y-BOCS. 15% des patients atteints de TLE souffrent de TOC, cependant il n’y a pas de corrélation entre la présence de TOC et la sévérité de l’épilepsie, le contrôle des crises ou le traitement mis en place (Kaplan, 2011). Dans l’étude de Monaco, 14,5% des patients atteints de TLE souffrent de TOC avec 68 une différence significative avec les patients sains, encore une fois il n’y a pas de corrélation entre la présence de TOC et l’âge de début d’épilepsie, le type, la durée et la fréquence des crises. Il n’y a pas non plus de corrélation, dans cette étude, avec la latéralisation du foyer épileptique ou le traitement antiépileptique (Monaco et al., 2005). Ce taux est plus important dans l’étude d’Isaac, il est de 22% (Isaacs et al., 2004). Mais cela est dû au fait que les patients pris dans l’étude sont, pour certains, réfractaires au traitement antiépileptique. Les patients atteints de TLE présentent des troubles compulsifs en lien avec la contamination, le lavage des mains alors que les patients atteints d’IGE sont plus sujets à des troubles d’obsessions de symétrie, d’exactitude et d’organisation (Ertekin et al., 2009). L’orientation religieuse de certains troubles compulsifs était aussi significativement plus présente chez les patients atteints de TLE (Kaplan, 2010). La plupart du temps les TOC se mettent en place peu après le début de l’épilepsie. 2) Lien avec d’autres épilepsies L’épilepsie du lobe frontal (FLE) est elle aussi suspectée d’être impliquée dans le développement de troubles compulsifs, probablement à cause des fonctions comportementales remplies par cette partie du cerveau. D’un point de vue neurobiologique, le dysfonctionnement de cette région affecte une partie du circuit fronto-cingulaire-thalamolimbique, ce qui pourrait favoriser la présence de troubles compulsifs. L’épilepsie limbique peut, elle aussi, être à l’origine de troubles obsessionnels compulsifs. Elle favoriserait le comportement ritualiste des personnes atteintes. Les patients présenteraient des comportements automatisés avec des mouvements répétitifs. (Kaplan, 2010) Des facteurs neurobiologiques et sociaux supposent une origine dans le circuit frontostriatal du thalamus. En effet, les chirurgies en regard de cette région peuvent engendrer ou diminuer la présence de TOC. C) Eléments de physiologie et pathogénie L’origine des troubles comportementaux lors d’épilepsie du lobe temporal peut provenir de la crise en elle-même. Cependant il est difficile d’expliquer clairement le processus mis en 69 jeu car les troubles peuvent être compliqués par les traitements antiépileptiques mis en place, autant les thérapies médicamenteuses que les thérapies chirurgicales. Il est donc possible que le phénomène épileptique, son étiologie et sa localisation, jouent un rôle dans le déclenchement de troubles obsessionnels compulsifs. D’autant plus que les troubles comportementaux sont plus souvent associés à l’épilepsie du lobe temporal (80%) qu’à l’épilepsie myoclonique juvénile (22%) par exemple (Perini et al., 1996). 1) Une localisation anatomique commune Le fait que les TOC soient si présents lors d’épilepsie focale, notamment chez les patients réfractaires atteints d’épilepsie du lobe temporal, suggère la présence d’un lien entre ces deux pathologies (Isaacs et al., 2004). Une localisation dans l’hémisphère droit de l’origine de l’épilepsie du lobe temporal prédispose au développement de TOC. En effet, la zone épileptogène chez les patients atteints de TOC se situe habituellement à droite (Levin, Duchowny, 1991). Cependant, l’étude d’Isaac, montrant que 22% des patients atteints de TLE réfractaire souffrent de TOC, ne met pas en évidence un côté en particulier, bien que les patients atteints de TLE latéralisée à droite présentent des TOC plus sévères (Isaacs et al., 2004). Une localisation anatomique commune expliquerait le fait qu’une intervention neurochirurgicale puisse réduire les crises d’épilepsie alors qu’elle déclenche la présence de TOC (Greenberg et al., 2010). Une étude concernant 50 patients traités chirurgicalement pour épilepsie focale (44 atteints de TLE et 6 atteints d’épilepsie frontale) ont été évalués par des méthodes neuropsychiatriques avant la chirurgie et pendant 2 ans. Avant la chirurgie 57% des patients atteints de TLE souffraient de troubles dysphoriques. Après la chirurgie, 39% ont eu des complications ou des exacerbations des troubles déjà présents. Parmi les patients ne présentant aucun trouble dysphorique, 42% en ont développé par la suite et ces troubles étaient significativement liés à la récurrence des crises. Cependant, les médicaments antidépresseurs se sont révélés efficaces dans le traitement des troubles psychiatriques liés à l’épilepsie chronique, leur utilisation en parallèle d’un traitement chirurgical semble significativement favorable dans l’amélioration de l’épilepsie et des troubles comportementaux associés (Blumer et al., 1998). Des examens d’imagerie par résonnance magnétique (IRM) sur 46 patients (32 atteints de TOC et 12 témoins) ont montré une corrélation entre les lésions du cortex frontal orbital et la 70 sévérité des symptômes chez les patients non traités ou ayant des antécédents familiaux de TOC. Lors d’une étude sur 12 patients atteints de TOC sévères, un tiers avait des anomalies sur l’électroencéphalographie (EEG) des lobes temporaux. Parmi eux, un seul a répondu favorablement au traitement antiépileptique instauré par la suite (Jenike, Brotman, 1984). 2) Des dysfonctionnements communs Une étude sur 28 patients (14 souffrants de TOC et 14 sains) a mesuré les taux métaboliques cérébraux de glucose à l’aide de tomoscintigraphie par émission de positons (TEP). L’activité métabolique était augmentée dans le cortex orbitofrontal droit et diminuée en regard de la jonction pariéto-occipitale gauche. La sévérité des symptômes était corrélée avec un fort métabolisme dans l’hippocampe droit, le putamen gauche et la région pariétale droite. Cette étude suggère que les patients atteints de TOC ont des caractéristiques distinctes d’activité métabolique cérébrale, notamment dans l’exécution de tâches cognitives. Les circuits frontaux sub-corticaux pourraient servir de médiateurs, non seulement dans l’expression symptomatique mais aussi dans l’expression cognitive chez les patients souffrant de TOC (Kwon et al., 2003). Certains auteurs expliquent que les circuits neuronaux reliant le cortex orbitofrontal, les ganglions de la base, le système limbique et le thalamus jouent un rôle essentiel dans la pathogénèse des TOC. Ils se déclencheraient lorsqu’un rétrocontrôle positif excessif se mettrait en place sur le neurone frontothalamique, lui même excitateur, insuffisamment inhibé par la partie ventromédiale du système limbique (Modell et al., 1989). Kaplan explique que deux circuits sont à la base du contrôle du comportement, pouvant induire des TOC, il distingue le circuit thalamo-orbitofrontal régulé par le glutamate, et le circuit striatalorbitofrontal régulé par la sérotonine, la dopamine et l’acide γ-aminobutyrique (GABA) (Kaplan, 2010). L’étude de Hamed basée sur 474 patients montre que les patients épileptiques ont de plus faibles concentrations sanguines de sérotonine, noradrénaline, adrénaline et dopamine par rapport à des patients non épileptiques. Une corrélation significative entre la présence de troubles psychiatriques et la concentration sanguine de noradrénaline est ressortie (Hamed et al., 2013). 71 II Troubles comportementaux et épilepsie chez le chien A) Une comorbidité des troubles comportementaux et de l’épilepsie chez le chien La première étude sur le développement de modifications comportementales chez les chiens date de 2011. Elle est réalisée sur 80 chiens atteints d’épilepsie idiopathique révèle que 71% des chiens présentent une modification de leur comportement (apparition d’au moins un comportement anormal) en lien avec l’apparition de l’épilepsie. Les modifications comportementales étudiées étaient les suivantes : peurs/anxiétés, agressions défensives, agressions spontanées, hallucinations, comportements territoriaux, comportements exigeants, réactions anormales, trouble de l’attachement, démences, apathie. Les troubles significativement plus présents chez les chiens épileptiques sont : peur/anxiété, agressions défensives et perception anormale (Shihab et al., 2011). Cette première étude est intéressante, d’autant plus que certains comportements (comme les phases de fixité ou le fait de chasser les lumières ou les ombres) sont reconnus par certains auteur comme des TOC. Cette étude est allée encore plus loin en analysant l’effet du traitement, du type de crises et de la résistance au traitement. La mise en place du traitement engendre des réactions anormales, des troubles de l’attachement (avec un animal qui refuse de rester seul), des démences (de la déambulation) et de l’apathie. Les comportements hallucinatoires persistent mais les comportements d’agressions disparaissent. La corrélation entre la fréquence des crises, les comportements de démences et d’hallucinations chez les chiens recevant un traitement montre la complexité d’une étroite relation entre la fréquence des crises, les traitements médicaux, l’épilepsie et les troubles comportementaux. Cependant le type de crises (focale ou généralisée) ne semble pas avoir d’influence sur le comportement. La résistance au traitement antiépileptique semble, comme chez l’homme, associée à un fort risque de développement de troubles comportementaux. Cette première étude montre, pour la première fois, la présence d’une comorbidité comportementale, mais elle montre également que le traitement peut avoir un effet sur l’apparition de certains comportements imputables aux effets secondaires du traitement. Une autre étude sur le Lagotto Romagnolo s’est intéressée à la comorbidité entre les troubles comportementaux et l’épilepsie juvénile bénigne de cette race, qui apparaît à l’âge de 5 à 9 semaines. Elle montre que les Lagotto Romagnolo atteint d’épilepsie juvénile ont 72 significativement plus de troubles comportementaux que les Lagotto Romagnolo non épileptiques. Les troubles comportementaux sont d’inattention (difficultés à apprendre et à se concentrer), de l’excitabilité (impossibilité de se contrôler lors d’excitation : bave, halète et urine par exemple) et de l’impulsivité (chiens impatients qui ne prend pas le temps de comprendre ce qu’il fait) (Jokinen et al., 2015). B) Une origine génétique commune L’implication de gènes à été mise en évidence à la fois concernant l’épilepsie idiopathique mais aussi concernant les troubles compulsifs. Certaines races sont prédisposées à ces deux pathologies, comme le Cavalier King Charles sujet aux crises d’épilepsie et au gobage de mouches imaginaires, le Berger Allemand sujet aux crises convulsives généralisées et au « tail chasing » ou le Berger Belge sujet aux crises d’épilepsie et aux troubles compulsifs. Ces arguments sont en faveur d’une voie pathogénique commune, à l’origine d’une anomalie ou d’un dysfonctionnement génétique commun. Une étude, chez le Malinois, a montré que le polymorphisme d’un gène codant pour le transporteur de la dopamine (DAT-VNTR) est associé à un plus fort risque de développement de l’épilepsie. La plupart des chiens sont homozygotes avec une double copie de l’allèle (2/2). Le Berger Belge est la plupart du temps homozygote avec une seule copie de l’allèle (1/1). Lorsque le Berger Belge est (1/1), il fait des crises d’épilepsie, lorsqu’il est (1/1) ou (1/2) il présente de l’hypervigilance, une augmentation de la fréquence d’agression et une perte de la réactivité aux stimuli environnementaux avec des phases de fixité (Lit et al., 2013). 73 Il ressort dans notre étude bibliographique, que les troubles comportementaux associés à l’épilepsie sont bien décrits chez l’homme, comme les obsessions de lavage, de symétrie ou d’organisation. Chez le chien, on a également montré, très récemment, qu’il y avait des troubles comportementaux associés à l’épilepsie idiopathique, notamment des troubles compulsifs (comme les phases de fixités ou le fait de chasser les lumières et les ombres). L’épilepsie et les troubles compulsifs ont tous deux une origine génétique chez le chien, ce qui fait la particularité de cette espèce. On retrouve certains types d’épilepsies dans certaines races données et certains troubles compulsifs d’autres races. Aujourd’hui, les arguments génétiques nous permettent de supposer qu’il existe des supports génétiques communs. Le chien pourrait donc être un modèle particulièrement pertinent dans la compréhension de la pathogénie des troubles compulsifs associés à l’épilepsie, en particulier sur le plan génétique. Au préalable à ce type d’étude, il faut donc s’assurer que la prévalence de troubles compulsifs est supérieure dans une population épileptique par rapport à une population témoin. C’est ici le but de notre partie expérimentale. 74 PARTIE 2 : ETUDE EXPERIMENTALE 75 76 I Objectif Cette étude a pour objectif d’évaluer si la prévalence de troubles compulsifs est plus élevée chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins. Pour cela, un questionnaire est soumis aux propriétaires des chiens appartenant à l’étude au moyen d’appels téléphoniques. L’influence d’autres facteurs sur le développement de troubles compulsifs sera aussi testée, comme l’âge, le sexe, la stérilisation, le fait d’être réfractaire au traitement ou le type de crise. II Matériels et méthodes A) Critères d’inclusion 1) Chiens épileptiques Les chiens inclus dans le groupe des épileptiques ont tous consulté au service de neurologie de VetAgroSup, entre janvier 2010 (la date d’acquisition de l’IRM étant fin 2009) et décembre 2014. Chaque chien devait avoir un examen neurologique normal. Un diagnostic d’épilepsie idiopathique a été posé pour chacun d’entre eux, ils ont donc eu un bilan sanguin exhaustif (Numération Formule, glycémie, PAL, ALAT, albumine, urée, créatinine, cholestérol, tryglycérides, T4, TSH, acides biliaires à jeun et post-prandiaux) et un examen d’imagerie de l’encéphale (scanner ou IRM) dans les normes. Les chiens atteints de dyschinésie paroxystique ont été exclus. 120 chiens épileptiques répondants à ces critères ont été sélectionnés, cependant seuls 50 ont pu être inclus dans notre étude. 2) Chiens témoins Pour chaque chien épileptique, deux témoins sont sélectionnés, afin d’augmenter la puissance des tests statistiques, lors de l’interprétation des résultats. Un chien témoin doit avoir le même âge (à 6 mois d’écart) et la même race que le chien épileptique. Il doit être, bien évidemment, non épileptique. Ces chiens ont été sélectionnés parmi les consultations au CHEVAC de VetAgroSup (comme par exemple au service de 77 médecine préventive, chirurgie ou dermatologie). Les chiens ayant une pathologie pouvant induire des comportements stéréotypés (notamment les problèmes dermatologiques engendrant du léchage ou du tournis) ont été exclus. 100 chiens témoins répondants à ces critères ont été inclus dans notre étude. B) Protocole expérimental 1) Recueil de données La base de données informatique de VetAgroSup, le logiciel Clovis, a permis de recueillir les informations suivantes (pour les données manquantes dans le dossier d’un animal, les informations ont été complétées à l’aide de l’échange téléphonique) : - Numéro de dossier - Age et race du chien - Sexe et présence de stérilisation ou non - Age de la première crise, type, fréquence et durée des crises pour chaque chien épileptique - Traitements antiépileptiques - Coordonnées des propriétaires Cette étape a également permis d’exclure de l’étude les chiens atteints d’une maladie intercurrente, ou pouvant interférer dans l’interprétation de nos résultats. Pour chaque chien, l’anamnèse a pu être consultée afin de vérifier les critères d’inclusion dans l’étude. Un chien est considéré comme réfractaire au traitement à partir du moment où au moins 3 molécules antiépileptiques lui ont été administrées. a) Sexe des chiens 72 femelles et 78 mâles ont participé à l’étude (Tableau VII, Figure 2). 78 Tableau VII : Répartition des chiens de l'étude par sexe Cas Témoins Total Femelle Mâle Total 22 50 72 28 50 78 50 100 150 Figure 2 : Comparaison du sexe des chiens épileptiques et des chiens témoins b) Statut castré ou non castré des chiens L’étude a concerné 76 chiens castrés et 74 chiens non castrés (Tableau VIII, Figure 3). Tableau VIII : Répartition des chiens de l'étude selon le statut castré ou non castré Castré Non castré Total Cas 24 26 50 Témoins Total 52 76 48 74 100 150 Figure 3 : Comparaison du statut castré ou non des chiens de l’étude 79 c) Age des chiens au moment de l’étude La moyenne d’âge des chiens de l’étude est de 6,2 ans, avec une médiane de 5 ans. 50% des chiens ont entre 4 et 8 ans. La répartition des chiens en fonction de leur âge est représentée dans les tableaux suivants (Tableau IX, Tableau X, Figure 4). Tableau IX : Age des chiens de l’étude (en années) Moyenne d’âge Médiane Quartile 1 Quartile 3 Age minimal Age maximal 6,2 6,2 6,2 5,5 5 5 4 4 4 8 8 8 2 1 1 17 18 18 Cas Témoins Total Tableau X : Répartition des chiens en fonction de leur classe d’âge (en années) [0 ; 4[ [4 ; 8[ [8 ; 12[ [12 ; 16[ [16 ; 20[ Cas 9 25 13 2 1 Témoins Total 18 27 50 75 27 40 3 5 2 3 Figure 4 : Comparaison de l’âge (en années) des chiens épileptiques et des chiens témoins d) Age des chiens épileptiques lors de leur première crise La moyenne d’âge lors de la première crise d’épilepsie est de 28 mois, soit 2 ans et 4 mois. La médiane s’élève à 24 mois (2 ans). 56% des chiens avaient entre 1 et 3 ans lors de leur première crise d’épilepsie. La répartition des chiens en fonction de leur âge lors de la première crise est représentée dans les tableaux suivants (Tableau XI, Tableau XII, Figure 5). 80 Tableau XI : Age des chiens épileptiques lors de leur première crise d’épilepsie (en mois) Cas épileptiques Moyenne d’âge 28 Médiane Quartile 1 Quartile 3 24 15,5 36 Age minimal 6 Age maximal 108 Tableau XII : Répartition des chiens en fonction de leur âge à la première crise d’épilepsie (en années) Cas épileptiques [0 ; 1[ [1 ; 2[ [2 ; 3[ [3 ; 4[ [4 ; 5[ [5 ; 6[ > 6 ans 6 13 15 8 5 2 1 Figure 5 : Répartition des chiens épileptiques selon l'âge à la première crise d’épilepsie e) Races des chiens Les races des deux groupes sont répertoriées dans le tableau ci dessous (Tableau XIII). 81 Tableau XIII : Races des chiens inclus dans l'étude Chiens épileptiques Race (type) Nombre de chiens Chiens témoins Race (type) Nombre de chiens Labrador Flat coat retriever Border Collie 6 1 6 Labrador 14 Border collie 12 Bouledogue français 5 Bouledogue français 10 Berger allemand 4 Berger allemand 8 Golden retriever 3 Caniche 2 Golden retriever Caniche 6 4 Malinois 2 Malinois 4 Husky 2 Husky 4 Cane corso 2 Cane corso 4 Groenendael 1 Groenendael 2 Cavalier King Charles 1 Cavalier King Charles 2 Bouledogue Anglais 1 Bouledogue Anglais 2 Malamute 1 Malamute 2 Irish Terrier 1 Scottish Terrier 1 Fox Terrier 1 Fox Terrier 3 Berger des Pyrénées 1 Berger des Pyrénées 2 Beagle 1 Beagle 2 Beauceron 1 Beauceron 2 Cocker 1 Cocker 2 Bull Terrier 1 Bull Terrier 2 Dogue Allemand 1 Dogue Allemand 2 Yorkshire Terrier 1 Yorkshire Terrier 2 Dogue Argentin 1 Dogue Argentin 2 Setter Gordon 1 Setter Gordon 2 Shiba Inu 1 Shiba Inu 2 Teckel 1 Teckel 2 2) Appels téléphoniques Suite au recueil des données, les propriétaires ont été contacté un par un, par téléphone uniquement. Ces appels avaient pour objectifs, d’une part, de compléter les données manquantes sur leur animal (comme le statut castré ou non par exemple), de vérifier les critères d’inclusions, et d’autre part, de leur soumettre le questionnaire de notre étude. 82 Avec les propriétaires de chiens épileptiques, la maladie n’a jamais été abordée avant d’avoir fini le questionnaire sur les troubles compulsifs, afin de ne pas influencer les réponses. Le but de l’étude était expliqué uniquement à la fin de l’échange téléphonique. 3) Questionnaire Une liste de troubles compulsifs était proposée lors de l’échange téléphonique, en insistant bien sur le caractère compulsif, répétitif et sans but de chaque comportement. Le propriétaire devait alors signaler soit la présence, soit l’absence de chaque trouble compulsif chez son animal. La présence du comportement n’était notée seulement s’il se produisait régulièrement et sans raison apparente. Pour cela, la classification des troubles compulsifs présentes chez le chien a été utilisée. C’est ce tableau qui a servi de base de donnée pour l’étude (Tableau XIV). Les seules issues possibles étaient : « présence » ou « absence » du critère. 83 Tableau XIV : Questionnaire Troubles compulsifs Locomoteurs Oraux Autodirigés Vocalisations Hallucinatoires Tourner en rond Chasser sa queue Déambuler Chasser les lumières ou les ombres Hochement de tête Léchage de l’air ou de la truffe Léchage des objets et des gens Polyphagie/Polydipsie Pica Grogner, mordre ou attaquer une partie de son corps Automutilation Se frotter ou se gratter la face Se lécher l’ensemble ou une partie du corps Se mordiller les griffes Succion du flanc Inspection de l’arrière train Aboiements Gémissements Hurlements Attraper des mouches imaginaires Fixité, moments d’absence Réveils brutaux associés à des agressions Attaque d’objets inanimés Agressions imprévisibles sur l’homme Présence/Absence 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 4) Analyses statistiques Les analyses statistiques ont été effectuées à l’aide du logiciel R studio®. L’objectif de l’étude est de savoir si le fait d’être épileptique peut avoir un impact sur le développement de troubles compulsifs. Pour nous permettre d’analyser des données codées en « présence » ou « absence » en fonction de variables qualitatives (« épileptique » ou « non épileptique »), tout en prenant en compte des potentiels facteurs de confusion (comme l’âge, le fait d’être stérilisé, etc…), nous avons réalisé une régression logistique basée sur un modèle linéaire. 84 Notre étude correspond à un modèle cas-témoins. Dans un premier temps, pour chaque trouble compulsif (TC) nous calculons l’odds-ratio sur le modèle TC=f(épilepsie). L’oddsratio, également appelé « rapport des chances », est une mesure statistique exprimant le degré de dépendance entre des variables aléatoires qualitatives. Il permet de mesurer l’effet d’un facteur ; il mesure ici l’effet de l’épilepsie sur la présence ou non de trouble compulsif. Par exemple, si l’odds-ratio est de 4 pour un trouble compulsif en testant l’effet du facteur « épilepsie », cela signifie qu’un chien épileptique aura 4 fois plus de chances de développer ce trouble compulsif par rapport à un chien sain. Cependant l’interprétation ne se limite pas à l’odds-ratio, il faut s’intéresser à la significativité du résultat. Dans un premier temps, il est important de regarder l’intervalle de confiance de l’odds-ratio. Si cet intervalle ne contient pas la valeur « 1 », le résultat est significatif. Pour estimer plus précisément cette significativité, nous avons réalisé un test du chi-deux d’indépendance qui permet de tester l’indépendance de deux variables aléatoires. Le principe de ce test est de définir l’hypothèse nulle H0 comme l’hypothèse de différence nulle (c’est-àdire qu’il n’y a aucune différence concernant le développement de troubles compulsifs entre un chien épileptique et un chien sain) et l’hypothèse alternative H1 comme l’hypothèse de différence non nulle (dans notre étude, ça sera le fait que l’épilepsie a une influence sur le développement de troubles compulsifs). Le principe du test est ensuite de confronter les résultats observés à l’hypothèse nulle pour savoir si ces résultats sont probables sous l’hypothèse nulle. On quantifie alors le degré de signification noté p, appelé p-value. Il s’agit d’observer, sous H0, une différence au moins aussi grande que celle observée. Si p < α, α étant un seuil communément fixé à 0,05, on rejettera H0. Ce qui permettra de conclure que la différence observée est significative. Cependant si p > α, on ne peut pas rejeter H0 et conclure à l’absence de différence significative. Ce résultat peut simplement provenir des fluctuations d’échantillonnage (nombre de cas insuffisant par exemple). Lorsque nos effectifs étaient inférieurs à 5, nous avons utilisé un test exact de Fisher. Il est utilisé pour des faibles effectifs. Ce test est qualifié d’exact car les probabilités peuvent être calculées exactement plutôt qu’en s’appuyant sur une approximation qui ne devient correcte qu’asymptotiquement comme lors du test du chi-deux d’indépendance. Ce test permet donc le calcul exact de la p-value. On réalise ensuite un ajustement de notre modèle à l’aide d’un modèle linéaire généralisé qui permet d’améliorer la précision de l’estimation en supprimant les effets des facteurs de 85 confusion. Cette régression linéaire permet de lier les deux variables prises en compte par une fonction linéaire (ici TC=f(épilepsie)). Un test du rapport de vraisemblance (LRT pour Likelihood Ratio Test) est ensuite réalisé pour comparer la qualité de l’ajustement des deux modèles (le premier modèle correspondant au modèle nul, celui comprenant le développement des troubles compulsifs sans tenir compte du facteur « épilepsie » ; le deuxième modèle correspondant au modèle alternatif, celui comprenant le développement des troubles compulsifs en fonction de l’épilepsie). De manière générale, il permet de comparer un modèle avec tous ses sous-modèles afin de déterminer celui qui offre le meilleur ajustement. Enfin, le Critère d’Information d’Akaike (AIC), qui prend en compte à la fois la déviance (l’adéquation du modèle obtenu par rapport au modèle de base) et le nombre de paramètres, permet de mesurer la qualité d’un modèle. En effet, il est possible d’augmenter la vraisemblance d’un modèle en ajoutant un paramètre. L’AIC permet de pénaliser les modèles en fonction du nombre de paramètres afin de satisfaire au critère de parcimonie. Il convient alors de choisir le modèle avec l’AIC le plus faible. Pour comparer le nombre total de troubles compulsifs entre nos deux populations, un test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) a été réalisé, il nous donne une pvalue, qui nous permet de savoir si les troubles compulsifs étudiés sont significativement plus présents chez nos chiens épileptiques par rapport à nos chiens témoins. Pour cela, la p-value doit, là aussi, être inférieure à 0,05. 86 III Résultats A) Absence de donnée Il a été difficile de joindre de nombreux propriétaires : ces derniers ayant parfois changé de coordonnées téléphoniques ou bien ne répondant pas toujours au téléphone. Dans de très rares cas, certains propriétaires n’ont pas souhaité répondre au questionnaire. Plusieurs raisons ont été évoquées : certains chiens étant décédés, par manque de temps ou pour des raisons personnelles. Pour ces différentes raisons, seuls 50 cas épileptiques sur les 120 cas initialement prévus ont pu entrer dans notre étude, ce qui représente 41,7% des chiens atteints d’épilepsie idiopathique ayant consultés au service de neurologie de VetAgroSup entre janvier 2010 et décembre 2014. Parallèlement, nous avons réduit le nombre de cas témoins à 100 au lieu de 240 initialement prévus, toujours dans le but d’avoir deux cas témoins par cas épileptique. Ainsi, pour obtenir 150 cas au total (chiens épileptiques et témoins), plus de 300 appels ont dû être effectués. B) Prévalence des troubles compulsifs Le questionnaire nous a permis de noter la présence ou l’absence de chacun des troubles compulsifs pour tous les cas inclus dans l’étude. Voici un histogramme comparant la prévalence globale, famille par famille, de troubles compulsifs entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (Figure 6). La prévalence totale de troubles compulsifs est comparée dans la partie « Total ». La prévalence globale de troubles compulsifs est de 14,9% chez les chiens épileptiques alors qu’elle n’est que de 7,6% chez les chiens témoins. 87 Figure 6 : Comparaison des prévalences de troubles compulsifs entre les deux populations Toutefois, nous constatons que 72% des témoins présentent au moins un trouble compulsif, contre 84% pour les chiens épileptiques. Un chien témoin présente en moyenne 1,8 troubles compulsifs, un chien épileptique en présente 3,6 en moyenne. Afin d’interpréter au mieux la présence de troubles compulsifs dans les deux populations, nous avons réalisé 4 classes en fonction du nombre de troubles compulsifs présents chez chaque animal : 88 - Classe 1 : Au plus 1 trouble compulsif présent - Classe 2 : Entre 2 et 4 troubles compulsifs présents - Classe 3 : Entre 5 et 9 troubles compulsifs présents - Classe 4 : Plus de 10 troubles compulsifs présents Voici la répartition du nombre de troubles compulsifs par chien chez nos deux familles Figure 7 : Figure 7 : Répartition du nombre de troubles compulsifs présents chez les chiens épileptiques et les chiens témoins Le test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) nous permet de mettre en évidence une différence significative (p-value = 0,002776) de la présence de troubles compulsifs entre nos deux populations. Ainsi, nous pouvons dire que les troubles compulsifs sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins. Les résultats, classés par famille de troubles comportementaux sont présentés ci-dessous. 1) Troubles compulsifs locomoteurs Le test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) nous permet de dire que les troubles compulsifs locomoteurs sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins (p-value = 0.01784). 89 Voici le détail de la prévalence des troubles compulsifs locomoteurs. a) Tourner en rond Tableau XV : Prévalences du trouble compulsif "tourner en rond" Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 6 5 Absence 94 45 Prévalence 6% 10% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,51) (Tableau XV). b) Chasser sa queue Tableau XVI : Prévalences du trouble compulsif "chasser sa queue" Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 9 5 Absence 91 45 Prévalence 9% 10% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=1) (Tableau XVI). c) Déambuler Tableau XVII : Prévalences du trouble compulsif de déambulation Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 3 12 Absence 97 38 Prévalence 3% 24% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant le fait de déambuler entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,00005) (Tableau XVII, Figure 8). 90 Figure 8 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif de déambulation entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XVIII : Odds ratio concernant le trouble compulsif de déambulation OR Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 2,7 38,2 10,2 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 10,2 fois plus de chance, en moyenne, de développer un trouble compulsif de déambulation par rapport à un chien non épileptique (Tableau XVIII). d) Chasser les lumières et/ou les ombres Tableau XIX : Prévalences du trouble compulsif "chasser les lumières et/ou les ombres" Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 10 5 Absence 90 45 Prévalence 10% 10% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=1) (Tableau XIX). 91 e) Hochement de tête Tableau XX : Prévalences de hochements de tête Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 0 8 Absence 100 42 Prévalence 0% 16% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant les hochements de tête entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,00004) (Tableau XX, Figure 9). Figure 9 : Comparaison de la présence ou de l’absence de hochements de tête entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XXI : Odds ratio concernant les hochements de tête OR Non estimable Intervalle de confiance OR minimum OR maximum Non estimable Non estimable L’OR est ici inestimable car aucun témoin ne présente ce trouble compulsif (Tableau XXI). Toutefois, les hochements de tête sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins. 92 2) Troubles compulsifs oraux Le test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) ne nous permet pas de dire que les troubles compulsifs oraux sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins (p-value = 0.1159). Voici le détail de la prévalence des troubles compulsifs oraux. a) Léchage de l’air et/ou du nez Tableau XXII : Prévalences de léchage de l'air et/ou du nez Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 12 5 Absence 88 45 Prévalence 12% 10% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,72) (Tableau XXII). b) Léchage des objets et/ou des gens Tableau XXIII : Prévalences de léchage des objets et/ou des gens Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 32 12 Absence 68 38 Prévalence 32% 24% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,31) (Tableau XXIII). 93 c) Polyphagie et/ou polydipsie Tableau XXIV : Prévalences de polyphagie/polydipsie Présence Absence Prévalence Chiens témoins 27 73 27% Chiens épileptiques 26 24 52% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant la présence de polyphagie et/ou polydipsie entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,0025) (Tableau XXIV, Figure 10). Figure 10 : Comparaison de la présence ou de l’absence de polyphagie/polydipsie entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XXV : Odds ratio concernant la polyphagie/polydipsie OR 2,9 Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 1,4 6 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 2,9 fois plus de chance, en moyenne, de développer une polyphagie et/ou une polydipsie par rapport à un chien non épileptique (Tableau XXV). 94 d) Pica Tableau XXVI : Prévalences du pica Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 7 9 Absence 93 41 Prévalence 7% 18% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant la présence de pica entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,04) (Tableau XXVI, Figure 11). Figure 11 : Comparaison de la présence ou de l’absence de pica entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XXVII : Odds ratio concernant le pica OR 2,9 Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 1,02 8,4 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 2,9 fois plus de probabilité, en moyenne, de présenter du pica par rapport à un chien non épileptique (Tableau XXVII). 3) Troubles compulsifs autodirigés Le test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) nous permet de dire que les troubles compulsifs autodirigés sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins (p-value = 0.003283). 95 Voici le détail de la prévalence des troubles compulsifs autodirigés. a) Se mordre, s’attaquer Tableau XXVIII : Prévalences du trouble compulsif "se mordre, s'attaquer" Présence Absence Prévalence Chiens témoins 2 98 2% Chiens épileptiques 6 44 12% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant le fait de se mordre, de s’attaquer entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,01) (Tableau XXVIII, Figure 12). Figure 12 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif « se mordre, s’attaquer » entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XXIX : Odds ratio concernant le trouble compulsif "se mordre, s'attaquer" OR 6,7 Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 1,3 34,4 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 6,7 fois plus de chance, en moyenne, de présenter ce trouble compulsif par rapport à un chien non épileptique (Tableau XXIX). 96 b) Automutilation Tableau XXX : Prévalences d'automutilation Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 1 1 Absence 99 49 Prévalence 1% 2% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=1) (Tableau XXX). c) Se frotter la face Tableau XXXI : Prévalences du trouble compulsif "se frotter la face" Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 6 14 Absence 94 36 Prévalence 6% 28% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant le fait de se frotter la face entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,0002) (Tableau XXXI, Figure 13). Figure 13 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif «se frotter la face» entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XXXII : Odds ratio concernant le trouble compulsif "se frotter la face" OR 6,1 Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 2,2 17,1 97 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 6,1 fois plus de chance, en moyenne, de se frotter la face de manière compulsive par rapport à un chien non épileptique (Tableau XXXII). d) Se lécher l’ensemble ou une partie du corps Tableau XXXIII : Prévalences du trouble compulsif "se lécher l'ensemble ou une partie du corps" Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 16 17 Absence 84 33 Prévalence 16% 34% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant le fait de se lécher l’ensemble ou une partie du corps entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,01) (Tableau XXXIII, Figure 14). Figure 14 : Comparaison de la présence ou de l’absence du trouble compulsif « se lécher l’ensemble ou une partie du corps » entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XXXIV : Odds ratio du trouble compulsif "se lécher l'ensemble ou une partie du corps" OR 2,7 98 Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 1,2 6 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 2,7 fois plus de chance, en moyenne, de se lécher de manière compulsive par rapport à un chien non épileptique (Tableau XXXIV). e) Se mordiller les griffes Tableau XXXV : Prévalences du trouble compulsif "se mordiller les griffes" Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 7 7 Absence 93 43 Prévalence 7% 14% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,16) (Tableau XXXV). f) Succion du flanc Tableau XXXVI : Prévalences du trouble compulsif de succion du flanc Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 11 8 Absence 89 42 Prévalence 11% 16% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,39) (Tableau XXXVI). g) Inspection de l’arrière train Tableau XXXVII : Prévalences du trouble compulsif « inspecter son arrière train » Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 10 9 Absence 90 41 Prévalence 10% 18% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,16) (Tableau XXXVII). 99 4) Troubles compulsifs de vocalisation Le test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) ne nous permet pas de dire que les troubles compulsifs de vocalisation sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins (p-value = 0.08589). Voici le détail de la prévalence des troubles compulsifs de vocalisation ci-dessous. a) Aboiements Tableau XXXVIII : Prévalences des aboiements Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 6 5 Absence 94 45 Prévalence 6% 10% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,38) (Tableau XXXVIII). b) Gémissements Tableau XXXIX : Prévalences des gémissements Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 1 4 Absence 99 46 Prévalence 1% 8% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant la présence de gémissements entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,02) (Tableau XXXIX, Figure 15). 100 Figure 15 : Comparaison de la présence ou de l’absence de gémissements entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XL : Odds ratio concernant les gémissements OR Intervalle de confiance OR minimum OR maximum 0,94 79,2 8,6 Un chien atteint d’épilepsie idiopathique aura 8,6 fois plus de chance, en moyenne, de gémir de manière compulsive par rapport à un chien non épileptique (Tableau XL). c) Hurlements Tableau XLI : Prévalences des hurlements Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 1 0 Absence 99 50 Prévalence 1% 0% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,48) (Tableau XLI). 5) Troubles compulsifs hallucinatoires Le test de la somme des rangs (test de Wilcoxon-Mann-Whitney) nous permet de dire que les troubles compulsifs hallucinatoires sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins (p-value = 0.02381). 101 Voici le détail de la prévalence des troubles compulsifs hallucinatoires ci-dessous. a) Claquements de mâchoire Tableau XLII : Prévalences des claquements de mâchoire Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 4 4 Absence 96 46 Prévalence 4% 8% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,3) (Tableau XLII). b) Moments d’absence, de fixité Tableau XLIII : Prévalences des moments d'absence, de fixité Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 9 10 Absence 91 40 Prévalence 9% 20% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,056) (Tableau XLIII). c) Réveils brutaux avec agression Tableau XLIV : Prévalences des réveils brutaux avec agression Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 2 2 Absence 98 48 Prévalence 2% 4% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,47) (Tableau XLIV). 102 d) Attaque d’objets inanimés Tableau XLV : Prévalences des attaques d'objets inanimés Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 0 3 Absence 100 47 Prévalence 0% 6% Une différence significative a pu être mise en évidence concernant les attaques d’objets inanimés entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,01) (Tableau XLV, Figure 16). Figure 16 : Comparaison de la présence ou de l’absence des attaques d’objets inanimés entre les chiens épileptiques et les chiens témoins Tableau XLVI : Odds ratio concernant les attaques d'objets inanimés OR Non estimable Intervalle de confiance OR minimum OR maximum Non estimable Non estimable Encore une fois, l’OR est inestimable car aucun témoin ne présente cette trouble compulsif (Tableau XLVI). Toutefois, l’attaque d’objets inanimés est significativement plus présente chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins. 103 e) Agressions imprévisibles envers l’homme Tableau XLVII : Prévalences des agressions imprévisibles envers l'homme Chiens témoins Chiens épileptiques Présence 1 2 Absence 99 48 Prévalence 1% 4% Aucune différence significative a été mise en évidence concernant ce trouble compulsif entre les chiens épileptiques et les chiens témoins (p=0,22) (Tableau XLVII). 6) Conclusions Nous avons démontré que certains troubles compulsifs apparaissent plus fréquemment chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins. D’autre part, aucun trouble compulsif n’est significativement plus présent chez les chiens témoins que chez les chiens épileptiques. Nous pouvons donc conclure que l’épilepsie favorise la présence de certains troubles du comportement. Nous avons répertorié ci-dessous les troubles compulsifs significativement plus présents chez les chiens épileptiques, à l’aide de l’odds ratio pour l’ordre d’importance : - Hochement de tête (OR infini) - Attaque d’objets inanimés (OR infini) - Déambuler (10,2) - Gémissements (8,6) - Se mordre, s’attaquer (6,7) - Se frotter la face (6,1) - Polyphagie/polydipsie (2,9) - Pica (2,9) - Se lécher l’ensemble ou une partie du corps (2,7) Les hochements de tête et les attaques d’objets inanimés pourraient être une forme singulière d’épilepsie. En effet, aucun des 100 chiens témoins n’a développé un de ces deux 104 troubles compulsifs alors qu’ils sont particulièrement présents chez les chiens épileptiques (16% et 6% respectivement). Cependant cela peut être dû à des fluctuations d’échantillonnages et aucune conclusion hâtive ne peut être tirée. C) Etude d’autres paramètres pouvant influencer la présence de troubles compulsifs On se demande ici si la présence de troubles compulsifs peut être favorisée par certains facteurs, autre que l’épilepsie. Grâce à notre recueil de données, on peut étudier l’influence de l’âge et de la stérilisation. Ces facteurs seront testés sur les chiens témoins uniquement pour ne pas que l’épilepsie interfère avec les résultats. Chez les chiens épileptiques, il sera alors intéressant de tester l’influence de la résistance au traitement et du type de crises, comme cela a été fait en médecine humaine. 1) Chez les chiens témoins a) Influence de l’âge Trois troubles compulsifs sont significativement plus ou moins présents en fonction de l’âge : - La déambulation diminue chaque année de 87% (OR=0,13) par rapport à l’année précédente (p=0,0465). - Le fait de « chasser les lumières et/ou les ombres » augmente chaque année de 24% (OR=1,24) par rapport à l’année précédente (p=0,028). - Le léchage des objets et/ou des gens diminue chaque année de 19% (OR=0,81) par rapport à l’année précédente (p=0,0179). Seule la présence du trouble compulsif « chasser les lumières et/ou les ombres » peut être augmentée par l’âge. Les autres diminuent ou ne sont pas influencés par l’âge. 105 b) Influence du sexe Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence entre les mâles et les femelles concernant la présence de troubles compulsifs. c) Influence de la stérilisation Un seul trouble compulsif est significativement moins présent chez les chiens stérilisés : les moments de fixité. Tableau XLVIII : Prévalences des moments de fixité en fonction de la stérilisation Stérilisés Non stérilisés Présence 2 7 Absence 50 41 Prévalence 4% 15% Le trouble comportemental est présent chez 15% des chiens non stérilisés, alors que sa prévalence chez les chiens stérilisés est seulement de 4% (p=0,0424) (Tableau XLVIII, Figure 17). La stérilisation permet de diminuer les moments de fixité à 89% (OR=0,11). Figure 17 : Comparaison de la présence ou de l’absence des moments de fixité en fonction de la stérilisation Dans touts les cas, la stérilisation ne favorise pas l’apparition de troubles compulsifs : soit elle en diminue la prévalence (moment de fixité), soit elle n’a aucune influence significative. 106 2) Chez les chiens épileptiques a) Influence de la résistance au traitement antiépileptique La présence d’un seul trouble compulsif est significativement augmentée par la résistance au traitement antiépileptique : le léchage de l’air et/ou du nez. Tableau XLIX : Prévalences de léchage de l’air et/ou du nez en fonction de la résistance au traitement antiépileptique Réfractaires Non réfractaires Présence 4 1 Absence 12 33 Prévalence 25% 3% Ce trouble compulsif est présent chez 25% des chiens réfractaires au traitement, alors que sa prévalence n’est que de 3% chez les chiens non réfractaires (p=0,03) (Tableau XLIX, Figure 18). Un chien réfractaire au traitement aura 10,4 fois plus de chance de présenter du léchage de l’air et/ou du nez par rapport à un chien répondant au traitement (OR=10,4). Figure 18 : Comparaison de la présence ou de l’absence du léchage de l’air et/ou du nez en fonction de la résistance au traitement antiépileptique La résistance au traitement favorise donc la présence du léchage de l’air et/ou du nez, cependant elle n’influe pas sur le développement des autres troubles étudiés. 107 b) Influence de la présence de crises groupées Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence entre les chiens présentant des crises groupées et ceux présentant uniquement des crises isolées. c) Influence de la présence de crises généralisées Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence entre les chiens présentant des crises généralisées et ceux présentant des crises focales. d) Influence de l’âge à la première crise Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence en fonction de l’âge à la première crise d’épilepsie. e) Influence de la durée de l’épilepsie Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence en fonction de la durée de l’épilepsie. 3) Conclusions Nous venons de démontrer que plusieurs facteurs peuvent influencer le développement de troubles compulsifs. Chez un chien sain, le fait de « chasser les lumières et/ou les ombres » augmente de 24% chaque année, cependant la stérilisation n’influe pas sur le développement des autres troubles compulsifs étudiés. Chez les chiens épileptiques, la résistance au traitement favorise la présence du léchage de l’air et/ou du nez, et les crises groupées favorisent la présence de pica. Cependant la présence de crises généralisées par rapport aux crises focales n’a pas d’influence sur le développement des autres troubles compulsifs. 108 IV Discussion A) Les troubles compulsifs 1) Une prévalence non négligeable dans la population générale Dans notre étude, la prévalence globale des troubles compulsifs étudiés chez les chiens non épileptiques est de 7,6%. Nous parlons ici d’une prévalence globale des 24 comportements étudiés. 72% de cette population témoin présente au moins un trouble compulsif. En effet, seul 28% de la population ne présente aucun trouble compulsif. Cette pathologie semble alors être relativement commune dans la population témoin. Parmi les troubles compulsifs les plus représentés, on retrouve 32% des chiens témoins qui présentent du léchage des gens et/ou des objets, 27% présentent de la polyphagie et/ou polyuro-polydipsie et 16% se lèchent de manière compulsive. A-t-on surestimé les troubles compulsifs dans la population témoin en demandant spécifiquement chacun des troubles étudiés ? Peut-être que les troubles compulsifs sont relativement fréquent dans cette espèce. 2) Epidémiologie des troubles compulsifs Notre avons précédemment étudié l’influence de l’âge, du sexe et de la stérilisation sur la présence de troubles compulsifs dans notre population témoin. L’âge semble diminuer les comportements de déambulation (de 87% par année) et de léchage compulsif (de 19% par année). Il semble augmenter le fait de chasser les lumières et les ombres (de 24% par année). En effet, un jeune chien aura plus tendance à avoir un comportement d’exploration (à déambuler et lécher ce qu’il trouve) par rapport à un chien plus âgé. Cela peut nous réconforter dans la validité de notre étude. Toutefois, les autres résultats restent difficilement interprétables Le sexe n’a aucune influence sur la présence de troubles compulsifs dans notre étude. La stérilisation a un impact sur un seul trouble compulsif. Elle diminue les moments de fixité de 89% par année. Là encore, l’interprétation de ce résultat reste difficile. 109 B) Association entre troubles compulsifs et épilepsie 1) Une comorbidité établie Cette étude est la première à mettre en évidence une corrélation entre la présence de troubles compulsifs et l’épilepsie idiopathique du chien. La prévalence globale des troubles compulsifs étudiés est de 14,9% chez les chiens épileptiques, contre 7,6% chez les chiens témoins. A noter que nous parlons de « prévalence globale » et non de simple « prévalence » car elle représente le pourcentage de troubles compulsifs présents chez nos chiens épileptiques par rapport aux nombre total de troubles compulsifs possiblement présents. C’est à dire que, pour chacun de nos 50 chiens épileptiques, 24 troubles compulsifs peuvent être présents, soit 1200 au total. On en compte 179, ce qui nous donne une prévalence de 14,9%. 2) Des troubles compulsifs significativement plus présents chez les chiens épileptiques 9 troubles compulsifs sur 24 ressortent significativement plus présents chez les chiens épileptiques par rapport aux chiens témoins. 52% des chiens épileptiques présentent de la polyphagie et/ou polyuro-polydipsie, 34% se lèchent l’ensemble ou une partie du corps, 28% se frottent la face, 24% déambulent sans raison, 18% expriment du pica, 16% présentent des hochements de tête, 12% se mordent et s’attaquent, 8% émettent des gémissements et 6% attaquent des objets inanimés. Les chiens épileptiques ont 2,9 à 10,2 fois plus de chance de développer ces troubles comportementaux par rapport à un chien sain. La polyphagie/polyuro-polydipsie et le pica peuvent être imputés au traitement car ce sont les effets secondaires courants du traitement antiépileptique. Toutefois, ces résultats nous confortent dans la validité de notre étude : il est normal qu’une population épileptique sous traitement présente davantage ce genre de comportement par rapport à une population témoin. Les gémissements et les déambulations pourraient être imputés à une psychose post-ictale ou péri-ictale. En effet, il n’est pas rare que les phases post-ictale durent quelques jours. Le caractère rétrospectif de notre étude ne nous a pas permis de rentrer en détail sur ces moments là. 110 Toutefois, certains comportements ne peuvent absolument pas être imputés au traitement ou à une psychose post-ictale, comme le léchage, le frottement de la face, les hochements de tête, l’automutilation ou l’attaque d’objets inanimés. Deux troubles compulsifs sont retrouvés uniquement chez les chiens épileptiques. En effet, le fait d’attaquer des objets inanimés est présent chez 3 chiens épileptiques sur 50 (soit 6%), contre 0 chiens témoins sur 100. De même, les hochements de têtes sont présents chez 8 chiens épileptiques (soit 16%), contre 0 témoins. Le classement de ce type de comportement dans les « troubles compulsifs » n’est, à l’heure actuelle, pas consensuel. Certains auteurs classent le « head bobbing » parmi les dyskinésies paroxystiques, d’autres parmi les crises d’épilepsie focales. Certains auteurs classent clairement le fait d’attaquer des objets inanimés dans les crises d’épilepsie focales. Le fait qu’on ne les retrouve que dans notre population épileptique plaide plutôt en faveur d’une forme d’épilepsie focale, néanmoins un biais d’échantillonnage pouvant entraîner de tels résultats, aucune conclusion de ce genre ne peut être tirée. L’utilisation de l’EEG nous permettrait de faire la distinction entre un trouble compulsif et une crise d’épilepsie focale. 3) Influence du type d’épilepsie Nous n’avons pas pu mettre en évidence de corrélation entre la gravité de l’épilepsie et la présence de TOC, comme cela a été décrit chez l’homme (Kaplan, 2011). De même, nous n’avons pas pu mettre en évidence de corrélation entre la présence de TOC et l’âge d’apparition de l’épilepsie ou le type de crises. On retrouve encore une fois des résultats similaires à ceux décrits chez l’homme (Monaco et al., 2005). Concernant la résistance au traitement : nous n’avons pas pu mettre en évidence d’effet majeur, contrairement à ce qui est décrit chez l’homme (Isaacs et al., 2004). Nous avons simplement pu mettre en évidence une influence sur un seul trouble compulsif, le léchage de l’air et/ou du nez (25% des chiens résistant au traitement présentent ce trouble compulsif contre 3% des chiens non réfractaires). Cette différence ne nous permet pas de conclure car on pourrait éventuellement l’attribuer à un effet secondaire des traitements antiépileptiques. En effet, les chiens classés comme résistant au traitement ont au moins 3 molécules différentes dans leur traitement, or ces molécules assèchent la bouche, diminuent la quantité de salive et peuvent entrainer ces comportements de léchage. 111 Nous n’avons pas pu mettre en évidence une influence du type de crises, focales ou généralisées. Néanmoins, comme cela a été décrit chez l’homme, l’épilepsie du lobe temporal est la plus couramment associée aux TOC. C’est une épilepsie chronique focale, ce qui diffère des épilepsies inclues dans notre étude. En effet, les épilepsies chez le chien ont une forte tendance à se généraliser. C’est pourquoi, 88% de nos chiens présentent une épilepsie généralisée (ou focale secondairement généralisée). Contrairement à l’homme, il est très difficile en médecine vétérinaire de différencier correctement les crises focales des crises généralisées. En effet, le diagnostic se base principalement sur les dires du propriétaire qui ne sait pas souvent faire la différence entre une crise focale secondairement généralisée et une crise généralisée, voire même entre une crise focale et une crise généralisée tout simplement. Encore une fois, l’utilisation de l’EEG serait pertinente pour mieux différencier les types de crises rencontrés. 4) Un parallèle avec l’épilepsie humaine possible ? Il est difficile de comparer les troubles compulsifs du chien à ceux de l’homme, certains comportements étant spécifiques au chien (comme le fait de tourner en rond ou d’attraper sa queue). Les humains atteints d’épilepsie (TLE ou IGE) ont développé des obsessions de contamination, de lavage, de symétrie, d’exactitude et d’organisation. Ces TOC diffèrent de ceux retrouvés chez les chiens atteints d’épilepsie idiopathique (déambulation, léchage, frottement de la face, pica, hochements de tête, automutilation, gémissements, attaque d’objets inanimés). Un trouble compulsif retrouvé peut évoquer les obsessions de lavage chez l’homme à savoir se lécher et se frotter la face. C) Limites de l’étude 1) Sélection de la population épileptique Il aurait été sûrement plus judicieux de réaliser l’étude sur une population plus homogène, en se basant sur une seule race par exemple. En effet, comme on a pu le voir en toute première partie, l’épilepsie idiopathique a une forte composante génétique et chaque race a ses 112 particularités. Dans notre étude, parmi les 50 cas épileptiques on compte 24 races différentes. D’autant plus que certains troubles compulsifs sont plus fréquents chez certaines races, comme le « tail chasing » (chasser sa queue) chez le Bull Terrier, le « fly snapping » (attraper des mouches imaginaires) chez le Cavalier King Charles ou le « flank sucking » (succion du flanc) chez le Doberman. De plus, c’est aussi ce qui diffère de chez l’homme, chez qui la population est plus homogène, ce qui limite les biais quant aux tests statistiques réalisés. Toutefois, même si l’effet race n’est pas négligeable dans l’étude de l’épilepsie idiopathique et des troubles compulsifs, le fait d’avoir sélectionné une population témoin avec des chiens de même race nous permet de moduler ce biais et d’avoir une étude valide. Un second choix pourrait être remis en cause : a-t-il été judicieux d’inclure des chiens atteints d’épilepsie généralisée ? Il est vrai qu’en comparaison avec la médecine humaine, l’épilepsie du lobe temporale apparaît souvent dans les études s’intéressant au développement de troubles compulsifs. Même si notre étude ne montre aucune différence significative entre les crises focales et généralisées, cela peut simplement provenir du peu de cas atteints d’épilepsie focale (6 cas sur 50). De même que parmi nos 44 épilepsies généralisées, certaines sont focales secondairement généralisées, ce qui favorise une fois de plus une population hétérogène. La question se pose alors : aurions-nous plus de résultats significatifs en choisissant une population de chiens atteint d’épilepsie focale ? Tout cela en distinguant bien les épilepsies focales des dyskinésies paroxystiques. Il est évident que les traitements ont des effets secondaires sur les troubles comportementaux, ils peuvent masquer certains troubles compulsifs et en diminuer la prévalence ou faire apparaître d’autres troubles. Il serait intéressant d’avoir des données sur des chiens non traités. 2) Choix des chiens témoins Les chiens témoins devaient avoir le même âge à 6 mois près que les épileptiques. Cependant, pour certains cas, il a été impossible de trouver un chien témoin répondant à ces critères. C’est pourquoi, l’écart d’âge a été élargi, le maximum étant de 8 mois pour certains chiens. Les témoins devaient appartenir à la même race que les épileptiques. Cependant, encore une fois, il a été impossible de répondre à tous les critères d’inclusions, certaines races étant 113 peu courantes, ou certains épileptiques étant croisés. Pour les chiens dont la race était introuvable parmi les témoins, une race apparentée à été sélectionnée ; par exemple un Irish Terrier a trouvé comme témoins un Scottish Terrier et un Fox Terrier. Pour les races croisées, un chien de pure race a été sélectionné parmi les témoins ; par exemple un croisé Labrador a trouvé comme témoin un Labrador. 3) Choix de la période d’étude La période d’étude concernait les chiens ayant consultés au service de Neurologie de VetAgroSup entre janvier 2010 et décembre 2014. Cependant, en raison du recueil de données important en amont, les propriétaires ont été contacté début 2016. Ce délai aurait pu être préjudiciable pour un certain nombre de propriétaires, dont le chien était décédé entre temps (certains ayant consultés 6 ans auparavant). Toutefois, la très grande majorité des propriétaires se souvenait précisément des comportements de leur chien et était capable de répondre correctement au questionnaire. 4) Choix de la méthode d’investigation Nous avons fait le choix d’utiliser un questionnaire répertoriant l’ensemble des troubles compulsifs chez le chien. Ce questionnaire a été soumis oralement, par le même investigateur et a toujours été abordé de la même manière, en insistant sur le caractère fréquent, répétitif, et invariant des troubles compulsifs. Néanmoins, il ne reflète pas exactement ce qui est fait dans la mise en évidence de troubles compulsifs en médecine humaine. En humaine, des échelles d’évaluations sont utilisées pour qualifier et quantifier la présence de TOC. Ces échelles définissent un score. Prenons ici l’exemple de l’échelle YBOCS, la plus couramment utilisée dans la littérature montrant une corrélation entre l’épilepsie du lobe temporal et les TOC de l’homme. Cette échelle mesure la gravité et les types de symptômes décrits chez les patients atteints de TOC. Les patients, avec l’évaluateur, déterminent la présence ou non d’obsessions, de rituels et de compulsions (agressives, de contamination, sexuelles, de collection, religieuses, de symétrie, diverses, somatiques, de lavage, de vérification, de répétition, de comptage, de rangement). Il s’agit ensuite de semiquantifier la durée, la gêne, l’angoisse, la résistance et le degré de contrôle face aux pensées 114 obsédantes, aux rituels et aux compulsions. Un score est alors établi et permet de classer les symptômes en sub-cliniques ou cliniques avec une échelle de gravité. Cet outil est difficilement réalisable en médecine vétérinaire et, même si les troubles compulsifs étudiés ont bien été décrits, cela ne vaut pas un score tel que l’échelle de Y-BOCS. C’est pourquoi nous avons choisi de réaliser 4 classes en fonction du nombre de troubles compulsifs présents chez chacun de nos cas. La fréquence, l’intensité et la gravité n’ont pas été évaluée. Toutefois, un outil de la sorte reste à développer en médecine vétérinaire, pour permettre des résultats objectivables. 5) Utilisation de tests statistiques Il aurait été préférable de réaliser cette étude avec un nombre plus important de cas. Ici, nous avons 150 cas au total, cependant au moins 300 appels ont dû être effectués pour obtenir 150 réponses. Cela requiert beaucoup de temps, d’investissement et de patience. Les résultats statistiques sont parfois non significatifs fort probablement parce que le nombre de cas est insuffisant pour tirer des conclusions. Dans tous les cas, cela ne fausse pas nos résultats, au contraire, les conclusions tirées sont plus exigeantes et restrictives. Avoir plus de cas aurait sûrement permis d’avoir plus de résultats significatifs. Toutefois, le fait que l’investigateur soit identique pour tous les appels et que le questionnement ait toujours été réalisé de la même manière, en insistant sur le caractère compulsif, répétitif et sans but, permet de limiter les biais. D) Perspectives La question qui se pose maintenant est la suivante : sommes-nous face à un syndrome troubles compulsifs – épilepsie comme chez l’homme ou est-ce que l’anatomie et la physiopathologie de l’épilepsie peuvent expliquer une telle corrélation ? Notre étude comporte certaines critiques possibles, cependant c’est la première étude qui atteste de l’association entre l’épilepsie et les troubles compulsifs chez le chien. Elle ouvre la voie à d’autres études. En particulier, nous projetons d’avoir des études prospectives pour 115 s’affranchir du biais des traitements. De nombreuses études sont en cours pour permettre les caractérisations phénotypiques des épilepsies, en associant une partie « troubles compulsifs » au questionnaire s’intéressant à l’épilepsie, pour avoir des données au sein d’une race. D’autre part, il faudrait développer un système de score concernant les troubles compulsifs, pour nous permettre d’avoir des données plus fiables et plus objectivables. 116 CONCLUSION En médecine humaine, l’association entre troubles compulsifs et épilepsie, en particulier l’épilepsie du lobe temporal, a été largement démontrée. La médecine vétérinaire ne s’est intéressée que récemment aux comorbidités comportementales associées au développement de l’épilepsie. Une première étude semble montrer que, comme chez l’homme, on retrouve des troubles comportementaux associés à l’épilepsie. Nous avons donc voulu savoir si, chez le chien aussi, il existait un lien entre l’épilepsie idiopathique et les troubles compulsifs. Nous pouvons constater une prévalence de troubles compulsifs relativement élevée dans notre population témoin ce qui en soi est déjà intéressant et n’a jamais été rapporté. L’âge semble avoir un impact sur le développement de certains troubles (la déambulation, le fait de chasser les lumières et/ou les ombres et le fait de lécher des objets et/ou des gens). Le sexe n’a aucune influence. La stérilisation non plus, excepté sur les phases de fixité. Nous avons pu démontrer une corrélation entre l’épilepsie idiopathique du chien et la présence de troubles compulsifs. Un chien épileptique présente en moyenne 3,6 troubles compulsifs sur les 24 étudiés alors qu’un chien témoin en présente en moyenne que 1,8. 9 troubles compulsifs ressortent significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les témoins. 52% des chiens épileptiques présentent de la polyphagie et/ou polyuropolydipsie, 34% se lèchent l’ensemble ou une partie du corps, 28% se frottent la face, 24% déambulent sans raison, 18% expriment du pica, 16% présentent des hochements de tête, 12% se mordent et s’attaquent, 8% émettent des gémissements et 6% attaquent des objets inanimés. Les chiens épileptiques ont 2,9 à 10,2 fois plus de chance de développer ces troubles comportementaux par rapport à un chien sain. Certains de ces troubles compulsifs semblent clairement imputables aux effets secondaires des traitements anti épileptiques ou à l’état confusionnel induit par les crises comme la polyphagie, les déambulations ou les gémissements. Certains ne sont rencontrés que chez les épileptiques comme les hochements de tête et les attaques d’objets inanimés et pourraient évoquer une forme d’épilepsie focale. D’autres comme le léchage du corps ou le frottement de la face peuvent être rapprochés du lavage de main compulsif retrouvé en médecine humaine et ne peuvent pas refléter une crise focale ou un effet secondaire de traitement. Enfin, contrairement à ce que l’on trouve en médecine humaine, la résistance au traitement antiépileptique n’a quasiment pas d’impact sur le développement de troubles compulsifs. Le type de crises n’a aucune influence non plus. 117 Cette première étude confirme notre intérêt pour le « modèle » canin car elle pointe du doigt une nouvelle similarité entre épilepsie humaine et canine en terme de comorbidité comportementale. Une origine anatomique et physiopathologique commune est fortement suspectée et pourrait expliquer la corrélation entre l’épilepsie idiopathique et les troubles du comportement. Afin de confirmer ces résultats et de s’affranchir de certains biais, il serait intéressant d’effectuer une nouvelle étude prospective sur une population plus homogène et plus importante. 118 BIBLIOGRAPHIE ABRAMOWITZ J.S., TAYLOR S. et MCKAY D. Obsessive-compulsive disorder. Lancet (London, England). 2009. Vol. 374, n° 9688, pp. 491 499. BERENDT M. Epilepsy in the dog and cat: Clinical presentation, diagnosis, and therapy. The European Journal of Companion Animal Practice. 2008. Vol. 18, n° 1, pp. 37–45. BERENDT M., FARQUHAR R.G., MANDIGERS P.J.J., PAKOZDY A., BHATTI S.F.M., DE RISIO L. et al. International veterinary epilepsy task force consensus report on epilepsy definition, classification and terminology in companion animals. BMC Veterinary Research. 2015. Vol. 11, pp. 182. BERENDT M., GREDAL H., ERSBØLL A.K. et ALVING J. Premature death, risk factors, and life patterns in dogs with epilepsy. 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Vol. 8, n° 1, pp. 21 23. 128 ANNEXES Annexe 1 : Présentation des 50 chiens épileptiques inclus dans l'étude N° SEXE STERILISE AGE (ans) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 F M F M F M F F F F F F M M M F F M F M F M M M M F F M M M Non Non Non Non Oui Non Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Non Oui Non Oui Non Oui Non Non Non Oui Non Non Oui Non Non Oui Oui 9 8 7 2 5 4 9 3 3 7 2 5 4 8 9 3 4 7 6 5 4 6 8 3 8 4 3 7 4 17 RACE Bordercollie CroiséTeckel Bergerallemand Bouledoguefrançais Caniche Bouledogueanglais Goldenretriever Goldenretriever Malinois Bordercollie Flatcoatedretriever Bouledoguefrançais Canecorso Goldenretriever CroiséGronendael Malinois Bordercollie Malamute CroiséLabrador Bordercollie Irishterrier Bergerdespyrénées Labrador Husky CroiséLabrador Bouledoguefrançais Bordercollie Beagle Labrador CroiséFox TYPEDECRISE Généralisée Focale Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Focale Focale Généralisée Focale Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Focale Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Groupée Isolée Groupée Groupée Isolée Isolée Groupée Isolée Isolée Isolée Groupée Isolée Groupée Groupée Groupée Isolée Isolée Isolée Groupée Groupée Groupée Isolée Groupée Isolée Groupée Groupée Groupée Groupée Isolée Isolée REFRACTAIRE Oui Non Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui Non Non Non Non Non Oui Non Non Non Non Non Non Non Oui Non Oui Oui Oui Oui Non Non 129 N° SEXE STERILISE AGE (ans) 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 130 M M F F F F M F M M M M M M F F M M M M Oui Oui Non Non Non Oui Non Oui Oui Non Oui Non Non Oui Oui Oui Oui Non Non Oui 9 8 5 4 6 5 4 4 10 7 8 12 13 10 6 11 5 2 3 5 RACE Bergerallemand Beauceron Bergerallemand Cocker Bullterrier Dogueallemand Yorkshireterrier Canecorso Dogueargentin Labrador Bergerallemand Settergordon Labrador Bordercollie Bouledoguefrançais Caniche Bouledoguefrançais ShibaInu CavalierKingCharles Husky TYPEDECRISE Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Focale Généralisée Généralisée Focale Généralisée Généralisée Focale Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Généralisée Focale Généralisée Groupée Groupée Isolée Isolée Groupée Isolée Isolée Isolée Groupée Groupée Groupée Isolée Groupée Isolée Groupée Groupée Isolée Groupée Groupée Groupée REFRACTAIRE Oui Oui Non Non Non Non Non Non Oui Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Annexe 2 : Présentation des 100 chiens témoins inclus dans l'étude N° SEXE STERILISE AGE 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 M M F F F M F M M F F F M M M M F M F M F F F F M F M F M F F M M M M Oui Oui Non Oui Non Non Oui Non Non Oui Non Non Non Non Non Oui Oui Non Oui Non Oui Oui Oui Oui Non Oui Non Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui 9 9 8 8 7 7 2 2 5 5 3 3 9 9 3 4 4 3 7 7 1 2 6 6 4 5 8 8 9 9 2 2 3 3 7 RACE Bordercollie Bordercollie Teckel Teckel Bergerallemand Bergerallemand Bouledoguefrançais Bouledoguefrançais Caniche Caniche Bouledogueanglais Bouledogueanglais Goldenretriever Goldenretriever Goldenretriever GoldenRetriever CroiséMalinois Malinois Bordercollie Bordercollie Labrador Labrador Bouledoguefrançais Bouledoguefrançais Canecorso Canecorso Goldenretriever Goldenretriever Groenendael Groenendael Malinois Malinois Bordercollie Bordercollie Malamute 131 N° SEXE STERILISE AGE 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 132 M F M F F F M M M M F M M F M M F M F M F F F M M F M M M F F M F F F F F F F F Non Oui Non Oui Non Non Non Non Oui Non Oui Non Non Oui Non Non Non Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Non Oui Non Oui Non Oui Oui Non Oui Oui Non Oui Oui Non Non Oui 7 6 6 5 5 5 5 5 5 9 8 4 3 8 8 4 4 4 4 7 6 4 4 18 18 8 9 8 8 5 5 3 4 6 6 5 5 4 5 5 RACE Malamute Labrador Labrador CroiséBorder Bordercollie Scottishterrier Foxterrier BergerdesPyrénées BergerdesPyrénées Labrador Labrador Husky Husky Labrador Labrador Bouledoguefrançais Bouledoguefrançais Bordercollie Bordercollie Beagle Beagle Labrador Labrador Foxterrier Foxterrier Bergerallemand Bergerallemand Beauceron Beauceron Bergerallemand Bergerallemand Cocker Cocker Bullterrier Bullterrier Dogueallemand Dogueallemand Yorkshireterrier Yorkshireterrier Bouledoguefrançais N° SEXE STERILISE AGE 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100 M M M F F M M F M M F M M M F F F M F M F M M F F Non Oui Non Non Oui Non Non Oui Oui Non Oui Non Oui Non Non Non Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Oui 5 3 2 4 3 5 5 10 10 7 6 8 8 12 11 12 12 10 10 6 6 11 11 4 5 RACE Bouledoguefrançais Shiba-inu Shiba-inu CavalierKingCharles CavalierKingCharles Canecorso Canecorso Dogueargentin Dogueargentin Labrador Labrador Bergerallemand Bergerallemand SetterGordon SetterGordon Labrador Labrador Bordercollie Bordercollie Bouledoguefrançais Bouledoguefrançais Caniche Caniche Husky Husky 133 Annexe 3 : Réponses au questionnaire concernant les 50 chiens épileptiques TC = Trouble compulsif, A = Absence, P = Présence 134 TC = Trouble compulsif, A = Absence, P = Présence 135 Annexe 4 : Réponses au questionnaire concernant les 100 chiens témoins TC = Trouble compulsif, A = Absence, P = Présence 136 TC = Trouble compulsif, A = Absence, P = Présence 137 TC = Trouble compulsif, A = Absence, P = Présence 138 139 GARRONE Manon TROUBLES COMPULSIFS ASSOCIES A L’EPILEPSIE IDIOPATHIQUE CHEZ LE CHIEN : ETUDE RETROSPECTIVE A PARTIR DE 50 CAS DIAGNOSTIQUES AU SERVICE DE NEUROLOGIE DE VETAGROSUP Thèse d’Etat de Doctorat Vétérinaire : Lyon, 28 octobre 2016 RESUME : De nombreux travaux menés chez l’Homme ont permis de mettre en évidence l’existence d’une relation entre les troubles obsessionnels compulsifs et l’épilepsie, notamment l’épilepsie du lobe temporal. Dans l’espèce canine, des comorbidités comportementales associées au développement de l’épilepsie ont récemment été démontrées, bien que la pathogénie ne soit pas clairement élucidée. Notre étude rétrospective a eu pour objectif de recenser les troubles compulsifs rencontrés lors d’épilepsie idiopathique chez le chien, et de montrer statistiquement cette relation. Elle révèle, pour la première fois en médecine vétérinaire, que les troubles compulsifs sont significativement plus présents chez les chiens épileptiques que chez les chiens témoins, avec une prévalence globale de 14,9% des 24 troubles compulsifs étudiés chez les épileptiques (7,6% chez les témoins). 9 troubles compulsifs sont significativement plus présents chez les épileptiques (52% de polyphagie et/ou polyuro-polydipsie, 34% de léchage du corps, 28% de frottement de la face, 24% de déambulation, 18% de pica, 16% de hochement de tête, 12% d’automutilation, 8% de gémissement et 6% d’attaque d’objets inanimés). Le sexe, l’âge et la stérilisation ont peu d’influence sur la présence de troubles compulsifs. Nous n’avons pas pu mettre en évidence de corrélation avec la résistance au traitement, contrairement à ce l’on retrouve en médecine humaine. Certains troubles peuvent être imputables aux effets secondaires du traitement anti épileptique et aux états confusionnels des crises, d’autres ne peuvent pas l’être. MOTS CLES : - Chien - Epilepsie - Troubles du comportement - Comportement compulsif JURY : Président : 1er Assesseur : 2ème Assesseur : Monsieur le Professeur Sylvain RHEIMS Madame le Docteur Catherine ESCRIOU Monsieur le Docteur Jean-Jacques THIEBAULT DATE DE SOUTENANCE : 28 octobre 2016 ADRESSE DE L’AUTEUR : 4, Rue Pierre Brossolette 63800 Cournon d’Auvergne 140