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février 1961, il déclare : "Je suis en effet persuadé que le plus grand apport de l'Islam est la libération de 
l'esprit humain. C'est à cette libération que les premiers Arabes musulmans doivent leur immense bond 
en avant".  
Abordant dans le même discours les croyances populaires qu'il juge contraires à l'Islam, il dit : "Mais 
lorsque s'élève la conscience humaine, ce qui fut le cas dans les siècles d'or de la civilisation 
musulmane, les grands maîtres de la doctrine tels que Ghazali et d'autres nous enseignent que cette 
croyance est d'un niveau inférieur à celui de la foi qui n'attend des œuvres accomplies aucune 
récompense terrestre ou céleste, mais recherche simplement la paix de la conscience". Loin de 
s'opposer à l'Islam ou vouloir rompre avec ses fondements, Bourguiba y intègre sa pensée et son action 
; bien plus, il se situe dans la lignée des grands réformateurs et de la tradition de l'Islam libéral, allant 
jusqu'à déclarer : "En tant que Chef de l'Etat, responsable des progrès de la nation dans ce monde, au 
même titre que le Prophète pour les musulmans de l'époque, il est de mon devoir de penser à tout ce qui 
est de nature à la consolider, à la relever, et à lui insuffler un dynamisme créateur". Propos jugés 
prétentieux et provocateurs, comme le fait d'avoir publiquement bu de l'eau en plein Ramadan, mais 
c'est aussi cela Bourguiba. 
 
C'est à partir de cette base théorique, qu'il jugeait conforme à l'Islam, qu'il a situé toutes les réformes 
qu'il a entreprises, se référant au devoir de réflexion critique : l'Ijtihad, qu'il n'a cessé de répéter dans ses 
discours, le plaçant en tête des missions dévolues par la religion à l'homme. Nous sommes bien loin 
d'Ataturk et d'un laïcisme primaire auquel certains veulent réduire Bourguiba. Par ses réformes et ses 
discours, il a contribué à dépoussiérer et à moderniser l'Islam. 
Ces considérations théoriques avaient pour Bourguiba une signification et une dimension politiques. 
Conscient du rôle et du poids de l'Islam dans un pays comme la Tunisie, il a toujours considéré qu'il 
était, de par sa responsabilité à la tête de l'Etat, tenu d'assumer la fonction d'Imam. Par là, il voulait ne 
pas demeurer dépendant de l'institution religieuse et disposer d'une grande marge de liberté et de 
manœuvre. Il était aussi convaincu des risques que représentait l'utilisation de la religion par ceux qu'il 
appelait les fanatiques et, à ce propos, la lettre qu'il avait adressée du Caire le 25 mai 1951 à Salah Ben 
Youssef et que nous reproduisons est significative de la pensée de Bourguiba et réellement 
prémonitoire. 
Hatem Ben Aziza
Dans une lettre à Ben Youssef  
Bourguiba parle de l'Islam, de la Zitouna et des extrémistes… 
Nous publions le texte d'une lettre adressée par Bourguiba du Caire, le 25 mai 1951, à Salah 
Ben Youssef. Il y parle de l'Islam, de la Zitouna et des extrémistes. Certains passages sont 
prémonitoires. 
Je reprends ma conversation. Je n'ai pas voulu poster cette lettre hier. J'ai préféré attendre le départ 
d'un ami pour la lui confier. 
Je me suis longuement étendu sur le problème zitounien parce que j'estime qu'il dépasse notre vieux 
différend avec les " archéos ". C'est un problème qui est en train d'évoluer vers une direction 
dangereuse, un problème dont les éléments ne sont déjà plus ceux d'avril 1950, un problème qui se 
pose, au surplus, avec plus d'acuité dans tous les pays musulmans arrivés à l'indépendance. Il ne 
faut pas s'y tromper : à côté et au-dessus du différend initial sur les réformes de l'enseignement 
zitounien, il y a - chez les chefs, chez les pontifes - la conscience nette du danger que constituerait 
pour eux l'accession au pouvoir des leaders du Néo-Destour, de formation occidentale et de 
mentalité progressiste. Je vous raconterai toutes les difficultés qu'éprouvent les gouvernements des 
pays musulmans que j'ai visités, à résister à l'opposition insidieuse des exaltés de l'Islam, à mentalité 
zitounienne, qui sévissent dans ces pays et résistent à cette adaptation de l'Islam aux nécessités de 
la vie internationale moderne (Ikhwan el-muslimin au Moyen-Orient, Djamaâ el-Islam, au Pakistan, 
opposé à la Ligue musulmane présidée par Liakat Ali Khan, Dar-ul-Islam, tenant encore le maquis en 
Indonésie, Fidayn el-Islam en Iran etc…) 
J'ai assez longuement développé cette question dans mon interview à la " République Algérienne "