Fiche projet
Station Alpine Joseph Fourier
1. Titre du projet
IMPACT DE LA PERCOLATION DE L’EAU SUR LA STRUCTURE DES POPULATIONS
DE LA BACTERIE PHYTOPATHOGENE PSEUDOMONAS SYRINGAE SUIVANT LES
PRATIQUES AGRICOLES ET LE TYPE DE SOL.
2. Mots clés
Pseudomonas syringae, Mésocosmes, Structure des populations, Neige, Eau, Sol.
3. Durée et déroulement du projet
2010-2011
4. Source(s) de financement
INRA
5. Responsable(s) du projet
Cindy Morris
Caroline Monteil
6. Principaux acteurs
Caroline Monteil (Attachée Scientifique Contractuelle, INRA Avignon)
Cindy Morris (DR, INRA Avignon)
François Lafolie (CR1, INRA Avignon)
Berge Odile (CR1, CNRS)
Glaux Catherine (TH, INRA Avignon)
7. Collaborations
Université Joseph Fourier Jean Christophe Clément (LECA) et Jonathan Lochet (Doctorant, LECA)
8. Objectifs et contexte du projet
Pseudomonas syringae est une bactérie intensivement étudiée depuis plus de 50 ans pour son
pouvoir phytopathogène. En France, elle est très étudiée depuis les épidémies sévères de 1996 et 1997
qui causèrent d’énormes pertes dans les productions de melon — Cucumis melo var. cantalupensi. Bien
que de nombreuses maladies dues à des virus ou des champignons soient bien connues dans ce type de
culture, aucune bactérie auparavant, n'avait déjà été impliquée dans des problèmes aussi sérieux (8).
Pour lutter contre la bactériose, le Service Régional de la Protection des Végétaux (SRPV) a mis en
place un certain nombre de moyens qui préconisent la prophylaxie, l’utilisation de produits chimiques
comme le cuivre et le mancobèze, ou la résistance variétale (5). Cependant, ces méthodes sont à bout de
souffle ; d’une part car elles sont inefficaces et d’autre part parce qu’elles ne permettent pas de
comprendre l’origine des épidémies, alors que la lutte contre un pathogène nécessite d’abord de
connaître son cycle de vie. Ainsi, par opposition aux micro-organismes importants dans le milieu
médical, les cycles de vie et la biologie des pathogènes de plante ont été exclusivement définis dans des
contextes agricoles et en termes de disponibilité et sensibilité des plantes hôtes. Les sources des inocula
pour les épidémies sont généralement cherchées dans les tissus de plante et les débris végétaux, sur les
équipements et structures agricoles, dans les insectes en tant que vecteurs et dans les eaux d'irrigation.
Même les notions de biodiversité et d'évolution des pathogènes de plante sont presque entièrement
basées sur les collections issues des plantes hôtes cultivées (9). Les habitats naturels et l’environnement
extérieur à l’hôte ne sont donc pas du tout considérés dans l’épidémiologie des maladies causées par les
bactéries phytopathogènes comme P. syringae contrairement aux pathogènes humains, pour qui on
connaît déjà mieux le cycle de vie. On manque d’informations sur la survie et la croissance en milieux
Figure 1. Prélèvement des précipitations de neige du 4
novembre 2010
naturels, qui pourtant, pourraient fortement nous renseigner sur les voies de dissémination, ou
d’acquisition du pouvoir pathogène.
Mais depuis une dizaine d’années notre équipe a été amenée à s’intéresser à P. syringae dans
plusieurs habitats non agricoles associés à l’eau. En effet, l’observation de certains comportements
particuliers tels que son activité glaçogène identifiée pour la première fois par Vali et al. (13) ainsi que
sa grande hydrophilicité laissait supposer l’existence d’un cycle hors de l’hôte. Deux études ont alors
permis de découvrir son abondance non seulement dans la pluie, la neige, les rivières et lacs alpins, mais
aussi dans des biofilms épilithiques et les plantes sauvages (6, 9). Ces observations se rajoutent à celles
d’autres d’études menées en parallèle, qui ont montré son occurrence dans les aérosols et les nuages (1,
4, 7). Suite à la mise en évidence du caractère ubiquiste des populations de P.syringae et de la présence
de clones de la même lignée dans les substrats agricoles et non agricoles, (11) ont alors proposé un cycle
de vie de la bactérie dirigée par le cycle environnemental de l’eau. Ainsi, les bactéries se trouvant à la
surface des plantes saines sous forme de biofilms (10) sont incorporées dans les aérosols (2, 7), et
transportées à des altitudes de plusieurs dizaines de kilomètres dans les nuages par lesquels elles se
disséminent sur longue distance. Elles regagnent la végétation à travers les précipitations de neige ou de
pluie, qui s’infiltrent dans le sol avant de regagner les réseaux hydrologiques qui atteignent à terme les
terrains agricoles. Ces observations sont à l’origine d’un projet qui vise à modéliser ce cycle de vie de
dans un bassin versant en identifiant les filtres physico chimiques déterminants dans sa survie et
l’acquisition de son pouvoir pathogène.
Dans ce contexte, notre objectif est d’évaluer les pressions de sélection que peuvent exercer la
percolation de l’eau à travers le sol sur les populations de la bactérie phytopathogène P. syringae. Le
passage étant une étape clé du cycle de l’eau auquel la bactérie est étroitement associée, il apparaît
important d’étudier dans quelle proportion il participe à la structuration des populations en termes
d’abondance et de diversité.
9. Approches/méthodes
Notre travail est basé sur le dispositif mis en place dans le cadre du projet Bio-CATCH par l’équipe
de Jean Christophe Clément et Sandra Lavorel. Il est question d’étudier l’eau de percolation de 6 des
mésocosmes lysimétriques chacun caractérisé par un type de sol (acide ou neutre) et une pratique
agricole (fauche ou abandon). L’abondance et la diversité de P. syringae sont ensuite déterminées et
comparées à celles déterminées dans les échantillons de neige et de pluie prélevés sur le site avant et lors
de la période de fonte des neiges (De novembre 2009 à juin 2010). Les premiers prélèvements d’eau
percolée ont été effectués début juin 2010 et les second 2 semaines plus tard.
10. Résultats
Détection de P. syringae dans les
précipitations du Col du Lautaret
P. syringae a été détecté dans 2/5 échantillons, un
de neige en novembre 2009 (Fig1) et un de pluie en
juin 2010 dans des concentrations respectives de
80CFU/L et 331 CFU/L. Ces données confirment
qu’une partie des populations de la bactérie
phytopathogène arrive dans le bassin versant par les
précipitations. Groupées avec d’autres données
collectées sur l’ensemble du bassin versant de la
Durance, elles nous permettront de mieux comprendre
le lien entre la dynamique des populations de P.
syringae dans les précipitations et l’histoire des masses d’air qui en sont à l’origine.
Détection de P. syringae sur le couvert végétal du Col du Lautaret
La bactérie phytopathogène P. syringae est présente en très forte abondance sur la végétation et la litière
des prairies juxtaposant les lysimètres (Fig 2), ce qui représente une réserve potentielle de bactéries pouvant
ensuite être transportées par l’eau de percolation.
Figure 2. Abondance de P.syringae dans la litière et la végétation du Col du Lautaret.
Détection de P. syringae dans l’eau percolée des lysimètres du projet BioCATCH
P. syringae a été détecté dans 9/12 eaux de percolation ce qui prouve qu’elle peut survivre à un passage à
travers 40cm de sol. Ces observations sont tout à fait inédites et soulèvent l’importance de considérer cet
environnement dans l’histoire de vie de la bactérie phytopathogène et dans l’épidémiologie des maladies
qu’elle provoque.
La pratique agricole n’a pas d’impact sur la taille des populations des bactéries totales et de P. syringae
alors que le pH et la conductivité électrique de l’eau sont significativement différents. Des études en
laboratoire sont en cours pour comprendre si l’abondance de P. syringae dans l’eau de percolation peut être
prédite en fonction de l’environnement physique et chimique et de la densité en bactéries à l’entrée des
monolithes.
Figure 2. (a) Tailles des populations des bactéries totales mésophiles (b) Tailles des populations de P. syringae (c) pH
et (d) conductivité électrique, dans l’eau percolée des lysimètres en fonction de la pratique agricole.
t-test, p=0,002 t-test, p=10-5
t-test, p=0,1 t-test, p=0,7
a
d
b
c
t-test, p=0,01
11. Perspectives pour 2011
Une seconde campagne avec les lysimètres du dispositif BioCATCH est envisagée afin de confirmer les
observations de la première année, et de valider les données issues de notre travail en laboratoire.
12. Références bibliographiques
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3. Cangelosi, G. A., N. E. Freitag, and M. R. Buckley. 2004. From outside to inside : environmental microorganisms as
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4. Christner, B. C., R. Cai, C. E. Morris, K. S. McCarter, C. M. Foreman, M. L. Skidmore, S. N. Montross, and D. C.
Sands. 2008. Geographic, seasonal, and precipitation chemistry influence on the abundance and activity of biological ice
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5. Mention, P., D. Lavigne, F. Leix- Henry, S. Bochu, C. E. Morris, P. Prior, M. Pitrat, L. Mercy, and O. Dours. 2004.
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8. Morris, C. E., C. Glaux, X. Latour, L. Gardan, R. Samson, and M. Pitrat. 2000. The relationship of host range,
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11. Morris, C. E., D. C. Sands, B. A. Vinatzer, C. Glaux, C. Guilbaud, A. Buffiere, S. C. Yan, H. Dominguez, and B. M.
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12. Sarkar, S. F., and D. S. Guttman. 2004. Evolution of the core genome of Pseudomonas syringae, a highly clonal,
endemic plant pathogen. Applied and Environmental Microbiology 70:1999-2012.
13. Vali, G., M. Christensen, R. W. Fresh, E. L. Galyan, L. R. Maki, and R. C. Schnell. 1976. Biogenic ice nuclei .2.
Bacterial sources. Journal of the Atmospheric Sciences 33:1565-1570.
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