compositions (1910 – 1915). Cela ne l’empêchera pas d’intégrer en 1920 le tout
nouvel Orchestre philharmonique tchèque en qualité de second violon.
Grâce à une bourse d’études de son pays, il s’installe à Paris en 1923. Il y croisera
Arthur Honegger et surtout Albert Roussel qui prendra sa formation musicale en main
et qui mettra de l’ordre dans « cet esprit bouillonnant ». De son rôle auprès de son
élève et du brio de celui-ci, Roussel reconnaissait avec conscience : « Martinů, ce
sera ma gloire ! ».
Au-delà de cette appréciation, force est de constater que le renommée de Bohuslav
Martinů n’est pas à la hauteur de la qualité, de la richesse et de la diversité de son
œuvre. Dans cette dernière où les symphonies et concertos sont si prégnants, la
place de la musique de chambre pourrait sembler minime. Elle y a, en fait, la rareté
propre aux trésors.
Le Deuxième trio avec piano en ré mineur H 237 (H comme Harry Halbreich,
musicologue qui a établi le catalogue de référence des œuvres de Martinů) date de
1951. Il est en trois mouvements (Allegro moderato – Andante – Allegro). Chacun est
marqué de classicisme et de nostalgie.
Composé aux USA tandis que Martinů enseignait à l’université de Princeton, on y
entend presque s’exhaler un « mal du pays tchèque » qu’il ne reverra jamais. La
musique, simple en apparence, tantôt lyrique, tantôt élégiaque, est comme dans ses
premières compositions marquée d’esprit national tchèque et semble, par bribes,
vouloir faire la révérence à celle d’Antonín Dvořák.
Zdeněk Fibich (1850 – 1900)
Quatuor avec piano en mi mineur op. 11
Bien qu’un peu oublié à l’ombre tutélaire des Dvořák ou Smetana, Zdeněk Fibich est
un compositeur marquant et renommé du XIXe siècle. Ainsi, avant les deux
précédents, il est à l’initiative du premier poème symphonique basé sur une légende
purement tchèque, Zaboj, Slavoj à Luděk . Il est aussi le premier à oser remplacer un
habituel mouvement de scherzo par un rythme de polka (danse d’origine tchèque
contrairement à son orthographe qui souvent la rattache faussement à la Pologne)
Il compose son Quatuor avec piano en mi mineur op.11 en 1874. C’est l’œuvre d’un
jeune homme encore marqué de romantisme, assumant sa familiarité avec
Mendelssohn ou Brahms telle qu’elle résulte de ses études à Vienne ou Leipzig.
Le quatuor est en trois mouvements ; l’Allegro moderato initial développe deux
thèmes d’un lyrisme affirmé. Le deuxième – Thème et variations – distille une quiète
élégie en des variantes ingénieuses et attachantes. Le finale Allegro energico
démontre par sa construction thématique la profonde connaissance que Fibich avait
de la musique de chambre de son temps, sa capacité à concilier l’inspiration
populaire et la musique savante et son talent à faire sonner « la voix tchèque » au
travers de canons d’écriture encore très germaniques.
Les compositeurs du concert d’aujourd’hui, bien différents, n’ont pas en commun que
leurs seules origines : ils semblent tous trois vouloir laisser le pouvoir à la mélodie.
Chacun à sa façon la met au service du récit qu’elle soutient, du lyrisme qu’elle
suscite ; et à chaque fois on y entend chanter le pays tchèque, à pleine voix.