Ecosystèmes périurbains et urbains Définitions Urbain: relatif à la ville (≠ rural) Agglomération (ville + banlieue) de plus de 2000 habitants Ecologie urbaine: partie de l’écologie qui étudie les biocénoses, biotopes et écosystèmes urbains Ecologie urbaine: étude pluridisciplinaire et planification de la ville dans le but d’améliorer les conditions de vie urbaine dans un contexte de développement durable Caractéristiques du climat urbain Température Les villes sont plus chaudes que les campagnes environnantes: - Moyenne annuelle: + 0.5-1 °C - Minimaux hivernaux: + 1-3 °C - Différences maximales: + 3-10 °C La période de gel est réduite de 25 % La période de végétation allongée de 8-10 jours Espèces méridionales favorisées Absorption du rayonnement infrarouge augmentée - Pollution atmosphérique - Matériel à forte capacité calorifique - Géométrie des rues 0.2 0.6 ψ est un facteur de visibilité du ciel ψ = surface visible/surface potentiellement visible Exemple de deux types de rues. Production de chaleur urbaine - Chauffage des maisons - Moteurs à combustion Relation entre ψ et la différence maximale de température dans différentes villes (Sukopp & Wittig 1998). Ecologie générale Ville Fairbanks (Alaska, 64°N) Berlin (Allemagne, 52°N) Montreal (Canada, 45°N) Los Angeles (USA, 34°N) Singapur (1°N) Population 30'000 2'300'000 1'100'000 7'000'000 2'100'000 2 Besoins énergétiques par habitant [1000 MJ] 740 67 221 331 25 Energie humaine 2 [W/m ] 19 21 99 21 3 Energie naturelle 2 [W/m ] 18 57 52 108 110 Population de quelques villes avec leur consommation d'énergie et ce que cela représente en énergie dégagée par m2 de sol, en comparaison avec l'énergie solaire naturelle (Sukopp & Wittig 1998). Diminution de l'évaporation Evaporer de l’eau demande de l’énergie => refroidit l’air Forêts, champs stockent l’eau et elle ne s’évapore que lentement (évapotranspiration) => maintiennent un climat frais En ville, absence de végétation et l’eau disparaît dans les canalisations Influence de la taille de la ville Relation entre le nombre d'habitants dans une ville et la différence de température de celle-ci avec sa campagne (Sukopp & Wittig 1998). Humidité et précipitations Humidité relative de l’air réduite de 6 % en moyenne annuelle (2 % en hiver, 8 % en été) - Absence d’humidité dans le sol ou la végétation (eau de pluie rapidement drainée) - Température de l’air plus élevée => diminution de l’humidité relative Partiellement compensé par la libération de vapeur d’eau par les moteurs et chauffage Augmentation des précipitations ? - Îlot de chaleur => augmentation des nuages de convection (cumulus) - Poussières de la pollution forment des noyaux de condensation - Vent déplacent en altitude ces nuages Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 3 Répartition des précipitations (en pourcents) lors d'une journée de pluie sur Berlin (Sukopp & Wittig 1998). Vent Diminution des vents (obstacle des bâtiments) de 25 % en moyenne - Effet rafraîchissant affaibli, apport d’air plus frais limité - Pollution pas “nettoyée” par le vent Bâtiments élevés (quartiers de gratte-ciels) peuvent créer des turbulences locales Vents nocturnes dus aux différences de température entre ville et campagne Lumière nocturne Eclairage nocturne de la ville important (réverbères, bâtiments, décorations, publicités, …) Flore et végétation urbaines Définitions Plante Rudérale: croît dans un site fortement marqué par la pression humaine (terrain vague, décombres, bord de chemin) Adventice: originaire d’une autre contrée et qui colonise un territoire sans qu’on l’y ait sciemment introduite; espèce indésirable, présente dans une culture Mauvaise herbe: point de vue très anthropocentrique ! Et peu scientifique. Origine des espèces Apophytes: espèces indigènes qui ont profité des premiers défrichements Archéophytes: espèces étrangères arrivées dès les débuts de l’agriculture ou à l’époque romaine Néophytes: espèces arrivées après 1500, essentiellement d’Amérique Hémérobie: intensité du dérangement et des perturbations humaines 1: pas de dérangements, ou très faible 9: dérangements extrêmes Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 4 Proportion (en pourcents) des espèces indigènes, archéophytes et néophytes en fonction du degré d'hémérobie dans différents zones de Berlin (Wittig 1991). Statistiques pour la flore lausannoise Cultivées Néophytes européens Néophytes extra-européens Indigènes (yc archéophytes) Nbre d'espèces 14 161 229 959 Total 1363 Origine des espèces de plantes dans la flore lausannoise (Droz et al. 2006). Milieu Forêts Montagnes Marais / aquatiques Prairies maigres Prairies grasses Pionnières Mauvaises herbes Echappées de jardin Nbre d'espèces 336 39 151 139 70 87 429 112 Répartition des plantes dans la flore lausannoise en fonction de leur milieu de prédilection (Droz et al. 2006). Adaptations à la vie rudérale Aucune espèce ne possède toutes les adaptations décrites ci-dessous, mais beaucoup en ont plusieurs. Ecologie: héliophiles, résistantes au piétinement, nitrophiles, résistantes aux herbicides et/ou la pollution Adaptées aux conditions sèches: petite taille pour diminuer la surface de transpiration, capacité à supporter la déshydratation, photosynthèse en C4 (meilleure efficacité de la photosynthèse en conditions sèches, enracinement profond) Résistances aux perturbations: racines ou rhizomes résistants aux dommages, voire favorisés par la multiplication végétative lorsqu'ils sont coupés en morceaux Phénologie: croissance rapide et cycle court, longue période de floraison ou plusieurs cycles annuels Floraison et fécondation: floraison rapide, fécondation indépendante de pollinisateurs Fructification: grande production de graines, bonne dispersion des graines, longue dormance, germination étalée dans le temps Principaux écosystèmes urbains Les espèces se répartissent dans la ville en fonction de Profondeur du sol Degré d’imperméabilisation Type de substrat Intensité lumineuse Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 5 Fréquence des interventions Intensité du piétinement Eutrophisation … Hasards de la dispersion des graines Pavés - un peu de sol, légère infiltration de l'eau - piétinement intense. Pieds des murs, bords de routes - fissures entre trottoirs et murs - très peu d'infiltrations, très sec - parfois fertilisés par les chiens Graviers et voies CFF - sol souvent limité, très drainant - très fort rayonnement - désherbages chimiques fréquents Murs - fissures naturelles ou non dans les murs - ensoleillement parfois intense => très sec Pieds des arbres et haies - forte variabilité d'entretien - important apport d'azote - meilleure rétention de l'eau (parfois arrosé en été) Friches - surfaces laissées à l'abandon de toutes tailles - succession primaire naturelle: gravier/goudron fissuré – espèces pionnières – pelouses sèches – buissons – forêt => grande diversité - très revendiquées depuis quelques années pour densifier la ville Jardins - sol profond, non recouvert - herbicides et engrais souvent importants - perturbations fréquentes mais petites surfaces souvent négligées Gazons - sol profond non couvert - en général entretien important (fauche et produits phytosanitaires) - arrosage en période sèche Ecosystèmes naturels à semi-naturels - villes comportent souvent des morceaux de "nature" (prairie maigre, rivières, forêts, …) - surfaces de refuge pour la faune et flore - rafraîchissement par l'eau qu'elles absorbent et libèrent progressivement Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 6 Néophytes envahissants Espèces végétales introduites généralement après 1500 et se répandant rapidement Souvent cultivées dans les jardins Se développent au détriment d’espèces indigènes en milieu naturel Certaines espèces problématiques au niveau de la santé Liste noire des 20 espèces les plus problématiques en Suisse Exemples: Ailante (ou faux vernis du Japon, Ailanthus altissima): l'écorce peut provoquer des irritations cutanées Ambroisie à feuilles d'armoise (Ambrosia artemisiifolia): pollen très allergène Berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum): irritation et rougeurs de la peau au soleil après avoir toucher la plante. Faune urbaine Définitions Synanthropie: degré d’affinité d’une espèce animale avec l’homme Urbanophile (hémérophile): ce dit des espèces suivant l’homme dans ses activités et liées à son habitat Urbanophobe (hémérophobe): ce dit des espèces fuyant l’homme et les régions habitées Petit historique de l'urbanisation Des parasites ont toujours accompagnée l'homme (pou de l'homme) Néolithique, début de l'agriculture => réserves hivernales => développement de ravageurs (mite alimentaire, charançon) Augmentation de la taille des localités => apparition d'espèces urbaines (rat) Intensification du commerce international à l'époque romaine => arrivée en Europe d'espèces méridionales (grillon domestique, blatte orientale) Conditions facilitant la vie urbaine Grands espaces non nécessaires Vie liée à des structures verticales, irrégulières (falaises, cavités) Régime alimentaire proche de l’homme (omnivore) ou spécialisé dans un aliment particulier Maturité précoce et taux de natalité élevé Petite taille Besoins en eau faibles Insensible à la pollution Adaptations à la vie urbaine Réduction de la distance de fuite Modification du régime alimentaire Nouveaux emplacements pour nicher Conséquences de la vie urbaine Augmentation de la densité des populations Allongement des journées Allongement des saisons Réduction des migrations Allongement de la vie Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 7 Exemples d'espèces urbaines Espèces très urbanophobes: jamais en ville (pluvier doré, azuré des paluds) Espèces modérément urbanophobes: essentiellement hors de la ville mais parfois en milieu urbain dans des sites proches de l’état naturel (grands parcs, rivières, friches importantes, …) (buse variable, renard roux) Espèces neutres: espèces ubiquistes présentes aussi bien en ville qu'en campagne (merle noir, mulot) Espèces modérément urbanophiles: espèces avant tout présentes dans les agglomérations mais parfois également en campagne (tourterelle turque, musaraigne musette) Espèces très urbanophiles: espèces vivant presque exclusivement en ville ou dans les villages (martinet noir, rat) Quelques particularités Vers de terre: particulièrement nombreux dans les gazons, favorisés par les déchets de tonte Humains Chiens Chats Vers de terre Autres animaux Végétaux Nombre 1'075'000 100'000 250'000 8'000'000'000 Poids [t] 59'000 1'000 750 8'000 5'000 750'000 823'750 Poids [%] 7.16 0.12 0.09 0.97 0.61 91.05 100 Importance des vers de terre en comparaison avec les autres organismes dans la ville de Bruxelles (Sukopp & Wittig 1998) Faucon crécerelle et pèlerin: niches en villes et se nourrissent soit en campagne soit en ville sur des oiseaux (particulièrement les pigeons pour le faucon pèlerin) Acariens: 36'000 individus pour 1 g de poussière de matelas, se nourrissent de poussière ou des champignons qui se développent sur les déchets de peau, déchets allergènes Faune des plantes d'appartement: cochenilles, pucerons, … parasitent les plantes d'appartement Termites: pas présentes en Suisse, mais de plus en plus abondante en France, se nourrissent de bois, de papiers et cartons et sont susceptibles de fortement endommagé un bâtiment Dessin d'un soldat, d'une nymphe et d'un adulte sexué ailé de termites vivant en France (Kalotermes flavicollis) (internet) Répartition des termites dans les communes françaises (http://www.termitesinfo.com/html/termites-france.html) Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 8 Aménagements urbains et nature Espaces verts: maintien / augmentation des espaces verts au cœur de la ville Diversité floristique et faunistique Purification de l’air Espaces de loisir Surfaces non imperméables => rafraîchissement de l'air Relation entre la surface d'un parc et la différence de température avec la ville proche (mesures faites lors d'une soirée avec faible rayonnement; Sukopp & Wittig 1998) Rivières: maintien ou remise au jour de rivières enterrées Rôle social Diversité biologique importante Corridor pour la faune entre la campagne et la ville Humidité => rafraîchissement de l’air Friches: laisser une partie des grandes friches à elles-mêmes Riches en diversité Places de jeu et découverte pour les enfants Surfaces vides pour une meilleure circulation de l’air Gazons: extensification des gazons (moins de fauche, d'engrais et de pesticides) Economie de travail, de bruit et d’essence Plus d’espèces, plus de couleur Toits et façades: verdir les toits plats et laisser les plantes grimper sur les façades Augmentation de la diversité Diminution de la pollution atmosphérique Diminution de la température (moins de surfaces absorbantes, plus d’humidité) Meilleure isolation thermique des bâtiments Aménagements extérieurs: privilégier la diversité et la verdure aux formes géométriques, éviter les haies monospécifiques (thuya, laurelle) et utiliser si possible des pavés ou graviers au lieu de l'asphalte Augmentation de la diversité Réseau de petits biotopes à travers la ville (diminue la fragmentation des populations) Augmentation du bien-être ? Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne Ecologie générale 9 Eclairage nocturne: diriger l'éclairage vers le bas et non vers le haut, remplacer les lampes à vapeur de mercure par des lampes à vapeur de sodium Moins d’insectes attirés et tués inutilement Meilleure visibilité des étoiles Facilite la migration des oiseaux Economie d’énergie Respecte les cycles jour/nuit (insectes, oiseaux, batraciens, humains) Choix d'un éclairage urbain ménagement l'obscurité au-dessus de la ville (Klaus et al. 2005). Bibliographie Buttler A, Ayer J., Claude B., Monnier M.-F. & Bongard M. (1996). Coup d'oeil sur la nature en ville de Neuchâtel. Ligue Neuchâteloise pour la Protection de la Nature, Musée d'histoire naturelle, Neuchâtel, 134 p. Droz J., Hoffer-Massard F., Vust M., Bornand C. (2006). Flore de Lausanne et de sa region. 2. Composition de la flore et répartition des espèces. Rossolis, Bussigny, 288 p. Hoffer-Massard F., Bornand C. & Vust M. (2006). Flore de Lausanne et de sa region. 1. A la découverte de la nature en ville. Rossolis, Bussigny, 192 p. Klaus G., Kägi B, Kobler R.L., Maus K. & Righetti A. (2005). Recomandations en vue d'éviter les emissions lumineuses. L'environnement pratique. Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage, Berne, 37 p. (http://www.ciel-noir.org/pdf/ofefp-pollumi.pdf) Sukopp H. & Wittig R. (1998). Stadtökologie. Ein Fachbuch für Studium und Praxis. Gustav Fischer, Stuttgart, 474 p. Wittig R. (1991). Ökologie der Grossstadtflora. Gustav Fischer, Stuttgart, 261 p. Wittig R. (2004). The origin and development of the urban flora of Central Europe. Urban Ecosystems 7: 323-339. Adresses internet Commission suisse pour la conservation des plantes sauvages CPS (internet). Information sur les plantes envahissantes: http://www.cps-skew.ch/francais/info_plantes_envahissantes.htm Pollution lumineuse nocturne: http://www.ciel-noir.org/ Printemps 2011 Pascal Vittoz, DEE / Université de Lausanne