Ateliers de Philosophie Questions posées par des enseignants

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Ateliers de Philosophie
Questions posées par des enseignants venant de mettre en place des ateliers
Réponses de G.Chambard, formatrice
Question :
- Pensez-vous qu’il soit intéressant de faire des ateliers de philosophie avec des enfants
placés en IME, ces « enfants handicapés de la pensée » ?
Réponse :
- Il est très intéressant de faire des ateliers de philosophie Agsas avec tous les enfants et
surtout avec ceux qui ont des difficultés à s’intégrer dans l’école ou dans la société. Il
ne s’agit pas d’établir des performances ou d’obtenir des résultats de type scolaire. Les
élèves sont en général très intéressés par le sujet, par le nouveau statut qu’on leur
propose. Ils découvrent le langage oral interne et une certaine capacité à penser et en
éprouvent du plaisir. De plus, ils confrontent ces pensées à celle des autres et cela
attise leur réflexion et les amène à débattre.
Le but est une modification des regards, de l’élève sur lui-même, du groupe sur
chacun, de l’enseignant sur chacun et de chacun sur le Savoir.
Ces élèves qui semblent « handicapés de la pensée » sont souvent davantage
handicapés par les prises de parole, l’expression, la communication verbale, que par la
pensée. Souvent, ils n’osent pas exprimer leur pensée. Cette invitation ne peut que les
aider.
Question
- Maître E, j’anime un atelier de Philosophie dans une classe de CM1. Je respecte à
la lettre le protocole établi par Jacques Lévine, mais cet atelier ne se passe pas très
bien : pauvreté des idées, peu de participants…Comment faire pour l’enrichir ?
Réponse
- Quelles sont vos attentes ? Si vous souhaitez que le groupe crée un produit fini
mettant en avant des idées fortes qui conduisent les enfants vers une conceptualisation,
alors ce n’est pas un atelier Agsas qu’il faut proposer aux élèves, mais un atelier dans
lequel vous aurez un rôle important pour les orienter dans leur réflexion.
La proposition d’un atelier Agsas suppose que vos attentes se placent sur le long
terme, avec petit à petit une libération de la pensée, un désir de la formuler clairement
pour être compris, le plaisir d’être un interlocuteur valable, « apportant » pour le
groupe, d’où un sentiment de plus-value.
Je vous conseille la lecture de « L’enfant philosophe, avenir de l’humanité ? »
Question
- J’anime un atelier de Philosophie dans une classe de collège depuis plusieurs mois.
Afin de lutter contre la monotonie, je pourrais peut être les remplacer par des ateliers
de psychologie qui me semblent être une évolution possible pour des collégiens.
Qu’en pensez-vous ?
Réponse
- Les Ateliers de psychologie ne sont pas du tout un prolongement des ateliers de
philosophie. Dans les ateliers de psychologie, il s’agit de demander à l’enfant
d’essayer de se mettre à la place de l’autre et d’imaginer ce qu’il peut ressentir.
L’enfant s’exprime de façon anonyme et l’ensemble des avis est lu au groupe ( lire le
§7 de « L’enfant philosophe, avenir de l’humanité ? »)
Il n’y a pas de prolongement nécessaire pour les ateliers de philosophie. Ils se suffisent
à eux-mêmes et pour des élèves bien entraînés, il peut être intéressant de regrouper
certains thèmes pour cerner la notion de concept, sans faire de lien vous-même et en
conservant le même protocole. Par exemple proposer « l’avenir », « la nostalgie », « le
regret », « l’oubli »… pour cerner la notion de temps et en arriver d’ailleurs à leur
proposer ce thème là.
Question
- Avec une classe difficile, n’est-il pas préférable d’animer un atelier avec une demi
classe plutôt qu’avec une classe entière ?
Réponse
- On peut effectivement travailler avec une demi-classe, mais il est dommage que la
nouvelle image que chaque élève donne de lui ne soit pas appréciée par l’ensemble du
groupe classe et par son enseignant. La modification des relations et le ressenti de
« plus-value » ne sont alors que partiels.
Question.
Dans une des classes où j’anime un atelier philo, un élève systématiquement parle de
ses problèmes personnels, ce qui rend mal à l’aise l’enseignante et moi-même et ce qui
fausse l’évolution du travail de la « communauté de recherche » . Que faire dans ce
cas ?
Réponse
- N’oubliez pas de redire avant chaque séance que philosopher, c’est réfléchir sur un
problème universel et que pour faire de la philosophie, il faut se positionner en tant
que personne du monde. En général, cela suffit pour que les élèves investissent ce
nouveau statut valorisant ou pour que d’autres élèves fassent remarquer que certains
n’ont pas encore le bon statut. Toutefois, vous pouvez faire remarquer à cet enfant
qu’il a du mal à se positionner en tant que personne du monde et lui demander s’il
accepte de faire un effort dans ce sens. Avant chaque atelier, demandez si chacun est
prêt à réfléchir en tant que personne du monde. Au besoin demandez-le ensuite à
quelques-uns dont cet élève. Si la réponse est positive, pas de problème ; si la réponse
est négative, alors proposez lui de ne pas participer.
Question :
Je vous écris pour recueillir des avis et même des conseils. Je suis maître E dans
un Rased. Dans ce cadre, je m’occupe de groupes d’enfants en difficultés, notamment
d’un groupe de 5 enfants de CM2 pour lequel j’ai pensé qu’il serait intéressant de
proposer un atelier philo. Je me suis lancée, me disant que cette expérience avec un
petit groupe me permettrait de me roder, avant de proposer des ateliers philo à des
demi-classes ou des classes entières.
Mais je rencontre un problème.
J’ai repris le cadre bien précisément. J’ai choisi deux premiers thèmes qui me
semblent ne pas éveiller trop de passion : la différence entre l’homme et l’animal ; et
le courage. Un des enfants ( ils ont presque 12 ans) a utilisé cet espace de parole pour
dire des choses crues avec des mots parfois familiers( limite grossiers) autour du « pipi
caca » et autour de ses préoccupations sexuelles. Les autres enfants ne sont pas dans le
même registre, même s’ils s’autorisent un parler direct….Je compte suspendre
l’Atelier.
Alors, s’autoriser à penser tout haut, oui, c’est même l’objectif…mais quelles limites
met-on ?
Réponse :
Vous avez bien fait d’interrompre momentanément cet atelier. Pour vous aider,
voici quelques réflexions que je vous soumets :
1 La participation d’un trop petit nombre d’enfants est une difficulté. La fréquence des
prises de paroles devient un jeu et laisse peu de place à la réflexion. De plus le côté
très intime du petit groupe permet un registre de langage qui n’est pas celui qu’on
utiliserait au sein d’un groupe d’une vingtaine de personnes
2 Dans le cas présent, la réécoute était vraiment de trop, sans toutefois les « punir » de
cette absence de réécoute. Vous auriez pu, par exemple, faire une synthèse des grandes
idées développées, en relevant qu’il est dommage que la forme utilisée pour énoncer
ces idées en ait fait perdre l’intérêt. Cela aurait donné une autre dimension à leur
atelier et les aurait amené à réfléchir sur la forme de l’énonciation.
3 Juste après l’Atelier, un temps de regard sur l’Atelier est nécessaire : « Comment
s’est passé cet atelier ? ». Il est intéressant d’écouter leurs réponses et d’en discuter
avec eux, avec la possibilité (puisqu’on est hors atelier) de donner votre avis sur la
forme (jamais sur le fond), sans toutefois ni les critiquer, ni les dévaloriser, ce qui
serait contraire à l’esprit de ces ateliers.
4 Si le climat de l’atelier ne permet pas la réflexion, n’attendez pas la fin de l’atelier.
Interrompez-le en disant aux enfants : « On ne peut pas faire de la philosophie
aujourd’hui. Certains élèves ne se placent pas en tant que personnes du monde et on ne
peut pas réfléchir sérieusement. On réessaiera un autre jour. ».
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