aiguisent les conflits d’intérêt associés. D’autre part, la contribution des pollutions diffuses
(cf. pressions sur les ressources en eau, gaz à effet de serre, déchets, etc…) relativement à
celle de sources ponctuelles telles que les cheminées des installations classées devient souvent
prépondérante. La performance environnementale dépend alors principalement de « l’éco-
efficacité » de secteurs tels que l’agriculture, l’énergie et les transports ; et donc de la manière
dont l’environnement a pu être intégré dans le comportement de l’ensemble des acteurs
économiques.
Le critère retenu par les économistes pour sélectionner les politiques
environnementales est premièrement un critère d’efficacité, c’est à dire de non gaspillage des
ressources, ce terme étant entendu dans son acceptation la plus commune. La démarche
conduit alors à définir des conditions d’efficacité que l’on peut associer à deux étapes de
l’optimisation :
- répartition des efforts de dépollution. Il est de l’intérêt de la collectivité dans son
ensemble, qu’à niveau de protection environnementale donné, le coût total des efforts à
engager soit le plus faible possible, les gisements de réduction des émissions les moins
coûteux étant mobilisés en premier. La condition pour cela est que ‘‘les coûts marginaux’’,
c’est à dire pour une unité supplémentaire de réduction (« d’abattement ») des émissions
polluantes, soient égaux pour tous les agents. En effet, si l’on se place dans la situation
hypothétique de deux firmes polluantes, l’une ayant poussé ses efforts de dépollution jusqu’à
dépenser 200€ pour éliminer une tonne de polluant, alors que l’autre n’a été que jusqu’à 100€,
il serait sûrement souhaitable que la seconde en fasse un peu plus et la première un peu moins,
ce qui, à niveau de pollution totale inchangée, permettrait de réduire le coût total à engager.
La première firme aurait d’ailleurs intérêt à proposer à la seconde cette réallocation des
efforts, le surplus qu’elle en retire lui permettant de dédommager la seconde pour les efforts
supplémentaires demandés.
- choix du niveau de protection socialement optimal du point de vue de la
collectivité. De même, si la valeur qu’accordent les ‘‘pollués’’ à un effort supplémentaire de
dépollution est supérieur au coût nécessaire à sa réalisation, c’est un gaspillage que de ne pas
le faire. Un échange suivant lequel ceux-ci demanderaient et compenseraient l'effort de
dépollution supplémentaire serait mutuellement avantageux. A contrario, ce serait aussi un
gaspillage que d’engager des efforts supplémentaires de dépollution lorsque leurs coûts
excèdent la valeur des dommages occasionnés. La condition d’efficacité s’en déduit : à
l’optimum, il y a égalité des coûts marginaux de dépollution et du coût marginal des
dommages associés à la nuisance considérée. Dit autrement la politique environnementale
efficace correspond, dans son ensemble, à la maximisation du bilan coûts-avantages se fixant
comme objectif la valeur de la qualité de l’environnement, nette des coûts de protection à
engager.
L’analyse qui précède conduit tout d’abord à dégager deux enseignements importants.
Le premier est la légitimité et la nécessité de l’intervention publique. Spontanément les agents
ne prennent pas en compte les dommages qu’ils occasionnent à d’autres au travers des
phénomènes de pollution ou de l’accès non régulé aux ressources environnementales. Comme
l’avait initialement compris Pigou, qui s’intéressait alors au ‘‘smog’’ londonien résultant des
interactions entre le brouillard naturel et les émissions des cheminées, le libre jeu des marchés
est imparfait à cet égard. Il ne fournit pas les incitations appropriées pour orienter les
comportements et stimuler les efforts de dépollution dans le sens socialement souhaitable.
L’ignorer, en escomptant que les efforts à réaliser pour l’environnement en soit spontanément
‘‘gagnant-gagnant’’, conduit à se trouver dépourvu à chaque fois que l’argument du maintien
de l’emploi sera avancé à l’encontre de normes environnementales ambitieuses. Les coûts de
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