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le premier a en main. Voilà qui limite considérablement le volume de transactions. On a donc utilisé
au fil du temps divers biens comme numéraire et unité de compte, le dernier en date dans les échanges
internationaux étant l’or. Mais il y a souvent un écart considérable entre la quantité de numéraire
nécessaire pour faciliter les échanges désirés et la quantité de ce numéraire effectivement disponible:
ce qui fait que le manque de numéraire entraîne une certaine atrophie des échanges, et donc étouffe
le développement économique.
L’utilisation de l’or comme monnaie d’échange au plan international a créé ce genre de problème dans
les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale: les échanges internationaux se multipliant
à proportion que les barrières tarifaires s’abaissaient, la production d’or n’a vite plus suffi pour
soutenir les échanges. Le numéraire devenant relativement rare, l’activité économique a ralenti. De
là l’importance de se donner une monnaie qui puisse s’ajuster en volume aux besoins de l’économie
mondiale comme c’est le cas pour les pays par l’opération de leur banque centrale.
Cette monnaie extensible institutionnellement à mesure que le volume de commerce s’accroît
correspond dans le meilleur des mondes à une aire géographique optimale – c’est-à-dire une aire à
forte intensité de commerce où la mobilité du travail et du capital est grande. C’est pourquoi ont
émergé les monnaies nationales fiduciaires (pièces et billets entièrement fondés sur la confiance et
dont le volume est déterminé par la banque centrale) parce qu’elles semblaient capables de faciliter
les transactions et échanges qui étaient beaucoup plus intenses à l’intérieur des pays qu’entre les
pays.
Mais à proportion que les barrières entre nations se sont écroulées dans l’après Seconde Guerre
mondiale, par l’opération du GATT en particulier, la mondialisation a fait que les échanges
internationaux ont grandi exponentiellement. On a vu grimper l’interdépendance économique entre
pays, et la zone monétaire optimale a débordé le cadre national.
Pour l’Europe, cette intensification des relations entre pays de la communauté européenne n’a pas été
seulement le résultat de la mondialisation, mais d’un effort délibéré pour construire un espace
économique pan-européen. Dès 1958, le Traité de Rome visait une union douanière en Europe (i.e.
une politique douanière commune des pays européens vis-à-vis les autres pays du monde). Cela devait
se réaliser en 1968. Puis l’Acte Unique Européen de 1987 préparait le marché unique qui va se
réaliser en 1993 – avec la libre circulation des marchandises, services, capitaux et personnes sur tout
le territoire. Le traité de Maastricht de 1992 préparait l’union monétaire et économique de 1999.
La construction d’un espace économique européen a redéfini la zone monétaire optimale: à proportion
que le commerce entre nations en Europe a crû plus rapidement que le commerce intra-national, et
que la libre circulation des personnes s’est accomplie en même temps que se faisait un immense
travail d’harmonisation pan-européenne des réglementations nationales, il est devenu clair qu’il y
aurait des avantages importants à créer une zone monétaire qui déborderait les frontières d’un seul
pays pour comprendre toute l’Europe. C’est le processus qui a été enclenché avec le traité de
Maastricht. La phase 1999 commence par une conversion des banques, de la bourse, et des emprunts
publics à l’euro. Entre 1999 et 2002, ce sera la période de double circulation des moyens de
paiements et du double affichage des prix. Les pièces et billets de l’euro seront disponibles au 1er
janvier 2002 au plus tard, et au milieu de 2002, les devises nationales disparaîtront.