La Lettre du Neurologue - n° 2 - vol. IV - avril 2000 107
par l’expression des VGCC par la tumeur, puisque les cancers
du poumon à petites cellules expriment le sous-type P/Q de
VGCC. Même si le traitement de la tumeur entraîne parfois une
rémission des symptômes du SMLE (7),le pronostic de ces
patients est sombre, avec une médiane de survie inférieure à un an,
en rapport avec une progression tumorale (3).
Le SMLE est parfois associé à d’autres syndromes paranéopla-
siques. Ainsi, 12 % des patients présentant un anticorps anti-Hu
ont aussi des anticorps anti-P/Q. Les dégénérescences cérébel-
leuses paranéoplasiques (DCP) représentent un cas particulière-
ment intéressant, puisque près d’un tiers des patients présentant
une DCP avec un cancer du poumon à petites cellules ont des
anticorps anti-P/Q (8). À l’inverse, aucune patiente avec DCP et
cancer gynécologique n’a d’anticorps anti-P/Q. Il en résulte que
la détection d’anticorps anti-VGCC chez les patients présentant
une atteinte cérébelleuse subaiguë d’étiologie indéterminée est
fortement évocatrice d’un syndrome paranéoplasique et d’un
cancer pulmonaire à petites cellules sous-jacent.
SMLE D’ORIGINE AUTO-IMMUNE
Concernant les 40 % de patients chez qui aucun cancer n’est
retrouvé, l’étiologie du SMLE est probablement auto-immune.
En effet, ces patients ont généralement des antécédents person-
nels ou familiaux de pathologie auto-immune, comme un vitili-
go, une anémie pernicieuse, une maladie cœliaque, un diabète
ou une thyroïdite auto-immune (3). Aucun critère clinique ou
électrophysiologique ne permet de distinguer l’origine paranéo-
plasique ou non paranéoplasique d’un SMLE. Les anticorps
anti-VGCC sont présents dans les deux groupes de patients.
Chez les patients dont le SMLE n’est pas d’origine paranéopla-
sique, la médiane de survie est de l’ordre de sept ans, avec des
cas de survie longue, parfois supérieure à quinze ans (3).
PRISE EN CHARGE DES SMLE
La prise en charge des SMLE bénéficie de multiples thérapeu-
tiques efficaces. Le traitement de la tumeur dans les cas paranéo-
plasiques améliore parfois la symptomatologie (7). La corticothé-
rapie ou l’azathioprine, ou idéalement l’association des deux, sont
efficaces au bout de quelques semaines (2). Les échanges plas-
matiques ou les perfusions d’immunoglobulines intraveineuses
améliorent la symptomatologie et les altérations électrophysiolo-
giques après un délai de une à trois semaines, et durent environ
deux mois (2, 9). La pyridostigmine aux doses efficaces dans la
prise en charge de myasthénie peut améliorer partiellement la
force musculaire. Parmi les agents améliorant spécifique-
ment la transmission neuro-musculaire présynaptique par bloca-
ge de la conductance membranaire (guanidine, 4-aminopyridine
ou 3,4-diaminopyridine), seule la 3,4-diaminopyridine est correc-
tement tolérée, avec des effets secondaires limités à des paresthé-
sies, des insomnies ou des effets cholinergiques et, à forte dose
(> 60 mg/j), des crises comitiales. Les effets secondaires et l’effi-
cacité clinique sont dose-dépendants, la posologie recommandée
se situant entre 20 et 50 mg par jour. Certains auteurs ont rappor-
té une accoutumance, mais la 3,4-diaminopyridine induit généra-
lement une amélioration prolongée sur plusieurs mois (10).
Malgré la multiplicité des traitements, ou peut-être à cause d’el-
le, la prise en charge des SMLE n’est pas clairement codifiée.
Dans les SMLE paranéoplasiques, le traitement de la tumeur est
impératif, et il est raisonnable de considérer un traitement par
3,4-diaminopyridine pour améliorer la symptomatologie. Dans
les SMLE d’origine auto-immune, un traitement associant pyri-
dostigmine et corticothérapie peut être proposé en première
intention, le recours en seconde intention à l’azathioprine, aux
immunoglobulines ou aux plasmaphérèses dépendant du patient
et des contingences hospitalières locales. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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