4 • C.G. Jung
C’est durant la Première Guerre mondiale
que Jung élabore ses principales théories
psychologiques, celles des archétypes,
de l’inconscient collectif et du processus
d’individuation, et qu’il transforme la
psychothérapie – méthode à l’époque
surtout destinée à traiter les malades –
en un moyen d’approfondissement et de
développement de la personnalité. Cela
aboutira à l’émergence de la psychologie
analytique en tant que discipline théo-
rique et forme de psychothérapie. Cette
recherche intérieure se fonde sur un pro-
cessus d’auto-expérimentation qui avait
débuté au cours de l’hiver 1913. Jung
donnait libre cours à son imagination et
consignait soigneusement ce qui s’ensui-
vait. Plus tard, il appellera ce processus
«imagination active» et encouragera son
utilisation comme méthode psychothé-
rapeutique. Il note les fantasmes qui le
hantent dans de petits Cahiers noirs.
Lorsque la Première Guerre mondiale
éclate, Jung réalise qu’un certain nombre
de ces fantasmes étaient des prémonitions
de cet événement. Cela le conduira à com-
poser la première ébauche du manuscrit
du Liber Novus, dans lequel il a retrans-
crit les principaux fantasmes notés dans
ses Cahiers noirs, en les accompagnant de
commentaires interprétatifs rédigés dans
un style poétique. Il s’agit d’un ouvrage
majeur dans son œuvre, car il contient
en germe ses travaux plus tardifs, et l’on
peut affirmer que le Livre Rouge aura été
l’ouvrage inédit le plus influent de toute
l’histoire de la psychologie.
4. Esquisse,1917 : Il s’agit d’une esquisse
préparatoire de la première page du Liber
Secundus , qui constitue la deuxième partie
du Livre Rouge. Le texte calligraphié pro-
vient d’un mythe de la création babylonien
qui ne figurait pas dans le Liber Novus :
«La Mère Huber, qui forma toutes choses,
Donna des armes irrésistibles,engendra
des serpents géants
Aux dents aiguisées, impitoyables à tous
égards ;
Elle remplit leur corps de poison au lieu
de sang. Elle dota de fécondité des sala-
mandres gigantesques et furieuses ;
Elle les fit s’enfler d’un éclat effrayant et
se dresser vers les hauteurs.
Qui les a contemplées devrait s’évanouir
de terreur ;
Leurs corps devraient se cabrer,
sans qu’elles se retournent
pour prendre la fuite.»
C’est la première page de la deuxième
partie du Livre Rouge : le Liber Secundus,
intitulée «Les Images de l’Errant», qui
4. ESQUISSE, 1917
Encre, peinture et crayon
sur papier-parchemin.
Collection particulière