Rapport final du projet GNB « Gestion forestière, naturalité et biodiversité » 30 octobre 2014
Programme « Biodiversité, gestion forestière et politiques publiques » (BGF) 5
RESUME LONG
L'extension raisonnée du réseau de réserves forestières intégrales fait partie des mesures
adoptées par la Stratégie Nationale pour la Biodiversité pour améliorer la biodiversité forestière
métropolitaine française. Au regard de la littérature scientifique, la non-exploitation favoriserait
une partie de la biodiversité forestière menacée par la gestion forestière traditionnelle, mais les
connaissances qui sous-tendent ce choix se révèlent très partielles et souffrent de problèmes
méthodologiques. En particulier, très peu d’études concernent les forêts tempérées
européennes, notamment la France, et les groupes qui sont étudiés dans ce contexte ne sont a
priori pas les plus sensibles à l’exploitation. D’autre part, les facteurs qui expliquent les
différences de biodiversité sont rarement analysés de manière systémique et certaines études
peuvent manquer de robustesse (pseudo-réplication, inadéquation stationelle…)
D’envergure nationale, le projet « Gestion forestière, Naturalité et Biodiversité » (GNB ;
http://gnb.irstea.fr) a pour objectif principal d’étudier l’impact de l’arrêt d’exploitation forestière
dans le réseau des réserves forestières intégrales sur la structure des peuplements et sur la
biodiversité au travers d’une double approche par méta-analyse de données mondiales et
d’analyses du jeu de données avec un accent fort sur leur magnitude plutôt que sur les
significativité statistique. Ce projet vise ainsi à identifier statistiquement quels facteurs
expliquent le mieux les variations de différentes parties de la biodiversité des espèces entre
des zones exploitées et non exploitées.
Nous avons tout d’abord confirmé, grâce à une méta-analyse mondiale pour les forêts
tempérées, boréales et méditerranéennes, que l’exploitation forestière a tendance à réduire la
richesse totale de certains groupes taxonomiques (champignons, bryophytes et oiseaux) alors
que les plantes vasculaires sont favorisées. Ces résultats sont en général plus marqués pour
les forêts boréales, mais pas systématiquement.
Ensuite, par le biais de 213 placettes installées dans 15 massifs forestiers français, nous avons
analysé les effets de l’abandon d’exploitation sur la structure forestière ainsi réponse de 7
groupes taxonomiques. Nous montrons d’une part qu’en absence d’exploitation, les éléments
caractéristiques des vieilles forêts (gros arbres, bois morts) sont ceux dont l(augmentation est
la plus significative. Inversement, des éléments fortement liés à l’exploitation ont tendance à
disparaître (souches). D’autres part, les résultats des analyses de biodiversité confirment dans
une certaine mesure les résultats mondiaux, notamment pour les bryophytes et champignons
lignicoles. Cependant, la mise en réserve en tant que telle n’est la plupart du temps pas la
meilleure explication des différences entre peuplements exploités et non exploités, mais que
d’autres variables, liées au bois mort notamment, expliquent mieux les patrons pour ces
groupes, et également pour des groupes écologiques plus fins (notamment bryophytes
spécialistes forestières). Pour les autres taxons, la réponse est plus faible et dépend plus de la
structure du peuplement que de la mise en réserve.
En termes d’appui aux politiques publiques, le projet a permis des avancées méthodologiques
notamment grâce au développement de protocoles d’inventaires, de méthodes d’analyse
d’image en télédétection et de méthodes statistiques. Nous avons notamment pu montrer
l’intérêt d’une approche multitaxonomique d’une problématique de recherche-action. Le jeu de
données acquis constitue par ailleurs un premier état des lieux de la structure forestière et de
la biodiversité des réserves forestières intégrales en France, en comparaison avec des forêts
exploitées et à une échelle nationale. Ce travail contribue également à l’amélioration continue
des indicateurs de biodiversité et de gestion durable des forêts françaises en fournissant pour
la première fois une analyse pour le territoire. Ce dispositif pourrait enfin servir de première
base à un suivi au long cours de la biodiversité des forêts françaises intégrant clairement les
forêts non exploitées comme référence.
Mots-clés : Biodiversité forestière ; Structure de peuplement ; perturbations ; Degré de
naturalité ; Mesure de la biodiversité ; Indicateur de biodiversité ; Modèles statistiques
bayésiens.