THÉORIES QUANTIQUES ET
FIBRATIONS
Daniel BENNEQUIN
Institut de Mathématiques de Jussieu - Paris 7
1
Théories quantiques et fibrations
(Daniel BENNEQUIN, Institut de Mathématiques de Jussieu, Paris 7)
1) Depuis Galilée, la physique moderne a connu bien des révolutions!: mécanique
classique, théorie des champs, thermodynamique et mécanique statistique, relativité,
mécanique quantique, théorie quantique des champs, supercordes,….
À partir de ces bouleversements, selon Heisenberg, on peut considérer que des
continents séparés se sont formés. Cependant, sur ces continents, on parle une même langue,
on entend les noms des mêmes concepts!; dynamique, énergie, symétrie, perturbation, action,
dualité,….
Comme l’avait compris Galilée, la nature en physique parle la langue géométrique.
Mais la géométrie elle-même a changé, des territoires nouveaux ont surgi, se sont creusés. La
géométrie euclidienne semblait suffire aux besoins de la mécanique, mais les champs ont
provoqué la géométrie différentielle. En retour, la géométrie symplectique a servi la
mécanique classique aussi bien que la mécanique quantique.
Cet exposé ne vise qu’un objectif!: à montrer simplement que la topologie des fibrés et
des connexions est au cœur de la physique quantique, et plus particulièrement des champs
quantiques. Il suffit de parcourir les superbes livres de ‘t Hooft! Under the Spell of the
Gauge!Principle“ [25] et de Polyakov “Gauge Fields and Strings“ [35], pour s’en convaincre.
2) Partons des équations de Maxwell pour l’évolution du champ électromagnétique
E,
B
( )
dans l’espace-temps usuel.
c2
∇ ×
B=
E
t
+
j/
ε
,
.
E=
ρ
/
ε
,
∇ ×
E=
B
t,
.
B=0
.
Il est plus naturel, pour comprendre son côté tensoriel, de construire une forme
différentielle de degré 2 sur l’espace-temps!:
F=
E.d
x×dt +
B.d
x×d
x
, et d’introduire
l’opérateur de dualité de Hodge!:!
E=c2
B,
.
2
Les équations se réécrivent, avec
j=
jd
x+
ρ
dt
,
d
F = j /
ε
° , dF = 0.
La seconde équation dit que F est une forme fermée, ce qui, localement, justifie
l’introduction du potentiel
A
:
F=dA
,
A=
A.d
x+
ϕ
dt,
c
B=
∇ ×
A,
E=
A
ct
+
ϕ
.
Les équations peuvent se réécrire comme un système du 2e ordre sur A, mais font alors
apparaître une indétermination de jauge!: à A il est toujours possible d’ajouter une 1- forme
fermée!donc localement différentielle d’une fonction. L’histoire n’a pas saisi cette occasion
pour interpréter F comme une courbure et!A comme une connexion.
La mécanique quantique, relativiste ou non, aurait également pu passer à côté sans la
vigilance de Weyl et de London!: car ce sont eux qui comprirent les premiers que l’ambiguïté
de jauge venait d’une ambiguïté fondamentale sur la phase (absolue) des fonctions d’ondes
des particules chargées!: à A A = A+df correspond le champ de rotation!:
x,
Ψ(x)Ψ'(x)=exp(2
π
i
hef (x))Ψ(x)
.
C’est à condition de pratiquer ensemble ces deux transformations qu’on peut trouver
(A,Ψ) solution des équations complètes du champ et des particules à partir d’une autre
solution
(A,Ψ)
. Il est bien tentant de dire qu’il s’agit de la même solution vue à travers un
autre repère.
La naissance du principe d’équivalence de jauge est bien retracée dans le livre de
reprints de O’Raifeartaigh [34].
3) Pour traduire la nature de ces équations et de ces invariances, il n’y a pas de
meilleure structure que celle de fibré et de connexion dessus mises en place par Charles
Ehresmann à partir des idées de Elie Cartan (Réf!:!Ehresmann [17], Nomizu [33], Steenrod
[37], Atiyah [ 1], [ 2]).
Au-dessus d’un espace-temps
W
(ici de dimension 4 si l’on souhaite profiter de
l’étoile de Hodge, mais qui à part cela peut être de dimension quelconque),!imaginez une
3
collection d’espaces vectoriels,
Ex,xW
, réunis, tenant ensemble comme dans un faisceau de
fibres grâce à leurs zéros
0x,xW
, attachés par la base W, afin de former l’espace total E.
Intrinsèquement, une fonction d’ondes Ψ est une section de
Ε
!: un point dans Ex pour
chaque x dans W.
Commençons avec le cas le plus simple, E est un fibré!hermitien en droites
complexes. Il faut écrire des équations du mouvement car la physique ne veut s’occuper que
de dynamique. C’est que l’électromagnétisme (même avec un champ complètement!nul)
intervient!: intrinsèquement le potentiel
A=(
A,
ϕ
)
correspond à une distribution de plans, de
mêmes dimensions que W, transverses aux fibres de
Ε
et compatibles avec la structure
vectorielle des Ex et avec leurs métriques!: juste ce qu’il faut pour relever à
Ε
les!chemins dans
W en des applications linéaires unitaires.
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