Théâtre-Sénart
Scène nationale
théâtre, danse, musique, cirque, opéra, rencontres,
rassemblement, éducation artistique
OUVERTURE DU NOUVEAU THÉÂTRE EN NOVEMBRE
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2 les inrockuptibles théâtre-sénart
Un théâtre pour quoi faire ?
Jean-Michel Puiffe–
Un théâtre est avant tout un
bâtiment dans lequel on se
réunit… Si l’on accepte l’idée
que les gens ont encore et
toujours le besoin d’être ensemble pour
partager leurs passions, si l’on admet
le principe que d’autres personnes,
les artistes, les musiciens et les poètes,
ont un talent particulier pour faire
entendre la sensibilité du réel, pour
témoigner du monde en racontant
des histoires, alors il faut un endroit où
les uns peuvent se réunir et les autres
se produire face à cette assemblée.
Quelle est la situation spécifique
d’un théâtre en grande banlieue ?
On parle beaucoup du périurbain,
et il y a en effet une réalité géopolitique
de la périphérie des grandes villes…
Mais quaranteans après que l’Etat a
pris la décision de la création des villes
nouvelles, la question du bien-vivre
dans ces agglomérations constituées
de toutes pièces reste à l’ordre du jour.
Ce qui va de soi dans n’importe quelle
autre ville –avoir un théâtre et une
offre culturelle proches du lieu où l’on
habite– n’a aucune raison d’être remis
en cause parce que l’on vit à 45minutes
enRER de la capitale. La revendication
de construire un nouveau théâtre au
Carré Sénart est fondée sur le fait que
les habitants de Sénart sont en droit
d’avoir une relation de proximité à l’art
Quelles sont les missions de
ce nouveau théâtre ?
Le Théâtre-Sénart est l’une des
soixante et onzescènes nationales,
un théâtre de service public et un lieu
pluridisciplinaire dans lequel
on pourra découvrir toutes les formes
artistiques: du théâtre, de la danse,
de la musique, de l’opéra et du cirque.
Notre bassin d’influence est
peuplé de 300 000habitants, notre
programmation se doit d’être
éclectique pour atteindre son but
et parler à tout le monde. Cette
ambition se transforme en un joyeux
défi, car la relation au spectacle vivant
n’est pas de la première immédiateté
pour nos concitoyens. Nous sommes
prescripteurs et le rapport de confiance
à installer avec les spectateurs est
la principale garantie de voir croître
leur désir de découvrir. Le lieu a donc
pour première mission de transmettre,
de faire connaître.
et à la culture… Pour qu’ils puissent
s’enrichir de la rencontre avec l’autre
et mieux comprendre le monde dans
lequel ils vivent. Le rêve était de
banaliser la ville… Qu’elle devienne
comme toutes les autres.
Sénart est une ville très jeune. Le
théâtre est-il le signal de sa maturité ?
Sénart est la plus jeune des villes
nouvelles. Elle poursuit donc sa
construction, et la réalisation du
théâtre – par lAgglo de Sénart – en est
le signe le plus flagrant. Elle rattrape
ainsi le niveau d’équipement culturel
de toute grande ville. Même si, en son
temps, LaCoupole de Combs-la-Ville,
toute proche, avait été la preuve d’une
ambition spectaculaire et radicale
à travers le choix de l’œuvre réalisée
par l’architecte Jean Nouvel. Le Carré
est le repère de sa centralité, le lieu
du partage et de la mise en commun
des ressources, donc l’endroit idéal
pour construire un théâtre. L’acte
fondateur du Carré Sénart a été la mise
en place des principes d’un paysage
végétal remarquable. Mais, avec
ce très beau vaisseau, œuvre de
lAtelier d’Architecture Chaix&Morel
et Associés, le théâtre est désormais
un repère symbolique dans la
composition du Carré… Tout autant
qu’un repère physique, car en
culminant à 29mètres, la cage de
scène fait du bâtiment un signal qui
domine toutes les autres constructions.
“première mission :
transmettre
Dans les années70, naissait la ville nouvelle
de Sénart, à 35kilomètres au sud-est de Paris.
Aujourd’hui, c’est un nouveau théâtre qui voit le jour
dans l’agglomération. Plus exactement dans le Carré
Sénart, écrin paysager et lieu de centralité
pour la ville. Le Théâtre-Sénart, Scène nationale, sera
inauguré le 28octobre. En attendant, rencontre avec
son directeur, Jean-Michel Puiffe.
Atelier d’Architecture Chaix & Moret et Associés
Vue de la
grande salle
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théâtre-sénart les inrockuptibles 3
Le théâtre est une maison que vous
souhaitez voir habitée en permanence…
L’autre versant de notre mission
est d’accompagner des artistes dans
leurs projets en aidant à la naissance
de leurs créations. A Sénart, nous
avons voulu répondre réellement
à la question de la pluridisciplinarité
en accueillant le théâtre, la danse
et la musique dans un lieu conçu pour
répondre aux impératifs de travail
de chaque discipline… Permettre à
des artistes d’en faire un camp de base
en leur offrant le confort de pouvoir
répéter et imaginer leurs projets
tout en les aidant à produire et diffuser
leurs spectacles. Il est important
d’avoir aussi avec eux des relations sur
mesure. Nous avons réuni sous notre
notre programmation se doit d’être éclectique
pour atteindre son but et parler à tout le monde
toit troiséquipes constituées chacune
autour d’un artiste associé. Il ne s’agit
pas d’un mariage pour toujours…
En imaginant ces partenariats sur
une période de troisans, notre souhait
est que le plaisir et le désir d’être
ensemble soient un moteur à entretenir
pour nous faire avancer.
Pouvez-vous nous présenter chacun
des artistes en résidence ?
En musique, il s’agit de l’orchestre
LesSiècles, sous la direction de
François-Xavier Roth, l’un des premiers
ensembles à jouer sur des instruments
d’époque pour faire entendre
la musique dans les conditions de
sa création. Avec eux, nous allons
pouvoir parcourir une grande variété
d’esthétiques musicales radicalement
différentes les unes des autres. Pour
la danse, avec la compagnie Mad, c’est
le chorégraphe Sylvain Groud, dont le
travail se nourrit d’une relation sensible
au sociétal. Une générosité rare
qui, à travers un lien tactile à l’autre,
développe un rapport très beau et assez
unique à la danse. Enfin, en théâtre,
avec la compagnie Pipo, c’est un
homme d’une humanité sans pareil,
un chef de troupe que nous accueillons:
Patrick Pineau. Il va venir à Sénart avec
le plaisir et la nécessité de faire
ce qui le caractérise depuis toujours.
Ces troisartistes ont chacun le même
souci de partager leur art. Nous
avons besoin de ce type d’énergie pour
qu’au quotidien cette maison soit
aussi habitée et vivante qu’attractive1.
propos recueillis par Patrick Sourd
1. lire aussi le portrait des troisartistes
associés pp. 6 et 7
theatre-senart.com
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4 les inrockuptibles théâtre-sénart
Comment penser un lieu de centralité pour
l’agglomération urbaine de Sénart ? C’est
en urbaniste féru d’art que François Tirot,
le créateur du Carré Sénart, nous en rappelle
la genèse: “Ma référence de départ était
Victory Boogie-Woogie, l’ultime tableau de Piet
Mondrian où, réinventant sa peinture constituée d’épais
traits noirs et de carrés de couleurs, le peintre trace les
principes de sa trame en couleur en laissant les carrés
en blanc.” Directeur de l’urbanisme et du paysage
à l’Etablissement public d’aménagement de la ville
nouvelle de Sénart, François Tirot poursuit: “Mon idée
était de démontrer qu’à l’intérieur de la forme symbolique
d’un carré, il était possible de stabiliser et de contenir le
développement d’une urbanité tout en créant un espace
fonctionnant comme un repère digne de lart sur la
carte.” Ainsi est née l’utopie urbaine du Carré Sénart.
“Dans un premier temps, j’ai commencé par m’appuyer
sur une diagonale historique datant de LouisXV,
une allée royale tirée au cordeau reliant les forêts
les racines
du Carré
Le créateur du Carré, François Tirot,
revient sur la genèse, au début des
années2000, de ce projet de paysage apte
à fonder le nouveau centre-ville de Sénart.
je mattache à ce que
ce territoire grandisse
à la manière dun plateau
qui séquilibre
de Rougeau et de Sénart. Pour transformer cette trace
du passé en un repère contemporain, mon premier geste
a été d’y faire planter sur toute sa longueur cinq cents
séquoias et de la désigner comme un monument végétal.”
François Tirot peut alors inscrire les 200hectares
du Carré Sénart sur le territoire, en s’appuyant sur
le travail des archéologues missionnés pour procéder
à des recherches avant de lancer une intervention
d’une telle ampleur. J’ai agrafé le Carré à cette allée
royale en l’orientant suivant les tracés historiques des
parcelles et fait planter sur chacun de ses côtés une
rangée de tilleuls. Un marquage du lieu par du végétal
pour dire ‘c’est là que ça se passe, là que nous allons
créer de la valeur’. Après, j’ai découpé l’espace intérieur
en allées, canaux, espaces boisés et voies de circulation
pour ensuite poursuivre avec la trame de petits carreaux
où, en fonction des programmes, peuvent se réaliser
toutes les hypothèses de construction.”
La souplesse des principes posés s’adapte aux
aléas de la politique et de l’économie en prônant
l’autonomie de chacun des projets. “Il faut bannir
le vieux réflexe d’une croissance à partir d’un centre de
gravité. Je m’attache à ce que ce territoire grandisse
à la manière d’un plateau qui s’équilibre. C’est pourquoi
le nouveau Théâtre-Sénart n’est pas en face du centre
commercial. Il m’a semblé plus riche d’éloigner le pôle
commercial et le pôle culturel, de permettre à d’autres
projets de créer des liens entre eux.” Patrick Sourd
Atelier d’Architecture Chaix & Moret et Associés
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théâtre-sénart les inrockuptibles 5
des ondulations de collines
Architecte de lAtelier d’Architecture Chaix & Morel et Associés en charge du projet,
Anabel Sergent dévoile les principes de conception du nouveau Théâtre-Sénart.
Comment inscrire le théâtre dans le site ?
Anabel Sergent– Le Carré Sénart
est un site très étonnant. Le terrain mis
à disposition est une marelle de quatre
carrés: un carré de parc boisé, un de
stationnement, un autre pour installer
un théâtre de plein air ou des chapiteaux et
un dernier pour poser le bâtiment du théâtre
lui-même. Construire sur cette grande
lande de plaine et répondre au principe
d’autonomie de chaque bâtiment
sur son territoire excluait dès le départ
les références à la ville. L’idée était alors
de créer un événement structurant
et participant du paysage.
Quelle image avez-vous voulu donner
au nouveau Théâtre-Sénart ?
Il s’agissait de réunir l’ensemble des
éléments du programme en reliant les
contraintes de leurs différences de hauteur
par des plans inclinés, jusqu’au point
culminant à29 mètres du volume de la cage
de scène de la grande salle. Et, ainsi, créer
un mouvement de terrain: un soulèvement
du sol avec des ondulations de collines
dans cet endroit où il n’y en a pas. Une peau
de caissons métalliques couvre l’ensemble,
s’adapte à son relief, habille le bâtiment
de façon continue, de son sommet jusqu’au
fruit des flancs, qui ouvrent l’espace de son
grand patio végétal vers le ciel. Une peau
dont les caissons de couleur grise déclinent,
à travers les motifs de leurs perforations et
embossages, l’idée d’une fractale du carré
jusqu’à la plus petite échelle et permettent,
la nuit, de donner des effets de nuées
luminescentes.
Et l’organisation intérieure ?
Le bâtiment donne l’impression de ne pas
prendre appui sur le sol: un soulèvement
qui invite le public à y entrer et correspond
à un hall se déclinant en séquences et se
déployant sur toute la longueur du côté
orienté sud-ouest. On y accède dans l’axe
du jardin du patio central… Au plus près de
l’escalier monumental qui mène à la grande
salle, de la billetterie, d’un coin librairie
et du bar. Le restaurant occupe l’angle
vers le parking. Les loges et les bureaux
disposent d’une terrasse à l’étage et d’un
vaste balcon donnant sur le grand patio.
Quels usages pour les trois salles ?
Habillée de caissons de hêtre sombre, la
grande salle a une capacité de 843places.
La faible courbure des rangs de fauteuils
y autorise chacun à appréhender l’ensemble
du plateau. Sa fosse d’orchestre, pour
quarantemusiciens, permet d’accueillir de
l’opéra et, s’agissant du théâtre, elle dispose
de cintres et de dessous, d’une arrière-
scène et de dégagements à cour et jardin.
La petite salle est de type modulable,
une black box à usages multiples, avec
un gradin rétractable et la possibilité
d’un deuxième gradin en bifrontal qui porte
sa capacité à403places. ainsi qu’une
configuration debout pouvant accueillir
plus de 1 000 personnes. Donnant sur
le patio, la salle René Gonzalez a les
dimensions du plateau de la grande salle,
elle est dédiée aux répétitions et à l’action
culturelle. propos recueillis par P. S.
Vue du Théâtre-Sénart
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