UTILISATION DE L’IRM SEULE POUR LA RADIOTHERAPIE CONFORMATIONNELLE DU CANCER DE LA PROSTATE PASQUIER D. 1,2, COULANGES M. 2, BETROUNI N. 2, BONODEAU F. 3, TAIEB S. 3, ROUSSEAU J. 2, LARTIGAU E. 1 1 Département Universitaire de Radiothérapie, Centre O. Lambret, Université Lille II 2 INSERM U 703, Institut de Technologie médicale, UPRES EA 1049, Lille 3 Département d’Imagerie Médicale, Centre O. Lambret, Lille Le cancer de la prostate est le premier cancer chez l’homme en terme d’incidence dans les pays industrialisés. La radiothérapie externe fait partie de l’arsenal thérapeutique avec la chirurgie et la curiethérapie. Les progrès récents de l’imagerie et de l’informatique ont permis le développement de la radiothérapie conformationnelle avec ou sans modulation d’intensité. L’examen le plus utilisé pour la définition des volumes est la tomodensitométrie (TDM); l’utilisation de l’IRM seule pourrait augmenter l’index thérapeutique de la radiothérapie. En radiothérapie conventionnelle la détermination des champs d’irradiation se faisait sur des clichés orthogonaux. Les volumes tumoraux et à risque étaient reportés manuellement. Les calculs dosimétriques étaient réalisés sur une ou plusieurs coupes axiales. Les résultats dosimétriques étaient connus sur une surface et pas dans un volume. Radiothérapie conformationnelle Détermination des volumes tumoraux et des organes à risque sur un examen de tomodensitométrie (TDM) Reconstruction tridimensionnelle des volumes Radiothérapie conformationnelle Balistique d’irradiation plus complexe Irradiation tumorale plus homogène Préservation accrue des organes sains Connaissance précise des doses délivrées dans les volumes tumoraux et les organes à risque (histogrammes dose-volume) Escalade de dose (augmentation de la survie sans récidive biologique et métastatique) Dosimétrie et reconstructions tridimensionnelles d’après un examen de tomodensitométrie Histogrammes dose-volume (volume cible et rectum) L’ examen le plus utilisé pour la définition des volumes est la tomodensitométrie en raison de sa précision géométrique (absence de distorsion) et des informations données sur les densités électroniques des tissus, nécessaires aux calculs dosimétriques. Ces caractéristiques permettent son intégration directe dans les calculs dosimétriques; la détermination des densités électroniques se fait à partir des UH de l’image. Unité Hounsfield = 1000 x (µ eau − µ ) µ µ = coefficient linéique d’atténuation (cm-1) eau 1500 1000 Unité Hounsf. 500 0 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1,8 2 -500 -1000 -1500 Densité électronique relative Courbe d’étalonnage du scanner Somatom Plus (Siemens®) Grâce à son contraste élevé pour les tissus mous et la possibilité d’acquisition multiplanaire, l’IRM permet une meilleure définition du volume cible. Dans la littérature le volume prostatique défini sur IRM est inférieur de 27 à 50 % à celui défini sur TDM. L’IRM permet également de diminuer la variabilité intra et inter-observateur, particulièrement au niveau de l’apex et des vésicules séminales. A l’heure actuelle l’IRM n’est utilisée qu’après fusion avec les images TDM. L’utilisation de l’IRM seule permettrait d’éviter l’imprécision induite par la fusion d’images, et éviterait la réalisation d’un examen supplémentaire, contraignant pour le patient et difficile à coordonner avec l’IRM en pratique quotidienne. Fusion d’images TDM – IRM Obstacles à l’utilisation de l’IRM seule I) Distorsion 1) Liée au système (hétérogénéités du champ magnétique B0 et des gradients) 2) Liée au déplacement chimique II) Absence d’information sur les densités électroniques III) Reconnaissance des images IRM par les systèmes de planification de dose IV) Reconstruction osseuse d’après les images IRM Matériels et méthodes Distorsion liée au système La distorsion liée au système a été étudiée avec un fantôme de taille équivalente à un pelvis (40x30x20 cm) constitué de billes disposées selon un motif cubique de 3 cm baignant dans du 1-2 propane-diol. La géométrie exacte du fantôme a été déterminée grâce aux images TDM. Les mesures de distorsion ont été menées sur deux machines à aimant supra-conducteur de 1.5 T. (séquence TSE pondérée T2). ∆x y z = (∆x 2 + ∆y 2 + ∆z 2 ) Déplacement chimique Inversion des axes de codage de phase et de fréquence chez 4 volontaires; après contourage de chacune des structures, mesure du déplacement du contour externe, de la prostate, de la vessie, et de l’isocentre déterminé par trois marqueurs cutanés. G r a d i e n t d e G r a d i e n t d e f r é q u e n c e p h a s e Gradient de fréquence Gradient de phase Détermination des densités électroniques à assigner Mesure des densités électroniques relatives sur les images TDM chez 10 patients (muscle, graisse, os) Comparaison de ces données avec les données de la littérature Calculs dosimétriques Comparaison chez 10 patients des plans de traitement obtenus: - avec densités électroniques (images TDM natives) - sans densités électroniques - après assignation de densités électroniques aux tissus mous et à l’os Les plans de traitement ont été calculés avec des photons de 10 et 25 MV (4 puis 5 champs). Le flux obtenu pour chaque champ a été assigné au champ correspondant du plan de traitement réalisé sur les images TDM natives. Les plans de traitement ont été comparés en terme de dose (histogrammes dose-volume); la répartition spatiale des écarts dosimétriques a également été évaluée en soustrayant les matrices de doses obtenues. RESULTATS Distorsion liée au système Sur des machines correctement calibrées, la distorsion moyenne reste modérée même pour des champs de vue de 40 à 50 cm. 7 6 Distorsion (mm) 5 4 3 2 1 0 0 5 10 15 Distance du centre du champ de vue (cm) Magnetom Vision Gyroscan Intera 20 25 Déplacement chimique Volontaire 1 Bande passante (Hz/pixel) Résolution (pixel) 15 23 256 x 256 Volontaire 2 15 Volontaire 3 23 15 256 x 256 23 256 x 256 Volontaire 4 15 512 x 512 Contour externe d x (mm) 1.8 1.9 3.4 2.5 3.5 1.2 2.4 d y (mm) 3.5 3.5 1.3 1.6 3 2.9 0.6 Vessie dx (mm) 1.5 0.4 0.4 1 1.1 0.3 0.2 d y (mm) 0.3 0.6 1.5 0.8 0.3 0.6 1.8 d x (mm) 0.5 0.2 1.3 1.8 0.1 d y (mm) 1.8 1.6 0.7 2.6 0.1 Isocentre Fréquence de résonance (Hz) 63 613 500 63 613 560 63 613 530 63 613 540 Le déplacement chimique reste inférieur aux valeurs théoriques, en raison de l’adaptation de la fréquence de résonance au patient étudié. Le déplacement chimique de la prostate est trop faible pour pouvoir être mesuré. Valeurs théoriques pour la graisse: 2.1 cm avec: bande passante de 15 Hz/pixel et résolution de 256 x 256 pixels 1.4 cm 23 Hz/pixel 256 x 256 pixels 1.05 cm 15 Hz/pixel 512 x 512 pixels Détermination des densités électroniques Les densités électroniques mesurées sont comparables à celles retrouvées dans la littérature. Il existe cependant peu de données dans la littérature concernant les densités électroniques des structures pelviennes. Densité électronique relative (données de la littérature) Densité électronique relative mesurée Muscle 1.042 1.039 ± 0.009 Graisse 0.952 ± 0.018 0.946 ± 0.003 Tissus mous 1.024 (corps entier) 0.986 ± 0.007 (pelvis) 1.278 * 1.182 ** (os entier) 1.271 ± 0.03 (extrémité supérieure) Tête fémorale 1.284 1.251 ± 0.04 Os iliaque 1.347 (os entier) 1.303 ± 0.04 (partie inférieure) Fémur Sacrum * Adultes de 30 ans ** Adultes de 90 ans 1.2 ± 0.03 Calculs dosimétriques L’absence de prise en compte des hétérogénéités induit un sous dosage du volume cible de 2.7 % et 1.5 % avec des photons de 20 et 10 MV. Après assignation de densités électroniques aux tissus mous et à l’os, l’écart dosimétrique est de l’ordre de 0.5 %. PTV 2 heterog 120 PTV 2 Homog PTV 2 T mous os 100 120 Rectum Heterog Rectum Homog Rectum T mous os 100 80 80 60 60 40 40 20 20 0 0 60 65 70 75 80 20 30 40 50 60 70 Histogrammes dose-volume (volume cible et rectum) pour chacun des trois plans de traitement chez un patient 80 Calculs dosimétriques La répartition des écarts dosimétriques est homogène au sein du volume cible. Chez les 10 patients étudiés, l’écart type de la différence de dose est compris entre 0.01 % et 0.22 %. Soustraction des matrices de dose sans puis avec assignation de densités électroniques Reconnaissance des images IRM par les systèmes de planification de dose Après modification des entêtes des fichiers DICOM, il a été possible de réaliser une planification dosimétrique directement sur IRM après assignation de densités électroniques. De la même manière la réalisation de «Digitally Reconstruction Radiographs» (DRR) nécessaire à la vérification de la position du patient est possible. CONCLUSION – PERSPECTIVES • La distorsion liée au système est acceptable (1-3 mm) dans un volume suffisant pour des localisations extra-cérébrales. L’application d’une méthode de correction pour obtenir une valeur millimétrique est possible. •Le déplacement chimique est compatible avec la précision requise pour la radiothérapie externe. Des séquences avec des gradients élevés doivent être privilégiées. •L’assignation de densités électroniques à seulement 2 structures (tissus mous et os) permet d’obtenir une dosimétrie équivalente à la dosimétrie originale. • Après modification de leur entête les images IRM peuvent être utilisées seules dans les systèmes de planification de dose. Au total l’utilisation de l’IRM seule pour la planification dosimétrique du cancer de la prostate pourrait être envisagée dans un avenir proche. Bibliographie Cazzaniga LF, Marinoni MA, Bossi A, Bianchi E, Cagna E, Cosentino D, Scandolaro L, Valli M, Frigerio M. 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