ENQUÊTE SUR LE DIEU UNIQUE
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contraire, appliquèrent cette distinction pour l’apposer au judaïsme ainsi qu’au christianisme,
comme pour mieux affirmer la supériorité morale mais également spirituelle de ces religions.
Très rapidement, s’impose donc que l’idée monothéiste peut se pratiquer de deux manières
opposées : de façon inclusive tout d’abord, à savoir que tous les hommes vénèrent le même dieu,
ou exclusive, c’est-à-dire que la foi monothéiste permet discerner, de distinguer, voire de séparer
les religions bibliques des autres croyances. On perçoit alors toute la difficulté à appréhender le
monothéisme et surtout, à le penser. Pourtant, l’injonction du Deutéronome est sans ambiguïté :
« Tu n’auras pas d’autres dieux face à moi. »Et pourtant, l’image d’un dieu solitaire semble
beaucoup plus compliquée à concevoir. Cette complexité est peut-être le résultat de l’opposition
entre le polythéisme et le monothéisme, longtemps présentés de façon manichéenne. Le combat et
les enjeux entre le bien (monothéisme) et le mal (polythéisme) ont par conséquent grandement
simplifiés les idées. Avec la découverte des autres grandes religions à la fin du XVIIème siècle,
certains missionnaires jésuites osent écrire que tout n’est pas mauvais dans les religions païennes.
Puis, au XVIIIème siècle, Voltaire et Diderot surtout ouvrent une brèche en soumettant l’idée que
les dieux sont pensés par les hommes. Enfin, un dernier tournant a enfoncé le clou avec
l’apparition de l’histoire des religions puis de l’ethnologie au XIXème siècle.
Les chercheurs en ont donc déduits que derrière ce polythéisme, se cachait un monothéisme
fondamental qui était tu dans la mesure où ce dieu était si lointain qu’il n’était pas menaçant.
Parallèlement, s’est développée l’idée que dans les religions polythéistes (égyptiennes, gréco-
latines) aurait également existé un monothéisme de fait. Le roi, la cité, la famille optent pour un
dieu ou une déesse « unique ». Contrairement à l’impression ressentie par Paul à Athènes, le païen
lambda ne voit pas une multiplicité de dieux mais, en réalité, « son » dieu. Enfin, la troisième
hypothèse pose la question de savoir ce que traduit le monothéisme. Chez les prophètes et les
mystiques, on débouche sur l’idée d’un dieu pur, doté d’une moralité sans faille car le polythéisme
est soupçonné d’amoralité, mais aussi une difficulté à penser Dieu comme seul. Le texte biblique
reflète également ces tâtonnements. Mais, il semblerait que la date du retour d’exil de Babylone
marque la progression de l’idée d’un dieu unique. L’exil à Babylone est l’occasion pour les
Hébreux de se confronter à un autre système religieux, de s’en nourrir mais en affirmant
l’existence d’un dieu « un ». Dès le retour d’exil, les prêtes prennent le relais des prophètes et
annoncent au peuple qu’il n’existe qu’un seul dieu.
L’ÉGYPTE, CREUSET DU MONOTHÉISME ?
L’ÉGYPTE, CREUSET DU MONOTHÉISME ?
Les origines ainsi que les mobiles de la révolution monothéiste voulus par Aménophis IV 1353 –
1337 av J.C., ne sont que partiellement connus. Ce souverain quitte Thèbes à la sixième année de
son règne pour aller fonder Akhénaton (Tell-el-Amarna) entièrement vouée à vénération du dieu
Aton, le disque solaire. Le roi s’échine à effacer toutes traces des dieux précédents. Le culte que
porte ce pharaon à Aton peut préfigurer le déisme de certains représentants des Lumières : Aton
est le dieu unique. La nouvelle religion est fortement marquée par le culte royal. Akhénaton est le
fils d’Aton, le seul qui connaisse dieu. On a voulu faire de la révolution de ce pharaon iconoclaste,
d’ailleurs bien vite effacée par ses successeurs, comme la naissance du monothéisme. Et de faire
de Moïse son disciple. Or, le monothéisme biblique n’émerge que huit siècles plus tard, se fonde
sur la tora, (loi) et ne s’enracine pas dans l’idéologie royale. Exit donc toute tentative de faire de
l’Egypte le berceau du monothéisme. Il reste cependant des traces ayant pu influencer les auteurs
bibliques. L’association des figures de Moïse et d’Akhénaton remonterait à Manéthon, un prêtre
égyptien hellénisé du IIIème siècle avant J.C. Dans son histoire de l’Egypte, Manéthon raconte
l’histoire d’un prêtre nommé Osarsiph devenu le chef d’une communauté de lépreux astreints aux
corvées à qui il aurait donné des lois contraires à toutes les coutumes égyptiennes alors en vigueur.
Ce prêtre précise que le chef de ces impurs aurai changé de nom et prit celui de Moïse. Manéthon
présente donc Moïse comme un Égyptien demeuré incompris de tous les siens.
NAISSANCE DE L’IDÉE DU DIEU UNIQUE
NAISSANCE DE L’IDÉE DU DIEU UNIQUE
Ne cherchons pas de point de départ nodal dans cette affaire. Le monothéisme biblique ne débute
pas avec Moïse, les contours historiques demeurent trop difficiles et impossibles à retracer. Des