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Parmi les premiers présocratiques se dresse une figure isolée, celle de Xénophane (de
Colophon), célèbre pour s’en être pris à l’anthropomorphisme de la religion : si les chevaux
et les bœufs pouvaient peindre leurs dieux, ils leur donneraient des figures de chevaux ou
de bœufs, fait remarquer Xénophane. « Il n’y a qu’un seul Dieu… qui ne ressemble aux mor-
tels ni par le corps, ni par la pensée. » Déjà Héraclite s’en prenait à la façon dont Homère
nous dépeignait les dieux. La critique de la façon populaire de se représenter les dieux se
retrouvera chez Platon.
L’ÉCOLE D’ÉLÉE
On oppose traditionnellement à l’école ionienne l’école d’Élée. Élée se trouve en Italie du
Sud, à l’ouest de la péninsule grecque. Les noms rattachés à cette école sont ceux de
Parménide et de son disciple Zénon d’Élée, tous deux du Vesiècle avant Jésus-Christ.
On oppose Parménide àHéraclite, comme le philosophe de l’Être au philosophe du Devenir.
En effet, Parménide, dans le fameux poème qui nous est resté de lui, dit : « Il est impossible
que l’Être ne soit pas ou que le non-Être soit. » « L’Être est, le non-Être n’est pas. »
L’être désigne simplement tout ce qui est, autrement dit le monde dans son ensemble. Il
est contradictoire en effet de dire que le monde peut n’avoir pas été avant d’être, ou qu’il
ne soit plus un jour après avoir été. Car du non-être on ne peut dériver de l’être, et jamais
de l’être ne peut devenir du non-être. La naissance ou la mort de l’univers (de l’être) sont
impensables. Cela implique aussi que le temps et le mouvement ne sont que des appa-
rences. On peut bien avoir l’impression que tout change, et que le temps passe, mais fonda-
mentalement le même monde demeure. Il est. S’il est, il est éternellement présent. Il ne
sera pas. Il n’a pas été.
Zénon développe toutes sortesde paradoxes logiques montrant qu’il est impossible de
penser sans contradiction le mouvement ou le changement. S’il est possible de diviser la
ligne que parcourt un mobile en une infinité de points, il faudra une infinité de temps à ce
mobile pour la parcourir (Achille, par exemple, ne rattrapera jamais la Tortue partie avant lui).
PYTHAGORE
L’Italie du Sud fut par ailleurs le ber-
ceau du pythagorisme. Pythagore, né à
Samos, s’est établi à Crotone au
VIesiècle. Il y aurait créé une commu-
nauté dontles pratiques religieuses, la
philosophie connurent une grande posté-
rité. Pour le pythagorisme, comme pour
l’orphisme, nos âmes d’origine céleste
divine sont tombées dans des corps. Le
corps (sôma) est le tombeau (sèma) de
l’âme. Les âmes des vivants (végétaux,
animaux, hommes) sont multiples et,
cependant, reliée entre elles par l’âme commune du monde. D’où l’interdiction de sacri-
fier desanimaux etla pratique du végétarisme, et la croyance en la réincarnation.
Citations
«Jamais il (l’Être) n’était ni ne sera,
puisqu’il est maintenant, tout entier à la
fois, un, d’un seul tenant. »Parménide.
«C’est la nature du nombre qui apprend
àconnaître, qui nous sert de guide, qui
nous enseigne toutes choses, lesquelles,
sans cela, resteraient impénétrables. »
D’après Philolaos, pythagoricien du
Vesiècle av.J.–C.