Communiqué de Presse Percer l’enveloppe de protection d’un virus Dessin par Aurélie Albertini, IVMS Des scientifiques mettent en lumière la structure d’une protéine qui aide les virus à se répliquer tout en évitant les réactions du système immunitaire de l’homme Six nucléoprotéines (en couleurs différentes) reliées côte à côte à une molécule AND (noir). Grenoble, 16 juin 2006 - Ebola, la rougeole et la rage représentent un danger sérieux pour la santé publique dans les pays en voie de développement. Leurs symptômes ont beau être différents, ces maladies sont toutes causées par des virus de la même classe qui contiennent une molécule d’ARN simple brin, contrairement à la plupart des autres êtres vivants qui portent leur information génétique sur une molécule d’ADN double brin. Des chercheurs de l’Institut de Virologie Moléculaire et Structurale (IVMS Université Joseph Fourier/CNRS) et de l’Antenne du Laboratoire Européen de Biologie Moléculaire (EMBL) de Grenoble ont obtenu une image détaillée d’une protéine qui permet au virus de la rage de résister à la réponse immunitaire humaine et de survivre et de se répliquer dans nos cellules. L’étude qui est publiée dans l’édition on-line de cette semaine de la revue Science suggère de nouvelles cibles potentielles pour les médicaments antirabiques et suggère comment des méthodes similaires pourraient aider à combattre d’autres maladies virales. Lorsque le virus de la rage pénètre dans les cellules humaines en traversant la membrane, la molécule d’ARN qui porte ses gènes est transportée au centre de la cellule. Là, elle détourne la machinerie cellulaire de l’hôte afin de produire un grand nombre de nouveaux exemplaires du virus qui peuvent infecter à leur tour d’autres cellules. Une molécule est essentielle pour ce mécanisme: la nucléoprotéine. Cette protéine garantit que pendant son parcours au sein de la cellule, l’ARN viral n’est pas détruit par la réponse immunitaire de l’hôte. Selon Rob Ruigrok, le directeur de l’IVMS et Professeur à l’Université Joseph Fourier « la nucléoprotéine est vitale pour le virus de la rage. Il s’agit de l’une des rares protéines que le virus emporte avec lui dans la cellule hôte et elle s’enveloppe autour de l’ARN comme un écran de protection. Sans cette protection, l’ARN serait dégradé par les enzymes du système immunitaire humain qui essayent d’éliminer l’envahisseur ». Pour étudier exactement comment fonctionne cette barrière de protection, Aurélie Albertini de l’équipe de Ruigrok a préparé des cristaux de nucléoprotéine liée à l’ARN. En examinant les cristaux à l’aide de sources de rayons X à haute densité au Centre européen de rayonnement synchrotron (ESRF), Amy Wernimont du groupe de Winfried Weissenhorn à l’EMBL-Grenoble a obtenu une image à haute résolution de la protéine. « La nucléoprotéine se comporte comme une pince » dit Weissenhorn. « Elle est constituée de deux domaines qui se referment comme deux mâchoires autour du brin d’ARN. De nombreuses nucléoprotéines se lient côte à côte le long d’une molécule d’ARN, ce qui bloque l’accès, non seulement aux enzymes de dégradation, mais aussi à la machinerie nécessaire à la réplication du virus. Cela signifie que l’enveloppe de protection doit être souple et permettre d’effectuer une distinction entre les différents types d’enzymes qui tentent d’y accéder. » L’image détaillée de la structure suggère que, sur un signal, une partie de la protéine localisée entre les deux principaux domaines pourrait servir de charnière qui écarte la mâchoire supérieure au moment où la réplication doit avoir lieu. « Ce mécanisme dynamique fait des nucléoprotéines une excellente cible pour les médicaments », dit Ruigrok. « Des agents de petite taille qui se lient à la protéine de manière à bloquer sa flexibilité et à la maintenir sous forme fermée empêcheraient la réplication du virus et pourraient interrompre sa dissémination. » Le virus de la rage partage cette stratégie de protection avec d’autres virus de la même classe ; on a trouvé des complexes d’ARN et de nucléoprotéines similaires dans les virus Ebola, Borna et de la rougeole. « Cela signifie que nos résultats ont non seulement des implications pour la conception de nouveaux médicaments antirabiques mais qu’ils suggèrent également de nouvelles approches thérapeutiques de diverses maladies, dont certaines sont beaucoup plus dangereuses que la rage. Sur un autre registre, la conservation du système des nucléoprotéines ouvre la voie à des spéculations dans le domaine de l’évolution à propos d’ancêtres communs et d’unités infectieuses primordiales des virus à ARN », conclut Weissenhorn. Source Article A.A.V. Albertini, A.K. Wernimont, T. Muziol, R.G.B. Ravelli, C.R. Clapier, G. Schoehn, W. Weissenhorn & R. Ruigrok. Crystal structure of the rabies virus nucleoprotein-RNA complex, Science online, 15 June 2006 Contact: Anna-Lynn Wegener, EMBL Press Officer, Heidelberg, Germany, Tel: +49 6221 387 452, www.embl.org, [email protected] L’EMBL Le Laboratoire Européen de Biologie Moléculaire est un institut de recherche financé par ses 19 pays membres parmi lesquels la plupart des pays de l’Union Européenne, la Suisse et Israël. Les programmes de recherche de l’EMBLsont menés par quelque 80 groupes indépendants qui couvrent tout le champ de la biologie moléculaire. Le laboratoire est éclaté en cinq lieux : le siège, à Heidelberg, et quatre antennes: Hinxton (le laboratoire européen pour la bio-informatique), Grenoble, Hambourg et Monterotondo près de Rome. La mission de l’EMBLest multiforme : la recherche fondamentale en biologie moléculaire, la formation des scientifiques, étudiants et visiteurs, quel que soit leur niveau, le service aux chercheurs des pays membres et le développement de nouveaux instruments et de nouvelles méthodes dans le domaine des sciences du vivant. Le programme international de thèses de l’EMBLaccueille environ 170 étudiants. Enfin le laboratoire finance activement un programme nommé « Science et Société ». Il accueille volontiers, pour des visites, la presse et le grand public. L’IVMS L’Institut de Virologie Moléculaire et Structurale (IVMS) est un laboratoire français supporté par l'Université Joseph Fourier (UJF), Grenoble, et le CNRS et abrité dans le Bâtiment Carl-Ivar Brändén (CIBB) sur le site ILL/ESRF. Le principal objectif de l'Institut est la détermination de la structure des virus, des protéines virales et des complexes entre les protéines virales et cellulaires, en utilisant la cristallographique aux rayons X, la microscopie électronique (ME) ou la résonance magnétique nucléaire (RMN). Ces structures peuvent alors être utilisées pour la conception de petits inhibiteurs moléculaires des infections virales, qui peuvent être testés par enzymologie et dans des cultures de cellules virales infectées. Après l'identification de médicaments potentiels, les industries pharmaceutiques peuvent être contactées pour poursuivre les développements. Policy regarding use EMBL press releases may be freely reprinted and distributed via print and electronic media. Text, photographs & graphics are copyrighted by EMBL. They may be freely reprinted and distributed in conjunction with this news story, provided that proper attribution to authors, photographers and designers is made. 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