religion et de la défendre par la raison et par le droit, pas d'une manière anarchique ni contraire à la loi islamique. Je vais tenter d'interdire la publication et la diffusion du livre au Liban. La liberté a des limites. Nous refusons toute atteinte à l'islam, or ce livre est blasphématoire et tourne en ridicule notre religion et notre Prophète. » fvi0 sociologue algérien Nous avons affaire à un homme qui considère le dogme comme une fin en soi. Il veut réduire l'univers à une seule dimension. Et pour cette raison, il faut condamner avec force son appel au meurtre et aider le peuple iranien à en finir avec la tyrannie Si on ne réagit pas contre Khomeini, il continuera dans la même voie. La liberté d'expression est un bien précieux. Il appartient à tous indépendamment des convictions philosophiques et religieuses. » CHEWH ABIDALUII enseignant à l'Institut islamique de Hebron (Territoires occupés) « J'approuve l'appel de l'ayatollah Khomeini. Il faut égorger ce traître indien et anéantir tout ce qu'il a écrit. Aucun pays occidental ne peut intervenir dans cette affaire musulmane, même sous prétexte que Rushdie est son citoyen. Rushdie est musulman et c'est comme tel qu'il doit payer. Vous, les Occidentaux, vous ne comprenez pas, et ce n'est pas votre faute. Si un musulman attaque la religion, il ne peut y avoir d'autre peine que la mort. » AYATOLLAH MEHDI ROMANI chefsprirituel de la communauté chiite d'Europe « J'ai lu les extraits du livre de Rushdie qui concernent l'islam et le Coran. Il est évident que l'auteur a non seulement renié sa religion mais qu'il a gravement blasphémé. Selon la jurisprudence islamique, il est donc condamnable. Je ne peux pas dire à quelle peine, mais il est condamnable. Les chiites, dans un tel cas, condamnent à mort. Mais il faut d'abord juger le coupable, vérifier s'il est sain d'esprit, s'il a été manipulé ou s'il a renié l'islam par ignorance. Sans un tel procès, une condamnation serait contraire aux principes de l'islam. La liberté d'expression, il faut le rappeler, fait partie des cinq principes de l'islam. Et l'un des versets du Coran dit que "dans la religion, il n'y a pas de contraintes". « Seul un tribunal islamique est donc compétent pour dire si, dans ces circonstances, Rushdie est coupable ou non. Si j'étais juge, je condamnerais Rushdie, car ce qu'il a fait est une sorte de désertion. Il a trahi l'islam, ça ne fait pas le moindre doute. Mais je ne le condamnerais pas à la peine de mort. Car le Code pénal islamique est soumis à "la loi du temps et de l'espace" et à un autre principe capital : si l'exécution d'une loi islamique porte atteinte au prestige de l'islam - ce qui pourrait être le cas dans l'affaire qui nous intéresse -, l'autorité juridique n'a pas le droit d'appliquer cette loi. Si j'avais rencontré Rushdie, je lui aurais dit : "Tu t'adresses à un milliard. • de musulmans, tu les as blessés dans leur foi. Demande- leur de t'excuser. Tu demandes à Dieu de te pardonner. Et on n'en parle plus." Quant à l'éditeur, je n'ai rien, du point de vue religieux, contre lui, puisqu'il n'est pas musulman. Mais sur le plan moral et politique, je lui dirais ceci "L'Islam et l'Occident sont deux civilisations qui ont coexisté depuis des siècles. A mon avis, ils constituent les deux piliers de l'équilibre de notre monde. S'attaquer à l'un des piliers, c'est mettre en péril l'ensemble de l'édifice." « Cela dit je constate qu'en Occident aucune voix ne s'est élevée pour manifester la moindre compréhension à l'égard des musulmans qui se sont sentis insultés par Rushdie. Et je suis bien obligé de constater que le responsable de cette situation est l'ayatollah Khomeini, qui a hâtivement jugé la question et condamné Rushdie à mort sans consulter les gens compétents. Il n'a respecté ni la loi internationale ni celle de l'islam. » CHEM-1 HASSAN chef spirituel de la communauté sunnite libanaise «Je n'ai pas encore lu les « Versets sataniques » mais je pense que Salman Rushdie doit être jugé conformément à la loi islamique. Nous ne pouvons pas prendre à son encontre une décision hâtive et spontanée, surtout s'il décide de se repentir. L'important est de défendre notre KHMOHAMMAD MEHDI CHAMSEDDINE chef spirituel des chiites libanais «Je n'ai pas eu l'occasion de lire le livre de Salman Rushdie, mais s'il porte atteinte à la personne du Prophète, comme je l'ai entendu dire et lu dans les médias, son auteur doit être condamné à mort par un avis légal, .conformément à la loi islamique, en tant que blasphémateur. Cette sentence doit être adoptée à l'unanimité par les musulmans et exécutée, sauf si M. Rushdie se repent publiquement et renie ses paroles blasphématoires à l'égard du Prophète. Pour notre part, nous interdirons la publication et la diffusion de l'ouvrage au Liban. Je pense que ce livre, qui porte atteinte à l'islam et aux musulmans, est un ouvrage de propagande dont l'origine est à chercher parmi les forces hostiles à l'islam. » Propos recueillis par René Baclonann et les correspondants du «Nouvel Observateur» à Beyrouth, Tunis, Tel-Aviv et Le Caire 23 FEVRIER - let MAliS 1989/55