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Ithaque : Revue de philosophie de l'Université de Montréal
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Pour citer cet article : Rocheleau-Houle, D. (2012) « Sandis, C., The
Things We Do and Why We Do Them », Ithaque, 11, p. 87-91.
URL : http://www.revueithaque.org/fichiers/Ithaque11/ Rocheleau-
Houle .pd f
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Sandis,'C.'(2012),'The#Things#We#Do#and#
Why#We#Do#Them,'New'York,''
Palgrave'Macmillan,'226'p.'
David'Rocheleau‐Houle*'
Dans The Things We Do and Why We Do Them, Constantine Sandis
cherche à montrer que toutes les théories en philosophie de l’action
que nous retrouvons actuellement dans la littérature sont, d’une
manière ou d’une autre, vouées à l’échec. Ce que propose l’auteur,
plutôt qu’un livre qui tente d’expliquer pourquoi nous agissons d’une
certaine façon, c’est un livre sur les théories de l’action et de
l’explication de l’action.
La thèse de Sandis est que plusieurs débats insolubles en
philosophie de l’action sont fondés sur des confusions, par exemple,
entre les choses que A fait et l’événement « A fait x », entre les
raisons selon lesquelles A agit et les différents éléments qui rendent
A sensible à ces raisons, entre la motivation d’agir et la production
causale de l’action, etc. Je me concentrerai sur les deux confusions
que je considère comme étant les plus importantes du livre de Sandis,
ce qui m’oblige bien entendu à en mettre certaines de (il y en a
vingt au total, mais il serait exagé d’affirmer qu’elles ont toutes la
même importance). La première est celle autour de l’explication de
l’action, alors que la deuxième concerne les raisons d’agir.
Le projet de Sandis est d’abord fondé sur une tentative pour
montrer qu’il n’y a pas une seule chose que nous pourrions appeler
« action » à laquelle toutes les explications de l’action pourraient
référer. Le terme « action » n’a pas un seul référent évident, même si
l’on réduit l’action aux mouvements visibles du corps. Ainsi, il n’est
pas possible d’isoler un seul explanandum en invoquant une définition
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* L’auteur est étudiant à la maîtrise en philosophie (Université Laval).
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consensuelle de ce qu’est une action1. Au moins trois façons de dire
ce qu’est une action sont possibles : (1) le mouvement du corps de
A ; (2) l’événement « A bouge son corps » ; (3) ce que A a fait
(bouger son corps)2. Corolairement à ces trois façons de finir ce
qu’est une action, trois choses différentes peuvent être expliquées :
(1) pourquoi le corps de A a bougé ; (2) pourquoi l’action de A de
bouger son corps est arrivée ; (3) pourquoi A a bouson corps. À la
première question nous cherchons une cause de l’événement « le
mouvement du corps de A ». À la deuxième question nous cherchons
la cause de l’événement « A bouge son corps ». À la troisième
question nous cherchons à comprendre pourquoi A a bougé son
corps, sans nécessairement chercher une cause3. Ce que veut montrer
Sandis, c’est que les théoriciens de l’action confondent de manière
implicite différentes conceptions de l’action, ce qui rend les bats
sur l’explication de l’action complexes et parfois sans issue.
Par exemple, pour les causalistes, toutes les explications de l’action
présupposent l’existence de lois causales, alors que les anti-causalistes
soutiennent le contraire. Les causalistes et les anti-causalistes diffèrent
quant à l’explication à donner à l’action, mais, selon Sandis, ils ne
cherchent pas nécessairement à répondre au même explanandum. En
tentant d’expliquer un phénone différent, ils rendent la possibilité
d’accord impossible. La confusion selon laquelle ce qui explique
pourquoi nous agissons explique aussi pourquoi notre action s’est
produite structure le débat entre les causalistes et leurs rivaux4.
Pour Sandis, il n’y a pas de raison de penser que lorsque nous
expliquons pourquoi quelqu’un fait quelque chose, nous expliquons
aussi pourquoi l’action de l’agent a é produite ; il s’agit d’une
confusion. Ainsi, il n’est pas incohérent de soutenir que l’explication
du pourquoi une action a é produite repose sur des lois causales,
tout en défendant que l’explication du pourquoi nous agissons ne
puisse pas reposer sur ces mes lois. En confondant ce qui explique
pourquoi A agit et ce qui explique pourquoi l’action de A s’est
produite, les causalistes et les anti-causalistes étendent trop loin la
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1 Sandis, C. (2012), The Things We Do and Why We Do Them, p. 11.
2 Ibid., p. 6.
3 Ibid., p. 12.
4 Ibid., p. 46. C’est ce que Sandis appelle « the conflating view of action
explanation » (CVAE).
Sandis,'C.'(2012),'The#Things#We#Do#and#Why#We#Do#Them'
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portée de leurs théories respectives. Si nous rejetons cette thèse, nous
sommes alors libres d’accepter à la fois la théorie causaliste et la
théorie anti-causaliste selon l’explanandum auquel nous cherchons à
répondre.
Sandis en conclut qu’il est préférable d’y aller avec une
compréhension pluraliste du concept d’action et de l’explication de
celle-ci. De ce fait, il y a une variété de conceptions de l’explication de
l’action qui répondent à plusieurs objectifs de l’explication5.
Une confusion importante structure également le bat sur les
raisons d’agir. Celui-ci est, comme le débat portant sur l’explication
de l’action, largement le sultat du fait que les différents
protagonistes de la discussion utilisent le terme « action » comme
étant le même objet de l’explication, alors qu’ils réfèrent à différents
explananda, à différentes choses à expliquer6. De plus, il y a confusion
entre différentes conceptions de ce qu’est la « motivation ». D’un
côté, certains considèrent que c’est l’équivalent à la raison pour
laquelle A agit, alors que de l’autre côté la raison motivante est
considérée comme étant ce qui a fait agir A7. C’est ce qui oppose
entre autres les humiens aux anti-humiens en théorie de la motivation
et le psychologisme à l’anti-psychologisme à propos des raisons
d’agir. La confusion dénotée par Sandis est construite autour d’une
thèse généralement acceptée, qui est celle que la raison pour laquelle
A agit est identique à ce qui motive A à agir8. Cette thèse laisse croire
à chaque côté du débat qu’ils parlent tous deux de la me chose,
soit des « raisons motivantes », alors que ce n’est pas le cas.
Pour Sandis, il ne va pas de soi que A a besoin d’être motivé par
la même raison que celle d’après laquelle A agit ou, pour le dire
autrement, que la raison qui motive A à agir est la même raison
d’après laquelle A agit9. Cette thèse doit être rejetée, car elle est
fondée sur une confusion entre différents sens de la motivation :
entre la raison pour laquelle A agit et ce qui motive A à agir. En
rejetant cette thèse, il n’est plus obligatoire de choisir de manière
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5 Sandis, C. (2012), The Things We Do and Why We Do Them, p. 39-40.
6 Ibid., p. 61.
7 Ibid., p. 63.
8 Ce que Sandis appelle « the conflating view of motivating reasons »
(CVMR).
9 Sandis, C. (2012), The Things We Do and Why We Do Them, p. 62.
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exclusive entre le psychologisme et l’anti-psychologisme. Il est donc
préférable de la rejeter, car sans cela nous sommes pris dans une
querelle sans fin, étant donné qu’il est plus intuitif de pencher vers le
psychologisme à propos de la motivation, alors qu’il est plus intuitif
d’aller vers l’anti-psychologisme à propos des raisons normatives.
De manière plus positive, Sandis propose de se concentrer sur les
raisons agentielles10 dans le but de dépasser le débat opposant les raisons
normatives aux raisons motivantes, les anti-psychologistes aux
psychologistes. Sans être ce qui a motivé A à agir, une raison
agentielle est une raison d’après laquelle A a agi, c’est la considération
d’après laquelle il a agi, et non pas l’entité psychologique qui l’a
motivé à agir11. Ainsi, ce sont des considérations externes à l’esprit12.
Avec les raisons agentielles, Sandis peut répondre à une difficulté
des raisons normatives, qui est celle d’expliquer comment de telles
raisons peuvent être à la fois normatives et nous motiver à agir,
difficulté d’ailleurs fondée sur la confusion soulignée plus tôt. Au
sens strict, les raisons agentielles ne sont pas nécessairement ce qui a
motivé A à agir, elles ne permettent pas non plus d’expliquer l’action,
mais elles peuvent être une partie d’un explanans.
C’est d’ailleurs ce qui permet à Sandis de ne pas être affecté par
une importante critique contre l’anti-psychologisme, selon laquelle
cette théorie ne peut pas expliquer une action produite par un agent
sur la base de fausses considérations, c’est-à-dire que la croyance de
l’agent était fausse ou s’est avérée fausse par la suite. Ces cas
représentent un problème pour les anti-psychologistes, car ils
affirment que ce qui explique une action ce sont des faits ou des états
de chose, et non pas des croyances de l’agent. Pourtant, lorsque A est
dans l’erreur, nous devons nécessairement faire férence à la fausse
croyance de l’agent pour expliquer son action. En affirmant que les
raisons agentielles n’expliquent pas l’action (qu’elles ne représentent
pas à elles seules un explanans de l’action), Sandis n’est pas toucpar
cette critique.
Malgré les apports importants des thèses fendues par Sandis, il
est possible d’avoir certains doutes quant à celles-ci. Par exemple,
Sandis ne traite pas toujours des théories qu’ils critiquent de manière
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10 Traduction libre de « agential reasons ».
11 Sandis, C. (2012), The Things We Do and Why We Do Them, p. 67.
12 Ibid., p. 106.
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