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Le 05 mars 2013, la Chaire CRSNG-UQAT-UQAM en aménagement forestier durable a reçu M.
Tyler D. Rudolph dans le cadre des conférences des Midis de la foresterie. Mr Rudolph a
obtenu sa maitrise à l'Université du Québec à Montréal en 2011 avec mention d'honneur.
Depuis, il a servi de conseiller scientifique pour le Conseil Cris-Québec, la Nation Naskapi de
Kawawachikamach, et le Département de l'Environnement et de la conservation de TerreNeuve et du Labrador. Lors de cette conférence, intitulée : « Le rétablissement du caribou de
la forêt boréale Québécoise : un défi de taille », M. Rudolph nous a présenté le bilan d’une
analyse récente de la situation du caribou forestier sur le territoire de la Baie-James*,
réalisée, en collaboration avec les professeurs Pierre Drapeau, Martin-Hugues St-Laurent et
Louis Imbeau, pour le Ministère des Ressources naturelles du Québec et le Grand Conseil des
Cris.
Le caribou forestier, espèce sentinelle de la forêt
boréale :
Le caribou forestier (Rangifer tarandus caribou) est l’écotype
boréal du caribou des bois vivant en milieu forestier. Au
Québec, il occupe principalement les domaines
bioclimatiques de la pessière à lichens et de la pessière à
mousses. On retrouve également quelques hardes isolées
dans le domaine de la sapinière à bouleau blanc, notamment
dans les régions de Val-d’Or (48) et de Charlevoix (49). Le
caribou forestier vit en groupes de faible densité, possédant
un faible potentiel de recrutement, ce qui limite la croissance
des populations.
Le caribou forestier est considéré par les scientifiques
comme une espèce « parapluie » de la forêt boréale, c’est-àdire une espèce dont les exigences pour l’habitat sont telles
qu’en assurant la protection de cette espèce, on assure également le maintien de l’habitat de
la plupart des autres espèces qui partagent le même écosystème.
La situation actuelle des populations du caribou forestier : état précaire et en déclin :
Ce n’est pas une coïncidence si, aujourd’hui, au Canada en général et au Québec en
particulier, la limite méridionale de l’aire de répartition du caribou forestier n’a cessé de
régresser vers le nord. Ces observations ont amené les gouvernements à évaluer le statut de
l'espèce. Ainsi, le caribou forestier est protégé en tant qu'espèce menacée à l'échelle du
Canada depuis mai 2003. Au Québec, c'est en 2005 que le caribou forestier a obtenu le statut
d'espèce vulnérable.
Cependant, pour expliquer le déclin du caribou forestier, tant au Québec qu’ailleurs au
Canada, de maintes raisons sont invoquées. L’importance relative de perturbations à l’intérieur
de l’aire de distribution des hardes est considérée comme le facteur principal de la chute
historique des populations. Les changements de l’habitat entraînent généralement le
déplacement du caribou et l’évitement des zones perturbées (notamment des routes) et
l’augmentation cumulative des perturbations ont un effet direct sur le taux de recrutement des
populations affectées. De plus, la récolte de subsistance autochtone et le braconnage sont
soupçonnés de contribuer à sa précarité.
La reconnaissance juridique du caribou forestier comme espèce vulnérable a mené à
l’élaboration d’un plan de rétablissement pour la période 2005-2012. Le plan d’action pour le
rétablissement du Caribou forestier au Québec propose une trentaine de mesures, visant le
taux de survie, la conservation d’habitats adéquats, le maintien de l’intégrité de la forêt
boréale, l’information et la sensibilisation des citoyens et la recherche et le développement des
connaissances.
Le sort du caribou forestier dans la Baie-James :
Il en ressort de l’analyse de la dispersion printanière du caribou forestier du Nord du Québec
effectuée par Tyler Rudolph et ses collaborateurs qu’il y a :
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
Une évidence d’une forte corrélation entre le déclin du caribou et la perturbation de
son habitat naturel ;
Une baisse significative du taux de recrutement du caribou forestier suite à la
perturbation de ses aires de répartitions ;
Le réseau routier continue à réduire la qualité et la connectivité fonctionnelle de
l’habitat du caribou forestier et à augmenter l’accès aux prédateurs.
M. Rudolph a insisté durant sa présentation sur ces trois éléments explicatifs du déclin des
populations de caribou forestier sur le territoire de la Baie-James :
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Les opérations forestières ;
Le développement du réseau routier ;
La chasse de subsistance effectuée par les Cris.
Stratégie de rétablissement du caribou forestier :
La Stratégie de rétablissement du caribou forestier, population boréale, publiée par
Environnement Canada en 2012, préconise le maintien des taux de perturbation en deçà de
35% dans l’aire de répartition de toute population. M. Rudolph et ses collaborateurs ont repris
le modèle des chercheurs fédéraux et l’ont bonifié en se servant de données démographiques
et cartographiques provenant de trois populations locales de caribous forestiers sur le
territoire de la Baie-James. Les résultats de leur étude démontrent l’important pouvoir
explicatif du modèle d’Environnement Canada, à un point tel que même en l’absence
d’information concrète sur la répartition et la démographie d’une harde, il devient possible de
prédire avec une mesure de probabilité le niveau de risque que courent ces populations.
Actuellement, les trois populations locales (Assinica, Nottaway et Témiscamie) sont
considérées comme étant non autosuffisantes, et on prévoit que la situation s’aggravera au
cours des prochaines années, si l’on poursuit la perturbation des aires de répartitions de ces
hardes.
Recommandations* :
Étant donné le faible degré de fidélité des individus à
des parcours de déplacement printaniers, les
chercheurs considèrent que la planification de
corridors fixes de déplacement ne semble pas une
approche très prometteuse pour maintenir la
connectivité des paysages pour le caribou forestier de
« la limite méridionale de
l’aire de répartition du
caribou forestier n’a cessé
de régresser »
la région du Nord-du-Québec. De plus, puisque les caribous forestiers en déplacement
semblent éviter les perturbations récentes, une densité accrue d’interventions forestières et de
routes dans le paysage ne pourrait que nuire à la connectivité fonctionnelle pour cet animal.
Afin de conserver cette espèce désignée vulnérable, les scientifiques suggèrent de réduire les
superficies de coupe totale ainsi que les chemins forestiers permanents dans les secteurs
encore occupés par le caribou forestier. Ils recommandent l’usage de la coupe partielle et la
récolte hivernale faite au moyen de chemins d’hiver qui pourront être reboisés comme modes
d’intervention forestière dans les secteurs de déplacement printaniers des caribous.
Message de clôture :
Le caribou forestier (Rangifer tarandus caribou) mérite une attention particulière au Québec
comme dans les autres territoires en raison du déclin ou de l’état précaire de nombreuses
populations. L’homme semble être à l’origine de cette situation en raison du niveau de
l’exploitation forestière et d’autres intrusions dans les aires de répartition. Ces activités
continuent à entraîner des effets directs de dégradation et de réduction de son habitat
fonctionnel, et des effets indirects liés à une augmentation de la prédation, notamment par le
loup gris (Canis lupus).
Les approches analytiques utilisées par M. Rudolph et ses collaborateurs pour leur étude sont
robustes et apportent un degré de confiance élevé quant à leurs résultats. Il n’est donc plus
pensable de vouloir aménager ce territoire sans reconnaissance des relations entre les
perturbations anthropiques et le déclin du caribou forestier dans le Nord-du Québec. Bien
entendu, les enjeux écologiques et économiques sont énormes, mais le temps est venu
d’assumer la responsabilité de nos actions et de se pencher collectivement sur l’avenir de
cette espèce sentinelle de la forêt boréale dans le contexte où les pressions de développement
risquent de devenir de plus en plus importantes. Les scientifiques s’entendent que la survie du
caribou dépend de grandes étendues de forêts intactes et connectées entre elles. Par ailleurs,
M. Rudolph a présenté un aspect de la norme boréale de la certification FSC touchant les
mesures de protection des habitats de caribou forestier jugés à risque. Enfin, la mise en place
d'aires protégées d’envergure dans les territoires boréaux occupés par le caribou semble être
essentielle à la survie de différentes hardes de l’espèce. Conséquemment, les gouvernements
provinciaux ainsi que le gouvernement fédéral doivent travailler conjointement pour
conserver, protéger et remettre en état l'habitat du caribou partout au pays avant qu’il soit
tard.
Pour lire le rapport et les recommandations du M. Rudolph et ses collaborateurs :
2012RapportFinalCaribouForestierBaieJames_EeyouIstchee.pdf
Louiza Moussaoui, Étudiante au Doctorat en sciences de l’environnement, UQAT
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