CORÉE DU NORD Recherches et écriture: LEPAC / Frank Tétart Réalisation : Frédéric Ramade Graphisme : Frédéric Lernoud Diffusion sur Arte le 13.02.1999 à 22:30 La Corée du Nord, l’un des derniers bastions communistes au monde connaît une famine sans précédent depuis bientôt 4 ans. S’agit-il d’un signe avant-coureur de l’effondrement du pays ? Le Dessous des Cartes analyse la situation politique et économique de ce pays le plus fermé au monde et donc le plus mal connu. Situation de la Corée Les deux Corées Voici, à l’extrême-est du continent eurasiatique, la péninsule coréenne. La péninsule coréenne La péninsule coréenne est divisée en deux pays aux systèmes politiques opposés, de part et d'autre du 38ème parallèle : - au nord, la Corée communiste, avec Pyongyang comme capitale. - au sud, la Corée capitaliste, avec la capitale de Séoul. La République Démocratique Populaire de Corée Elle est frontalière, au nord, de la Chine et de la Russie ; au sud, du Japon, et s’ouvre à l’est sur la Mer du Japon, et à l'ouest sur la Mer Jaune. La Corée du Nord s'est développée depuis I948, à l'ombre de ses deux alliés communistes, l'URSS et la Chine, en s'appuyant sur une politique d'autosuffisance économique, et sur le culte de la personnalité de Kim Il Sung, qui a régné sur le pays de 1948 à sa mort en 1994, et de son fils Kim Jong Il qui lui a succédé, inaugurant ainsi la première dynastie communiste de l'histoire. Le dessous des cartes CORÉE DU NORD 1/5 Surface et population Industries La Corée du nord fait 120 000 km2. Elle a une population comprise entre 22 et 24 millions d'habitants, qui se répartissent entre la côte Est et le Nord-Ouest, la région centrale étant plus rude à vivre. Les ressources naturelles Des complexes sidérurgiques et chimiques ont été construits autour de Pyongyang , et les ports de Hungnam, Wonsan et Chongjin. Les ressources forestières et hydroélectriques En Corée du nord, l'agriculture est difficile , car le relief est montagneux, et il y a près de 200 jours de gel par an. Quelques rizières ont donc été gagnées sur la mer, sur la côte ouest. En revanche, le pays est bien doté en ressources naturelles : houille, minerai de fer, zinc, or, argent, magnésite. Jusqu'au grand déboisement de ces dernières années, le pays disposait de beaucoup de forêts. Sur les fleuves Yalu et Tumen, des barrages ont été construits pour l'hydroélectricité. Un pays sinistré La Corée du Nord apparaissait dans les années 50 / 60, comme un pays avec un fort potentiel, en comparaison de la Corée du Sud, qui dispose de peu de ressources naturelles. Or, aujourd’hui la Corée du sud est un dragon asiatique, et la Corée du Nord est un pays sinistré. Le dessous des cartes CORÉE DU NORD 2/5 La politique nord-coréenne Que s'est-il passé ? Le régime nord coréen a hypertrophié le secteur minier et militaroindustriel, prenant ainsi un grand retard technologique, et il ne s'est pas inséré dans l'économie mondiale, car il faisait 7O% de ses échanges avec le bloc communiste. Pénuries alimentaires Le délabrement économique de la Corée se traduit aujourd’hui par les pénuries alimentaires, la malnutrition, voire la véritable famine que connaît le pays, ou certaines parties du pays, depuis 1995. L'évaluation est évidemment difficile à faire, mais on parle de 1 à 3 millions de morts. Isolationnisme mais aussi de simples citoyens, via la Chine et Hong Kong vers la Corée du Sud. La menace nucléaire Enfin, le régime conduit une politique étrangère difficile à décoder. Essayons. En 1994, elle refuse l'inspection par l'Agence internationale de l'énergie atomique de certaines de ses installations nucléaires civiles suspectées de développer du nucléaire militaire. Et elle utilise la crainte qu'inspire le nucléaire comme moyen de chantage sur la communauté internationale. Militarisation et diplomatie Elle obtient ainsi, en échange du gel de son programme nucléaire, le cofinancement provisoire de ses besoins en énergie par un consortium de pays occidentaux inquiets, et accède à un dialogue en direct avec Washington, ce qui lui permet d'afficher sa fermeté, et sont autant de gages appréciés par l'armée nord coréenne. La Corée est en effet fortement militarisée, avec plus d'un million de soldats et un budget de la défense qui représentait 25% du PIB de 1995. À cela s'ajoute les défections à l'étranger des membres de l'élite politique, des membres du parti, Le dessous des cartes CORÉE DU NORD 3/5 Missile Le Japon redoute aussi l'effondrement du régime, parce qu’une Corée réunifiée pourrait constituer dans IO ou 20 ans, une menace économique, et peut être même militaire. Et une Corée réunifiée, puissance nucléaire pourrait inciter le Japon à la nucléarisation, entrainant donc un changement radical de tout l'équilibre régional. Les vues chinoises Et au cours de l'été I998, la Corée du Nord tire un missile de moyenne portée au dessus du Japon. Tout cela est pris très au sérieux par les Américains, car cela démontre avant tout la nuisance, mais aussi la faiblesse du régime, dont l'effondrement total aurait des conséquences graves. La politique de rapprochement La Chine est comme le Japon, favorable au statu quo. Mais si le régime nord-coréen disparaît, Pékin cherchera à ce que les Etats-Unis se retirent de Corée, mais pas du Japon. La présence militaire américaine dans la région arrange la Chine, car elle permet de maintenir le Japon sous surveillance. Les visées américaines La Corée du sud, bien que souhaitant à long terme la réunification de la péninsule, craint aujourd’hui autant une attaque militaire surprise du nord, que l'effondrement brusque du régime de Pyongyang. Séoul préconise donc une politique de rapprochement, et comme dans la région de Tumen, par un développement économique conjoint. Les craintes japonaises Le dessous des cartes CORÉE DU NORD Les Etats-Unis, principal allié de la Corée du Sud, sont pour la stabilité avant toute chose, et le maintien de leur seul leadership. En cas de réunification, ils chercheront donc à favoriser l'émergence d'une Corée dénucléarisée. 4/5 Les vues de la Russie Enfin , la Russie, elle est aussi pour la stabilité régionale. Même si elle a aujourd'hui moins d'influence dans la région, elle verrait de toute façon d'un bon oeil le développement de la zone de la rivière Tumen . Aujourd'hui, pour la Corée du Nord, ni effondrement, ni réunification. Pourquoi ? Et bien parce que Kim Jong Il n'hésite pas à détourner l'aide alimentaire au profit de l'armée pour garder les moyens du maintien de l'ordre à l'intérieur. L'armée est bien nourrie, le régime tient par la corruption, par le verrouillage de l'information, par la constante psychose de la guerre immédiate. En fait le régime Nord Coréen a les moyens d'éviter la famine. Mais il ne le fait pas parce qu'il préfère laisser mourir sa population plutôt que d'être exposé au contact de l'étranger. Alors quels sont les scénarii à venir ? Le moins probable, le régime se réforme, avec une ouverture politique et économique. C'est ce que favorise en tout cas la Corée du Sud, et cela conduit à une réunification à long terme. Deuxième hypothèse, l'effondrement total du système, comme ce fut le cas pour la R.D.A. en 1989. Cela conduit à une réunification-sauvetage, ce dont ne veut pas Séoul. Dernière possibilité, le maintien du statu quo actuel, c'est-à-dire que la Corée du Nord continue de colmater les brèches de son système. C'est cette troisième hypothèse qui a la faveur des analystes. Statu quo, fuite en avant. Kim Jong Il est un maître chanteur, et il soutire de ses amis ou de ses ennemis de l’argent et de la durée, en échange de la seule chose que tout le monde réclame : la stabilité. Car en fait, la réunification, personne n'en veut. Le dessous des cartes CORÉE DU NORD 5/5