
Extrait du Vocabulaire français de l'Art urbain, par Robert-Max Antoni, sur www.arturbain.fr 
Extrait du “Vocabulaire français de l'Art urbain”, par Robert-Max Antoni, sur www.arturbain.fr 
 
VOIES URBAINES
VOIES URBAINES : 
Du  latin  via,  «  voie  »,  et 
urbanus, « de (la) ville ».
Espace  à  parcourir  pour  aller 
quelque  part.  Voies  urbaines,  à 
l'intérieur  d'une  agglomération 
(rue,  avenue,  boulevard,  etc.). 
Voies  express,  à  circulation 
rapide,  dans  les  villes.  Les  voies 
sur berges, à Paris.
D'une  manière  générale, 
la  voie  publique  est  "tout 
espace du domaine public 
destiné  à  la  circulation 
(voies  proprement  dites, 
places, etc.) dans les villes. 
[…]. Partie d'une route de 
la  largeur  d'un  véhicule. 
Route  à  trois,  quatre 
voies » (Le Robert).
Dès  l'époque  grecque,  à 
travers les cités-États, coexis-
tent  deux  modèles 
d'organisation,  le  plan  libre 
(Pergame)  et  le  plan  ortho-
normé  (Milet)  (1).  Ce  der- 
nier,  datant  du  Ve  siècle 
av. J.-C., se fonde sur un plan 
en échiquier. Son découpage 
perpendiculaire  délimite  les 
insulæ  rectangulaires  per- 
mettant  une  lecture  claire et 
symbolique de l'espace. À  la 
même  époque,  les  Romains 
s'inspirent  des  principes 
grecs.  L'organisation  viaire 
découvre  une  place  centrale 
au  croisement  de  l'axe 
est/ouest  (decumanus)  et 
nord/sud  (cardo).  Les  voies 
sont réglementées  selon leur 
usage.  Les  itinera  désignent 
les  rues  pour  piétons,  l'actus 
sert  pour  le  passage  d'un 
char  et  la  via,  pour  celui  de 
deux  chars.  Leur  largeur 
varie  de  4  à  8  m  avec  une 
exception  de  32  m  pour  la 
Via Noua de Rome. Déjà, les 
rues  sont  dallées  et  bordées 
de trottoirs. Aoste révèle une 
persistance de la trame viaire 
romaine  jusqu'à  nos 
jours (2).
La  planification  isotropique 
est  abandonnée  dans  les 
villes  chrétiennes  du  Moyen 
Âge.  Elles  s'organisent  au- 
tour  d'un  lieu  de  culte  ou 
d'un  château  fort  protecteur 
suivant  un  plan  circulaire. 
Délimité  par  des  enceintes, 
l'espace  urbain  se  compose 
de  voies  très  étroites  et 
irrégulières,  comme  l'illustre 
la cité de Brive (3).
Au XVIIe siècle, on assiste à 
l'élargissement  des  artères 
principales grâce au principe 
de l'expropriation immédiate. 
Suivant une politique d'unifi- 
cation,  les  dimensions  sont 
normalisées.  Le  plan  officiel 
des  rues  de  Paris  de 
Verniquet  permet  d'établir 
trois classes de voies :  10 m 
et plus, de 8 à 10 m et moins 
de  8  m.  Parallèlement,  la 
hauteur  des  bâtiments  est 
définie.  Sous  le  Directoire, 
un  arrêté  codifie  les  dimen-
sions des rues entre 14 m et 
6 m. 
Durant  la  révolution  indus-
trielle,  95  %  du  système 
viaire  français  est  mis  en 
place entre 1836 et 1886. La 
voirie  parisienne  sert  de 
modèle.  Rambuteau  (1833-
1848)  applique,  sous  la 
Restauration,  les  premiers 
plans  d'alignement  en 
perçant et élargissant certains 
axes.  La  voie  urbaine  est 
traitée  comme  un  équipe-
ment. Une partition horizon-
tale  (les  chaussées  et  les 
trottoirs)  et  verticale  (sol  et 
sous-sol) est implantée. 
Haussmann  (1853-1870)  im- 
pose  un  plan  d'ensemble 
systématique  de  la  voirie 
urbaine  pour  répondre  aux 
problèmes d'encombrements 
dus à la  circulation. L'art de 
la  voirie  codifie  l'espace 
urbain et son paysage. La rue 
est  traitée  comme  une 
composition  (profil  bombé, 
revêtement,  trottoirs  et 
caniveaux).  Le boulevard et 
l'avenue  déterminent  une 
nouvelle  typologie  de  voies 
urbaines (8/9). 
Les  villes  américaines  quant 
à elles sont planifiées suivant 
le  modèle  de  la  trame  de 
Jefferson (Jefferson's Ordinance) 
qui  définit  un  quadrillage 
rectiligne strict (7).
Cerda  (1815-1876)  propose 
sa  «  teoria  »  fondée  sur  un 
urbanisme  de  réseaux 
précurseur  des  doctrines  du 
Mouvement  moderne.  Son 
approche  fonctionnaliste,  la 
première, différencie l'espace 
du mouvement (la voirie) de 
celui  du  séjour  (les  îlots) 
suivant  le  concept  de 
« viabilité universelle », com- 
me  le  montre  le  plan  de 
Barcelone  (4).  La  ville  se 
compose  d'un  système  de 
voies  orthogonales  formant 
les carrefours traités en pans 
coupés  et  percées  de  voies 
diagonales. Les voies particu-
lières sont réservées à l'accès 
aux lotissements.
Ebenezer  Howard  (1850- 
1928)  publie  en  1899  le 
concept  des  cités-jardins 
satellites en Angleterre. Leur 
plan  théorique  partant  d'un 
rond-point  central  suit  un 
schéma  radioconcentrique 
avec  une  hiérarchisation  des 
voies (6).
Les  CIAM  approfondissent 
la logique de la spécialisation. 
En  1933,  Le  Corbusier 
présente, au congrès d'Athè- 
nes,  sa  théorie  de  «  la  ville 
fonctionnelle  ».  Le  système 
viaire  est  requalifié  selon  la 
vitesse  et  hiérarchisé  suivant 
trois  fonctions  fondamen-
tales : l'habitat, le travail et le 
loisir.  À  Chandigar  (5),  il 
applique  le  principe  des 
«  sept  V »  composé  de 
sept  voies adaptées à  l'usage 
et à  la circulation  modernes. 
En  préviligiant  la  vitesse  et 
en évitant les carrefours par 
des  voies  en  dénivelé,  il 
réduit  le  réseau  viaire  à  une 
monofonctionnalité  circula-
toire avec perte d'orientation 
et de liens avec le bâti.
La croissance de la motorisa-
tion  dans  les  années  qui 
suivent  la  Seconde  Guerre 
mondiale  bouleverse  la 
problématique  des  villes. 
En  1969,  les  voies  rapides 
urbaines  (autoroutes  urbai- 
nes) sont mises en place sur 
les  berges  parisiennes.  Le 
boulevard  périphérique  se 
substitue  aux  remparts 
suivant un schéma circulaire. 
Dans les années soixante-dix, 
les  rues  piétonnes  font  leur 
apparition  pour  restituer  le 
centre  des  villes  aux 
riverains.  Avec  l'évolution 
des  différents  modes  de 
déplacements  (transports  en 
commun,  vélos,  etc.) 
surgissent  les  voies  en  site 
propre  employées  notam-
ment  au  cœur  des  «  villes 
nouvelles » (10).
À  l'inverse,  l'essor  de  voies 
mixtes  réglementées  telles 
que  les  zones  30  (limitées  à 
30  km/h)  ou  les  cours 
urbaines sont des alternatives 
à  la  spécialisation  et  à 
l'encombrement  de  l'espace 
urbain. 
La  réduction  du  station- 
nement  et  de  la  circulation 
automobile  aux  voies 
urbaines ne peut que réhabi-
liter les espaces publics pour 
les  citadins.  Cependant  les 
habitudes  prises  par  nos 
concitoyens  et  les  nom-
breuses  activités  économi- 
ques  qui  dépendent  de 
l'usage  abusif  de  l'auto 
constituent une résistance au 
changement  comportemen-
tal et économique. Seule une 
réponse  globale  dans  le 
temps apportera une amélio-
ration de notre cadre de vie.
V.  AVENUE,  BOULEVARD, 
CARREFOUR,  COUR,  ÎLOT, 
LOTISSEMENT,  ROND-
POINT,  RUE,  RUE  PIÉ- 
TONNE.
« Le point de départ comme le point d'arrivée de toutes 
les  voies  est  toujours  l'habitation  ou  la  demeure  de 
l'Homme.  La  communication  entre  ces  deux  points 
extrêmes  n'est  généralement  pas  directe  et  elle  doit 
s'effectuer  par  des  voies  intermédiaires.  Un  système  de 
voies ressemble à un bassin fluvial. Les sources forment 
des  ruisseaux  qui  affluent  vers  des  torrents.  Ceux-ci 
débouchent  dans  les  rivières  qui,  à  leur  tour,  se  jettent 
dans le fleuve qui mènera toutes ces eaux à la mer.  De 
même,  l'Homme  sort  de  sa  maison  en  empruntant  un 
sentier qui le conduit à un chemin qui débouche sur un 
chemin  vicinal.  Celui-ci  mène  à  une  route 
départementale,  puis  nationale,  et  ainsi  de  suite, 
jusqu'au  rivage  de  la  mer  où  les  différentes  voies  se 
disperseront  sur  cet  élément  navigable  en  toutes 
directions pour desservir les divers points du globe. »
I. Cerda