Droit romain classique Les premières 250 années de l'ère actuelle sont la période durant laquelle le droit romain et la science juridique romaine atteignent le plus haut degré de « perfection », selon la tradition romaniste: on parle de période classique du droit romain. Néanmoins, l'empereur absorbe peu à peu les sources du droit et l'édit du préteur cesse de devenir une source vivante pour se figer. Les jurisconsultes travaillent à différentes fonctions : ils donnent des opinions juridiques sur la requête de partis privés (fonction de cavere, ou conseil) ; ils conseillent les magistrats qui ont la charge de l'administration de la justice, surtout les préteurs ; et ils aident ces derniers à rédiger leurs édits, dans lesquels ils annoncent publiquement, au début de leur mandat, comment ils vont user de leurs pouvoirs, et les formulaires, selon lesquels les procédures spécifiques seront conduites. Quelques juristes tiennent aussi eux-mêmes d'importantes places administratives ou juridiques. Ils produisent aussi toute sorte de commentaires ou traités juridiques. Autour de 130, le juriste Salvius Iulianus rédige une forme standard des édits des préteurs, qui fut ensuite utilisée par tous les préteurs. Cet édit codifié contenait des descriptions détaillées de tous les cas, dans lesquels le préteur autorisait une action juridique et accordait une défense. L'édit standard fonctionna ainsi comme un code légal complet, même s'il n'avait pas officiellement force de loi. Il indiquait les exigences pour une revendication juridique réussie. L'édit est donc devenu la base des commentaires juridiques approfondis par les classiques tardifs comme Paul et Ulpien. Les nouveaux concepts et les institutions juridiques développés par les juristes pré-classiques et classiques sont trop nombreux pour être mentionnés ici. Voici quelques exemples: - les juristes romains séparent clairement le droit de propriété sur un bien (usus, fructus et abusus), de sa simple possession. Ils trouvent aussi la distinction entre le contrat et le délit comme sources d'obligations juridiques. - les types standard de contrat (la vente, le contrat de travail, la location, le contrat de services) sont développés, à l'origine dans le cadre du ius gentium. - le juriste classique Gaius (autour de 160) systématisa le droit privé à travers la division en personae (les personnes), res (les biens) et actiones (les actions juridiques). L'influence déterminante de cette systématisation perdure jusqu'à aujourd'hui. Il peut être reconnu dans des traités juridiques comme les Commentaries on the Laws of England de William Blackstone et des dispositions comme le code Napoléon ou le Code civil allemand. Droit post-classique Au milieu du IIIe siècle, les conditions pour l'épanouissement d'une culture juridique raffinée sont devenues moins favorables. La situation politique et économique générale s'est détériorée. Les empereurs assument directement le contrôle sur tous les aspects de la vie politique. Le système politique du principat, qui avait gardé quelques liens avec les Institutions de la République romaine, commence à se transformer en une monarchie absolue qu'est le dominat. L'existence d'une science juridique et de juristes qui regardent le droit comme une science, et non pas comme un instrument pour accomplir des objectifs politiques fixés par le monarque absolu, n'est plus dans l'ordre des choses. Peu de juristes après le milieu du IIIe siècle ont laissé leur nom. Alors que la science juridique et l'éducation législative persistent dans une certaine mesure dans la partie est de l'Empire, la plupart des subtilités du droit classique est négligée et finalement oubliée à l'Ouest. Le droit classique est remplacé par un droit vulgaire. Où les écrits des juristes classiques sont encore connus, ils sont modifiés et simplifiés pour rester praticables. Droit public Les institutions romaines et le mos maiorum (« coutumes des ancêtres ») forment un ensemble non-écrit de règles et de principes transmis principalement par la jurisprudence. On en retrouve de nombreux concepts dans les constitutions modernes : les mandats de durée limitée, les élections à échéances régulières, un processus de définition des lois, les équilibres et les contrôles entre différents corps constitués, dont le contrôle des crédits, le veto et l’obstruction, le quorum, la mise en accusation. Même des concepts moins importants, comme ceux utilisés dans le système électoral américain, trouvent leur origine dans la constitution romaine. L'organisation de la République romaine n'est ni formelle ni même officielle. Elle est largement non écrite, et est en constante évolution durant la République. Pendant le Ier siècle av. J.-C., le pouvoir et la légitimité des institutions romaines s'érodent progressivement. Même les institutionnalistes romains, tels que le sénateur Cicéron, perdent à la fin de la République la volonté de résister aux ambitions illégales. Cette dernière se transforme dans les années qui suivent la bataille d'Actium. Le premier empereur romain, quand Auguste et ses successeurs superposent un fonctionnmeent impérial aux apparences républicaines. La conviction d'une survivance républicaine dure tout le long du Haut Empire romain. Droit privé Stipulatio est la forme basique du contrat dans le droit romain. Il est fait sous la forme de question et de réponse. La nature précise du contrat est disputée, comme cela peut être vu ci-dessous. Rei vindicatio est une action judiciaire par laquelle le demandeur demande que le défendeur rende un bien qui lui appartient. Cela peut seulement être demandé lorsque le demandeur est propriétaire du bien, et que le défendeur entrave d'une manière ou d'une autre sa propriété. Le demandeur peut aussi établir une actio furti (qui est une action personnelle) pour punir le défendeur. Si le bien ne peut être récupéré, le plaignant peut réclamer des dommages à l'accusé avec l'aide de la condictio furtiva. Avec l’actio legis Aquiliae, il pouvait réclamer des dommages (toutes ces actions sauf la première sont personnelles). Rei vindicatio est tiré du ius civile et n'est donc disponible que pour les citoyens romains. Afin de comprendre le droit privé romain, il est nécessaire d'étudier les actions de la loi (legis actiones) qui sont au nombre de cinq: - sacramentum - iudicis arbitrive postulation - condictio - manu injectio - pignoris capio Ces procédures sont concurrencées à partir du IIIe siècle av. J.-C. par la procédure formulaire. Sous le Bas-Empire romain (IIIe au VIe siècle ap. J.-C.), il y a l'apparition du procès cognitoire appelé la cognitio. Concernant les obligations délictuelles sous le droit romain antique, il faut s'intéresser à quatre types de délits privés à Rome: - injuria - damnum injuria datum ou dommage aquilien (issu de la lex Aquilia) - vol (furtum, rapina) - délits des animaux, des esclaves et des enfants de citoyens romains (délits des alieni juris) Concernant les obligations contractuelles sous le droit romain antique, il faut s'intéresser à: - acte per aes et libram ou contrats formalistes romains (exemple: mancipatio et nexum) - acte re (exemple: mutuum, fiducie) - acte verbis (exemple: stipulatio) - acte litteris - expensilatio - fidejution Statut romain Pour décrire la position d'une personne dans le système juridique, les Romains utilisent l'expression status. Il y a deux axes principaux de détermination: la citoyenneté (status civitatis) par opposition aux étrangers (les pérégrins); et la liberté (status libertatis) par opposition aux esclaves. Le pérégrin est ainsi un étranger libre; le citoyen, quant à lui, est par définition libre. Par ailleurs, le citoyen peut être pater familias, chef de la famille, ou un quelconque membre inférieur de cette famille (femme, enfant, esclave). Litige romain La Rome antique n'a aucun service public de poursuites judiciaires, comme le parquet français, donc les citoyens doivent eux-mêmes amener les affaires, parfois pour une compensation financière dérisoire: on parle d'« action ». Cependant, les magistrats amenaient souvent ces affaires, ce qui était perçu comme un service public. Le procès se décompose en deux phases: l'une où les faits sont transcrits en termes de droit, sous la supervision d'un magistrat, l'autre où elle est tranchée par un second juge, à partir de l'exposé juridique effectué. À l'origine, cela est fait au moyen d'une citation orale, plutôt qu'une accusation écrite. Pourtant, plus tard, les cas peuvent être initiés par méthode écrite. Après que l'affaire est engagée, un juge est nommé puis l'affaire est décidée. Sous la République et jusqu'à la « bureaucratisation » des procédures judiciaires, le juge est généralement une personne privée (iudex privatus). Il doit être un citoyen romain mâle. Les parties s'accordent sur un juge, ou le choisissent depuis une liste appelée album iudicum. Ils parcourent la liste jusqu'à ce que les deux parties soient d'accord sur le nom du juge. Dans les cas où de grands intérêts publics étaient en jeu, un tribunal de cinq juges était formé. D'abord, les parties en choisissent sept dans une liste, et parmi ces sept, cinq sont choisis aléatoirement. On les appelle des recuperatores. Personne n'est juridiquement obligé de juger un cas. Cependant, il y a une obligation morale de le faire: il s'agit d'un officium (litt. office, qui peut être interprétée comme sorte de mission accompli dans l'intérêt public, d'une façon analogue au jury moderne). Le juge a une grande latitude de la manière dont il conduit des litiges. Il considère toutes les preuves et décrète ce qui lui semble le plus juste. Puisque le juge n'est pas un juriste ou un technicien juridique, un juriste est préalablement consulté qui fournit des directives techniques, mais le juge n'est pas tenu de suivre les suggestions du juriste. À la fin des litiges, si les choses ne sont pas claires pour lui, il peut refuser de donner un jugement, en jurant que ce n'est pas limpide pour lui. Il a aussi un temps limite pour décider d'un jugement, qui dépend de quelques questions techniques du cas (type de l'action, etc.). Plus tard, avec la bureaucratisation et l'empire, la procédure s'efface progressivement puis disparait au bénéfice de la procédure extraordinaire, aux mécanismes plus contraignant pour le juge. Le cas entier est passé en revue devant un magistrat dans une unique phase. Le magistrat a l'obligation de juger et de donner une décision, et on peut faire appel de cette décision devant un magistrat de plus haut rang.