Réunion du CEMAM
17 Novembre 2000-11-20
Islam and Secularism in the Middle East (J Esposito and Azzam tamimi (eds.)
Ce soir je voudrais présenter ce petit livre « Islam and Secularism in the ME « édité (dirigé) par John
Esposito et Azzam Tamimi (Hurst and Co., London, 2000). Il contient 11 contributions : 2 américains, 1 anglais,
2 égyptiens, 1 palestinien, 1 soudanais, 2 tunisiens, 1 pakistanais et 1 turc.
Sur le sujet du sécularisme nous sommes habitués à lire l’apologie standard des musulmans c’est-à-dire
que le sécularisme ou la laïcité est apparu à l’ouest à cause des abus de la hiérarchie et du clergé de l’église.
En Islam au contraire il a ni hiérarchie ni clergé ni église ; alors historiquement il n’y avait pas de cause
pour la laïcité (sécularisme). Chez les commentateurs de l’Islam les positions se trouvent aux deux extrêmes – ou
l’Islam est imperméable à la laïcité ou l’Islam est en fait laïque – je vous rappelle P. Samson et son livre
« L’Islam laïque ».
Le thème principal de ce livre c’est la naïveté des missionnaires du sécularisme dans les pays du
Moyen-Orient. C’est la mode chez plusieurs propagandistes du sécularisme de faire des confessions publiques et
de dire qu’ils n’ont rien compris et qu’ils se sont trompés en pensant que la religion sera mise en marge de la
société avec la modernisation des sociétés traditionnelles.
L’introduction par John Esposito effectue un survol rapide des tensions dans les sociétés musulmanes
entre les sécularistes et ceux qui présentent l’Islam comme une alternative ou au moins formulent leur opposition
en termes islamiques.
Les régimes responsables pour le développement après la II° Guerre Mondiale représentaient une élite
dévouée au développement de l’état nation ou la religion et ces hommes de religion étaient mis de côté. Ces
élites et leurs tuteurs occidentaux ont présumé que la religion n’était pas un facteur de développement.
Esposito considère que les sécularistes ont négligé les mouvements populistes pour cultiver les élites.
Maintenant on trouve les forces sociales neuves qui cherchent un développement et une modernisation dans une
perspective islamique, pas laïque. L’enjeu est de définir l’identité de l’état nation ; les fondamentalistes séculiers
contre les forces nouvelles. Ce n’est pas un conflit entre tradition et modernité mais entre deux secteurs de la
société avec deux visions et deux modèles de développement.
Il conclu que les deux secteurs font face au défi de développer les formes modernes du sécularisme qui
nourrissent un pluralisme apte aux diverses sociétés et qui protègent les droits de ceux qui avaient autant que
ceux qui ne croient pas.
Cette dernière phrase est étrange – il n’est pas contre le sécularisme mais pour un autre forme de
sécularisme.
Aziz Tamimi, le coéditeur – commence avec une citation de Ernest Gellner : dans les derniers cent ans
de l’emprise de l’Islam sur les musulmans n’a pas diminuer mais a plutôt augmenté. C’est un contre-exemple
frappant de la thèse de la sécularisation. Dans son article il retrace aussi les développements depuis le 19° siècle
sans préjudice idéologique mais il conclue avec la réflexion que les sécularistes arabes ont promu un sécularisme
qui n’est pas compatible avec l’Islam. Le Sécularisme est devenu une religion comme l’Eglise en Europe
médiévale. Le défi pour ces islamistes est de montrer leur engagement aux valeurs de la démocratie, la
participation, etc.…
John Keune, professeur de sciences politiques à l’Université de Westmunter signale les limites du
sécularisme qui est devenu une religion invisible de l’expression de soi et l’accomplissement personnel. Le
sécularisme n’est pas un principe universel. On doit réfléchir sur les résultats du sécularisme au Moyen-Orient.
La seule option est de chercher de nouveaux moyens pour maximiser la liberté des croyants et des non-croyants.
La plus drôle de toutes les contributions est celle de Peter Berger, sociologue à l’Université de Boston
et bien connu pour ces petits livres sur la sociologie de religion.
Il commence avec une réflexion sur les millions de dollars dépensés sur des études qui visent à
comprendre la résurgence de la religion au Moyen-Orient. Lui séculariste convaincu, repense ses positions et
propose une étude des académiques pour voir pourquoi ils ont rêvé de faire disparaître la religion. Son article
embrasse toutes les religions et par conséquent quelques vérités partielles – il prône la position que ce sont les
mouvements conservateurs, orthodoxes et traditionalistes qui sont en augmentation aujourd’hui, pendant que les
mouvements et institutions religieuses qui ont fait l’effort de se conformer à une modernité sont baisse. Il essaie
même de lier croissance économique en Espagne avec l’Opéra Dei.
Quant aux autres :
Heba Ezzat, jeune politologue et docteur à l’Université du Caire présente une analyse de la crise des valeurs qui
accompagne le sécularisme à l’Ouest.
Et Abdel-wahab el-Missiri, professeur émirati à la même Université, signale la nécessité de comprendre
la complexité de sécularisme – c’est beaucoup plus qu’une séparation entre l’église et l’état.
Munir Shafiq, palestinien signale la nécessité d’avoir l’Islam comme cadre de référence.
Abdal-Wahab el-Affendi, soudanais, met l’accent sur la société civile. Pour lui, les musulmans ont mal
lu leur histoire et les événements, et aujourd’hui les régimes oppressifs attaquent quotidiennement la société
civile faible qui existe.
Fawaz Manzoor, rédacteur de la revue Afkar-Inquiry et The Muslim World Book Review pense que la
bataille de nos jours n’est pas entre l’Islam et la modernité, ni entre la foi islamique et la nationalité laïque mais
entre la foi dans un être transcendant et le projet totalitarisme pour une utopie sociale (imminente, conçue
comme la fin ultime. Alors l’Homme Islamicus n’a pas d’autre choix que de rester ferme dans sa foi d’un ordre
ultime trans-séculaire. (p.96).
Deux articles que j’ai trouvé qui présentent un particulier sont celui de Rashid Ghannoushi, leader d’al-
Nahdah (Renaissance) de Tunisie qui vit en exile et celui d’Ahmet Favutoglu, professeur turc.
Ghannoushi présente la situation de sécularisme en Afrique du Nord. Il présente la colonisation de
l’Afrique du Nord comme une tentative d’effacer l’identité culturelle des peuples. Par la suite, l’indépendance
n’était pas une vraie victoire mais une continuation du processus destructif. Et pendant que les Français n’ont pas
réussie dans leur tentative de détruire l’héritage islamique, les nationalistes tunisiens ont bien réussi au nom de
l’occidentalisme par leur imitation aveugle de l’Ouest en toute chose sauf dans la liberté, l’état de droit et la
démocratie. Le gouvernement d’indépendance est devenu une autocratie oppressive : l’élite laïque est comme
l’église du moyne-âge à l’Ouest. Le gouvernement a presque éliminé la société civile qui était toujours
charactéristique de l’Islam.
La réaction était une série de soulèvements populaires gauchistes puis libéraux et maintenant Islam
c’est-à-dire la poursuite d’une identité culturelle islamique comme fondation pour la reconstruction d’une société
civile.
La situation faucheuse de la société occidentale libérale est qu’aucune solution ne peut se trouver dans
un cadre séculariste pour réconcilier l’altruisme et l’individualisme (égoïsme). Il n’y a aucune solution saine
dans un cadre religieux qui peut prolonger la durée de la vie au-delà de ce monde et se référer à la justice divine.
Il termine avec une louange des aspects positifs du sécularisme. Les musulmans doivent admettre que leur
présence massive à l’Ouest est en partie grâce à la révolution séculariste. Jusqu’à l’établissement d’un système
consensuel islamique (shura). La meilleure alternative est un régime séculier démocratique. Un système séculier
démocratique du gouvernement est moins mauvais qu’un système despotique des gouvernements qui prétendent
être islamique. (p.123)
L’autre analyse présentée par Ahmet Dacutoglu est intéressante parce qu’il essaie de laisser de côté des
explications simplistes de l’origine du sécularisme c’est-à-dire église et clergé. Il propose qu’il y ait une
différence entre la conscience ontologique ou l’auto compréhension de Dieu, de l’univers et d’autrui dans le
christianisme et dans l’Islam.
La paradigme occidental est de proximité et particularité. Il y a une identification entre Dieu, l’homme
et la nature qui amène à un Christ semi divin et une justification ontologique d’une classe cléricale.
Le paradigme islamique est hiérarchie ontologique et unité – il ne tolère par l’émergence d’une
catégorie ontologique intermédiaire. Il nous renvoie à ces écrits sur l’auto perception (self perception). Sans
doute il a touché quelque chose d’essentiel qui mérite plus d’étude, une étude plus approfondie. Mais, on trouve
un certain flou dans l’article. Il commence avec une citation de Gellner sur l’imperméabilité de l’Islam mais il
conclu avec les efforts des civilisations révivalistes islamiques de redéfinir leur existentialité ontologique et
historique.
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