Pemphredon lethifer femelle introduisant un puceron dans son nid. Larve de Pemphredon lethifer dans une cellule garnie de pucerons
paralysés.
Mais si leur rôle est prépondérant, ils ne doivent
pas faire oublier l’ensemble des prédateurs et
parasites, représenté par plusieurs dizaines d’es-
pèces qui contribuent peu ou prou, de manière
discrète mais efficace, à cette limitation naturelle.
Parmi ces méconnus, ces sans-grades, quelques-
uns méritent d’être évoqués.
LE PEMPHREDON.
Cet inconnu au bataillon
des aphidiphages (dévoreurs de pucerons) est
une petite guêpe (6-8 mm) à banale livrée noire
(Pemphredon lethifer). Sous ce physique austère
se cachent d’étonnantes capacités comportemen-
tales : la bestiole capture et stocke des proies
vivantes immobilisées par paralysie, constituant
ainsi un garde-manger pour ses larves dans un
« nid » préalablement élaboré dans une tige à
moelle sèche (jamais dans des tiges vivantes).
Fécondées dès le printemps, les femelles prospec-
tent, afin d’établir leur nid, des tiges de plantes à
moelle sèches dont l’accès à la partie médullaire
(la partie centrale de la tige, qui renferme la
moelle) est rendu possible par la taille ou un acci-
dent naturel. On observe des nids dans la ronce,
le framboisier, le rosier, le sureau… Une galerie,
d’une vingtaine de centimètres, est creusée dans
la tige. La première « cellule », permettant le
stockage des proies, est créée au fond de cette
galerie ; les suivantes seront établies par la suite
en remontant. Cette première cellule achevée, la
femelle part en chasse. Le prélèvement des puce-
rons se fait sur les plantes hôtes que la chasseuse
prospecte activement. Elle capture vivement
entre ses mandibules la proie choisie. Celle-ci est
paralysée d‘un coup d’aiguillon pendant son
transport en vol et prestement introduite dans la
cellule du nid. Ainsi successivement jusqu’au rem-
plissage de la cellule (environ 60 pucerons). Un
œuf unique, de trois mm de long, en forme d’au-
bergine est alors pondu par le pemphredon, et
fixé sur le ventre d’une des premières proies
récoltées. La cellule est ensuite clôturée à l’aide
d’un bouchon de sciure produit par le creusement
de la cellule suivante. Une dizaine de cellules peu-
vent être aménagées dans une galerie. Un bon
millier de pucerons est ainsi prélevé par une
femelle au cours de sa vie. La larve âgée, ayant
achevé de consommer sa ration de pucerons
vivants mais inactivés, hivernera et attendra le
printemps pour se nymphoser et donner les
adultes d’une nouvelle génération (deux généra-
tions en moyenne par an). Avec une tendance à
exploiter, une fois découverte, la même colonie
de pucerons, les pemphredons ont un impact non
négligeable et mériteraient d’être encouragés au
jardin.
L’HÉMÉROBE.
Un comportement bien moins
sophistiqué que celui du pemphredon, un habit
sombre, une taille réduite, une vie cachée, une
activité crépusculaire et la capacité à faire le mort
à la moindre alerte ne rendent pas facile l’obser-
JARDIN fondamentaux
40 LES QUATRE SAISONS
DU JARDINAGE
SEPT./OCT. 2006
N
0160
B. CHAUBET