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I S E A U P O I N T
La Lettre du Neurologue - n° 5 - vol. VIII - mai 2004
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des méninges (13). En cas de paralysie flasque aiguë, la réalisa-
tion d’une IRM médullaire est préconisée ; elle pourra révéler un
hypersignal médullaire en T2 se rehaussant après injection de
gadolinium (12).
L’électromyogramme peut montrer une atteinte axonale motrice
compatible avec des lésions de la corne antérieure, ou un profil
de démyélinisation compatible avec un syndrome de Guillain-
Barré (11).
DIAGNOSTIC
Les tentatives pour isoler le virus dans le sérum ou le LCR sont
le plus souvent infructueuses. En effet, les virémies sont faibles
et transitoires et déjà régressives lors de l’admission des patients
(figure 3). Chez les sujets infectés, le virus a été isolé dans le sang
deux jours avant l’apparition des symptômes et jusqu’à quatre
jours après le début de la maladie. Cependant, après le premier
jour de la phase d’état, la virémie chute rapidement, et la pro-
babilité d’isoler le virus diminue considérablement. De nouvelles
techniques permettent néanmoins la détection d’antigènes viraux
(ELISA) et de l’ARN viral (PCR et PCR cinétique quantitative
ou “en temps réel” qui est la plus sensible de ces techniques, mais
ne permet le diagnostic que dans 55 % des cas). Leur faible sen-
sibilité rend difficile l’utilisation de ces techniques en pratique
courante, même si elles présentent l’intérêt d’être spécifiques et
d’apporter un diagnostic rapide en cas de positivité.
Le diagnostic d’infection par le virus West-Nile est donc confirmé
par la détection d’anticorps dirigés contre le virus. La technique
de référence reste la détection d’IgM spécifiques par ELISAd a n s
le sérum ou le LCR (14). Si la détection d’IgM dans le sérum est
positive chez les sujets infectés, même en l’absence de symp-
tômes, la détection d’anticorps dans le LCR signe la présence
d’une atteinte du système nerveux central. Des anticorps sont
isolés chez 50 % des patients à l’admission, et dans presque 100 %
des cas une semaine après l’admission. Un taux élevé d’anticorps
IgM spécifiques à la phase aiguë de l’infection suggère fortement
le diagnostic. Cependant, des IgM spécifiques ont été détectées
dans le sérum jusqu’à plusieurs mois après l’épisode infectieux. Un
diagnostic sérologique certain nécessite une séroconversion ou la
multiplication par 4 du taux d’IgM sur 2 prélèvements successifs.
Le diagnostic est donc retardé. L’autre limite de cette technique
diagnostique est l’existence de réactions croisées avec les autres
flavivirus (virus de l’encéphalite Saint-Louis, de l’encéphalite
japonaise, ou de la dengue).
TRAITEMENT
Il n’y a pas de traitement antiviral connu actif sur le virus
West-Nile, ni sur aucun autre flavivirus. Certaines substances ont
montré une activité in vitro dans des modèles animaux, mais
aucune étude contrôlée n’a démontré leur efficacité clinique.
L’interféron -2b possède une activité in vitro sur le virus West-
Nile et d’autres flavivirus. Une étude ouverte interféron alpha
versus placebo a été menée chez les patients atteints d’encépha-
lite à virus West-Nile lors de l’épidémie nord américaine en 2002,
même si les résultats d’une étude ouverte utilisant l’interféron
alpha au cours d’encéphalites japonaises se sont révélés peu pro-
bants ( 1 5 ). Les données sont insuffisantes pour conclure. La riba-
virine utilisée à fortes doses semble avoir une activité in vitro.
Elle a été administrée à certains patients lors de l’épidémie israé-
lienne en 2000, sans apporter de bénéfices évidents ( 2 ) . Enfin,
l’injection d’immunoglobulines de sujets précédemment infectés
par le virus West-Nile a montré des résultats encourageants chez
un petit nombre de patients.
Les traitements non-spécifiques symptomatiques sont essentiels
dans la prise en charge des patients atteints d’encéphalites à virus
West-Nile tels que les traitements anti-épileptiques, les mesures
préventives contre les infections et les défaillances respiratoires.
MESURES PRÉVENTIVES ET CONTRÔLE
Dans les régions touchées par le virus West-Nile, la protection
contre les moustiques est une mesure essentielle visant à limiter
les cas d’infection (utilisation de répulsif, port de vêtements
appropriés). Des mesures visent à limiter la circulation de mous-
t i q u e s : drainage des eaux stagnantes, emploi de larvicides ou
d’insecticides visant à tuer les moustiques lors des périodes épi-
démiques. Des mesures de surveillance rapprochée des mous-
tiques, des oiseaux, et des chevaux ont été mises en place, visant
à dépister précocement l’émergence du virus. Il n’existe pas de
vaccin préventif efficace contre l’infection par le virus We s t - N i l e .
CONCLUSION
Des épidémies d’infections liées au virus West-Nile ont été récem-
ment décrites aux États-Unis et dans d’autres régions du monde
où de telles infections n’avaient été que rarement, voire jamais
rapportées. Ces épidémies ont révélé la large répartition géo-
graphique de souches virales épidémiques associées à un taux
élevé d’atteintes neurologiques et de décès chez l’homme. Les
médecins exerçant dans les zones touchées par le virus We s t - N i l e
doivent inclure l’infection par ce virus parmi les diagnostics à
évoquer en cas de syndrome fébrile estival, d’encéphalite ou de
méningite aseptique. En France, une épidémie et une épizootie
touchant les chevaux ont été observées respectivement en 1962
et 2000 ainsi qu’en été et à l’automne 2003 où six cas ont été
rapportés dans le Var.
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RÉ F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S
1.
Hayes CG. West-Nile virus: Uganda, 1937 to New York City, 1999. Ann NY
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Solomon T, How Ooi M, Beasley DWC, Mallewa M. West-Nile encephalitis. Br
Med J 2003;326:865-9.
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Nash D, Mostashari F, Fine Aet al. The outbreak of West-Nile virus infection
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