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De son coté, le monothéisme chrétien avant de devenir religion officielle de
l’Etat romain, a connu une des figures les plus représentatives de cet impact de
l’historique et du culturel sur le transcendant. Il s’agit de Saint Paul à qui le
christianisme doit la première théologie écrite.
Originaire de la ville de Tarse en Asie mineure, foyer d’une culture brillante et
ville de commerce, Saul de son nom juif s’est déplacé très jeune vers Jérusalem
pour étudier le savoir rabbinique au pied d’un grand maître pharisien ( le rabbin
Gamaliel). Ainsi à sa culture grecque, s’est ajoutée sa connaissance de la Torah,
et grâce à sa culture encore élargie par son mérite de polyglotte (il connaissait le
grec, le latin, l’hébreu et l’araméen) se sont accumulées chez lui les très diverses
mais très ressemblantes versions misogynes des cultures qui existaient autour de
la méditerranée à son époque .
Mais celui « qui a tout fait pour Jésus sans l’avoir jamais connu »4 , était dans sa
conception du rapport entre les sexes foncièrement différent de Jésus.
Jésus, en homme exceptionnel, s’est placé au-dessus de tout lien étroit de sang,
de naissance ou de sexe. Le lien transcendant de l’amour l’a mis en dehors de
toute démarche sexiste.
Saint Paul, par contre, était représentatif de cette synthèse entre la misogynie
sémitique élaborée par la littérature et l’exégèse rabbiniques, celle grecque à
laquelle il adhère par sa culture, et enfin celle romaine à laquelle il appartient
comme citoyen.
L’idée de la nécessaire soumission des femmes et le principe de la prééminence
de l’homme traversent régulièrement ses écrits. En témoignent amplement ses
épîtres célèbres aux Corinthiens5.
De plus, le lancement par Saint Paul de l’idée du péché comme structure de
l’existence humaine avait certainement contribué à sa dureté envers les femmes,
potentiellement plus pécheresses que les hommes d’après lui, même si le dogme
du péché originel, n’était élaboré que plus tard par Saint Augustin (au cours du
Vé s).
Ainsi donc, si le judaïsme s’est imprégné de la tradition sémitique d’abord, de
celle de la Grèce antique et du monde romain ensuite, et si le christianisme a
repris à son tour une partie du legs judaïque ainsi que celui du monde gréco-
romain, l’Islam, le plus récent monothéisme parmi les trois, a eu à hériter de
toutes ces traditions à la fois. Et, il n’est possible de comprendre son histoire
qu’une fois celui-ci replacé dans la culture de son époque, non pas celle du
4 Régis Debray : Dieu un itinéraire- éd, Odile Jacob, Paris 2002
5 Le Nouveau Testament –Traduction d’Hugues Oltramare : Epître aux Corinthiens 11-3, 11-5, 11-7, 11-8, 11-
10, 11-13 p507-508 –éd Gallimard Folio classique 2001