Il existe plusieurs systèmes de santé dans le monde, basés sur des critères, des théories et principes
très différents selon les pays :
Le critère du marché, comme le système de santé nord-américain, basé sur la théorie
libérale de la justice. Le marché s’appuie la valeur première de la liberté.
Le critère de la solidarité, mais avec des différences, selon que cette solidarité
s’appuie sur les besoins individuels (systèmes dits bismarckiens en Allemagne,
Autriche, Belgique, Luxembourg et Pays-Bas) ou sur l’utilité collective (systèmes dits
beveridgiens de solidarité utilitariste au Royaume-Uni, Danemark, Irlande, Finlande et
Suède). La France, comme l’Italie, le Portugal, la Grèce et l’Espagne sont des systèmes
mixtes. Tous ces pays ont en commun le besoin comme valeur première, ce sont les
théories solidaristes de la justice. Les droits réels se substituent aux droits formels.
L’utilitarisme donne priorité aux actions qui maximisent le bien-être pour un maximum
de personnes. Equilibre trouvé entre impôt consenti et l’intérêt général (niveau de
santé publique souhaité).
Chaque système comporte malheureusement des failles, produit des effets injustes et chaque système
tente de les corriger en introduisant un des autres critères des autres systèmes. Plus on élève le niveau
de santé d’une population, plus le seuil de tolérance devant la maladie baisse et plus augmente la
demande de santé. Doit-on et peut-on offrir à tout le monde tout ce qui est techniquement possible
en matière de biens de santé ? La couverture du risque engendre la prise de risque, et augmente le
besoin de soins. (C’est ce qu’on appelle un risque moral élevé, ou encore le risque de
déresponsabilisation des patients trop assisté). Les quelques mécanismes libéraux persistants (choix
du médecin, accès direct aux spécialistes, paiement à l’acte, liberté d’installation, etc) induisent
nécessairement une surproduction et une surconsommation massives du système de santé. Les
systèmes utilitaristes purs ont des effets « sacrificiels » (les laisser pour compte du système) et sont de
plus parfois inefficient par inertie bureaucratique et non incitatifs pour les médecins.
Des tentatives de corrections des dérives sont faites soit par des mécanismes de marché (en
introduisant par ex des systèmes concurrentiels entre caisse d’assurance), des systèmes pour favoriser
l’autonomie, le mérite, la responsabilisation de sa santé, augmenter la solidarité utilitariste par
limitation des demandeurs (accès indirects aux spécialistes) et/ou des offreurs (numérus clausus) …
Chaque mécanisme de corrections comporte également des effets pervers complexes.
En France : (toujours selon l’analyse de Suzanne Rameix)
Obligation morale des médecins :
Coté médecin, les conséquences des options françaises sont considérables : leur responsabilité est
immense. Un système solidariste suppose des médecins « vertueux » puisqu’ils ont la charge d’évaluer
les besoins médicaux qui sont – qui devraient être – le seul critère de production et d’allocation des
soins et, d’autres part, de prodiguer les soins correspondant à ces besoins, et ceux-là seulement. De
lourdes obligations pèsent sur eux : détermination du besoin « objectif », évaluation, comparaison
(médecine et autres actions, préventif et curatif, etc.) interdiction de tout soin inutile, compétence