des vaisseaux sanguins. Ils réduisent le chimiotactisme et la migra-
tion cellulaire sur le site inflammatoire en diminuant la libération
d’histamine par les mastocytes, la production de kinine, de leuco-
triènes et de prostaglandines. Ils inhibent la fonction phagocytaire
des monocytes ainsi que la production de toutes sortes de cytokines
par les lymphocytes (IL1, IL2, …).
Les corticoïdes empêchent la prolifération des fibroblastes ainsi
que la synthèse de collagène et des mucopolysaccharides.
Par leur action immunosuppressive, ils peuvent donc logiquement
avoir leur place dans le traitement de la maladie de Lapeyronie puis-
qu’ils agissent sur les deux versants défaillants de la réaction
inflammatoire spécifique de la maladie [7, 13].
L’utilisation de l’injection dans la plaque permet d’éviter les effets
secondaires systémiques et surtout de contourner le phénomène de
“trapping” albuginéal.
La bibliographie du traitement de la maladie de Lapeyronie par des
injections de corticoïdes est faible.
En 1954, TEASLEY décrit l’utilisation intralésionnelle des stéroïdes
chez 24 patients mais les résultats sont peu documentés [14].
La même année, BODNER rapporte de bons résultats avec la cortiso-
ne et l’hydrocortisone chez 17 patients [1].
En 1967, DESANCTIS [6] rapporte les résultats d’une étude prospec-
tive réalisée sur 10 ans. Il obtient de bons résultats avec 4 cc de
dexaméthasone injectés 1 fois par semaine dans la plaque. Le nom-
bre d’injections dépend de la réponse clinique. Un patient a reçu 62
injections.
En 1975, CHESNEY [3] publie 79% de bons résultats. Les patients
ont reçu 12 injections de 4 mg de dexaméthasone espacées de 15
jours. Mais les groupes de patients sont très hétérogènes et reçoi-
vent parfois plusieurs thérapeutiques. L’interprétation des résultats
manque d’objectivité.
WINTER et KHANNA[16] commentent leur expérience de l’injection
de dexaméthasone au dermo-jet. 21 patients reçurent 6 à 10 injec-
tions de solution à 0,4% de dexaméthasone. Bien que les auteurs
rapportent une diminution de la taille de la plaque et de la douleur
pendant l’érection, aucune différence significative n’est mise en
évidence par rapport à l’évolution naturelle de la maladie. Les
auteurs n’ont pas noté objectivement les modifications de la taille
de la plaque et du degré de courbure de la verge.
En 1980, WILLIAMS et GREEN [15] réalisent une étude prospective
sur 10 ans avec utilisation du triamcinolone. 45 patients sont suivis
pendant 1 an avant de recevoir 6 injections de 2 mg de triamcinolo-
ne dans la plaque à 6 semaines d’intervalle. Durant la période sans
traitement, seuls 3 patients (6%) voient leur maladie se résoudre
spontanément. A la fin du traitement, 33% des patients montrent
des guérisons ou des améliorations. Les meilleurs répondeurs
étaient les patients de moins de 50 ans présentant une petite plaque
ferme distale. Les malades ayant une plaque dure, large et associée
avec des collagénopathies semblaient peu sensibles au traitement.
Aucun effet secondaire ne fut constaté. Malheureusement, cette
étude ne traite pas vraiment de la maladie en phase aiguë car le trai-
tement était initié après 1 an d’évolution de la maladie.
Une étude italienne randomisée réalisée par CIPOLLONE [4] en 1998
compare 15 patients traités par injection de Bétamétasone à 15
patients traités par des injections de solution saline isotonique (pla-
cebo). Les résultats observés à 12 mois sont corrects dans les 2
séries avec 66,6% de disparition de la douleur dans le premier grou-
pe et 53,3% dans le groupe placebo. Environ 20% et 40% des
patients voient respectivement leur courbure et la taille de la plaque
diminuer. Il n’existe pas de différence significative entre les deux
groupes et CIPOLLONE explique les bons résultats par l’effet
mécanique des injections qui “fragmentent” la plaque.
De grands spécialistes de la maladie comme LUE, GELBARD, LEVINE
et RALPH [10] ne recommandent pas ce traitement. Ils en craignent
les effets secondaires : atrophie cutanée, risques d’infection au site
de ponction, effet de passage systémique et accolement des fascia
de Buck à l’albuginée compliquant une chirurgie ultérieure. Pour-
tant, aucune de ces complications n’est relatée dans la littérature
internationale.
Nos résultats sont proches de ceux de la littérature (Tableau I).
Les effets sur la douleur sont bons. Les effets sur la plaque et la
courbure le sont un peu moins.
Malgré ces similarités, il est difficile d’établir un parallèle entre ces
différentes séries.
En effet, les groupes de patients sont rarement homogènes. Ils ne se
présentent pas tous au même stade de la maladie. Les phases aiguës
et chroniques sont généralement traitées indifféremment alors que
notre étude s’est focalisée sur les patients en phase aiguë.
En plus du faible nombre de patients, les séries de la littérature sont
courtes, non randomisées et ne disposent pas d’un recul suffisant.
Comme dans notre étude, les protocoles d’injection ne sont pas
standardisés ce qui biaise les conclusions et interprétations.
Les patients qui bénéficient des injections intracaverneuses de cor-
ticoïdes reviennent régulièrement pour recevoir leur traitement ce
qui explique qu’aucun des patients n’ait été perdu de vue.
Aucun effet secondaire n’est mentionné dans les domaines de l’étu-
de.
Comme pour les autres traitements médicaux, il n’existe aucun
consensus pour les infiltrations de corticoïdes. Il reste donc à défi-
nir les posologies, les fréquences d’injections et leur nombre.
Notre étude ne nous permet pas d’évaluer le nombre d’injections
permettant d’obtenir les meilleurs résultats. Le plus souvent, les
patients niçois ont reçu 4 injections contre 3 pour les patients de
Chambéry/Salon de Provence. Cependant, certains malades ont
reçu des injections tant que la douleur persistait.
La grande majorité des patients a reçu moins de 8 IICC. Les bons
A. Demey et coll., Progrès en Urologie (2006), 16, 52-57
55
Figure 7. Résumé de la physiopathologie de la maladie de Lapeyronie
[10].