14-18 à l`affiche

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14-18
à l’affiche
Ce diaporama reprend des affiches
présentées au public en 2008 aux Archives
de la Ville et de la Communauté urbaine
de Strasbourg lors d’une exposition
intitulée « 14-18 à l’affiche », ainsi que des
textes tirés du catalogue.
Catalogue d’exposition:
14-18 à l’affiche, Strasbourg, Archives,
2008.
Toute reproduction commerciale, même
partielle d’un document d’archives, est
soumise à l’autorisation des Archives de
la Ville et de la Communauté urbaine de
Strasbourg.
Conception et réalisation du diaporama :
Christelle STRUB, professeur d’histoiregéographie et chargée de mission aux
AVCUS. Service éducatif des Archives.
Les Archives de la Ville et de la Communauté urbaine de Strasbourg conservent un
fonds important de près de 20 000 affiches illustrées.
Les affiches illustrées datant de la Première Guerre mondiale font partie des documents
les plus anciens de ce type conservés aux Archives.
Ces documents qui n’étaient pas destinés à être conservés sont imprimés le plus souvent
sur du papier bois très acide. C’est pourquoi ces affiches constituent un fonds très
fragile, nombre d’entre-elles ont été pliées et comportent des déchirures voire des
lacunes. Non accessibles pour l’instant au public, en raison de leur état de conservation,
elles ont fait l’objet d’une campagne de « rajeunissement ».
L’exposition « 14-18 à l’affiche » qui s’est tenue aux Archives du 18 septembre au 12
décembre 2008 a présenté au public une sélection de 87 affiches allemandes et
françaises datant de la Grande Guerre.
Les Archives conservent des affiches allemandes, ce qui semble naturel car l’Alsace
fait partie de l’Empire allemand en 1914, mais également des affiches françaises
collectionnées par les Allemands durant la Grande Guerre.
Grâce à cette richesse, il est non seulement possible de comparer les thématiques
propres à la propagande de chaque camp durant la cette guerre mais également les
différences de graphisme entre affichistes allemands et français.
PLAN
Une guerre de propagande qui mobilise tous les médias
Deux formes d’affiches
Deux styles d’affiches différents
Les autorités de l’affichage
Chronologie simplifiée de la Grande Guerre en France et en Alsace
Août 1914, la guerre!
La guerre coûte cher
Les emprunts français
Les emprunts allemands
Les collectes et réquisitions
Une guerre de propagande
L’évolution de l’armement
Les figures héroïques
La mobilisation de l’arrière
L’Alsace-Lorraine dans la propagande française
L’Alsace-Lorraine dans la propagande allemande
La fin de la guerre
L’Alsace-Lorraine après la guerre
L’image de l’Allemand après la guerre
UNE
GUERRE
PROPAGANDE
MOBILISE TOUS
MEDIAS
DE
QUI
LES
Diverses techniques de communication ont
été utilisées au cours de la guerre : des
articles de presse dirigés et contrôlés, des
publicités de presse, des cartes postales, des
calendriers, des timbres postaux et même
les premiers films de propagande. Mais,
dans ce registre, le médium le plus utilisé
et le seul permettant aux autorités
d’atteindre le public le plus vaste était
l’affiche : celle-ci était collée sur les
panneaux d’affichage et les murs dans les
villes comme dans les plus petits villages.
Avant la guerre, l’affiche avait été surtout
un outil de communication pour les
spectacles et pour la publicité commerciale.
Au cours de la guerre, l’affiche devint une
arme très efficace de propagande.
Henri Royer, L’Aurore, Paris, s.d. AVCUS,
503 Fi 24.
DEUX FORMES D’AFFICHES
Les affiches textes
L’affiche texte est un placard qui se
présente uniquement sous une forme
typographique. Ce que l’autorité, qui
émet cette affiche, reconnaît comme
important est en caractères gras et
souvent beaucoup plus grands.
Les affiches textes ont été souvent
moins collectionnées que les affiches
illustrées. De ce fait, les collections
parvenues jusqu’à nous ne reflètent pas
l’émission réelle des affiches.
Inscription des territoriaux, 26 juillet 1915. Imprimerie Riedel Frères, Strasbourg. AVCUS, 502 Fi 12.
Avis du général commandant remplaçant du XVe corps d'armée, le général d'infanterie von Gilgenheim, au sujet de l'inscription sur les
listes des territoriaux des hommes de 17 à 45 ans qui n'ont pas encore suivi d'instruction militaire et qui ne sont pas encore inscrits.
Les affiches illustrées
Sur l’affiche illustrée, l’image
occupe l’essentiel de la feuille
et
transmet
le
message
principal.
Non ! Jamais !, 1917, Julius Ussy
Engelhard, imprimerie C. Wolf et fils
Munich. AVCUS, 503 Fi 308.
DEUX STYLES D’AFFICHES DIFFÉRENTS
En France
Nous en avons encore !, août 1916,
Emile Friant, Nancy, AVCUS, 503 Fi 5.
Une tradition s’est installée fortement en France : le
lien entre caricature et affiche. La loi sur la liberté
de la presse de 1881 avait favorisé le foisonnement
de journaux satiriques. Tous les quotidiens et
hebdomadaires (Le Figaro, Le Petit Parisien, Le
Journal…) avaient des rubriques illustrées et les
revues illustrées satiriques étaient nombreuses autour
de 1900, critiquant allègrement les institutions
politiques, le clergé, les bourgeois. Outre La
Caricature, Le Rire et bien d’autres, il y avait
L’Assiette au beurre, qui est l’une des plus
représentatives de ces revues : elle comptait parmi
ses collaborateurs réguliers Steinlen, Gottlob, Faivre,
Naudin, Willette qui tous produisirent des affiches
pendant la guerre. Une majorité d’affichistes français
de la Grande Guerre a été formée aux Beaux-Arts où
ils avaient étudié le dessin et la peinture. Mais, les
trois-quarts sont surtout des praticiens de l’image
caricaturale : il leur faut trouver un dessin qui
accroche et c’est ce qu’ils font lorsqu’ils créent une
affiche pour la guerre.
En Allemagne
L’affiche est un objet qui relève des
arts décoratifs.
L’Allemagne avait également ses
revues satiriques, mais la loi allemande
sur la presse de 1874 était beaucoup
moins tolérante que la loi française.
Une analyse et une réflexion fort
modernes avaient été menées dans les
Kunstgewerbeschulen, portant sur le
concept qui devait être retenu pour une
affiche, sur l’image qu’il convenait de
choisir et enfin sur le rôle et la place du
texte. L’affiche était ainsi devenue en
Allemagne plus un objet technique
qu’une création purement artistique.
Ceci est le chemin vers la paix-les ennemis
le veulent ainsi! C’est pourquoi, souscris à
l’emprunt de guerre!, Lucian Bernhard,
Stuttgart, s.d., AVCUS, 502 Fi 297.
LES AUTORITES DE L’AFFICHAGE
En France, il y eut bien sûr les affiches officielles du début de la guerre,
placardées par le gouvernement : affiches de mobilisation, proclamations liées
à l’entrée en guerre. Les proclamations se multiplièrent au long de la guerre :
discours du président de la République, prises de position du gouvernement.
Toutes ces affiches étaient émises sous la forme d’affiches textes, ornées de
deux petits drapeaux tricolores ou de bordures tricolores.
Cet affichage relevait directement du gouvernement ou se faisait par
délégation. Deux ministères, guerre et affaires étrangères, développèrent des
services de propagande spécifiques.
Mais d’autres instances émirent également des affiches comme la Maison de
la Presse, la Ligue des Patriotes, des associations d’artistes, et de multiples
comités spécifiques.
En Allemagne, une loi de 1849 voulait que la communication par affiches soit
réservée à la communication politique et à la seule publicité commerciale.
Le gouvernement allemand et le commandement supérieur de l’armée ont lancé
plus tardivement des campagnes d’affichage. Le gouvernement et la OHL
(oberste Heeresleitung) diffusaient les ordres, décisions, règlements et les
messages de l’empereur. Ce commandement supérieur de l’armée mobilisait des
« peintres de guerre », comme Erler et veillait à la carrière d’affichistes connus
qui avaient été appelés sous les drapeaux, comme Lucian Bernhard ou Martin
Lehmann. Au niveau des fronts, sinon dans tel Land, le Generalkommando de tel
corps d’armée avait toute autorité pour faire placarder les mesures jugées
indispensables.
Il y a eu aussi des initiatives régionales et locales et le rôle des banques, dans le
cas des emprunts ; ces initiatives de Länder et de communes se multiplièrent
lorsqu’il a fallu gérer la pénurie beaucoup plus précoce et plus dure en
Allemagne qu’en France en raison du blocus maritime anglais.
CHRONOLOGIE SIMPLIFIÉE
DE LA GRANDE GUERRE EN FRANCE
1871
Suite à la guerre de 1870-71, l’Alsace et une partie de la Lorraine sont annexées par l’Empire allemand de
Guillaume 1er et de Bismarck (Traité de Francfort).
1914
28 juin : L’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône d’Autriche-Hongrie est assassiné avec son épouse à
Sarajevo par un étudiant nationaliste serbe de Bosnie, Gavrilo Princip.
23 juillet : L’Autriche-Hongrie adresse un ultimatum à la Serbie dans lequel elle exige entre autres que les
autorités autrichiennes puissent enquêter en Serbie. Refus des serbes sur ce point, l’Autriche lui déclare la
guerre le 28 juillet.
29 juillet : La Russie apporte son soutien à la Serbie et mobilise contre l’Autriche-Hongrie.
1er août : L’Allemagne alliée de l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Russie et, suivant le plan Schlieffen, à
la France alliée des russes le 3 août.
5 août : Suite au viol de la neutralité belge par l’armée allemande, l’Angleterre déclare la guerre à l’Allemagne.
6-9 septembre : Première bataille de la Marne, l’avancée allemande est stoppée à 40 km de Paris.
19 octobre - fin 1914 : « Course à la mer », chaque camp cherche à déborder l’autre par le nord. Première
bataille d’Ypres. En décembre, le front se stabilise de la mer du nord à la frontière suisse, c’est la fin de la
guerre de mouvement. Les soldats creusent les premières tranchées, c’est le début de la guerre de positions.
1915
16 février - 16 mars : Bataille de Champagne, la tentative française de percer le front est un échec.
Avril : Seconde bataille d’Ypres, première attaque massive à l'arme chimique (gaz moutarde appelé par la suite
ypérite) par l'armée allemande le 22 avril.
7 mai : Torpillage par les Allemands du paquebot britannique Lusitania.
1916
21 février - 18 décembre : Bataille de Verdun, l’offensive allemande veut réduire le front et saigner à
blanc l’armée française.
1er juillet - 18 novembre : Bataille de la Somme, les alliés cherchent à soulager Verdun en obligeant
les allemands à disperser leur forces.
1917
2 avril : Entrée en guerre des Etats-Unis aux côté des alliés suite à la politique de guerre sous-marine à
outrance des allemands.
Début avril - mi mai : L’échec de l’offensive française du Chemin des Dames (Aisne) du général
Nivelle conduit à des mutineries chez les poilus.
6-7 novembre : Révolution d’Octobre (suivant le calendrier russe), les Bolcheviks de Lénine prennent
le pouvoir à Saint-Pétersbourg.
3 décembre : Les Bolcheviks signent la paix de Brest-Litovsk avec les empires centraux. L’Allemagne
peut concentrer ses forces sur le front ouest.
1918
Mars-juillet : Dernières offensives allemandes en Picardie puis en Champagne, création d’un
commandement unique sous l’autorité du général Foch.
11 novembre : L'armistice franco-allemand est signé à Rethondes.
1919
28 juin : Signature du traité de Versailles, l’Allemagne perd 10 % de son territoire. L’Alsace-Lorraine
retourne à la France.
LA GUERRE EN ALSACE
1914
31 juillet 14 h : Arrivée à Strasbourg d’un télégramme du ministère de la guerre à Berlin « Danger de
guerre imminent ».
1er août 18 h : Ordre de mobilisation générale de l’armée allemande à partir du 2 Août.
7 août : Prise de Thann par les français.
8 août : Les troupes françaises entrent dans Mulhouse, les allemands reprennent la ville le 10. Les
français la réoccupent du 19 au 24 août.
14 août : Bataille de Diespach/St Blaise dans la vallée de la Bruche, première défaite allemande de la
guerre.
19-20 août : Bataille de Lorraine : échec de la percée française recherchée par le plan XVII, retrait des
troupes françaises de haute Alsace et de la vallée de la Bruche.
1915
Juillet-Août : Combats au col du Linge près d’Orbey
Janvier, mars, avril, décembre : Combats du Hartmannswillerkopf (Viel Armand).
1918
9 novembre : Petite révolution du soviet, des conseils d’ouvriers et de soldats se constituent à
Strasbourg. La république allemande est proclamée le 10 novembre devant l'Aubette.
22 novembre : Entrée des troupes françaises à Strasbourg.
AOÛT 1914, LA GUERRE !
Après l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand le 28 juin 1914 à Sarajevo, on pouvait
espérer une solution diplomatique à la crise austro-serbe. Mais la mobilisation partielle
de l'armée russe, décrétée le 29 juillet, conduit en quelques jours, par le jeu des alliances,
au déclenchement de la Première Guerre mondiale.
En effet, la montée des nationalismes et les rivalités économiques et coloniales entre les
pays européens avaient engendré, par le jeu des alliances, la création de deux blocs
opposés. D'une part, les empires centraux, l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie, s'étaient
alliés à l'Italie (qui change de camp en 1915) pour former la Triplice. De l'autre, la France
s'était alliée à la Russie puis à l'Angleterre pour former la Triple-Entente.
La mobilisation de l'armée allemande est ordonnée le 1er août ; elle est effective dès le
lendemain. La rapidité de cette mobilisation doit permettre à l'armée allemande de prendre
ses ennemis de vitesse et augmenter ainsi ses chances de victoire. En effet, l'empire
allemand doit se battre sur deux fronts, contre les Français à l'ouest et les Russes à l'est. Il
se trouve de fait en infériorité numérique.
Aux yeux de la population, l'ordre de mobilisation tient lieu d'annonce officielle de l'état
de guerre.
Sur la plus ancienne des affiches,
l’empereur allemand décrète - à la
troisième personne du pluriel, selon les
formes de politesse en cours - la
mobilisation de l’armée et de la marine,
échelonnée
sur
plusieurs
jours.
L’autorité qui signe l’affiche est le
général commandant le XVe corps
d’armée.
Ce placard standardisé pour tout
l’empire, porte la mention d’une
impression
à
Berlin,
par
la
Reichsdruckerei, mais il est très possible
qu’il
s’agisse
d’une
impression
strasbourgeoise par délégation.
L’affiche est un travail typographique
classique, particulièrement soigné, dans
un cadre constitué des trois couleurs de
l’empire: noir, blanc, rouge.
Ordre de mobilisation de l’armée du 1er août 1914,
Berlin. AVCUS, 502 Fi 40.
LA GUERRE COÛTE CHER
Les deux camps croyaient à une guerre courte comme celle de 1870-1871. Mais à
la fin de l'année 1914, lorsque la guerre de mouvement cède la place à la
guerre de position, la perspective d'une victoire rapide s'éloigne.
Dès la déclaration de guerre, les belligérants avaient voté des crédits
exceptionnels, mais la poursuite des hostilités demande sans cesse de nouveaux
capitaux. La guerre des matériels impose la guerre de l'argent. Mais le coût
d'un conflit de l'ère industrielle dépasse les capacités financières des Etats. Ces
derniers doivent donc emprunter auprès de leur population les sommes
nécessaires pour poursuivre la guerre. La guerre d'usure touche également
l’économie.
C'est ainsi que les Etats et les organismes privés multiplient les appels auprès de
la population l’invitant à placer ses économies dans les emprunts de guerre et à
répondre à différentes collectes. Ces opérations sont présentées comme des actes
patriotiques et un investissement sur l'avenir. Le nombre important d'affiches
annonçant les emprunts de guerre montre leur importance dans l'effort de guerre.
Journée du poilu, 25 et 26 décembre 1915,
Francisque Poulbot, Imprimerie Devambez,
Paris. AVCUS, 503 Fi 27. Collecte de
bienfaisance au profit des soldats au front,
organisée par le Parlement.
Journée du poilu, 1915, ThéophileAlexandre Steinlen, imprimerie Devambez,
Paris. AVCUS, 503 Fi 34. Journée de
bienfaisance au profit des soldats au front,
organisée par le Parlement.
LES EMPRUNTS FRANÇAIS
Les emprunts visaient une large population, notamment celle des très nombreux
épargnants des villes et surtout des riches départementaux agricoles qui, tout
cumulé, avaient amassé des quantités considérables d’or. Le premier emprunt fut
émis en novembre 1915, le second en octobre 1916, le troisième en octobre 1917 et
le dernier en octobre 1918.
Le rapport du premier emprunt, le plus élevé, rapporta plus de 15 milliards de
francs. Ultérieurement les sommes perçues furent moindres : nominalement de
l’ordre de 10 milliards, mais, en raison de la dévaluation du franc au cours de la
guerre, ces sommes étaient, en valeur réelle, de moins en moins élevées. La
situation devenait difficile à l’arrière, et les gens en état de souscrire étaient de
moins en moins nombreux.
Par ailleurs, il y avait tant d’autres sollicitations : ainsi, tout au long de la période de
guerre, des collectes innombrables pour les éprouvés de guerre, lors de Journées du
poilu, de la Journée serbe, pour les régions libérées, pour les foyers de soldats… Il y
eut aussi de multiples « journées » de départements, de certaines villes. La guerre
devait être suivie d’une « rafale » d’emprunts essentiellement en vue de la
libération, de la reconstruction ; on vit apparaître des emprunts nationaux,
perpétuels...
Pour la France, versez votre or,
1915. Abel Faivre, Imprimerie
Devambez, Paris. AVCUS, 503
Fi 30.
Affiche de promotion de
l'emprunt de guerre de 1915.
Un soldat allemand plie sous
le poids d'une pièce d'or
française d'où jaillit le coq
gaulois.
On
les
aura
Abel
Faivre,
Devambez,
AVCUS,
503
!,
1916.
Imprimerie
Paris.
Fi
29.
Affiche de promotion du
second emprunt de guerre
français.
LES EMPRUNTS ALLEMANDS
Les campagnes allemandes dans le domaine des collectes et particulièrement
des emprunts ont été nettement plus nombreuses car l’Allemagne était
progressivement asphyxiée par le blocus et dut recourir à la solidarité
nationale beaucoup plus que tous les autres belligérants.
On compte ainsi neuf emprunts allemands. Ils ont été lancés successivement
en octobre 1914 (rapport : 14,5 milliards de marks), en mars 1915 (rapport :
moins d’un milliard), en septembre 1915 (rapport : 12 milliards), en mars
1916 (rapport : 10,5 milliards), en octobre 1916 (rapport : 10,5 milliards), en
mars 1917 (rapport : 13,1 milliards), en octobre 1917 (rapport : 12,5
milliards), en mars 1918 (rapport : 15 milliards), et le neuvième peu avant
l’armistice (rapport : 10,4 milliards).
Comme en France, il y eut en Allemagne une inflation importante durant la
guerre et une dévaluation de fait de la monnaie.
Patrie, famille, avenir, 1918.
Casper Augustin Geiger, texte de la
direction pour l'empire allemand,
imprimerie Münchner
Buchgewerbehaus M. Müller et fils,
Munich. AVCUS, 502 Fi 271.
Affiche pour l'assuranceemprunt de guerre de la
société d'assurance-vie "le
Phœnix autrichien" de Vienne.
Un soldat allemand coiffé d'un
casque à pointe porte dans ses
bras un enfant blond, nu, qui
touche du doigt le mot
"avenir" sur fond doré.
Aidez-nous à vaincre, Souscrivez à
l’emprunt de guerre, 1917.
Fritz Erler, imprimerie Hollerbaum et
Schmidt, Berlin. AVCUS, 502 Fi 372.
L’affiche du peintre Fritz Erler pour le
6e emprunt, lancé en mars 1917, a eu
un effet extraordinaire. Le nombre de
souscripteurs s’éleva à plus de 6,7
millions.
Un soldat au front (Verdun ?) porte un
casque d’acier modèle 1916, un
masque à gaz et des grenades à
manche. On aperçoit derrière lui du fil
de fer barbelé.
Cette affiche devint l’une des icônes
de l’art de l’affiche de la Première
Guerre mondiale. Elle fut déclinée en
plusieurs formats et largement
diffusée sous forme de cartes postales
distribuées aux soldats.
COLLECTES ET RECQUISITIONS
Le blocus imposé par l’Entente à l’Allemagne a été très éprouvant pour la
population. Les autorités allemandes invitent la population à pratiquer des
économies, à collecter par exemple des feuilles ou des noyaux. Les autorités
récupèrent les métaux pour fabriquer des armes.
Plusieurs affiches trahissent la dégradation de l'approvisionnement, ce qui
contraint les autorités à recourir à des réquisitions.
Hohlwein fait une démonstration de son savoir-faire dans l’affiche qui ne porte que
trois mots : Ludendorff-Spende für Kriegsbeschädigte / « collecte Ludendorff pour
les mutilés de guerre ». Outre le titre court, tout est dans l’image : un mutilé,
caractérisé par la béquille qu’il tient de sa main gauche et qui semble avoir des
difficultés du côté de sa main droite, cherche d’évidence à retrouver l’usage d’outils
simples comme un marteau et une tenaille. L’affiche apparaît bien claire: l’uniforme
gris-clair est savamment rendu, avec un traitement élaboré de la texture du tissu et
comme des effets de pochoir (ombre et lumière) qui indiquent la profondeur et le
mouvement. Sur cette affiche en largeur, il y a beaucoup de blanc : la chemise du
soldat et de grands espaces blancs autour du personnage.
Collecte Ludendorff pour les mutilés de guerre, s.d. Ludwig Hohlwein, imprimerie
Kunstanstalt Wüsten et Co., Francfort-sur-le-Main. AVCUS, 502 Fi 300. Inscription
manuscrite au crayon bleu : "réception des dons à l'office II de la taxe de circulation
impériale, bureau 24".
Ayez un cœur…, s.d., Josef
Goller,
imprimerie
Feyl
frères, Berlin. AVCUS, 502 Fi
269.
Cette affiche annonce une
collecte de vêtements usagés
pour les soldats rentrants du
front et la population
nécessiteuse. Dans un cœur
surmonté d'une croix de fer,
des soldats reçoivent des
vêtements de civils.
Expropriation des métaux nonferreux,
1918.
Louis
Oppenheim, imprimerie d'art
Weylandt,
Berlin.
AVCUS,
502
Fi
363.
La pénurie de métaux oblige
le gouvernement allemand à
réquisitionner tous les objets
contenant de l'aluminium,
du cuivre, du laiton, du
nickel
ou de l'étain.
L’affiche montre un ouvrier
rassemblant dans un grand
sac des objets hétéroclites
en métaux non-ferreux.
Ramassez des noyaux de fruits, s.
d., Julius Gipkens, imprimerie
Hollerbaum et Schmidt, Berlin.
AVCUS, 502 Fi 362.
L’affiche de la délégation
de guerre pour les huiles et
graisses promeut la collecte
de noyaux de fruits afin
d'en tirer de l'huile. Deux
pépins dotés de jambes et
d'une tête suent des gouttes
d'huile.
Ramassez des feuilles en guise de foin, 1917. Gottlob More, imprimerie d'art S. Malz, Berlin.
AVCUS, 502 Fi 301. Une femme et des enfants collectent des feuilles sur les arbres pour en faire
du fourrage.
UNE GUERRE DE PROPAGANDE
L'entrée en guerre est marquée par un important mouvement patriotique d'union
nationale jusque dans la classe politique. En France, c'est l'Union sacrée, en
Allemagne le Burgfrieden.
Mais, dans la poursuite de la guerre, les gouvernements doivent s'assurer que l'opinion
publique y reste favorable. Il leur faut veiller aussi bien au moral des soldats au front
qu'à celui de la population civile restée à l'arrière. Un argument est mis en avant : c’est
le camp adversaire qui a rendu la guerre inévitable. Le bellicisme de l’autre est opposé
à des protestations de justice et de paix.
En France, on emploie l'expression "guerre du droit" pour souligner le fait que c'est
l'Allemagne qui a agressé une France obligée de se défendre. Les affiches dénoncent
alors l'inculture, l'hypocrisie voire la barbarie de l'ennemi.
Tout au long du conflit, il faut entretenir auprès de la population la certitude de
la victoire et combattre le défaitisme afin d’éviter un relâchement de l'effort de
guerre. Les affiches sont alors utilisées pour démontrer l'affaiblissement de l'ennemi,
ce qui confirme l'imminence de la victoire.
« Was von der Ent », s.d., F. Klimesch, imprimerie Dietrich Reimer (Ernst Vohsen), Berlin. La
légende : "Ce qu'il resterait de l'Entente, si elle prenait au sérieux l'autodétermination de ses propres
peuples et lâchait les rênes". AVCUS, 502 Fi 289.
Sommes-nous les barbares ?, 1916,
Louis Oppenheim, imprimerie Dr.
Selle et Co., Berlin. AVCUS, 502 Fi
265.
La comparaison des dépenses
sociales,
du
nombre
d'analphabètes, des dépenses
pour l'éducation, de l'édition,
des prix Nobel et des brevets
en Allemagne, en Angleterre
et en France cherche à
démontrer
la
supériorité
culturelle de l'Allemagne. Audessus du titre figure le
portrait de Goethe dans un
médaillon.
La guerre est l'industrie nationale de la Prusse, 1917.
Maurice Neumont, P. G. Gallais et Co., Paris. AVCUS, 503 Fi 16.
La carte de l'Europe
montre
l'expansion
territoriale de la
Prusse depuis 1715.
La
Prusse
est
représentée comme
une pieuvre coiffée
d'un casque à pointe
dont les tentacules
s'étendent sur tout le
continent.
Les
territoires français et
belges occupés par
l'armée
allemande
sont représentés en
pointillés. A droite un
dessin
figure
l'augmentation
progressive
de
l'armée
allemande
entre 1715 et 1914.
L’ÉVOLUTION DE L’ARMEMENT
Les affiches constituent, d’une certaine manière, un indicateur imagé de
l’évolution de l’armement. Elles permettent de voir apparaître les casques
d’acier, les avions, les sous-marins et les chars.
Le CASQUE À POINTE subsiste comme symbole durable de l’armée
allemande « éternelle » mais dans la réalité, il a été remplacé, en février 1916
par le Stahlhelm (casque d’acier, dit aussi casque à boulons).
Hitler devait écrire dans Mein Kampf : „aus dem Schleier der Vergangenheit
heraus [wird] die eiserne Front des grauen Stahlhelms sichtbar werden, nicht
wankend und nicht weichend, ein Mahnmal der Unsterblichkeit." Le Stahlhelm
devint même le nom d’un mouvement militaro-politique qui, aux yeux des
révolutionnaires des débuts de Weimar, apparut comme le symbole des forces
d’ordre réactionnaires. Ultérieurement, au début des années 1930, ce
mouvement fit équipe avec le parti nazi. Le peintre Erler qui fit la célèbre
affiche « Helft uns siegen! » fut apprécié par les nazis. Il fut notamment appelé à
faire un portrait de Hitler et ceux d’autres dignitaires.
La meilleure caisse d'épargne :
l'emprunt de guerre, s.d., Louis
Oppenheim, imprimerie Fritz
Schneller et Co., Nuremberg.
AVCUS, 502 Fi 291.
Une main tient un casque d'acier
allemand modèle 1916 dans
lequel tombent des billets de
banque.
L’AVIATION
Et vous ?, s.d.,
Fritz Erler, Munich, imprimerie
Eckstein et Stähle, Stuttgart.
AVCUS, 502 Fi 371.
Un aviateur est représenté debout
dans un baquet d’avion biplan. Il a
le bras droit bandé, porte un
bonnet d’aviateur et une vareuse
en cuir. Sous son bras gauche, on
peut distinguer la crosse d’une
mitrailleuse de bord.
Le slogan inscrit sur l’affiche est :
"Et vous ? Souscrivez à l'emprunt
de guerre".
LES SOUS-MARINS
Donnez pour la quête des sous-marins,
1917. Willy Stöwer, imprimerie Pass
et Garleb, Berlin. AVCUS, 502 Fi 295.
Le sous-marin est représenté en
surface avec son équipage. Une liste
indique
quels
établissements
acceptent les dons. Cette affiche
correspond à la reprise de la guerre
sous-marine
à
outrance
par
l'Allemagne, ce qui conduira à l'entrée
en guerre des Etats-Unis.
A la différence de nombre d’affiches
allemandes qui recherchent la
simplification et la schématisation du
sujet, il ne manque, ici, pas un bouton
d’uniforme de sous-mariniers et pas
un écrou sur le sous-marin. Cela est
dû à la formation spécifique du
peintre qui a débuté comme
dessinateur d’armements de marine
LES CHARS
Nous allons les battre…, s.d.
Martin Lehmann, imprimerie Weylandt,
Berlin. AVCUS, 502 Fi 268.
L’apparition des chars a été une des
grosses surprises militaires de la guerre.
La Grande-Bretagne a, la première,
entrepris de mettre au point une telle
arme en 1915. L’irruption de ces engins
mécaniques sur le champ de bataille, en
septembre 1916, provoqua une panique
considérable dans les rangs allemands
qui faisaient face aux premiers engins.
Le rôle militaire des chars resta pourtant
mineur sur les champs de bataille.
Les chars représentés sur cette affiche
sont britanniques! Ces Mark IV,
construits à partir de mai 1917,
menacent de tout écraser. Mais les
Allemands affirment dans la légende en
gros caractères, sous les chenilles du
char, Wir schlagen sie / « Nous les
vaincrons ». Ce slogan martial est
augmenté d’un corollaire « et nous
souscrivons à l’emprunt ».
LES FIGURES HÉROÏQUES
Des deux côtés, français comme allemand, se
détachèrent bientôt des figures héroïques réelles,
historiques et mythologiques.
Dans un premier temps et dans la logique de guerre en
général, les principaux chefs de guerre furent
célébrés.
Du côté français : les Joffre, Galliéni, Pétain et Foch ;
mais durant les dernières années de la guerre, ce fut
particulièrement le chef du gouvernement, Clemenceau.
Du côté allemand, le Kaiser apparut évidemment en
premier lieu, ainsi que le Kronprinz. Après ses victoires
contre les Russes en Mazurie, Hindenburg rejoignit
définitivement le panthéon des chefs de guerre
allemands, suivi bientôt par Ludendorff.
Souscrivez à l'emprunt de guerre, s.d.
Paul Bruno, imprimerie C. Wolf et Fils, Munich. AVCUS, 502 Fi 263.
Le maréchal von Hindenburg est représenté de profil, à la manière d’une médaille : "Les
temps sont durs, mais la victoire est certaine".
Les affiches permettent de voir se dégager une toute nouvelle figure, celle du soldat du
front : le Poilu du côté français et le Feldgraue du côté adverse.
Sur les affiches françaises, le soldat est représenté sur le front le plus souvent
indemne, idéalisé. Le mutilé apparaît plus tard en 1919 ou 1920, aux côtés du
travailleur
ou
lorsqu’il
est
redevenu
paysan.
Du côté allemand, celui qui, pour les populations de l’arrière, contribua
considérablement à installer l’image du soldat du front fut certainement le professeur
Erler, auteur de quelques affiches fameuses.
Erler, tout à fait dans l’esprit
héroïque, dessina un combattant
nu armant un arc et tirant, selon le
slogan qui avait été retenu, la
neuvième flèche (c’était la
neuvième campagne d’emprunt).
Or, cette affiche, certainement
tirée à un très grand nombre
d’exemplaires, fit un flop. Elle
semble avoir heurté la population
et elle aurait été en grande partie
retirée et pilonnée…
La neuvième flèche, 1918.
Fritz Erler, Hollerbaum et Schmidt,
Berlin, imprimerie populaire Paul
Singer, Strasbourg. AVCUS, 502 Fi
370.
LA MOBILISATION
DE L’ARRIÈRE
Si le soldat au front, destinataire de
l'effort de guerre, constitue un thème
central des affiches de guerre, pour
autant la population civile restée à
l'arrière n'est pas oubliée. L'arrière doit
fournir aux armées en campagne
l'ensemble de leur approvisionnement.
De nombreuses affiches représentent le
monde rural et ouvrier afin de montrer
son importance dans l'économie de
guerre. Les belligérants sont conscients
que la guerre se gagne aussi bien sur le
front qu'à l'arrière. On parle ainsi de
"front intérieur" ; les Allemands
emploient quant à eux le terme de
"Heimatfront".
Le travail en ville et à la campagne !, 1918.
Hanns Anker, imprimerie Meisenbach Riffarth
et Co., Berlin-Schöneberg. AVCUS, 502 Fi 292.
L’ALSACE-LORRAINE DANS LA
PROPAGANDE FRANCAISE
Après la défaite française contre la Prusse en 1870, l'Alsace
et une partie de la Lorraine sont annexées par l'empire
allemand (Traité de Francfort, 1871). Cette annexion est à
l'origine d'un fort sentiment de revanche en France,
sentiment qui contribue au déclenchement de la Première
Guerre mondiale. Si le thème de l'Alsace-Lorraine,
provinces perdues, reste récurrent dans le débat politique
français jusqu'en 1914, il a cependant perdu, aux fils des
décennies, beaucoup de son retentissement dans l'opinion
publique.
Mais face aux milliers de morts, la défense de la Serbie et
de la Belgique ne constitue plus une justification suffisante
pour faire accepter à la population française la poursuite de
la guerre. Dans ce contexte, la reconquête de l'AlsaceLorraine redevient le thème majeur de la propagande
française et son principal but de guerre. De nombreuses
affiches françaises représentent ainsi Alsaciennes et
Lorraines attendant le retour de la France.
Deux cœurs fidèles, s. d.
Lucien
Lévy-Dhurmer,
imprimerie Devambez, Paris.
AVCUS, 503 Fi 14. Les deux
"provinces
perdues"
sont
personnifiées par deux jeunes
filles, revêtues du costume
traditionnel alsacien et lorrain.
L'attente, s. d.
Henri Royer, imprimerie Minot, Paris.
AVCUS, 503 Fi 9.
Une jeune fille alsacienne assise attend le retour
des Français en tenant de sa main gauche une
cocarde tricolore.
La belle Lorraine, s. d.
Henri Royer, imprimerie Lapina, Paris.
AVCUS, 503 Fi 8.
Une jeune fille lorraine attend assise le retour des
Français. Elle tient de sa main gauche une rose et
porte sur son bonnet la cocarde tricolore.
Le drapeau tricolore sur la
cathédrale de Strasbourg, s.d.
Jean-Jacques Waltz dit HANSI,
imprimerie Lapina, Paris. AVCUS,
503 Fi 22.
Des poilus en bleu horizon sur
le
front
des
Vosges,
symbolisé par un sapin,
regardent dans la plaine
d'Alsace et voient au de-là de
l'horizon la Cathédrale de
Strasbourg sur laquelle flotte
le drapeau tricolore.
La légende est une citation de
Victor Hugo : "Ce ciel est
notre azur, ce champ est notre
terre ! Cette Lorraine et cette
Alsace c'est à nous !".
L’ALSACE-LORRAINE
ALLEMANDE
DANS
LA
PROPAGANDE
L’Allemagne avait pris, très progressivement, sinon bien tardivement, des
mesures plus libérales dans le Reichsland : lors de moments d’échauffement,
par exemple lors de l’affaire de Saverne (épisode causé par la morgue d’un
jeune officier allemand), l’opinion allemande avait redécouvert la question
alsacienne. Du point de vue allemand, le Reichsland était en voie
d’intégration. De nombreuses recrues d’origine alsacienne ou mosellane se
trouvèrent sur le front de guerre ouest, en Flandre ou sur la Somme.
En réaction à la propagande française sur les provinces perdues, l'Allemagne
insista sur l'appartenance historique de l'Alsace-Lorraine à l'aire germanique.
A l’extrême fin de la guerre, la question de la restitution est figurée, de façon
cartographique, sur des affiches où l’on voit les Allemands redouter la main
mise française sur la totalité de la rive gauche du Rhin.
Non ! Jamais !, 1917.
Julius Ussy Engelhard, imprimerie C.
Wolf et fils Munich. AVCUS, 503 Fi
308.
L’affiche la plus expressive est
due à Engelhard : on peut trouver
une connotation antisémite dans
la représentation expressionniste
du soldat français qui tente de
mettre la main sur l’Alsace (avec
la cathédrale reconnaissable).
Le texte est bref : Nein !
Niemals ! / « Non ! Jamais ! ».
LA FIN DE LA GUERRE
Après l'échec des offensives allemandes du printemps et de l'été 1918, l'opinion publique
allemande, lassée par la guerre et les pénuries, se résout à la défaite. Le 3 novembre
1918, les marins de Kiel se mutinent et l’empereur Guillaume II finit par abdiquer le 9
novembre. Les sociaux-démocrates prennent le pouvoir à Berlin, proclament la
république et signent un armistice avec les alliés le 11 novembre 1918 dans la forêt de
Compiègne.
A Strasbourg, comme dans le reste de l'Allemagne, soldats et ouvriers se constituent
en soviet à partir du 9 novembre, à l’exemple de ce qui s’était passé en Russie en 1917.
La république est proclamée le 10 novembre sur la place Kléber. Dans un climat
révolutionnaire, le socialiste Jacques Peirotes est élu maire. Les troupes françaises
entrent dans la ville le 22 novembre.
Quatre années de privations et de restrictions ont réduit à néant les acquis politiques de
47 années d'annexion allemande. C'est donc une population enthousiaste qui accueille les
troupes françaises. Mais le 29 novembre, la municipalité présidée par Peirotes est
dissoute par les autorités françaises et remplacée par une commission municipale
présidée par Léon Ungemach.
C'est cette dernière qui accueille, le 9 décembre, le président de la République
Raymond Poincaré et le président du conseil Georges Clemenceau.
AVCUS, 1 FI 298-6, entrée des troupes
françaises avec le Maréchal Foch, 26
novembre 1918.
AVCUS, 1 FI 298-1, Proclamation de la
République, 10 novembre 1918.
AVCUS, 1 FI 298-4, les spahis place
Kléber, 22 novembre 1918.
Réunions
publiques,
17
novembre 1918. Imprimerie
populaire Strasbourgeoise Paul
Meyer. AVCUS, 502 Fi 379.
A l’annonce de l’abdication de
Guillaume II, des soviets se
mettent en place dans plusieurs
villes allemandes, dans une
atmosphère
de
révolution
inspirée des évènements russes
d’octobre 1917.
Pour Strasbourg, cette affiche
annonce huit réunions politiques
dans différents lieux de la ville
portant sur la guerre mondiale,
la révolution et le socialisme.
Ces réunions sont organisées par
le conseil central des ouvriers et
des soldats de Strasbourg.
Avis important, 20 novembre 1918. Imprimerie Alsacienne, anciennement G. Fischbach,
Strasbourg. AVCUS, 502 Fi 56. Un comité prépare l’entrée des troupes françaises dans
Strasbourg, pour le 22 novembre 1918. L’affiche porte convocation en français et en alsacien
(mais pas en allemand) des jeunes filles "vraiment alsaciennes" qui souhaitent accueillir les
troupes françaises en costume alsacien.
Aux habitants de Strasbourg! Aux
soldats de la 4ème armée! Le jour de
gloire est arrivé! AVCUS, 503 FI 70.
Panneaux destinés aux badauds lors de la
visite de Raymond Poincaré et Georges
Clemenceau, 1918. AVCUS, 503 Fi 41.
Annonce de la visite de Poincaré et
Clémenceau, 1918, AVCUS, 503 FI 45.
Nos
libérateurs,
s.
d.
Lucien Jonas, imprimerie Henri
Meyer et Fils, Paris. AVCUS,
503
Fi
37.
Une fillette alsacienne
montre à une petite
Lorraine une affiche sur
un mur qui représente,
autour d'une figure de
poilu, les portraits des
principaux
hommes
politiques et des généraux
des forces alliées. Les
deux enfants portent des
symboles tricolores.
Entrée
des
Français
à
Strasbourg, 1918. Jean-Jacques
Waltz dit Hansi, imprimerie
Lapina, Paris. AVCUS, 503 Fi
25.
Les troupes françaises
défilent dans un Strasbourg
idéalisé et folklorique. La
légende : "Voici l'heure de
la justice et de la victoire
!", s’inscrit dans la
continuité des buts de
guerre français.
L’ALSACE-LORRAINE APRÈS LA GUERRE
La signature du traité de Versailles, le 28 juin 1919, entérine le retour de
l'Alsace-Lorraine à la France.
Bien que le principal but de guerre français, à savoir la reconquête des
provinces perdues en 1871, a été atteint, les affiches d'après-guerre
continuent à exploiter le thème de l'Alsace-Lorraine. Mais à présent, cette
propagande s'adresse aux populations des trois départements recouvrés du
Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Après 47 années d'annexion par
l'empire allemand et malgré la liesse déployée lors de l'entrée des troupes
françaises dans la région, les autorités françaises sont conscientes qu'il
faudra du temps pour assimiler des populations qui n'ont qu'une
représentation lointaine de la France.
Pour leur part, les autorités locales affichent leur patriotisme en organisant
notamment des quêtes et autres œuvres de charité en faveur de communes
françaises touchées par les combats.
Union Amicale d'Alsace et de
Lorraine, s. d.
M.
L.
Pinel,
imprimerie
Chachoin, Paris. AVCUS, 503
Fi 23.
Ce dessin de M. L. Pinet,
de
l'école
des
arts
décoratifs, participe à un
concours interscolaire de
panneaux décoratifs pour
les écoles d'Alsace. La
France, sous les traits de
Marianne, sert contre elle
deux
petits
enfants
alsaciens.
Debout
Lucien
nos
Jonas,
morts
pour
imprimerie
la
J.
patrie…
Cussac,
Voici
Paris.
la
France
!,
AVCUS,
503
s.
Fi
d.
17.
Une femme alsacienne et ses deux enfants se tiennent debout devant la tombe fleurie d'un soldat. Son
fantôme regarde avec eux le cortège des héros guerriers de la France traverser en cortège le ciel au-dessus
des Vosges.
Les Alsaciens et les Lorrains
s'engagent dans l'armée française,
1919.
René George Gautier, Imprimerie
Berger
Levrault,
Strasbourg.
AVCUS, 503 Fi 2.
Trois jeunes hommes en
costume alsacien, arborant
des
cocardes
tricolores,
passent devant une maison à
colombages. Sur le pas de la
porte une Alsacienne et une
Lorraine les saluent.
L’IMAGE DE L’ALLEMAND
APRÈS LA GUERRE
L‘Allemagne fut prise au dépourvu par la campagne de
communication qui se développa contre elle dès les
débuts de la guerre et se poursuivit dans les années 1916
et 1917. Les malheurs de la Belgique, envahie au
mépris d’un traité international, marquée par la destruction de la bibliothèque
universitaire de Louvain et des massacres de population, choquèrent
beaucoup l’opinion internationale.
Certaines destructions en France, particulièrement violentes, furent
stigmatisées comme l’incendie en 1914 de la cathédrale de Reims et les
destructions de villes historiques du Nord. Les caricaturistes français se
déchaînèrent dans de très nombreux journaux de la presse hebdomadaire
surtout. On y traitait les Allemands de barbares ou de Huns. Pour désigner de
façon méprisante les Allemands, un surnom durable fut créé, celui de «
Boches » (dérivé apparemment d’Allboches). Il fut question de « tête de
Boche », de « Bochorama ».
Souvenez-vous !, 1919.
Fernand-Louis Gottlob, Paris. AVCUS,
503 Fi 36.
La haine de l’Allemand se
prolonge après l’armistice par une
guerre économique. L’affiche
appelle à boycotter les produits
allemands. Un soldat allemand
tient un flambeau et un couteau
devant une ville en feu (évocation
des crimes de guerre allemands),
et le même homme travaille après
la guerre comme représentant de
commerce en France.
Cette affiche montre que les
comptes ne sont pas complètement
réglés après la guerre. Le loup
s’est vêtu en agneau, mais l’image
du « Boche » incendiaire
demeure…
Ville
de
Schiltigheim,
fête
de
charité,
4
et
5
juillet
1920.
André Masse, imprimerie alsacienne anciennement G. Fischbach, Strasbourg.
AVCUS, 503 Fi 32. Cette affiche, en français et en alsacien, annonce l'organisation d'une fête de
charité par la commune de Schiltigheim au profit du village de Mazerulles en Meurthe-et-Moselle,
détruit durant la guerre.
Novembre 1918 : Français et
Allemands espèrent que la
Grande Guerre qui s’achève
sera la « der des der ».
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