Je croyais en Issa, j`ai rencontré jésus

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Préliminaires
Jamel, jeune Marocain. Un besoin pour ainsi dire inné de Dieu, une soif dévorante de le
connaître et un engagement de plus en plus fort dans la pratique d’un islam strict. La
volonté de faire découvrir la vraie foi musulmane aux autres et de les encourager à
l’appliquer. Une grande admiration pour le prophète Mohamed. Des convictions fortes.
Et puis, un jour, l’arrivée en France pour la poursuite d’études universitaires. La
confrontation avec l’Occident et le christianisme. Le choc.
Comment le jeune Jamel va-t-il gérer la découverte d’une foi différente de la sienne mais
tout aussi sincère et d’un Jésus autre que celui qu’on lui avait décrit?
Un parcours personnel qui ne manque pas d’intérêt!
Je croyais en ‘Issa, j’ai rencontré Jésus
Licence accordée le 26.06.2014 à PLACENTINO Sandro ([email protected]) pour son
usage personnel exclusif.
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de ne pas l’imprimer en plusieurs exemplaires et de ne pas le copier ni le transférer à qui
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Jamel Attar
Je croyais en ‘Issa, j’ai rencontré Jésus
Quand un musulman fervent est confronté à la grâce
Licence accordée le 26.06.2014 à PLACENTINO Sandro ([email protected]) pour son
usage personnel exclusif.
Les textes bibliques sont tirés de la version Segond 21
http://www.universdelabible.net
© et édition: Ourania, 2013
Case postale 128
1032 Romanel-sur-Lausanne, Suisse
Tous droits réservés.
E-mail: [email protected]
Internet: http://www.ourania.ch
ISBN édition imprimée 978-2-940335-77-0
ISBN format epub 978-2-88913-570-7
ISBN format pdf 978-2-88913-952-1
A Daniel Lacey,
In Memoriam
Préambule
Préface
Ce livre écrit avec une grande simplicité n’est pas un livre de plus écrit par un converti de
l’islam. Récit d’une rare beauté, ce parcours vous émeut aux larmes. L’auteur répond à
des questions difficiles, renforce la foi et nous propose un voyage spirituel complet.
Le lecteur savourera, il se délectera de chaque chapitre, des ruelles marocaines
muezzinantes en passant par l’odeur des souks, parcours où se reconnaîtront tous ceux
qui ont bravé la peur et l’ostracisme. Il nous décrit une vraie recherche, une quête de
Dieu.
Ce livre balaie la mauvaise conception que nous avons du christianisme. Et soudain, une
nuit, jaillit du tréfonds du cœur l’irruption de la grâce, celle qui affranchit, celle qui libère
l’homme de la servitude et du péché, décrite ici comme un «Amour surprenant». Une
histoire sans équivoque qui aidera le lecteur à mieux comprendre des faits saillants de
l’islam avec ses différentes facettes et pratiques.
L’auteur nous entraîne dans son cheminement spirituel de l’islam traditionnel à celui de
«Salaf», à l’image même du prophète de l’islam. Quelle soif!
Beaucoup se reconnaîtront dans ce livre, parcours ô combien douloureux des néochrétiens qui passent du Croissant à la Croix.
Je le conseille vivement. Ce livre est un cadeau qui touchera des milliers de cœurs.
Bouleversant et vrai. Ecrit avec force, écrit avec foi, et tout ceci sans compromis.
Et, comme le dit l’auteur, Il est le «divin Sauveur».
Saïd Oujibou Pasteur itinérant, professeur d’islamologie, chargé de communication de l’Union des Nord-Africains
chrétiens de France (UNACF)
Informations préliminaires
Les citations de la Bible sont tirées de la version Segond 21.
Les citations du Coran sont tirées de la traduction de Mouhammad Hamidullah (Le Saint
Coran, trad. par Muhammad Hamidullah, Maison d’édition d’Ennour, 12e édition, 1986).
Les hadiths, c’est-à-dire les entretiens, les causeries, sont la deuxième source, après le
Coran, pour tout ce qui est relatif à la doctrine et à la loi islamiques. Ce sont des gestes,
paroles, attitudes, comportements que Mohamed aurait exprimés dans les diverses
circonstances de sa vie publique et privée. Beaucoup de musulmans et d’hommes
religieux d’autorité les considèrent comme presque aussi sacrés que le Coran lui-même.
C’est dans ces sources, transmises de génération en génération, d’abord oralement et
enfin compilées par de grands savants, qu’ils puisent, pour les mettre en pratique, des
milliers de prescriptions et de commandements. Parmi les compilateurs de ces textes,
Mouslim et Al-Boukhari font autorité et les propos qu’ils rapportent sont considérés par la
majorité des musulmans comme authentiques. Il n’existe pas de traduction complète de
ces ouvrages. On peut trouver une traduction condensée de Mouslim (Sahih Mouslim) sur
le site: http://bibliotheque-islamique-coran-sunna.over-blog.com.
Le Sahih d’Al-Boukhari a été traduit, en partie seulement, par Ahmed Harkat: Le Sahîh
d’Al-Bukhâry, Les hadiths authentiques établis par le grand traditionniste l’Imam Abu
Abdullah Muhammad ben Ismail Al-bukhâry, Librairie Al Assiriyah, Beyrouth, 2003.
C’est à ces ouvrages que je renvoie en indiquant la page concernée quand ils proposent
le passage que je cite. Sinon, c’est moi qui traduis.
Introduction
En racontant ici ma conversion, je ne fais pas le récit de mon passage d’une religion à
une autre, mais la narration d’un long cheminement qui a abouti à la rencontre avec le
Dieu vivant et vrai, manifesté en Jésus-Christ son Fils. C’est le récit de la recherche de
Dieu par le cœur assoiffé de vérité, assoiffé de Dieu même. Mais c’est surtout celui de
l’œuvre de Dieu dans le cœur des hommes! Et puisque j’ai employé le mot conversion, il
est nécessaire alors de préciser que c’est une conversion à Jésus le Christ, c’est-à-dire le
passage d’une religion à une relation vivante avec celui en qui j’ai découvert le Sauveur
et Seigneur de ma vie.
Je voudrais indiquer ci-après les raisons qui ont motivé l’écriture de ce témoignage. Tout
d’abord, je sais qu’il y a beaucoup de musulmans, hommes et femmes, qui sont à la
recherche de la vérité, qui ont soif de Dieu et veulent nouer une relation vivante avec lui.
Je voudrais leur offrir mon expérience comme un simple exemple, parmi des millions
d’autres, de personnes qui étaient musulmanes et qui, cherchant le vrai Dieu, l’ont
trouvé! «Celui qui cherche trouve», dit Jésus (Matthieu 7.8 ); Dieu lui-même, par la
bouche de son prophète Amos (Amos 5.4), invitait les hommes à le chercher: «Cherchezmoi, et vous vivrez!» Ainsi, nous sommes encouragés par Dieu lui-même, sachant qu’il ne
laissera pas vains nos efforts, puisque c’est la vie qu’il nous promet.
Je voudrais aussi donner à ces musulmans l’occasion de connaître la vérité sur le
christianisme, sur la Bible et surtout sur le chemin qui mène au vrai pardon offert par
Dieu, non tels que le Coran les présente, mais tels que les chrétiens les comprennent.
Car, malheureusement, les musulmans ne connaissent pas le christianisme tel qu’en luimême mais tel que croit le connaître l’islam. Ils ignorent, pour la majorité d’entre eux, ce
que croient les chrétiens, quand ils ne le déforment pas exprès. Les musulmans qui le
veulent ont maintenant de nombreux moyens de vérifier, notamment par Internet, ce
qu’ils ont entendu et appris sans preuve et d’en tester la solidité historique et spirituelle.
Il est nécessaire aussi que les chrétiens comprennent les objections et les obstacles qui
surgissent dans l’esprit des musulmans quand ils leur parlent de Jésus et, de manière plus
générale, de la foi chrétienne. Les mots ne sont pas chargés de la même signification, les
concepts ne sont pas identiques, la vision du monde est conditionnée par la foi que nous
confessons. Pour une communication plus efficace de l’Evangile, nous avons besoin de
comprendre non seulement l’islam, mais aussi le cadre de pensée, qui constitue un
obstacle pour saisir pleinement les enseignements de l’Evangile. Voilà pourquoi je me
suis arrêté assez longuement sur plusieurs détails, car mon souci est de donner au lecteur
une juste compréhension de l’islam, aussi bien tel qu’il se présente que tel qu’il
appréhende le christianisme. Cela, bien sûr, dans le but de vous donner une idée précise
des combats intérieurs que peuvent affronter ceux qui découvrent le christianisme. Je prie
que vous trouviez ici une certaine aide pour comprendre ces luttes.
Mais par-dessus tout, ce témoignage se veut l’expression de ma profonde reconnaissance
envers le Seigneur. Quand je pense à la grâce qu’il m’a manifestée, il ne me reste qu’une
chose à faire: rendre gloire à mon Seigneur et mon Dieu pour son œuvre magnifique de
salut. A Dieu seul, en effet, soit toute la gloire!
Témoignage
1. En terre d’islam
C’est au Maroc, pays musulman jusque dans sa constitution, que j’ai vu le jour. Plus
exactement, je suis né, cinquième de huit enfants, en pleine campagne, à vingt
kilomètres de Casablanca, ville la plus grande du pays. Et aussi loin que puissent
remonter mes souvenirs, je me vois concerné par les questions relatives à Dieu. Plus
encore, il me semble que le besoin de connaître Dieu était chez moi congénital, chevillé
au cœur! D’ailleurs, ma mère me racontait souvent qu’à ma naissance j’avais l’index
pointé vers le ciel! C’était, pour elle, le signe de mon intérêt, dès mon très jeune âge,
pour Allah qui est au ciel.
Tombé dedans étant petit!
Comme l’islam était la seule religion faisant partie de mon environnement familial et
social, c’est dans cette religion que j’ai été initié aux choses de Dieu et c’est dans cette
religion que j’ai commencé à chercher à étancher ma soif spirituelle précoce. Comme tout
enfant dans un pays musulman, j’ai vite été encouragé à dire la shahada, la confession
de foi: «J’atteste qu’il n’y a de Dieu qu’Allah et que Mohamed est son envoyé.» J’aimais
répéter cette profession de foi, ce qui faisait de moi un musulman. J’ai su aussi très tôt
réciter quelques passages du Coran, et je me suis efforcé de les apprendre par cœur,
avant même d’aller à l’école, surtout la première sourate, «l’ouverture», car elle se situe
au début du Livre. Le ramadan, le mois du jeûne, était un autre moyen formidable
d’initier les enfants à la pratique de l’islam en leur demandant de jeûner non pas tout le
mois, mais plusieurs jours pour les y habituer. Il n’était pas nécessaire pour ma famille de
m’obliger à jeûner: c’est moi qui ai voulu le faire dès l’âge de sept ans. C’était même
l’occasion pour moi de briller devant mes cousins en jeûnant plus de jours qu’eux! C’est
aussi pendant ce mois sacré que j’ai découvert ce que veut dire faire la prière rituelle.
J’ai donc compris très tôt que la religion était un ensemble d’obligations à accomplir pour
plaire à Dieu et mériter son pardon. Et le peu que j’avais appris et que je mettais en
pratique me donnait envie d’en savoir encore plus. Un ardent désir de pratiquer et de
connaître davantage l’islam s’était emparé de moi.
Mais ce n’est pas auprès de mes parents ou de mes grands frères que je pouvais
m’instruire: aucun d’eux n’avait une connaissance de l’islam autre que superficielle et
superstitieuse, aucun d’eux ne pratiquait réellement en dehors des temps forts. Mes
parents ne m’avaient d’ailleurs pas inscrit dans une école coranique, contrairement à ce
que faisaient bien d’autres familles de notre voisinage. Je me rappelle l’envie dévorante
que je ressentais en voyant de loin les enfants de mon âge en train de laver leur ardoise
sur laquelle des versets coraniques avaient été écrits et d’essayer d’apprendre par cœur
de longs passages du Coran.
Ce n’est pas non plus auprès de responsables religieux, un imam par exemple, que je
pouvais être davantage enseigné. La raison en est que nous habitions à la campagne et
qu’à cette époque-là il n’y avait pas de mosquée près de chez nous. La plus proche se
trouvait à huit kilomètres. Et même s’il y en avait eu une, c’est aux enseignements
traditionnels qu’on m’aurait renvoyé. Quant à l’école, où l’instruction religieuse occupait
un temps non négligeable, elle nous apprenait le Coran et quelques règles, sans plus. Les
maîtres n’étaient pas très instruits dans l’islam; le seul qui ait vraiment essayé de nous
enseigner, c’était un professeur qui pensait apparemment qu’apprendre le Coran par
cœur était l’essence même de toute chose. Nous passions ainsi des heures à mémoriser
des passages sans en comprendre le sens. Je n’avais donc que de très rares occasions
d’entendre des explications sur l’islam.
C’est par moi-même que j’ai d’abord approfondi mes connaissances sur ma religion et
essayé d’étancher ma soif de Dieu, et cela grâce aux livres! J’en ai découvert par hasard,
alors que j’accompagnais mon père au souk lors des courses hebdomadaires. J’avais alors
dix ans. Je me rappelle encore la joie qui m’a inondé à leur vue. A partir de ce jour-là, je
l’ai souvent accompagné; je déambulais dans les ruelles serrées et labyrinthiques, et ce
n’était pas l’odeur des pop-corns ou des cacahouètes caramélisées qui m’attirait, mais
bien plutôt les petits commerçants qui, au milieu d’un bazar indescriptible, pouvaient
proposer sur des présentoirs bancals des livres sur l’islam. Leur couverture était décorée
d’arabesques, signes distinctifs de leur contenu religieux. La majorité d’entre eux étaient
de couleur verte, emblème de l’islam, mais pâle et effacée par le soleil, comme on en
trouve encore aujourd’hui sur les marchés. Voilà ce que je demandais à papa de
m’acheter.
De retour à la maison, je me jetais sur ces ouvrages pour les dévorer littéralement. J’y
puisais une satisfaction momentanée, car à peine en avais-je fini la lecture qu’il m’en
fallait d’autres. Ils étaient comme une ondée qui arrosait mon âme ou des portes qui
ouvraient sur le ciel mais qui devenaient vite trop étroites.
Je me souviens aussi des moments où j’allais chez ma tante et pouvais ainsi accéder à la
bibliothèque de mon oncle. C’était un homme important. Il avait de gros livres, bien
rangés dans une armoire et dont la couleur remplit encore mon esprit: du vert avec des
ornements dorés! Je ne connaissais personne d’autre possédant même un seul livre dans
un rayon de cinq kilomètres! Autant dire que j’en approchais avec vénération et crainte,
car nous n’avions pas le droit de les toucher. Mais il arrivait de temps en temps que mon
oncle ouvre l’un d’eux et me demande de le lire. Il me posait alors des questions et
m’expliquait certains points de l’islam.
Aux livres il faut ajouter les séries télévisées diffusées pendant le ramadan, qui mettaient
l’islam en vedette, quand ce n’était pas Mohamed lui-même. Elles avaient le don
d’inscrire dans notre tendre cœur encore malléable les pensées les plus douces à l’égard
du prophète et nous le faisaient aimer. C’était lui notre héros, mon héros, bien que
jamais acteur n’ait joué le rôle! Il est en effet absolument interdit de représenter
Mohamed, que ce soit en peinture, au théâtre ou au cinéma.
Les livres que je lisais étaient des condensés de la foi; ils se voulaient des initiations aux
différents aspects de l’islam. Les uns m’en présentaient les cinq piliers: la shahada, la
prière cinq fois par jour, le jeûne du ramadan, la dîme, le pèlerinage à la Mecque. Ils me
montraient que, pour être un musulman sérieux, je devais les appliquer dans ma vie.
D’autres m’expliquaient en quoi consistait la foi: croire en Dieu, en ses envoyés (les
prophètes), en ses livres (la Torah, les Psaumes, l’Evangile), en ses anges, au dernier
jour (le jour du jugement) et au destin. Et j’accueillais tout cela avec confiance, j’y croyais
de tout mon cœur. D’autres encore m’apprenaient ce qu’était la prière, comment la faire,
à quels moments de la journée, dans quelle direction me tourner, quels passages du
Coran utiliser… Ils m’ont aussi enseigné comment faire les ablutions, quelles étaient les
règles à respecter pour être en état de pureté…
Il y avait aussi, parmi ces ouvrages, beaucoup de récits inspirés de textes très anciens de
la tradition islamique. Ils racontaient, en les adaptant à l’enfant que j’étais, la vie de
Mohamed, la vie de ses principaux successeurs et leur zèle pour la nouvelle religion, les
débuts de l’islam, ses conquêtes militaires… Ce que j’aimais et admirais par-dessus tout
dans ces livres, c’étaient ces histoires édifiantes, écrites pour former dans le cœur l’ardent
désir de vivre l’islam et de reproduire dans les comportements la vie de Mohamed. Leur
style suscitait le respect et l’admiration à son égard, aussi bien que la fierté de le suivre,
de l’avoir pour guide. Il était comme un homme surgi d’un autre monde, et sa vie était
toujours plus éblouissante, plus belle, plus unique, plus romantique. Plus j’en lisais à son
propos, plus il me paraissait un être d’exception. Non pas une figure historique, non pas
un homme, mais un être à part. Les livres le magnifiaient; jamais il n’était question de
ses défauts. Il est alors devenu LE héros que j’admirais, comme il l’est en réalité pour
tout musulman. C’est l’homme intouchable, inattaquable. On ne peut s’amuser à lui
manquer de respect, à moins qu’on ne tienne pas beaucoup à la vie!
Bien sûr, on ne trouvait rien, dans ces textes, qui puisse nuire à la réputation de
Mohamed. Aucune critique, même très légère n’était formulée contre lui. Je n’ai jamais lu
ni entendu, tant que j’ai vécu au Maroc, une seule remarque négative à son sujet. Son
nom était toujours prononcé avec respect, même par l’homme le moins attaché à l’islam,
et jamais sans que lui soit accolée la fameuse expression: «Que Dieu le soutienne de sa
prière et lui accorde la paix!» C’était un homme beau, toujours protégé et chéri de Dieu,
avec toutes les qualités morales et spirituelles. De nombreuses légendes le présentaient
dans des situations où son intelligence, sa compassion, sa générosité, etc. étaient mises
en lumière et atteignaient un degré bien supérieur à celui du commun des mortels. Tout
cela renforçait en moi l’admiration que je lui portais ainsi que le désir de lui obéir et de
suivre ses directives.
Découverte de l’islam
Le moment de mettre tout cela en pratique n’a pas tardé à se présenter devant moi. En
effet, mes parents ont tout fait pour que je puisse poursuivre mes études au-delà du
primaire, et j’ai figuré parmi les très rares enfants à passer au collège. Celui dans lequel
j’ai été envoyé se situait dans un village, à huit kilomètres de chez moi, doté d’une
grande mosquée. Cela a été la grande découverte pour moi. Je devais être en cinquième
quand j’ai commencé à fréquenter assidûment ce lieu de culte. C’est là que j’ai rencontré
des hommes, de jeunes adultes déterminés à vivre un islam authentique. Ils m’ont
encouragé et me l’ont présenté comme étant le seul qui doive être pratiqué. Etant donné
l’éloignement du collège et l’absence de bus, c’était parfois mon oncle qui me conduisait
en tracteur à l’école; d’autres fois, un ami avait pitié de moi et me permettait de grimper
derrière lui sur sa mobylette. Mais le plus souvent, surtout en quatrième et en troisième,
c’était à vélo que je parcourais les interminables kilomètres. Cela ne m’empêchait pas de
rester pour la prière du vendredi, quitte à revenir chez moi à pied… Pendant les vacances,
je n’hésitais pas à faire dix kilomètres en marchant pour me rendre à la prière du
vendredi. C’était le moment idéal pour en savoir plus et découvrir le véritable islam tel
que l’enseignent les Frères musulmans.
Cette progression s’est accompagnée chez moi de l’achat de livres de plus en plus
sérieux. Prenant de l’assurance, j’ai en effet commencé à me rendre seul dans la ville
voisine où les épiceries tenaient, sur leurs rayons, les livres aux couleurs vert et or.
L’argent dont je pouvais disposer, je le dépensais dans l’achat de quelques-uns d’entre
eux. Il s’agissait de hadiths, consacrés aux paroles que Mohamed avait prononcées et aux
actes qu’il avait accomplis, même les plus anodins; ils abordaient aussi des questions plus
ardues et plus sérieuses et commentaient le Coran. Dans l’incapacité d’acheter les six
volumes – qui faisaient plus de 2500 pages1 –, je me contentais d’abrégés et de
collections thématiques.
Mon niveau de connaissances devenait important, et l’on s’adressait parfois à moi pour
avoir réponse à certaines questions, et ce d’autant plus facilement que j’étais parmi les
rares adolescents à savoir lire et expliquer les choses. J’étais capable de raconter avec
beaucoup de détails la vie de Mohamed, de citer des anecdotes plaisantes et édifiantes
puisées dans la tradition: comment, par exemple, il avait reçu le Coran pour la toute
première fois, comment il avait émigré vers Médine, en passant par tel chemin et en
étant protégé par tel miracle… Mais, surtout, j’étais capable de donner à ceux qui me le
demandaient beaucoup d’informations sur les différentes manières de pratiquer la religion
et je leur montrais comment faire la prière. Evidemment, je ne me contentais pas de
parler, je mettais également en œuvre tout ce que j’apprenais.
Ainsi, je jeûnais souvent, même en dehors du ramadan. Je voulais accomplir des œuvres
surérogatoires, c’est-à-dire faire au-delà de ce qui était exigé. Je passais beaucoup de
temps à la mosquée, le lieu de prière du musulman, et je lisais tous les jours le Coran.
Prier Allah cinq fois par jour en me tournant en direction de la Mecque était un exercice
quotidien de foi et de sincérité. Ma ferveur religieuse prenait de l’ampleur pendant le
ramadan. Je rêvais de pouvoir un jour faire un voyage à la Mecque, lieu saint de l’islam,
ce qui constituerait l’expérience suprême pour moi. Ma foi atteindrait alors son apogée;
Dieu me pardonnerait tous mes péchés et me permettrait de repartir tout blanc, sans
tache. J’étais très exigeant envers moi-même concernant les règles de pureté: je devais
très souvent me laver de manière rituelle et être prêt à accomplir la prière. J’étais à la
recherche de bonnes œuvres à accomplir afin de compenser le mal que je pouvais faire et
de mériter le pardon divin. Ainsi, si je voyais une pierre sur la route, je l’enlevais en me
disant que c’était un acte que Dieu inscrirait en ma faveur. Je dois ajouter que j’étais un
enfant turbulent, jusqu’à ce que je décide de pratiquer l’islam.
Un vrai musulman…
Au lycée, ma pratique de l’islam est devenue radicale et systématique. Elle se voulait
totale (on dirait intégriste, aujourd’hui!). Rien ne pouvait me détourner des temps fixés
pour la prière dans la journée d’un musulman. Mes amis et les jeunes de mon âge
jouaient au foot, tandis que moi, je prenais le chemin de la mosquée dès que le muezzin
appelait à la prière. Si c’était en plein match, je n’hésitais pas à abandonner mon équipe
pour aller faire la prière. Mon plus grand plaisir était de me rendre à la mosquée bien
avant que l’appel à la prière ne retentisse, afin d’accomplir tout ce que Mohamed faisait
avant la prière obligatoire. Alors que beaucoup sortaient juste après la fin, je restais afin
de prolonger ces instants. Chaque après-midi, dans certaines mosquées, des explications
du Coran, de points de détail, des précisions ou des histoires extraites de la biographie de
Mohamed sont proposées par l’imam. Je me débrouillais pour y assister autant que je le
pouvais. Il m’arrivait de passer certains vendredis après-midi dans la mosquée.
Je désirais de plus en plus une pratique pure, dénuée de toute superstition, et c’est dans
les livres et auprès des imams des grandes mosquées du centre de Casablanca que je
pouvais la trouver. Il n’était pas question que je pratique un islam traditionnel, détourné,
«mou» et formel. L’islam populaire et factice ne pouvait étancher ma soif. Je voyais les
gens le pratiquer pour des motifs absurdes. Moi, je voulais – c’est maintenant seulement
que je le sais – la communion avec Dieu, l’accès au ciel! Je pensais alors que ce chemin
passait par une connaissance du véritable islam et de sa mise en œuvre la plus exacte et
la plus scrupuleuse possible, aussi bien que par l’imitation fidèle de la vie de Mohamed.
C’est que mon cœur s’est enflammé et qu’un ardent désir s’est emparé de moi:
ressembler autant que je le pouvais au prophète! Mon attachement à lui et ma
vénération envers lui m’ont conduit à vouloir l’imiter parfaitement. D’ailleurs, si je voulais
être vraiment pieux, il me fallait me soumettre à Dieu, accomplir ses commandements et,
en troisième lieu, imiter son prophète. De plus, le Coran m’exhortait à le faire: «En effet,
vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle [à suivre], pour quiconque
espère en Allah et au Jour dernier et invoque Allah fréquemment» (Coran 33, 21). Dans
un autre passage, parce que certains l’accusaient d’être possédé du démon et écrivaient
qu’il était dépourvu d’intelligence, Dieu lui dit: «Et tu es certes, d’une moralité
imminente» (Coran 68, 4). Pour tout musulman et toute musulmane, Mohamed est un
exemple en tout, parce qu’il était la plus noble des créatures et le meilleur des prophètes.
L’imiter n’est pas une option, mais une obligation.
…imitateur de Mohamed
Je me suis donc décidé, pour être un vrai et parfait musulman, à développer une
imitation scrupuleuse du meilleur des musulmans, dont la biographie était consignée
dans les nombreux livres que je lisais. Je m’efforçais de connaître les gestes et les
paroles de Mohamed dans chacune des circonstances de sa vie quotidienne afin de les
reproduire dans la mienne. Ainsi, s’il m’arrivait de me réveiller pendant la nuit, je récitais
avant de me rendormir des passages précis du Coran; si je sortais de la maison, c’était
avec le pied droit d’abord; quand j’allais à la mosquée, ce n’était pas la simple prière
exigée que j’effectuais, mais bien d’autres encore, ainsi que des prosternations pour y
entrer juste avant la prière obligatoire et, une fois cette prière faite, d’autres
prosternations encore. Je voulais m’habiller en suivant ses recommandations, prononcer
les paroles qu’il disait avant de manger et après avoir fini, me laver les mains, me
nettoyer le nez… tout comme il l’avait fait et avait indiqué de le faire. Pour rompre le
jeûne, je mangeais d’abord une datte, comme lui; quand j’allais aux toilettes, je
m’obligeais à l’imiter, puisque des pages entières expliquaient comment accomplir même
cet acte intime. Tout faire comme Mohamed en obéissant à ses directives, voilà ce qui
m’animait. C’était afin d’être plus facilement agréé de Dieu. Je recourais à tous les
moyens possibles, avec une profonde sincérité et un grand zèle, pour qu’Allah ait pitié de
moi et se montre clément et miséricordieux à mon égard. Pour cela, il était nécessaire
que j’accomplisse toutes sortes de bonnes œuvres.
Pour moi – et c’est vrai pour tout musulman –, Mohamed n’était pas un prophète comme
un autre, mais le dernier et le meilleur de tous, le prince des créatures d’Allah, «le Sceau
des prophètes», comme le dit le Coran lui-même (Coran 33, 40), l’homme accompli,
l’exemple parfait en tout sauf dans les domaines qui lui étaient spécifiques comme le
mariage avec treize femmes au lieu de quatre, selon la prescription du Coran à tout
musulman:
O! Prophète! Nous t’avons rendu licites tes épouses à qui tu as donné leur dot, ce que
tu as possédé légalement parmi les captives [ou esclaves] qu’Allah t’a destinées, les
filles de ton oncle paternel, les filles de tes tantes paternelles, les filles de ton oncle
maternel, et les filles de tes tantes maternelles, – celles qui avaient émigré en ta
compagnie, – ainsi que toute femme croyante si elle fait don de sa personne au
prophète, pourvu que le prophète consente à se marier avec elle: c’est là un privilège
pour toi, à l’exclusion des autres croyants.
Coran 33, 50
Je croyais que sa venue avait été annoncée par les autres prophètes et par Jésus luimême: «Jésus fils de Marie dit: ‘ô Enfants d’Israël, je suis vraiment le messager d’Allah
[envoyé] à vous, confirmateur de ce qui, dans la Thora, est antérieur à moi, et
annonciateur d’un messager à venir après moi, dont le nom sera Ahmad’» (Coran 61, 6).
Ahmad ou Ahmed est l’un des autres noms donnés à Mohamed.2
Mohamed avait été choisi et envoyé de Dieu pour apporter le message, l’Unique, que les
prophètes avaient proclamé avant lui, mais aussi pour parachever la religion et la mener
à sa perfection: «C’est lui qui a envoyé son messager avec la bonne direction et la
religion de la vérité, afin qu’elle triomphe sur toute autre religion, quelque répulsion qu’en
aient les associateurs» (Coran 9, 33). Ces «associateurs» étaient, dans mon esprit, tous
les non-musulmans, surtout ceux qui se disaient chrétiens ou juifs et qui remettaient en
cause l’unicité de Dieu en lui associant d’autres dieux.
Tout ce que je savais de Mohamed était hautement élogieux. Jamais je n’avais lu les
histoires, surprenantes, qui le révèlent sous une lumière bien moins flatteuse et que j’ai
découvertes plus tard. Sa naissance et sa jeunesse ont été embellies par des récits qui
l’exaltent au-delà de toute mesure. Il m’était présenté, dans les livres issus de la
tradition, comme le fidèle, comme l’exceptionnel. Dans plusieurs hadiths, il est dit que
Dieu lui a même accordé le privilège d’intercéder pour sa communauté au jour du
Jugement. Parmi ceux qui ont commis des péchés graves et se trouvent en enfer,
beaucoup en sortiront et se verront accueillis au paradis grâce à sa médiation.
Orphelin de père avant même de naître, et de mère à l’âge de six ans, il était illettré,
défaut transformé en une puissante qualité puisqu’il est venu avec le Coran, un livre
exceptionnel. Très tôt, il a effectué des voyages avec sa tribu pour le commerce. Jeune
homme, il manifestait une grande sagesse, au point qu’une riche femme – celle qui allait
devenir son épouse – lui a demandé de gérer ses affaires, qu’il a fait abondamment
fructifier.
Mon cœur se réjouissait, une émotion délicieuse m’envahissait lorsque je lisais, par
exemple, que des hommes sages, des chrétiens et des Juifs l’avaient examiné et avaient
vu et attesté qu’il était le Sceau des prophètes. Parmi eux figurait un moine du nom de
Bahira, le plus instruit des chrétiens, qui avait vu le jeune homme voyager avec son oncle
Abu-Taleb pour le commerce. Au moment où la caravane s’approchait de l’endroit où il se
trouvait, il a vu un nuage faire de l’ombre pour Mohamed. Et lorsque ce dernier s’est
abrité du soleil sous un arbre, les branches se sont penchées pour le protéger. Le moine
l’a ensuite examiné et a vu sur son dos une marque, le sceau du prophète. Voici ce qu’il a
alors dit à l’oncle: «Prends ton neveu avec toi et ramène-le dans son pays; protège-le
contre les Juifs, car, par Dieu! s’ils le voient et savent ce que je sais à son sujet, ils lui
feront du mal; un grand avenir attend ton neveu, ramène-le donc vite dans son pays.»3
Des histoires de ce genre remplissent des centaines de pages écrites il y a plus de mille
ans.
Des éléments de son comportement qui me semblent aujourd’hui très discutables, voire
scandaleux, me paraissaient alors admirables. Ainsi, son mariage avec Aïcha alors qu’elle
n’était âgée que de neuf ans. En tant que musulman, je n’y trouvais rien à redire, car le
contexte culturel dans lequel j’ai grandi fonctionnait sur la base de ces choses et les avait
intégrées comme des aspects honorables et non répréhensibles. Je ne savais pas, à ce
moment-là, que l’apôtre Paul, un autre «envoyé» de Dieu, avait écrit: «Ce que vous avez
appris, reçu et entendu de moi et ce que vous avez vu en moi, mettez-le en pratique. Et
le Dieu de la paix sera avec vous» (Philippiens 4.9). Le même apôtre ne se présentait pas
comme le modèle suprême mais rappelait à ceux à qui il s’adressait qu’il était lui-même
l’imitateur d’un autre: Jésus.
Si je me suis un peu attardé sur la nécessité pour moi d’imiter Mohamed, c’est pour
montrer combien sa personne est éminente, sacrée pour tous les musulmans. En réalité
toutefois, il s’agit d’une pâle imitation de celui que je considère aujourd’hui comme le
seul digne d’être imité, le modèle suprême: Jésus-Christ. Il me semble que l’islam a tout
fait pour voler au Christ ses distinctions et les attribuer soit à Mohamed, soit au Coran, au
point même que beaucoup croient que le Coran est la parole incréée de Dieu. N’est-ce
pas là le défi extrême?
Zélateur de la religion
Mon engagement à vivre l’islam s’accompagnait de la volonté de faire connaître la vraie
foi musulmane aux autres et de les encourager à l’appliquer. Bien sûr, c’est auprès de
mes parents d’abord que j’ai entrepris mes premières démarches dans ce sens. Ce n’est
pas qu’ils ne voulaient pas vivre dans le respect des règles, mais, percevant quel niveau
d’exigences cela représentait, ils se contentaient de peu; ma mère me disait chaque jour
qu’elle s’y mettrait un jour.
Pendant les vacances scolaires, surtout en été, mon père me demandait de l’aider à la
ferme; il cultivait alors des tomates. Il embauchait en même temps plusieurs ouvriers
pour les divers travaux: irrigation, traitement chimique, cueillette… C’est auprès d’eux
que j’ai remporté mes premières victoires. Je passais beaucoup plus de temps à leur
expliquer l’islam qu’à travailler. Le champ de tomates se transformait en mosquée, et les
temps de repas et de pause en conférences d’initiation à l’islam. Quelques personnes se
sont alors engagées dans une pratique sérieuse, et moi, j’étais comme leur guide. Il
s’agissait pour moi de les pousser non à prier, mais à pratiquer la religion de la meilleure
des façons afin d’obtenir la miséricorde d’Allah.
Mon zèle m’a poussé jusqu’à enseigner à un sourd-muet comment prier cinq fois par jour,
comment faire les ablutions, bref comment être un bon musulman. En effet, un de mes
amis était sourd-muet de naissance; il avait développé un langage des signes qui lui était
propre. A force de passer du temps avec lui, j’ai fini par maîtriser son langage, et c’est
ainsi que j’ai pu lui apprendre comment faire les ablutions, comment penser à Dieu et
accomplir les gestes rituels de la prière. C’était bien difficile de transposer les notions
spirituelles, mais en même temps exaltant pour moi de le voir devenir pratiquant.
A la même époque, on a édifié une mosquée près de chez nous, mais il n’y avait pas
d’imam. C’est à moi qu’il a souvent incombé de diriger la prière, et même d’organiser des
«conversations religieuses» du genre de celles que je voyais au centre de Casablanca. Le
voisinage était au courant de mes compétences et de mon sérieux. Je peux dire – en
reprenant les mots du grand homme qu’était l’apôtre Paul – qu’à ce moment-là, «j’étais
plus avancé dans [l’islam] que beaucoup de ceux de mon âge parmi mon peuple, car
j’étais animé d’un zèle excessif pour les traditions de mes ancêtres» (Galates 1.14). Bien
sûr, j’ai connu des périodes où ma pratique était plus lâche, mais ma soif de connaître
Dieu ne cessait de grandir.
Le Coran
Jusqu’à présent je n’ai pas encore évoqué un autre élément fondamental de l’islam: le
Coran. Je l’ai découvert très tôt, comme tout musulman marocain, à travers la radio. Tous
les jours, un extrait était lu; la télévision aussi débutait ses programmes par une
psalmodie du texte sacré. Depuis ma tendre enfance, donc, je savais que c’était la
dernière révélation de Dieu et que c’était Mohamed qui en avait eu l’honneur. J’ai appris
à voir ce livre comme parfait et comme constituant en lui-même un miracle en raison de
sa beauté stylistique: personne ne peut produire un seul verset aussi beau que ceux du
Coran; il est un miracle et un défi aux humains. Voici ce qui est écrit à son sujet: «C’est
un Livre dont les versets sont parfaits en style et en sens, émanant d’un sage,
parfaitement connaisseur» (Coran 11, 1). J’ai donc grandi en vénérant ce livre sacré; je
ne le touchais qu’après m’être lavé ou, tout au moins, qu’en état de pureté! Je passais
beaucoup de temps à en apprendre de longs passages par cœur. Ce que j’aimais surtout
faire, c’était le psalmodier.
Ce qui m’y encourageait, c’étaient ces paroles de Mohamed enregistrées par la tradition:
Celui qui récite une seule lettre du Coran aura à son actif une bonne action qui lui sera
comptée pour dix. Je ne dis pas qu’alif lâm mîm constituent une seule lettre, mais bien
qu’alif est une lettre, lâm une lettre et mîm une lettre.4
Dans un autre hadith rapporté par Mouslim (un compilateur de la tradition islamique),
Mohamed dit:
Au jour du jugement on fera comparaître le Coran et ses familiers, ceux qui avaient
l’habitude de le mettre en pratique en ce monde. Ils seront précédés des sourates «La
Vache» et «La Famille de Imrân», qui plaideront pour ceux qui les ont méditées et
mises en pratique.
Ce témoignage rendu par le Coran à ma fidélité et à ma consécration à Dieu, je l’espérais
avec ardeur en vue du jour du jugement. A cela s’ajoutait le fait que son écoute et sa
récitation me procuraient un énorme plaisir, même quand je ne comprenais pas ce qui
était dit. C’est en effet un livre très difficile d’accès. Toutefois, le plus important pour moi
– comme pour tous – ce n’était pas de le comprendre mais simplement de le lire et de
l’écouter, car son écoute et sa récitation étaient en elles-mêmes des œuvres
récompensées par Dieu. Ce qui importe pour un musulman, ce n’est pas de comprendre
le Coran pour en tirer une connaissance de la volonté divine, c’est lui-même en tant que
livre «magique».
La foi
L’imitation de Mohamed et le zèle pour l’islam ne constituaient qu’un des aspects les plus
importants de cette foi que je voulais pure et orthodoxe dans sa pratique. Que croyais-je
et que m’enseignait l’islam sur d’autres sujets, comme Dieu et le salut?
En ce qui concerne Dieu, j’avais une très grande conscience de sa grandeur et de son
unicité. C’est ce que martèlent le Coran et la prédication de Mohamed. L’unicité de Dieu
est la doctrine de base, et je croyais qu’elle constituait le point de distinction avec toutes
les autres religions. L’islam est d’ailleurs soumission au Dieu absolument Un.
Je croyais qu’Allah avait donné aux hommes une loi, par un pacte unilatéral selon lequel il
s’obligeait à rétribuer les croyants qui se soumettaient à lui en les faisant entrer dans son
paradis. «Aujourd’hui, j’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur vous mon
bienfait. Et j’agrée l’Islam comme religion pour vous» (Coran 5, 3). L’islam est la dernière
des religions venue affirmer l’unicité de Dieu et la soumission à sa volonté exprimée dans
cette loi; il en est donc l’incarnation. Si quelqu’un choisit une autre religion, elle ne sera
pas acceptée: «Et quiconque désire une religion autre que l’islam, ne sera point agréé, et
il sera, dans l’au-delà, parmi les perdants» (Coran 3, 85). La religion voulue par Dieu pour
les hommes se résumait pour nous dans les cinq piliers. C’était en les mettant en
pratique que nous pouvions espérer obtenir son pardon. Ce Dieu un, Allah, attendait de
moi une soumission totale à sa volonté, exprimée dans le Coran et dans les hadiths.
Il me paraissait évident, en retour, d’être rétribué pour mes bonnes œuvres et pour mon
obéissance aux commandements d’Allah!
Selon Abou Horaïra, le Prophète a dit: Celui qui fait le jeûne du ramadan avec foi et
espérance obtiendra le pardon de ses fautes passées. Celui qui priera pendant la nuit
du destin5 avec foi et espérance obtiendra le pardon de ses fautes passées.6
Le problème, c’était que je ne savais pas si j’avais accompli assez de bonnes œuvres ou
non. Mon espoir était que le poids de mes bonnes actions l’emporterait sur celui des
mauvaises. En tout dernier lieu, je me remettais, comme tout musulman, au bon vouloir
de Dieu et à sa miséricorde. Je ne pouvais avoir aucune assurance que j’irais au paradis,
à moins de passer par le martyre. Jusqu’à la fin de ses jours, aucun musulman ne sait s’il
en a assez fait pour aller au paradis. Beaucoup s’attendent à devoir passer par une sorte
de purgatoire afin d’expier leurs péchés ou leurs manquements aux commandements de
Dieu avant d’y aller.
En dernier ressort, outre mes bonnes actions, j’espérais en la miséricorde de Dieu et en
l’intercession de Mohamed. Il n’y a qu’un péché que Dieu ne puisse pas pardonner (et il
n’y avait aucun risque que je le commette): c’est celui qui consiste à lui associer une
autre divinité:
Certes Allah ne pardonne pas qu’on Lui donne quelqu’associé. A part cela, Il pardonne
à qui Il veut. Mais quiconque donne à Allah quelqu’associé commet un énorme péché.
Coran 4, 48
Grâce à l’intercession de Mohamed, je pensais obtenir de sortir de l’enfer, car ceux de ses
fidèles au cœur de qui se trouvera «un atome» de foi, il va les en faire sortir. Les petits
péchés sont automatiquement pardonnés, et pour les péchés graves un séjour en enfer
plus ou moins long finira par les couvrir.
Ce qui était clair pour moi, c’était que tout dépendait de Dieu. Je n’avais aucun moyen de
savoir si j’étais sur la bonne voie ou non, ce qu’Allah allait faire de moi, s’il allait agréer
mes bonnes actions, si j’en avais assez fait. Cela ne m’inquiétait pas outre mesure, car
aucun musulman ne peut être certain de se retrouver directement au paradis, en dehors
des martyrs. En rapport avec le jour du jugement, conscients qu’ils n’auront pas pu
mettre en œuvre les commandements de Dieu, voici la réponse que donnent tous les
musulmans: «Nous sommes entre les mains d’Allah, qui est clément et miséricordieux.»
Et lorsque la question est posée au plus sérieux, au plus pieux d’entre eux, la réponse
reste la même.
C’est par la soumission et l’obéissance à Dieu et à son prophète que j’espérais donc
mériter le paradis. Sans que j’en sois conscient, mon cœur aspirait à la communion avec
ce Dieu, mais ce n’était pas ce que j’étais en train de rechercher. Nulle part en effet je ne
voyais que seuls sa connaissance, la communion à sa vie et le partage de son cœur
pouvaient satisfaire mon âme. Ce dont je rêvais, ce pour quoi j’œuvrais en accomplissant
de bonnes actions, ce n’était pas le paradis des chrétiens – où il est question de vision de
Dieu, de communion éternelle avec lui – mais celui que le Coran me présentait: un
paradis matériel où je recevrais tout ce dont je me serais privé ici-bas. C’était le seul que
je connaisse, et je ne soupçonnais pas qu’il puisse en exister un différent. Le
christianisme présente le sommet de la vie comme un accès à la contemplation de Dieu
et à la vie de sa vie, tandis que l’islam dépeint le summum de l’existence humaine
comme la jouissance, dans un cadre matériel, de tous les biens matériels: des nourritures
raffinées de toutes sortes, un vin délicieux et de très belles femmes en grand nombre
(autant dire les banquets sensuels sans fin dont rêvent en général les hommes). C’est un
paradis rempli de plaisirs charnels mais vide de Dieu. Le Coran, en effet, ne parle pas
d’une vie éternelle passée dans la présence de Dieu ni de la contemplation de sa face.
Voici la description détaillée que j’y lisais:
Les premiers (à suivre les ordres d’Allah sur la terre), ce sont eux qui seront les
premiers (dans l’au-delà). Ce sont ceux-là les plus rapprochés d’Allah dans les Jardins
des délices, une multitude d’élus parmi les premières [générations], et un petit
nombre parmi les dernières [générations], sur des lits ornés [d’or et de pierreries], s’y
accoudant et se faisant face. Parmi eux circuleront des garçons éternellement jeunes,
avec des coupes, des aiguières et un verre [rempli]: d’une liqueur de source qui ne
leur provoquera ni maux de tête ni étourdissement; et des fruits de leur choix, et
toute chair d’oiseau qu’ils désireront. Et ils auront des houris aux yeux, grands et
beaux, pareilles à des perles en coquille, en récompense pour ce qu’ils faisaient. Ils n’y
entendront ni futilité ni blasphème; mais seulement les propos: «Salam! Salam!» Et
les gens de la droite; que sont les gens de la droite? [Ils seront parmi] des jujubiers
sans épines, et parmi des bananiers aux régimes bien fournis, dans une ombre
étendue [près] d’une eau coulant continuellement, et des fruits abondants ni
interrompus ni défendus, sur des lits surélevés. C’est Nous qui les avons créées à la
perfection, et Nous les avons faites vierges, gracieuses, toutes de même âge, pour les
gens de la droite, une multitude d’élus parmi les premières [générations], et une
multitude d’élus parmi les dernières [générations].
Coran 56, 10-40
Si je cite ce long passage, c’est pour donner une idée plus précise du paradis que
j’attendais, comme tout musulman, ainsi que de notre représentation du monde spirituel.
Il ne me semblait pas en dessous des espérances humaines; il était tel que je le voulais,
tel que le veut encore tout musulman aujourd’hui. Il n’avait rien à voir avec le paradis tel
que la Bible le présente et qui consiste, comme je l’ai indiqué, dans la participation à la
vie de Dieu et le bonheur éternel.
On peut dire qu’il y a un gouffre entre le monde des chrétiens et celui des musulmans, et
entre le Dieu qu’ils confessent: l’un place ses fidèles dans des jouissances matérielles et
s’en va, l’autre les fait participants de sa propre vie; l’un leur offre ce que les bédouins
rêvaient d’obtenir dans leur misérable désert, l’autre leur offre la seule réalité capable de
les satisfaire: lui-même.
1 Les musulmans reconnaissent en tout six recueils de hadiths. Ils ont trié parmi des millions de propos de Mohamed
rapportés par la tradition afin de n’en retenir qu’un petit nombre.
2 Dans les Evangiles, jamais Jésus n’annonce la venue de Mohamed. On a cherché par tous les moyens une preuve
permettant d’affirmer le contraire, sans jamais y parvenir; il a fallu littéralement disloquer la Bible en l’interprétant très mal
et même inventer un évangile – celui de Barnabé, texte écrit au Moyen Age – censé avoir prédit la venue de Mohamed.
3 Ibn Ishaq, Sira an-nabawwiyah, p. 122ss. Le titre signifie «la conduite du prophète».
4 Al-Tarmidhi, Les Pratiques, hadith numéro 996. Alif, lâm, mîm sont des lettres de l’alphabet arabe et constituent le
premier verset de la sourate deux du Coran.
5 Nuit lors de laquelle le Coran a été révélé à Mohamed
6 Le Sahîh d’Al-Bukhâry, tome 3, p. 76, traduction de Harkat
2. Regard sur les chrétiens
En même temps que j’acquérais des connaissances sur l’islam, un petit pan du voile
cachant les autres religions était levé, de temps en temps, par un livre ou par un
professeur. En règle générale, les ouvrages que je lisais ne parlaient pas des autres
religions, ou alors c’était pour enseigner le regard que l’islam portait sur elles, non ce
qu’elles disaient d’elles-mêmes. Au lycée, où l’éducation religieuse était obligatoire à
raison de deux heures par semaine, on ne nous présentait pas non plus le judaïsme et le
christianisme de manière objective; les professeurs saisissaient l’occasion pour nous
«endoctriner» en enfonçant dans notre tête de fausses idées, transmises de génération
en génération sans aucun fondement ni vérité. C’est ainsi qu’on a développé une forme
d’apologie de l’islam, construite sur la déformation des doctrines chrétiennes et juives.
Souvent, les bribes d’enseignement proposées sur les chrétiens ne servaient qu’à illustrer
par la négative la valeur hautement positive de ce que l’islam avait apporté.
A force de lire que de nombreux chrétiens et Juifs avaient attesté l’apostolat de
Mohamed, j’ai fini par croire – et c’est le cas de tous les musulmans – que ces gens
n’étaient que des entêtés, de vrais ennemis d’Allah, qui, bien que connaissant la vérité, la
nient pour nuire à Mohamed et à l’islam. Ils ne cherchaient pas Dieu et ne le craignaient
pas. La présentation faite des Juifs, particulièrement, a fini par susciter dans mon cœur
une haine sourde: ils m’étaient toujours montrés comme des falsificateurs, des
corrupteurs de la Parole de Dieu, des opposants à Mohamed. Les biographies de ce
dernier contiennent de nombreux épisodes dans lesquels on perçoit la «ruse» des Juifs et
leur opposition obstinée. Tout cela a fait germer et a nourri dans mon cœur un sentiment
de haine à leur égard, en tant qu’ennemis naturels de l’islam. Du reste, Mohamed, le tout
premier, ne les a-t-il pas combattus, et cela dès l’origine?
C’est ainsi que j’ai grandi avec l’idée que les Juifs, bien que connaissant la vérité à propos
du prophète, avaient tout fait pour la rejeter. Sa venue comme sceau des prophètes était
prédite dans la Torah et l’Evangile. Mais aussi bien les Juifs que les chrétiens avaient
caché cette vérité. En tant que musulman, j’ai fini par croire que l’erreur de ces gens était
évidente; eux-mêmes savaient que l’islam était la dernière religion révélée, j’en étais
persuadé. Je pensais que, s’ils persistaient dans leur erreur, c’était par simple refus de
Mohamed, par pur mépris de Dieu, et non en raison de convictions fondées sur leurs
doctrines.
Des «associateurs»
L’erreur la plus flagrante des chrétiens, souvent dénoncée par les imams dans les
mosquées, c’était leur négation de l’unicité de Dieu. Ils étaient présentés comme des
polythéistes associant au Seigneur tout-puissant, absolument UN, un autre dieu, et même
deux autres dieux. Et ils le faisaient contre l’avis même de leur prophète Jésus! Celui-ci,
interrogé par Allah: «O Jésus, fils de Marie, est-ce toi qui as dit aux gens: ‘Prenez-moi,
ainsi que ma mère, pour deux divinités en dehors d’Allah’?», répond: «Gloire et pureté à
toi! Il ne m’appartient pas de déclarer ce que je n’ai pas le droit de dire! Si je l’avais dit,
tu l’aurais su, certes» (Coran 5, 116).
Très souvent, cette doctrine essentielle de l’islam est affirmée par opposition au
polythéisme chrétien, dans un contexte polémique. Voici le passage coranique que nous
apprenions en tout premier lieu (c’est une très courte sourate de 4 versets, dont le titre
est «le monothéisme pur»):
Dis: «Il est Allah, Unique. Allah, le seul à être imploré pour ce que nous désirons. Il n’a
jamais engendré, n’a pas été engendré non plus. Et nul n’est égal à lui.»
Coran 112, 1-4
Cette parole représentait pour moi la vérité absolue, et je lisais aussi dans le Coran que,
d’après les chrétiens, Dieu avait un fils; plus grave encore, que ce fils était né de Marie et
de Dieu: «Le tout miséricordieux s’est attribué un enfant» (Coran 19, 88)! La réponse à
cette hérésie, réponse à laquelle j’adhérais de tout mon cœur, ne se faisait pas attendre:
Vous avancez certes là une chose abominable! Peu s’en faut que les cieux ne
s’entrouvrent à ces mots, que la terre ne se fende et que les montagnes ne
s’écroulent, du fait qu’ils ont attribué un enfant au tout miséricordieux, alors qu’il ne
convient nullement au tout miséricordieux d’avoir un enfant!
Coran 19, 88-92
Une telle conception de Dieu représentait pour moi le blasphème suprême et
impardonnable. Comment pouvait-il avoir un fils, alors qu’il n’a pas de compagne? Si les
chrétiens l’affirmaient, c’était parce qu’ils avançaient que Dieu avait pris Marie pour
compagne. Le pire, c’était qu’ils faisaient exprès de blasphémer: ce n’était pas leur
conviction sincère, mais une erreur volontaire. Ibn Kathir, l’un des plus célèbres
commentateurs musulmans, dit dans son commentaire de la sourate 4, 171: «Maudits
soient les chrétiens! Certains d’entre eux pensent que Jésus est un dieu, d’autres croient
qu’il est un associé de Dieu, d’autres encore croient qu’il est un fils…»7
Jésus, simple prophète
En réalité, voici le regard que je portais, en tant que musulman, sur Jésus: il n’était qu’un
homme mortel comme tous les autres; Dieu l’a envoyé comme son prophète aux Juifs et
aux chrétiens, de la même manière qu’il a envoyé Moïse comme prophète avant lui. Les
Juifs ont voulu se saisir de lui pour le mettre à mort, mais Dieu l’a fait échapper à leur
ruse. Voici en effet ce que disent «les gens du Livre» (les Juifs), d’après le Coran:
«Nous avons vraiment tué le Christ, Jésus, fils de Marie, le messager d’Allah…» Mais la
vérité c’est qu’ils ne l’ont ni tué ni crucifié; mais ce n’était qu’un faux-semblant! Et
ceux qui ont discuté sur son sujet sont vraiment dans l’incertitude: ils n’en ont aucune
connaissance certaine, ils ne font que suivre des conjectures et ils ne l’ont
certainement pas tué.
Coran 4, 157
Ainsi donc, les Juifs croient avec les chrétiens que Jésus a été crucifié, alors qu’en réalité
il n’a jamais été mis sur la croix: Dieu, qui ne pouvait permettre que son envoyé subisse
une telle fin, l’a enlevé à lui. Il reviendra à la fin des temps pour déclarer que l’islam est
la vérité et appeler tous ses adeptes à y adhérer.
Voici donc ce que je croyais: Dieu n’a pas de fils, Jésus n’est pas mort crucifié, il n’était
qu’un prophète et, à ce titre, il avait même annoncé la venue de Mohamed après lui.
Comment se faisait-il que les chrétiens croient tout cela? Ils avaient falsifié leur Livre!
Voilà un autre point enseigné par l’islam comme l’évidence même, sans aucune
démonstration ni argumentation: le Coran affirme – et par conséquent c’est suffisant –
que les Juifs et les chrétiens ont volontairement falsifié leurs Ecritures saintes (la Torah
et l’Evangile) en éliminant les prophéties qui annonçaient la venue de Mohamed et en
intégrant des mensonges et des erreurs au sujet de Dieu et de son unicité. «Eh bien,
espérez-vous [musulmans], que des pareils gens (les Juifs) vous partageront la foi? alors
qu’un groupe d’entre eux, après avoir entendu et compris la parole d’Allah, la falsifièrent
sciemment?» (Coran 2, 75). Moïse et Jésus étaient des musulmans avant l’heure, mais les
Juifs ont trahi leurs propres envoyés. C’est de cette affirmation que tout le reste dépend.
Attribution à Dieu d’un fils (dans un sens charnel), affirmation que Jésus a été crucifié,
falsification des Ecritures: ces trois «dogmes» étaient solidement ancrés dans ma tête et
dans mon cœur. Le plus surprenant, c’est qu’il ne venait à l’esprit de personne de
chercher à prouver ces accusations, ou tout au moins de les vérifier. En tant que
musulman, je les tenais pour la vérité, puisqu’elles étaient soutenues par le Coran, le
livre d’Allah qui ne pouvait se tromper.
En tant que musulman, je croyais que Dieu s’était révélé auparavant, qu’il avait même
donné la Torah, l’Evangile et les Psaumes:
O les croyants! Soyez fermes en votre foi en Allah, en son messager, au livre qu’il a
fait descendre sur son messager, et au livre qu’il a fait descendre avant. Quiconque ne
croit pas en Allah, en ses anges, en ses Livres, en ses messagers et au jour dernier,
s’égare, loin dans l’égarement.
Coran 4, 136
Il y a là un certain paradoxe: croire aux livres saints tout en soutenant qu’ils ont été
falsifiés. Je ne leur reconnaissais, de ce fait, aucune valeur, et l’idée de les lire ne
m’effleurait même pas l’esprit. La pensée que ce livre existe effectivement et qu’on peut
l’ouvrir étant étrangère à la majorité des musulmans, c’était pour moi comme quelque
chose d’abstrait, d’immatériel. D’ailleurs, si j’avais voulu lire la Bible, il m’aurait été
impossible d’en trouver un exemplaire. Si j’avais nourri l’idée d’en acheter un, à supposer
que j’en aie trouvé un, j’aurais été immédiatement soupçonné et menacé de mort.
7 Ibn Khatir, Commentaire, p. 565, Liban, 2000
3. Rencontre avec l’Evangile
Pendant toute mon enfance et ma jeunesse, j’étais comme sur une île, ne connaissant
que l’islam et ne pensant pas qu’il puisse souffrir d’une quelconque faiblesse qui le rende
sujet à la critique. Tout un vaste océan, à l’horizon infini, m’entourait et me protégeait.
En effet, aucune contestation, aucune remise en cause, aucune critique n’était jamais
formulée contre l’islam, ni dans les livres ni dans les revues, encore moins à la télévision.
Au contraire, tout était fait, non pour défendre cette religion – il n’y avait pas à la
défendre, puisqu’il n’y avait pas d’attaque contre elle, et il ne peut pas y en avoir,
aujourd’hui encore – mais pour l’exalter et montrer sa grandeur. N’ayant pas eu à
affronter de contradicteurs, je croyais ma foi et mes idées fondées sur un roc solide.
J’étais loin de me douter, en quittant mon «île», que j’allais m’exposer au ressac d’une
autre pensée et que le roc sur lequel reposaient mes certitudes allait vite s’effriter sous
l’assaut des vagues de la Bible, toujours plus difficiles à endiguer.
Départ pour la France
Alors que j’étais en terminale – j’avais alors 18 ans –, le lycée a proposé à certains élèves
– dont je faisais partie – un dossier d’inscription dans les universités françaises. Le
moment est donc venu que je parte pour la France afin de poursuivre mes études à
l’université de Caen. A mon arrivée, je ne voulais même pas boire dans des verres
susceptibles d’avoir servi pour de l’alcool. Je me rappelle d’ailleurs l’étonnement de
l’hôtelier, le premier jour: il ne comprenait pas ce que je voulais, lorsque je lui ai
demandé si le verre employé pour mon Orangina avait servi à de l’alcool. C’est que je
voulais respecter le plus scrupuleusement possible les lois islamiques. Ainsi, je ne voulais
pas manger de viande qui ne soit pas hallal non plus.
Ma première rencontre avec des chrétiens a eu lieu dans le hall du restaurant
universitaire. Alors que je m’y trouvais, j’ai aperçu une femme, une dénommée Margaret,
qui tenait un stand. C’était une petite table sur laquelle étaient disposés quelques livres
et surtout quelques bibles. Je me rappelle encore ma surprise en voyant ces dernières:
«Tiens, la Bible existe en livre? Surprenant!» Je pensais que ce n’était qu’une idée. A
l’instar de l’abeille attirée par le miel, je me suis senti comme aimanté, aspiré et attiré
dans sa direction. J’éprouvais un sentiment de curiosité, mais instinctivement je voyais là
une occasion de prêcher l’islam à un chrétien. Après quelques échanges, Margaret m’a
proposé de me présenter de jeunes étudiants chrétiens. Quelle joie pour moi: c’était
l’occasion rêvée de convertir ces «païens»! Quel honneur ce serait pour moi d’arracher au
moins l’un d’eux à ses errements!
Quelques jours après, j’ai fait la connaissance de Jean-Patrick, Alain et Christophe. Tout
naturellement, nous en sommes venus à discuter de religion. Jusque-là, je le rappelle, je
ne savais rien à propos de la Bible, sauf qu’elle était falsifiée, conformément à ce que
j’avais appris en tant que musulman. On m’avait enseigné que les chrétiens faisaient de
Jésus le Fils de Dieu, et pour moi ce n’était ni plus ni moins qu’un blasphème
impardonnable. J’étais impatient de leur présenter la vraie religion, car il était évident
pour moi qu’il me suffirait de leur dire deux ou trois choses pour qu’ils reconnaissent leur
égarement. Cependant, j’ai rapidement déchanté: ces jeunes chrétiens étaient plus
entêtés que je ne le croyais! Ayant grandi dans la pensée que l’islam représentait
l’évidence même et qu’on le rejetait non par conviction mais par impiété ou ignorance,
j’ai été quelque peu déboussolé en voyant qu’ils n’accueillaient pas favorablement ma
parole sur-le-champ, contrairement à ce dont j’étais persuadé. Nous avons pris l’habitude
de nous retrouver plusieurs fois dans la semaine pour discuter.
L’argument massue avec lequel je croyais fracasser la tromperie de ces chrétiens était le
suivant: «Votre Bible n’est pas authentique; elle est falsifiée! Moi, je vous apporte la
vraie révélation préservée dans le Coran.» Alors que je croyais la tâche facile, je me suis
aperçu que mon «arme fatale» se révélait inefficace. J’avais la confiance du soldat: il me
suffirait de la brandir pour que tout le monde capitule. Mais je voyais bien qu’une fois
dégoupillée, elle laissait mes interlocuteurs complètement indifférents.
– Ah, oui? Comment sais-tu que la Bible est falsifiée? L’as-tu déjà lue? me demandaient
ces chrétiens.
– Ai-je besoin de la lire pour savoir qu’elle est fausse? répondais-je. Le Coran le dit, cela
suffit pour moi!
J’avais appris à raisonner en m’appuyant sur le Coran, l’autorité suprême. Or, je me suis
rapidement rendu compte que ce qui faisait autorité pour moi ne faisait pas autorité pour
eux. J’ai même découvert avec surprise qu’ils n’acceptaient pas le Coran du tout! Dans
mon ignorance, j’avais cru que la véracité de ce livre s’imposait à tous, même si certains
rejetaient son enseignement par incrédulité et par rébellion.
Trois ou quatre mois se sont ainsi écoulés. Face à la résistance de ces chrétiens, mon
zèle restait intact, et je voulais de toutes les manières leur prouver que l’islam était la
vérité. En même temps je me sentais démuni, incapable de les y conduire, en l’absence
de preuves adaptées pour eux. Aussi ai-je décidé d’étudier la Bible, avec l’intention de
leur montrer qu’elle était effectivement falsifiée. Je pensais que ma tâche serait très
facile, n’ayant aucune idée de son contenu ni des motifs sous-jacents à l’affirmation
qu’elle avait été falsifiée, ni même du moment de cette falsification et de ce qu’on avait
changé. Quand je leur ai annoncé ma décision, ils ont été tout heureux de m’en offrir un
exemplaire et m’ont conseillé de lire spécifiquement certains livres ou passages. Quelle a
été ma surprise lorsque j’ai commencé la lecture! En moi se sont alors produites deux
secousses qui ont fissuré, bien qu’imperceptiblement et sans que j’y prenne garde, le roc
solide sur lequel reposait ma foi.
La première secousse a été provoquée par la découverte que nombre des histoires
relatées dans le Coran se trouvaient déjà dans la Bible. J’y lisais l’histoire d’Ibrahim
(Abraham), de Youssef (Joseph), de Moussa (Moïse), de Younès (Jonas) et de bien
d’autres encore! Ils faisaient partie de mes familiers, je croyais que tous ces récits étaient
consignés dans le Coran seul, par suite d’une révélation divine à Mohamed, et voilà que
je les trouvais dans un autre livre! Cela n’a pas manqué de me perturber. On ne m’avait
jamais enseigné, et je ne l’avais jamais lu nulle part, que la plupart des textes coraniques
correspondaient en grande partie à des passages bibliques. Au contraire, à force
d’entendre à quel point le Coran était exceptionnel, j’avais fini par le considérer comme
un livre en dehors du temps, en dehors de tout ce que l’homme pouvait avoir fait. J’étais
bien loin d’imaginer que ses récits se trouvaient dans d’autres livres, même s’il s’agissait
de la Bible.
Le Coran se présente comme étant auprès de Dieu de toute éternité et en réalité incréé.
Voici ce qui est écrit: «Mais c’est plutôt un Coran glorifié, préservé sur une Tablette
(auprès d’Allah)» (Coran 85, 20-21). Je comprenais, avec tous les musulmans, ce verset
de la manière suivante: le Coran est la transmission d’un texte préexistant, venu
intégralement d’En-Haut. Ecrit sur des tablettes de toute éternité, il est descendu sur
Mohamed comme révélation de Dieu. Le Coran est donc incréé, il est la Parole incréée
d’Allah. Par conséquent, rien ne saurait lui ressembler ni l’égaler. Vous pouvez imaginer
ma surprise lorsque j’ai découvert dans la Bible des récits que je connaissais par cœur
pour les avoir appris du Coran.
La deuxième secousse a été provoquée par la lecture des Evangiles, qui m’ont confronté
à la personne de Jésus. Je ne savais pas qu’il s’agissait de récits de sa vie. Je pensais
qu’ils parlaient de lui dans les mêmes proportions et de la même manière que le Coran,
autant dire de façon plutôt sommaire. La vie du fils de Marie se réduisait jusque-là, pour
moi, à un son; ce n’était qu’un nom dépouillé de sa chair et de ses os! Aucun moyen
d’imaginer un tant soit peu sa vie, résumée qu’elle était en formules lapidaires et
éparses. Les Evangiles, eux, me présentaient Jésus sous un jour lumineux.
Ces découvertes n’ont pas, pour autant, entamé ma détermination. Je leur cherchais des
explications et poursuivais toujours mon objectif: convaincre d’erreur les chrétiens. Mes
certitudes restaient intactes; je n’étais pas conscient de l’impact réel de ces éléments
troublants sur moi.
En côtoyant des chrétiens, j‘ai par ailleurs constaté qu’ils ne s’adonnaient pas au péché,
alors que dans mon esprit de musulman, ils étaient des mangeurs de porc et des buveurs
de vin. Ces deux attitudes constituaient pour nous les transgressions suprêmes, plus
graves encore que le vol ou le mensonge. Je les croyais aussi dévergondés et immoraux.
Or, je découvrais des personnes sérieuses, désireuses de plaire à Dieu et de lui obéir.
Les échanges devenaient de plus en plus réfléchis et argumentés; il me fallait désormais
non plus seulement attaquer leurs croyances mais aussi défendre les miennes. Les
chrétiens m’affirmaient que la Bible n’était pas un livre dépassé que le Coran serait venu
corriger, mais l’ultime parole de Dieu aux hommes. Et par ma lecture je découvrais que la
Bible atteste pour elle-même, comme le fait le Coran, qu’elle est inspirée de Dieu:
«Toute l’Ecriture est inspirée de Dieu…» (2 Timothée 3.16). En fait, je me rendais compte
que ce que je pensais de Mohamed, les chrétiens le pensaient de Jésus. Loin d’avoir
simplement choisi exprès de rejeter le prophète, ils se révélaient vraiment convaincus de
la vérité de leur foi.
Quelques mois ont passé. J’ai alors fait la connaissance d’un pasteur, Daniel Lacey, avec
qui j’ai pris l’habitude de discuter de tous les sujets. Dans nos discussions, il revenait
souvent sur ce point particulier: «La Bible est traversée de part en part d’un fil, me disaitil. C’est l’amour de Dieu. Tu peux le voir dans la création, tu peux le voir dans le soin qu’il
prend des hommes, tu peux le voir surtout dans le plan qu’il a eu de sauver tous les
pécheurs, ses propres ennemis, ceux qui se sont révoltés contre lui… ‘En effet, Dieu a
tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique8.’» Bien sûr, ces derniers mots me
faisaient bondir. Comment Dieu peut-il avoir un fils, alors qu’il n’a pas de compagne?
Daniel me donnait toutes les explications possibles, mais je les recevais en les faisant
passer par le filtre du Coran, ce qui les rendait incompréhensibles pour moi. Tout mon
être hurlait contre ces mots; les nombreuses sourates du Coran surgissaient dans mon
esprit pour rejeter ce que la Bible, citée par Daniel, proclamait: «Il n’a jamais engendré,
n’a pas été engendré non plus. Et nul n’est égal à Lui» (Coran 112, 3-4).
Cependant, le langage de l’amour divin était tout nouveau pour moi. En effet, il n’est pas
question d’amour dans le Coran, et encore moins d’amour de Dieu pour les humains. Je
savais qu’Allah aime les musulmans, les croyants, les justes, mais cet amour est toujours
conditionnel et dépend de l’obéissance manifestée à son égard. De plus il n’est pas une
réalité dans son être; il se traduit simplement en récompense ou en approbation de ses
serviteurs. L’idée que Dieu puisse aimer des pécheurs, comme Daniel ne manquait pas de
me le rappeler, était tout simplement incroyable pour moi, et cet amour faisait son œuvre
dans mon cœur.
Il était bien sûr hors de question que je reconnaisse pour moi-même, et encore moins
devant les autres, qu’il pouvait y avoir une part de vérité là-dedans. Néanmoins, au plus
profond de moi, quelque chose se passait. C’était comme si, enfoui au tréfonds de mon
être, un vide se comblait au mouvement de cet amour gratuit et premier.
«Voici comment Dieu prouve son amour envers nous: alors que nous étions encore des
pécheurs, Christ est mort pour nous» (Romains 5.8). Tel est l’un des versets de la Bible
que Daniel me lisait et me rappelait, sans oublier d’ajouter:
– Dieu t’aime alors que tu es son ennemi!
– Mais je ne suis pas ennemi de Dieu, je veux le servir, répondais-je.
– Tu es pécheur, tu as désobéi à Dieu; cela fait de toi son ennemi, répondait alors Daniel.
Ces mêmes échanges, je les entendais lorsque je parlais avec sa femme Betty, avec
Susan ou les autres filles de la famille. Je m’étais en effet lié d’amitié avec toute la
famille, les parents et leurs quatre filles, qui m’avaient fait bon accueil; ils me montraient
concrètement ce qu’est l’amour de Dieu agissant dans le cœur des humains et les
renouvelant.
L’amour divin manifesté à la croix m’avait bouleversé, moi qui ne connaissais qu’un Dieu
souverain, puissant, sans aucune indulgence pour le pécheur. On peut facilement lui
appliquer ce qu’Emil Brunner disait du Dieu des philosophes: «Dieu possède tout ce dont
il a besoin; parfait en lui-même, il se suffit. Ne désirant rien en dehors de lui-même, il
n’aime pas. Sans doute à cause de sa perfection, de son éternité et de sa béatitude, a-t-il
droit à l’amour, mais de lui-même, il ne peut aimer, car seul celui qui, d’une manière ou
d’une autre, éprouve le besoin d’être parachevé, peut et doit aimer… L’absolu se suffit à
lui-même, demeure en lui.»9
En tant que musulman, je prenais plaisir à réciter les 99 noms d’Allah, et je voulais même
les appendre par cœur. Cependant, il se trouve que dans cette longue liste, Allah est le
Véridique, le Juste, le Parfait, le Guide, le Premier… mais Amour, il ne l’est pas! La Bible,
au contraire, mettait constamment devant moi cet attribut de l’être divin: «Dieu est
Amour», répète-t-elle sans cesse.
L’amour lumineux du Dieu de Jésus-Christ commençait à transpercer l’armure opaque
constituée de ma foi musulmane qui me le cachait. Ce n’était pas le dévoilement total,
mais ses rayons pénétraient jusqu’au tréfonds de mon âme pour la remuer. Toutefois, si
mon âme était touchée, mon intelligence refusait, mon esprit résistait. Tout cela était
accompli en moi malgré moi. Quand mon âme était troublée, je cherchais à l’apaiser: je
voulais me convaincre qu’Allah était lui aussi un Dieu d’amour. Néanmoins, il me fallait
me rendre à l’évidence et céder devant les preuves fournies par ma propre pratique
quotidienne de l’islam.
Le temps passant, quand on me parlait de cet amour, j’avais les larmes aux yeux. Ne
pouvant être insensible à la sollicitude divine, je restais quand même sûr que l’islam était
la bonne et la meilleure voie. Comment pouvais-je croire le contraire, alors que le Coran
me répétait: «Certes, la religion acceptée d’Allah, c’est l’islam» (Coran 3, 19)? Comment
pouvais-je croire le contraire, quand l’islam était mon sang et ma chair, ma culture, mon
âme? Ce n’était pas un simple vêtement que j’avais enfilé par-dessus mon corps, il était
mon corps, ma tête, mon cœur… Et les échanges avec les chrétiens commençaient à faire
mal à mon cœur.
Sauvé par quoi?
Tout cela, bien évidemment, ne m’empêchait pas d’assaillir Daniel de mes questions et
de mes objections. Nous discutions de nombreux sujets, principalement de la mort de
Jésus, de la question de savoir s’il était le Fils de Dieu, de la pratique des œuvres, du
salut par la foi seule… Ces échanges ne me laissaient pas sans interrogations. Alors que
je concevais le christianisme comme une préparation de l’islam, il se révélait bien
différent, et l’antagonisme entre les deux me paraissait radical. Il devenait clair pour moi
qu’ils étaient irréconciliables. Ce n’étaient pas seulement les trois ou quatre choses
apprises auparavant qui faisaient la différence entre eux. Presque tout s’y révélait
compris de manière différente: l’identité de Dieu, l’identité de l’homme et la raison de sa
création, la nature du paradis, les moyens de la rédemption et même sa nécessité, la
nature de la pureté (rituelle pour l’islam, intérieure et spirituelle pour Jésus)… Je prenais
conscience qu’ils divergeaient en tout et sur tout! Les deux ne pouvaient pas être
compatibles: la vérité était du côté de l’un ou de l’autre!
L’une des principales différences résidait dans le fait que l’islam n’aborde pas le moyen du
salut, c’est-à-dire la manière – prévue par Dieu – dont les hommes peuvent accéder au
paradis. En tant que musulman, je devais bien sûr dire la shahada, la confession de foi en
l’unicité divine, mais elle marquait seulement l’entrée dans l’islam. Pour être agréable à
Dieu, et surtout pour mériter son pardon, je devais accomplir les cinq piliers et faire des
œuvres. L’islam est basé sur les œuvres: «Voici le paradis qui vous sera donné en
héritage, pour prix de vos actions sur terre» (Coran 43, 72).
Que devais-je accomplir pour mériter le paradis? La réponse m’était donnée grâce à un
hadith, un parmi mille autres:
Un bédouin vint voir le prophète et lui dit: «Indique-moi une œuvre qui, en
l’accomplissant, me fera entrer au paradis! – Tu dois adorer Dieu, répondit le
prophète, sans rien lui associer, accomplir la prière prescrite, t’acquitter de la dîme
obligatoire, et jeûner le ramadan. – Par celui qui tient mon âme, je n’ajouterai rien à
cela.»10
A l’instar de ce bédouin, je pratiquais donc les piliers de l’islam, comme je l’ai déjà dit,
afin d’éviter la punition de Dieu, tout en espérant lui plaire et être admis au paradis le
jour du jugement. Mais je voulais être plus religieux encore que ce bédouin, je voulais
«ajouter à cela» pour mettre toutes les chances de mon côté. En fait, je devais tout
bonnement mériter par mes efforts personnels l’entrée au paradis. Je savais qu’au
jugement dernier Allah pèserait mes œuvres bonnes et mes œuvres mauvaises et
déciderait de mon sort:
Quant à celui dont la balance sera lourde, il sera dans une vie agréable; et quant à
celui dont la balance sera légère, sa destination est un abîme très profond. Et qui te
dira ce que c’est? C’est un feu ardent.
Coran 101, 6-11
Dieu allait donc me juger en fonction de mes œuvres, sans que je puisse savoir avant le
jour du jugement ce qu’il adviendrait de moi. Il est vrai que beaucoup de récits évoquent
la miséricorde d’Allah, sa compassion, le fait qu’il favorise les bonnes œuvres et les
compte en les multipliant, mais, si mes péchés ne m’étaient pas pardonnés – ce que je
ne pouvais pas savoir à l’avance –, ils seraient pesés et témoigneraient contre moi. Tout,
en fait, dépendait de la décision d’Allah.
Un tel donnant, donnant me semblait à cette époque-là tout à fait logique. Quoi de plus
normal en effet que de faire ce qu’Allah m’ordonnait afin d’obtenir de lui les
récompenses? Mais voilà que j’entendais tout autre chose de la part des chrétiens: «Non,
tes œuvres ne pourront pas te donner accès au paradis. En fait, le salut que Dieu veut
pour toi est un salut gratuit. C’est un salut qui s’obtient par la foi seule! Ecoute ce qui est
écrit dans la Bible, qui est la Parole de Dieu et que tu dois accepter comme telle en tant
que musulman: ‘Si tu reconnais publiquement de ta bouche que Jésus est le Seigneur et
si tu crois dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité, tu seras sauvé’ (Romains 10.9).»
Je passe par-dessus ce qui m’était le plus insupportable: l’idée que Jésus aurait été mis à
mort (j’y reviendrai plus tard). Les chrétiens, et notamment Daniel, poursuivaient: «Si le
salut s’obtenait par les œuvres, tu ne pourrais jamais en faire assez pour que Dieu te
pardonne, ni jamais savoir si tu en as assez fait. Mais ce que tu ne peux pas obtenir par
tes bonnes œuvres, Dieu te l’offre gratuitement. Le salut est le don gratuit de Dieu. C’est
par grâce que Dieu veut te sauver, non par tes œuvres.»
J’avoue que cette idée me semblait folle, à ce moment-là, habitué que j’étais à la règle
d’après laquelle rien ne s’obtenait sans rien, en matière de religion. Je comprenais bien
leur parole, mais il m’était difficile de la recevoir. Ils continuaient d’ailleurs en affirmant
que mon péché était trop grave pour que Dieu me pardonne en raison de mes œuvres.
Pour que tel soit le cas, il faudrait que celles-ci soient aussi excellentes que si Dieu les
avait faites, il faudrait qu’elles soient dignes des œuvres de Dieu lui-même pour pouvoir
effacer mes péchés. On me donnait des exemples pour m’aider à comprendre: «Prétendre
effacer tes péchés par tes œuvres reviendrait à te croire capable de couvrir de neige
blanche de très hautes montagnes, par la seule force de tes bras. Cela t’est impossible,
Dieu seul est assez puissant pour le faire.»
Le poids du péché
J’étais conscient que j’étais pécheur, que je tombais bien souvent dans le mal. Mais ce
qui m’empêchait de comprendre les paroles ci-dessus, c’était ma conception du péché:
pour moi, ce n’était pas grave au point de nécessiter une solution aussi radicale que la
mort de Jésus sur une croix. Voilà pourquoi, quand les chrétiens me disaient que Jésus
était mort pour nos péchés, cela me semblait irrecevable. Pourquoi fallait-il cette mort?
Le poids du péché n’était-il pas allégé par le bien que je pouvais faire? Le péché n’était
pas un acte qui ne puisse pas être pardonné, mais seulement un acte qui déséquilibrait la
balance entre le bien et le mal. Je devais, par la pratique du bien, l’emporter sur le mal.
Le seul péché impardonnable était celui qui consistait à associer un autre dieu à Allah. A
part cela, le péché n’était pas grave; je ne le vivais pas comme un acte terrible blessant
Dieu, mais comme une œuvre qui me ferait du tort à moi-même et provoquerait peutêtre ma perdition.
Me venaient à l’esprit beaucoup de passages des hadiths qui mettent en perspective la
facilité avec laquelle Allah pardonne sans grande exigence le péché. Lorsque je faisais,
par exemple, mes ablutions rituelles pour me préparer à la prière, les gouttes d’eau qui
s’écoulaient de mes mains ou de mon visage et tombaient à terre étaient autant de
péchés qui tombaient aussi et dont j’étais purifié.11 Lorsque j’allais prier, Allah
pardonnait mes péchés commis juste avant, en vertu de cette prière obligatoire et
rituelle. En effet, c’est ce qu’atteste Mohamed lui-même par la réponse qu’il a donnée à
un homme ayant commis un péché: il s’y fonde sur le principe que les bonnes œuvres
dissipent les mauvaises.
Un homme vint trouver le prophète et lui dit: «O Envoyé de Dieu, j’ai commis une
faute qui doit être sanctionnée, applique-moi donc la peine prescrite.» L’heure de la
prière étant venue, l’homme pria avec le prophète. La prière terminée, l’homme dit:
«O Envoyé de Dieu, j’ai commis une faute qui doit être sanctionnée, applique-moi la
peine indiquée dans le Livre de Dieu.» – «N’as-tu pas fait la prière avec nous?»
demanda le prophète. – «Si», répondit l’homme. – «Eh bien, tu as été pardonné.»12
Le Coran n’est pas en reste: «Ceux qui ont cru et accompli de bonnes œuvres et ont cru
en ce qui a été descendu sur Muhammad – et c’est la vérité venant de leur Seigneur – Il
leur efface leurs méfaits et améliore leur condition» (Coran 47, 2). C’était aussi simple
que cela, le pardon des péchés: une bonne œuvre dissipe une mauvaise!
Par ailleurs, je répétais plusieurs fois par jour des formules, ce qui me procurait le pardon
de Dieu pour mes péchés, même s’ils étaient aussi nombreux que l’écume de la mer:
Si quelqu’un, disait Mohamed, répète 33 fois «Allah est exempt d’imperfection», 33
fois «grâces soient rendues à Allah», et 33 fois «Allah est grand» et qu’il complète le
100 par la confession de foi, alors Dieu lui pardonne tous ses péchés, fussent-ils aussi
nombreux que l’écume de la mer.13
Mohamed a dit aussi:
Quiconque répète cent fois en un jour: «Il n’y a d’autre divinité à part Dieu, l’unique; Il
n’a pas d’associé; à lui la royauté et à lui la louange et il est omnipotent», obtiendra
une récompense équivalente à celle attribuée à l’affranchissement de dix esclaves; on
lui inscrira à son compte cent bonnes actions, et on en effacera cent mauvaises… Nul
n’a fait chose plus méritoire que ce croyant, hormis celui qui a répété plus encore
cette invocation. Quiconque répète cent fois par jour cette formule: «Pureté et
louange à Dieu», aura toutes ses fautes effacées, fussent-elles comparables à l’écume
de la mer.14
De plus, j’avais pris l’habitude de jeûner le lundi et le jeudi. C’était bien suffisant pour le
pardon de mes péchés!
Néanmoins, je commençais à comprendre que, du point de vue de la Bible, le péché n’est
pas une simple transgression de la loi de Dieu, qu’on peut effacer par des formules, par
des œuvres bonnes ou par des actes rituels. Il était certes une transgression des
commandements divins, mais il était aussi beaucoup plus que cela: une rébellion et une
offense envers Dieu lui-même, un échec total par rapport au but pour lequel nous avons
été créés, à savoir le glorifier. Au lieu donc de rendre gloire à Dieu, nous manifestons, par
notre péché, une volonté d’indépendance à son égard, ce qui, en termes islamiques,
équivaut à une volonté d’insoumission. Et, comme tel, il est trop grave pour être effacé
par un acte bon, aussi extraordinaire soit-il. Ce que la Bible me montrait de la première
page à la dernière, c’était le besoin que le péché soit expié par la mort, non par de
bonnes œuvres. En réalité, tout homme qui transgresse les commandements de Dieu
porte un coup à la personne de Dieu même. Il n’est logiquement pas condamné à
accomplir du bien ou un rite, mais à mourir! C’est la sentence qui a été prononcée par
Dieu dès l’origine et que je lisais au début même de la Bible:
L’Eternel Dieu donna cet ordre à l’homme: «Tu pourras manger les fruits de tous les
arbres du jardin, mais tu ne mangeras pas le fruit de l’arbre de la connaissance du
bien et du mal, car le jour où tu en mangeras, tu mourras, c’est certain.»
Genèse 2.16-17
Cette sentence, je la trouvais confirmée par les paroles bibliques suivantes: «En effet, le
salaire du péché, c’est la mort, mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en JésusChrist notre Seigneur» (Romains 6.23). Ainsi donc, dans le christianisme, le salaire du
péché, c’est-à-dire ce que mérite notre péché, c’est la mort. Contrairement à l’islam, le
péché n’est pas minimisé dans la Bible, ni les bonnes œuvres valorisées, mais il est tenu
pour ce qu’il est: un crime commis contre Dieu lui-même, qui, à ce titre, ne peut être
expié que par la mort.
Au début, je ne comprenais pas comment la mort pouvait être un châtiment. J’imaginais
que Dieu devait frapper sur-le-champ tout pécheur et le mettre à mort. Or, je ne le voyais
jamais arriver. Néanmoins, j’ai compris que la mort, dans le verset cité plus haut, est
opposée à la vie éternelle. Il ne s’agit donc pas seulement de mort physique. Le salaire
du péché, c’est aussi la mort éternelle ou spirituelle.
Les chrétiens ne manquaient pas de préciser que nous étions tous séparés de Dieu à
cause de nos péchés, sans possibilité aucune pour nous d’être en relation avec lui. Pour
lui, nous étions réellement morts, au sens spirituel, et nous ne pouvions donc rien faire
de bien pour lui; il nous fallait d’abord être vivifiés. Voilà pourquoi, au lieu de nous donner
ce que nous méritions, Dieu nous offrait, en don gratuit, la vie éternelle par la foi en
Jésus le Seigneur.
8 Jean 3.16
9 Emil Brunner, La Doctrine chrétienne de Dieu, Dogmatique tome 1, Labor et Fides, 1964, p. 203-204
10 Le Sahîh d’Al-Bukhâry, tome 2, p. 272, traduction de Harkat
11 «Les péchés de celui qui parfait ses ablutions sortiront de son corps jusqu’à s’écouler par ses ongles» (Sahih Mouslim,
partie 3, purification).
12 Sahih Mouslim, partie 49, repentir, p. 295
13 Ibidem
14 Sahih Mouslim, partie 48, Evocation et invocation d’Allah, repentir et demande du pardon, p. 289
4. Combat intérieur
Deux ans s’étaient écoulés et j’étais davantage familiarisé avec le christianisme, sans
pour autant comprendre tous ses enseignements et encore moins les accepter.
Cependant, les divergences essentielles entre ce que je croyais et ce que me
présentaient les chrétiens à propos de leur foi – que je pouvais d’ailleurs vérifier dans la
Bible– ne manquaient pas de me troubler. Vous savez, quand une réalité fait partie de
votre être ou constitue votre être même, cela fait terriblement mal quand elle est remise
en question et apparaît plus fragile qu’elle n’en avait l’air.
La vérité du christianisme s’imposait de plus en plus à moi. J’avais beau chasser et fuir la
lumière, elle pénétrait plus encore. Le trouble grandissait, et avec lui la résistance. Ce
que j’essaie d’expliquer, c’est que ce n’est pas volontairement, ce n’est pas de moi-même
que j’ai déclaré que l’islam n’était pas la vraie révélation de Dieu. C’est parce que la force
de persuasion du christianisme l’emportait largement sur tout le reste.
L’important pour moi, à ce moment-là, c’était de connaître la vérité. Je croyais la
connaître… je continuais de vouloir croire que je la connaissais. Cependant, les paroles
que j’entendais ou lisais semblaient trouver un chemin en moi pour atteindre la partie
secrète de mon être. Avec force je les refusais, je les rejetais, car il n’est pas facile
d’admettre que vous vous êtes trompé en matière de religion: cela remet en question
toute votre vie. Personne ne peut comprendre cela, sinon celui pour qui seule la vérité
importe. Cependant mes protestations, mes efforts pour me convaincre moi-même de la
vérité de ma religion ne parvenaient plus à me procurer la tranquillité de l’esprit. Je ne
pouvais pas rester dans le statu quo en ignorant tout simplement, par exemple, les
paroles des chrétiens; il me fallait une certitude absolue, sans quoi je ne pouvais être
dans la paix. Il aurait fallu que je reste ignorant du christianisme; maintenant que j’avais
été confronté à ses idées, je me devais de lui faire face. Sinon, le tourment de mon âme,
dont je n’étais pas conscient à l’époque mais dont j’allais prendre la mesure plus tard, me
dévorerait.
Si je ne remettais pas en cause ma religion, les échanges toujours plus profonds, plus
directs, plus conflictuels aussi, me remuaient jusqu’aux entrailles. Ma résistance à ces
agitations intérieures était elle-même source de souffrance. Dans le but de me rassurer,
j’allais voir d’autres musulmans affermis afin de leur poser des questions, mais en veillant
à ce qu’ils ne soupçonnent jamais que je discutais religion avec des chrétiens. Je me
rappelle encore les réponses et les encouragements qu’ils me donnaient. J’y trouvais un
réconfort ponctuel, vite troublé par les nombreuses questions qui m’assiégeaient.
Un amour surprenant
Le roc sur lequel reposaient mes assurances a continué à se fissurer, mais de manière
plus radicale encore et plus décisive. Ce qui a contribué à cette fracture, c’est le
dévoilement plus grand de la personne de Jésus. Plus je discutais avec le pasteur Daniel
et les autres chrétiens, plus je lisais la Bible, et plus la personne de Jésus se dégageait
avec netteté et s’imposait à moi. Alors que je ne connaissais de lui, jusque-là, que des
bribes, je le trouvais désormais dépeint avec force détails. Alors qu’il n’était qu’une
silhouette sans contours dans le Coran, il devenait une personne, un être vivant, il
commençait à prendre du relief. Je découvrais qu’on en savait beaucoup à propos de sa
vie et qu’elle était «charmante» au sens étymologique du terme: placé devant lui, le
lecteur de l’Evangile était attiré de manière irrésistible. Pareil à la femme atteinte
d’hémorragie douze années durant, je voulais le toucher tout en tremblant, non par
crainte qu’il ne veuille pas de moi, mais par crainte de le découvrir tel que j’avais peur
qu’il soit. Tel le pécheur appelé Zachée, j’avais envie de grimper sur un arbre afin de
mieux le voir, mais j’avais en même temps peur qu’il ne tourne vers moi un visage de
lumière, qu’il ne m’interpelle par mon nom. Voilà la délicieuse crainte que me faisait
éprouver la personne de Jésus.
Un aspect de sa conduite m’intriguait particulièrement, me captivait tout en produisant en
moi une sourde inquiétude, car il était en opposition avec le comportement de Mohamed:
Jésus reflétait dans sa personne l’amour de Dieu pour les hommes, pour tous les êtres
humains de toute condition, de toute origine. A ce que je comprenais, la Bible le
présentait comme l’amour de Dieu incarné, marchant sur deux pieds, accueillant les
pauvres comme Mohamed, ouvrant ses bras à ses amis comme Mohamed. Mais elle le
présentait aussi – et là il dépassait le prophète – bénissant ses ennemis et leur offrant
son pardon, tout comme au pire des pécheurs. Cela rendait ma lecture de la Bible
douloureuse, car dangereuse et menaçante pour ma foi musulmane. J’avais peur de ce
que j’allais découvrir concernant Jésus. J’espérais, au fond de moi, le voir sous un jour
moins favorable. Certes, j’aurais pu tout simplement arrêter de lire ce livre et continuer
mon chemin, mais cela m’aurait laissé dans le doute. J’avais besoin de savoir pour
confirmer ma foi en l’islam. Or, je ne trouvais rien à reprocher à Jésus, rien de
répréhensible à quoi m’accrocher, mais à l’inverse des paroles uniques, des actes
sublimes. Inconsciemment, je le comparais à Mohamed, qui devait être le plus éminent
pour moi, et j’avais peur des résultats de cette comparaison.
Ce qui m’a le plus perturbé et ébloui à la fois, ce sont les paroles de Jésus à propos de
l’amour pour les ennemis!
Vous avez appris qu’il a été dit: «Tu aimeras ton prochain et tu détesteras ton
ennemi.» Mais moi je vous dis: Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous
maudissent, faites du bien à ceux qui vous détestent et priez pour ceux qui vous
maltraitent et qui vous persécutent.
Matthieu 5.43-44
Ces paroles me semblaient tout bonnement absurdes, peu habitué que j’étais à ce
langage, mais aussi fascinantes! (J’ai compris plus tard qu’elles ne laissent personne
indifférent; elles suscitent encore et toujours ou bien l’admiration, ou bien l’aspiration au
monde de paix qu’elles évoquent.) Quoi? Ne devons-nous pas plutôt nous venger des
ennemis d’Allah et de nos ennemis? N’est-ce pas l’enseignement fondamental de l’islam?
N’est-ce pas ce que j’ai pratiqué jusque-là?
J’ai en effet appris, comme tout bon musulman, à finir mes prières rituelles par ces mots:
«O, Allah, donne la victoire aux musulmans et détruis leurs ennemis!» C’est ainsi
qu’enseignait et agissait Mohamed lui-même. Il avait l’habitude, par exemple, quand il
priait le matin, de maudire de nombreuses personnes en les nommant. Voici l’une des
nombreuses paroles que rapporte la tradition: «Quand Mohamed levait la tête lors de la
dernière prosternation, lors de la prière du matin, il disait: ‘Dieu, maudis untel et
untel…’»15 Il disait aussi: «Que Dieu maudisse les juifs et les chrétiens, car ils ont fait
des tombeaux de leurs prophètes des lieux de prière!»16 C’était un devoir de maudire les
ennemis de l’islam. J’avais appris tout cela par cœur afin de prier comme le prophète.
Autant dire que c’était la haine des ennemis, non leur amour, qui nous était
recommandée. Le plus sincèrement possible, je me tournais vers Dieu et le priais afin
qu’il détruise et ne bénisse pas.
J’ai donc décidé d’approfondir ce que je savais de Mohamed, l’homme de paix admirable
et admiré par moi. J’étais convaincu qu’en lisant tout Mouslim et Al-Boukhari, deux
auteurs qui avaient compilé la tradition, j’allais découvrir le même visage lumineux que je
croyais connaître, que d’autres actes et paroles inconnus de moi allaient témoigner en sa
faveur. Voici ce que j’ai trouvé et que je ne pouvais pas lire dans les versions abrégées de
ma jeunesse.
J’ai découvert qu’avant de quitter la Mecque, Mohamed s’était adressé ainsi à Koraish,
une tribu avec laquelle il était fâché: «O gens de la Mecque, je jure au nom d’Allah que je
reviendrai vous tuer.» 17 Effectivement, dix ans plus tard, il est revenu triomphant, avec
son armée de 10’000 hommes. A son entrée dans la ville, il avait pour sa division une
bannière noire portant un seul mot: «punition»!18
Je dois reconnaître que, sans le face-à-face avec Jésus – dont la lumière irradiant de sa
personne met en évidence les défauts criants et cachés des hommes –, ce qui me
semblait beau et unique dans la vie de Mohamed ne serait pas devenu un élément
contestable. La haine de l’ennemi et la vengeance me paraissaient normales jusqu’à ce
qu’elles soient placées en face d’une autre attitude et comparées à elle. Si mon arrièreplan religieux me faisait percevoir les paroles de Jésus comme bizarres, en même temps
il m’était impossible d’y réagir par l’indifférence, car elles reflétaient quelque chose du
ciel. Je ne sais comment l’expliquer, mais une chose est certaine: elles ont eu un effet sur
moi. Elles ont résonné au fond de mon âme et y ont trouvé un écho. Je crois que
l’homme, fait à l’image de Dieu, a en lui-même un repli de son être qui vibre à l’amour
divin, qui réagit à la personne de Jésus comme l’eau à la chaleur du soleil, comme le
jasmin à l’ondée du matin. De même que la chaleur monte vers les hauteurs, de même
mon âme réchauffée par la lumière de Christ était attirée vers lui. En même temps,
j’avais peur et je cherchais à minimiser la portée de ces paroles. Cependant, plus je
voulais le faire, plus leur vérité se gravait dans mon esprit. Cela me rendait très
malheureux.
Je commençais à me rendre compte que la Bible était autre que la représentation que
j’en avais, et surtout que l’image que je me faisais de Jésus était tout à fait fausse. Dans
le Coran, ses miracles étaient placés hors cadre, accomplis seulement pour prouver qu’il
était le Messie. Dans la Bible, ils exprimaient beaucoup plus que cela: par eux, se
manifestait la compassion de Dieu, dont Jésus était l’incarnation; il était les mains de
Dieu, ses pieds, son cœur. Ce qu’il faisait n’était pas inspiré par la volonté d’éblouir les
autres ni de leur prouver son identité de Messie mais par la compassion à l’égard des
pécheurs perdus et par l’amour envers eux. C’est pour cette raison qu’il a guéri le lépreux,
multiplié le pain, redonné la vue à l’aveugle, délivré les possédés… bref, secouru tous les
malheureux.
D’étranger, Jésus me devenait de plus en plus proche; sa proximité le manifestait
davantage en ce qu’il a d’unique. Qui a, comme lui, consolé les pauvres, accueilli les êtres
rejetés, pansé les blessures de tous les opprimés? Qui a, comme lui, parlé avec simplicité
et grâce du Dieu qui aime les malheureux et prend le parti des humiliés? Surtout, qui a,
comme lui, révélé le Dieu Père de tous ceux qui placent leur confiance en lui? Il cessait
peu à peu d’être un mot, un être vague, et prenait de plus en plus chair et os. Il devenait,
au fur et à mesure de mes lectures et de me discussions avec les chrétiens, l’homme de
l’amour et du pardon, l’homme aux paroles captivantes, l’homme dont l’existence a été
vécue pour les autres, amis ou ennemis.
Le visage de Jésus donnait, par contraste, un drôle de relief à celui de Mohamed. Lisez
dans l’Evangile de Jean (Jean 8.1-11) l’histoire de la femme que les Juifs voulaient lapider
pour cause d’adultère. Quelle sagesse dans sa réponse, quelle justice, mais surtout quelle
compassion, quelle miséricorde, quel pardon! Ecoutez comment il a parlé à cette femme:
«Jésus lui dit: ‘Moi non plus, je ne te condamne pas; vas-y et désormais ne pèche plus’»
(Jean 8.11). Accusée par tous, elle a reçu le pardon de la part de Jésus, son Sauveur.
Maintenant, imaginez le choc que peut ressentir face à ce texte un musulman habitué à
lire des histoires telles que celle-ci:
Une femme vint dire à Mohamed: «J’ai commis l’adultère, purifie-moi.» Mais il la
renvoya. Le lendemain, elle revint: «Ne me renvoie pas, je suis enceinte!» Mohamed
lui répondit: «Va-t’en jusqu’à la naissance de l’enfant.» Après avoir mis l’enfant au
monde, elle revint avec l’enfant et dit: «Voici l’enfant que j’ai mis au monde.»
Mohamed répondit: «Va-t’en et allaite-le jusqu’à ce qu’il soit sevré.»
Une fois l’enfant sevré, elle vint vers Mohamed avec l’enfant qui tenait un morceau de
pain dans sa main (il devait avoir deux ans, selon la durée prescrite par le Coran pour
l’allaitement).
La femme dit: «Messager d’Allah, le voici, je l’ai sevré et il mange de la nourriture
solide.» Mohamed donna l’enfant à un musulman et prononça ensuite la sentence. La
femme fut enterrée dans un fossé jusqu’à la poitrine et lapidée.19
Cette histoire est couramment citée dans l’enseignement islamique comme une preuve
de la miséricorde de Mohamed. Toute une section dans Mouslim, intitulée «peines
légales», est très édifiante sur sa prétendue tendresse ou compassion.
Quel choc, quand les réactions de Jésus et de Mohamed sont confrontées! C’est comme si
l’on admirait la lune, et voilà qu’on découvre le soleil! Présentée comme une preuve de la
miséricorde du prophète, cette histoire me semblait bien être telle tant que je n’avais pas
eu connaissance de l’attitude de Jésus, qui en révélait l’absurdité et, surtout, la cruauté
inouïe.
Ne croyez pas que j’ai cédé face à tout cela! Non, je ne pouvais laisser le doute envahir
mon esprit, et je m’y refusais. Ce serait terrible de penser même une seule seconde que
cela pouvait être vrai: je commettrais le péché impardonnable. Ce péché, je l’aurais
assurément commis, si j’avais laissé mon esprit croire que Jésus était plus grand que
Mohamed ou, plus grave encore, qu’il était le Fils de Dieu. C’était tout simplement
impossible!
Seulement voilà, le contraste entre Jésus et Mohamed grandissait de lecture en lecture.
En réalité, les récits relatifs au prophète que je lisais, je ne les découvrais pas tous pour
la première fois; j’en connaissais déjà un certain nombre. Toutefois, je ne les lisais plus
comme avant. Confrontés à l’amour inconditionnel que manifestait Jésus et à la manière
dont lui avait traité ses persécuteurs, ils devenaient problématiques pour moi, ils
prenaient un autre relief. Je voyais, par exemple, que Mohamed n’admettait aucune
critique contre sa personne. Il ordonnait à ses compagnons de tuer tous ceux qui osaient
le décrier. Ils devaient le défendre par leur parole, par leur vie, par leur mort, par leur
épée. La tradition est remplie d’histoires d’assassinat ou d’exécution de personnes qui
ont, à un moment ou à un autre, dénigré la personne du prophète. Le nombre de
personnes qu’il a tuées ou ordonné de tuer est impressionnant.
Une seule histoire à titre d’illustration, car elle m’a bien dérangé: un musulman aveugle
était marié à une femme dont il avait deux enfants. Son épouse ne pouvait s’empêcher
d’insulter Mohamed, chaque fois que son nom était prononcé devant elle. Le mari la
reprenait souvent et la mettait en garde. Or, une nuit, il en est venu à parler du
prophète, et son épouse, comme à son habitude, n’a pas manqué de l’insulter. Il a alors
saisi une barre de fer qui avait la forme d’une épée et l’a frappée jusqu’à ce qu’elle
meure. L’aveugle s’est ensuite dénoncé auprès de Mohamed et lui a expliqué qu’il avait
tué sa femme parce qu’elle l’avait insulté. La loi exigeait normalement que l’assassin soit
tué à son tour, mais le prophète a déclaré l’assassin innocent, parce qu’il l’avait vengé
des insultes de la femme.
«Comment pouvait-il agir de cette manière, s’il était prophète?» me suis-je demandé à la
fin de ma lecture. Je cherchais à chasser cette pensée, mais mon esprit était envahi par
une autre: «Comment Jésus aurait-il réagi, lui?» M’est alors revenue en mémoire la
parole de Jésus sur la croix: «Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font»
(Luc 23.34). Jésus est en train de souffrir une mise à mort, pas une simple insulte, et
pourtant il prie pour ceux-là mêmes qui l’ont crucifié afin qu’ils vivent, et non qu’ils
meurent. «N’est-ce pas la seule réponse digne du vrai prophète?» étais-je tenté de
conclure.
Les apôtres de Jésus, témoins de sa vie, l’ont décrit ainsi: «Lui qui insulté ne rendait pas
l’insulte, maltraité ne faisait pas de menaces mais s’en remettait à celui qui juge
justement» (1 Pierre 2.23). Et c’est vrai qu’il «a été conduit comme une brebis à l’abattoir
et, pareil à un agneau muet devant celui qui le tond, il n’ouvre pas la bouche» (Actes
8.32).
Une Bible falsifiée?
Pendant tout ce temps, mes recherches pour trouver d’éventuelles erreurs dans la Bible
restaient infructueuses. Daniel, sa femme Betty et les autres chrétiens, de leur côté, ne
restaient pas les bras croisés: m’entendant toujours leur servir les mêmes objections, ils
entreprenaient de me prouver l’authenticité des Ecritures. Leur principal argument était
l’accomplissement de nombreuses prophéties, dont certaines étaient d’une précision
renversante. Ils ne cessaient de me lire le Psaume 22, écrit par David mille ans avant la
naissance de Jésus, qui décrit sa mort sur la croix avec des détails incroyables. Je cite à
titre d’exemple deux versets dans lesquels c’est le Messie, Jésus, qui parle:
Oui, des chiens m’environnent, une bande de scélérats rôdent autour de moi; ils ont
percé mes mains et mes pieds. Je pourrais compter tous mes os; eux, ils observent, ils
me regardent, ils se partagent mes vêtements, ils tirent au sort mon habit.
Psaume 22.17-19
Ce qui me tracassait, c’était la concordance entre l’Ancien Testament (livre des Juifs) et
le Nouveau Testament (livre des chrétiens) sur des points que le judaïsme n’admettait
pourtant pas. Le meilleur exemple est celui d’Esaïe 53, fameux passage de l’Ancien
Testament que je me suis entendu citer de nombreuses fois. Il prophétise la mort du
Messie Jésus et donne le sens et la raison de cette mort: «Pourtant, ce sont nos
souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé. Et nous, nous l’avons
considéré comme puni, frappé par Dieu et humilié.» Il témoigne ainsi contre les Juifs de
leur rejet de Jésus. Cependant, ceux-ci n’ont pas supprimé ni falsifié ce passage. Il se
dresse aujourd’hui encore au milieu de leurs Ecritures comme un doigt accusateur et
témoigne contre eux, car il est accompli de la manière la plus étonnante dans le Nouveau
Testament. Les Juifs auraient donc falsifié les Ecritures tout en laissant Esaïe, David et
bien d’autres témoigner contre eux en faveur des chrétiens? Des pensées terribles me
hantaient: «Pourquoi les Juifs n’ont-ils pas falsifié ces passages? Pourquoi les ont-ils
laissés, alors même qu’ils constituent une preuve irréfutable de leur tort face aux
affirmations des chrétiens? A leur place, ce sont ces textes-là que j’aurais arrachés ou,
tout au moins, modifiés, si vraiment j’avais voulu falsifier la Bible!»
L’accord parfait des deux Testaments en dépit des divergences entre leurs adeptes
respectifs ne cessait de m’interroger. Je ne faisais pas ces constatations de gaieté de
cœur: elles s’infiltraient dans mon être, dans ma tête, et s’imposaient à ma raison. Et
chaque fois, c’étaient des angoisses, c’étaient autant d’aiguillons qui me transperçaient.
«Pourquoi, me demandais-je encore, les Juifs n’ont-ils pas supprimé aussi tous les
passages qui les montrent sous un jour horrible, puisque, en tant que musulman, c’est
l’accusation que je porte contre eux? Qu’ont-ils donc falsifié, si ce qui reste dans la Bible
est extrêmement sévère à leur égard? Moi, à leur place, j’aurais ajouté des éléments à
mon avantage et retiré ce qui me montrait tel qu’aucune nation ne voudrait paraître:
idolâtre, rebelle, pécheur, châtié!»
Face à toutes ces observations, c’était le Coran qui se trouvait remis en question.
C’étaient des évidences que je ne m’avouais pas. Au contraire, je luttais, je cherchais
encore les preuves attestant que le Coran avait raison. Je me rendais à nouveau auprès
de musulmans aguerris. Mon âme criait au secours tout en restant sans voix – je ne
pouvais pas en effet, par crainte, exprimer clairement les doutes qui m’assaillaient –, et
je ne trouvais jamais d’aide. C’est qu’il ne me fallait pas de fausses preuves mais des
arguments tangibles et vérifiés qui soient convaincants et ne se dissipent pas au moindre
examen. Certes, quand j’allais vers les musulmans, ils me fournissaient des «preuves»,
mais elles prêtaient à sourire et ne pouvaient apaiser mon âme torturée. Elles ne me
satisfaisaient plus: c’étaient des accusations ou des affirmations gratuites qui ne
résistaient pas une seconde à la critique des chrétiens. En fait, ce n’était plus pour
convaincre les autres de leur erreur que je les cherchais, mais pour me prouver à moimême que j’étais dans le vrai. Tout cela, je le devinais, je le ressentais, je ne me
l’avouais pas.
En fait, je découvrais que l’Ancien Testament et le Nouveau Testament déroulaient le
même plan, qu’ils étaient traversés par le même souffle. Le Nouveau Testament s’inscrit
dans la continuité de l’Ancien: il est l’accomplissement de l’alliance et des promesses
faites à Abraham, renouvelées à David et réalisées en Jésus! Un même et unique projet
de Dieu pour sa création, et en particulier pour les hommes, se dévoile dans la Torah,
s’approfondit dans les Prophètes et les Psaumes pour atteindre son achèvement parfait
dans les Evangiles et les autres livres du Nouveau Testament. Le Coran, il me fallait bien
le reconnaître, n’était pas dans cette continuité. Je voyais qu’il bifurquait à 90° par
rapport à l’Ancien Testament et au Nouveau. Comment les Juifs auraient-ils tordu la
Torah, les Psaumes et les Prophètes afin de les aligner avec le Nouveau Testament qu’ils
ne reconnaissaient pas? Il aurait fallu qu’ils soient complices des chrétiens, et c’était
impossible!
Cette dernière question me hantait. En même temps, sans jamais envisager de devenir
chrétien, je pensais parfois spontanément à ma famille: «Voilà de quoi les rendre fous,
les tuer! Voilà de quoi couper tout lien! Comment réagiraient-ils? Mais cela les
anéantirait, ce serait la fin de tout!»
Mort pour nous sauver
Certains hommes, touchés dans leur cœur, s’ouvrent immédiatement et embrassent ce
qui les a touchés. D’autres, parce que cela leur coûte et exige un renoncement à leurs
certitudes et assurances humaines, luttent et s’attachent à ce qui reste peu clair pour
eux, dans l’espoir d’en faire leur planche de salut. C’est ainsi sans doute que réagissent
beaucoup de personnes face à la vérité. Il n’est pas facile de l’accueillir, car elle ébranle
nos certitudes et nous met en danger. Elle nous invite à nous remettre en question, pour
ne pas dire à tout remettre en question. En même temps, elle est douce et désirable. Elle
attire parce qu’elle est la vérité et fait peur parce qu’elle enjoint de se dépouiller de soi,
de ce qui fait qu’on est soi. Elle exige l’aveu de nos errements. Voilà pourquoi je
m’accrochais à tout ce qui me permettait de croire que j’étais dans le vrai.
Quand l’occasion se présentait, c’était la mort de Jésus, fondement du christianisme, que
je voulais saper. Ou alors c’était le grave blasphème d’après lequel il était le Fils de Dieu,
voire Dieu lui-même. «Mais, pendant que Jésus était sur la terre, qui gouvernait le
monde?» demandais-je aux chrétiens en guise de défi. Il était ancré dans ma tête de
musulman qu’il n’y avait qu’un seul Dieu et que le monde devait tourner tout seul, si
Jésus était Dieu.
Les chrétiens me disaient que Jésus était mort sur la croix pour nos péchés. Mais, pour
moi, même si le péché commençait à m’apparaître sous un jour nouveau, laisser mourir
son prophète me semblait impliquer tout bonnement une défaite de Dieu. L’une des
preuves de la vérité de l’islam n’était-elle pas précisément le soutien apporté par Allah à
son prophète Mohamed en vue de ses victoires militaires? Comment Dieu pouvait-il ainsi
laisser mourir Jésus, son envoyé? N’était-il pas capable de le protéger? Mourir de cette
manière, c’était subir la honte, c’était aussi avouer la défaite divine.
Voici la réponse de Daniel alors que nous étions ensemble dans son bureau:
– Mais non! La mort de Jésus n’est pas une défaite de Dieu. Ce serait le cas si sa mort lui
avait été imposée. Or, il ne l’a pas subie malgré lui, c’est volontairement qu’il a donné sa
vie! Jésus lui-même a dit, en parlant de sa vie: ‘Personne ne me l’enlève, mais je la
donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la donner et j’ai le pouvoir de la reprendre’ (Jean
10.18). Tu vois donc que c’était dans le plan de Dieu même. Tu sais, Jamel, les apôtres
qui accompagnaient Jésus étaient scandalisés, comme toi, d’entendre de la bouche de
Jésus qu’il devait mourir. Mais ils ont fini par comprendre que c’était la volonté de Dieu
pour le salut de tous. Laisse-moi te lire ce que disait l’apôtre Pierre, par exemple, après
avoir vu Jésus ressuscité:
Israélites, écoutez ces paroles! Dieu vous a désigné Jésus de Nazareth en
accomplissant par lui, au milieu de vous, des miracles, des prodiges et des signes,
comme vous le savez vous-mêmes. Cet homme vous a été livré suivant le projet défini
et la prescience de Dieu. Vous l’avez arrêté, vous l’avez fait mourir sur une croix par
l’intermédiaire d’hommes impies. Mais Dieu a brisé les liens de la mort, il l’a
ressuscité, parce qu’il n’était pas possible qu’elle le retienne.
Actes 2.22-24
– Et pourquoi Dieu aurait-il voulu que Jésus meure, et de cette mort infâme, par-dessus
le marché? Je ne comprends pas.
– Dieu l’a voulu car c’était le seul moyen pour que nos péchés puissent être pardonnés.
Rappelle-toi ce que je t’ai déjà dit plusieurs fois: le péché ne peut être expié que par la
mort du coupable. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Dieu qui en a décidé ainsi. Comme le
châtiment de notre péché a été notre mort spirituelle, c’est-à-dire notre séparation
éternelle d’avec Dieu, soit il nous laissait loin de lui, soit il nous pardonnait. Mais il ne
peut pas nous pardonner sans que le jugement du péché soit quand même exécuté.
Jésus est donc mort à notre place, lui qui était innocent, pour nous les coupables. La mort
de Jésus n’est pas la défaite de Dieu; c’est le moyen choisi par Dieu pour nous sauver.
Elle est la plus grande des preuves de son amour, comme il le dit lui-même dans
l’Evangile de Jean: «En effet, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin
que quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle» (Jean 3.16). Tu sais,
Dieu t’aime! Il veut te sauver afin que tu le connaisses. Mais il est saint, et tu ne peux
pas l’approcher sans que tes péchés soient effacés. Seul le sang de Jésus, mort sur la
croix, peut les effacer. Crois en lui pour être pardonné!
– Daniel, mes péchés peuvent m’être pardonnés grâce à mes prières, grâce à mes
œuvres qui plaisent à Dieu.
Voilà ce que je répliquais, essayant de me convaincre moi-même de ce que je disais.
Daniel poursuivait:
– Tu sais, tu peux faire tout ce que tu veux, jamais Dieu ne te pardonnera en raison de
choses que tu auras faites. Les bonnes œuvres que tu accomplis ne sont pas des bonnes
œuvres pour lui. Sais-tu pourquoi? Parce qu’elles sont accomplies par des mains souillées
par le péché. C’est Dieu lui-même qui le dit: «Nous sommes tous devenus comme des
objets impurs et toute notre justice est pareille à un habit taché de sang» (Esaïe 64.5).
De fait, aucun de nous ne peut plaire à Dieu, puisque nous sommes tous pécheurs et
ennemis du Seigneur. Les mains qui font des offrandes à Dieu doivent être des mains
purifiées. Ton péché doit être effacé et pardonné d’abord, ensuite seulement tu pourras
faire du bien qui comptera aux yeux de Dieu. Je te l’ai déjà dit plusieurs fois et je te le
répète encore: c’est par la foi seule en Jésus-Christ seul et en sa mort, sacrifice offert
pour tes péchés, que Dieu te pardonnera tes péchés. Si tu ne crois pas, tu mourras dans
ton péché. Viens au Seigneur Jésus, crois en lui et demande-lui pardon…»
Je sortais de moins en moins indemne de ces discussions. Ma résistance s’érodait face à
la pertinence de ce que j’entendais. Ces paroles de vérité accomplissaient leur œuvre en
moi, mais, alors que d’autres leur auraient fait bon accueil, j’étais incapable de les
embrasser. C’était traumatisant de me rendre compte que le roc solide sur lequel étaient
posés mes pieds était bien plus fragile que je ne le pensais. Plus encore, il mollissait sous
mes pieds! Je m’enfonçais dans ma détresse comme le voyageur imprudent dans des
sables mouvants. Cependant, je ne pouvais pas m’abandonner à la vérité. On ne peut pas
simplement s’asseoir et se dire qu’on s’est trompé. C’est l’aveu que l’on ne se fait jamais
à soi-même. Personne, en réalité, n’aime voir qu’il s’est trompé. Cela correspond à un
rejet de vous-même, de votre identité, un désaveu de ce que vous êtes. Et ce d’autant
plus lorsqu’il s’agit de réalités essentielles qui vous ont façonné, qui constituent votre être
intérieur.
«Et si tout cela était vrai?» De telles pensées fulgurantes, telle une flèche jaillie de nulle
part, me perçaient l’esprit. Des mots, des paroles échangées avec Daniel, avec sa femme
ou avec d’autres chrétiens me hantaient la nuit. Je devais immédiatement les chasser, de
peur de commettre le péché d’association, péché impardonnable! Pareil à un soldat dans
ses derniers retranchements, je cherchais vainement des munitions pour leur résister
encore.
Que dirait ma famille? Dans quelle angoisse les mettrais-je? Quel malheur provoqueraisje pour eux? Bien malgré moi, je ne pouvais m’empêcher de penser à leur réaction.
C’était devenu même une obsession. Quitter l’islam, c’est renier votre famille, votre
patrie. C’est assurément couper les liens, provoquer leur colère, risquer une rupture
totale. Le prix me paraissait trop élevé. C’était toujours le côté où se trouvait ma famille
qui faisait pencher la balance.
15 Sahîh d’Al-Bukhâry, partie 64, expéditions militaires
16 Sahih Mouslim, partie 5, les mosquées et les prières, chapitre 3, hadith 21
17 Ibn Kathir, Le commencement et la fin, vol. 2, partie 3, p. 53
18 Idem, p. 288
19 Sahih Mouslim, partie 29, peines légales, d’après la traduction de Mark A. Gabriel, Jésus et Mahomet, Ourania, 2007,
p. 244-245
5. Qui es-tu? Est-ce toi, Jésus?
Un combat violent et continu s’était déclaré en moi, il avait pris place dans mon cœur
même. Si quelqu’un m’avait interrogé à ce moment-là sur ma foi, j’aurais répondu avec
netteté que j’étais musulman. Mais, aujourd’hui, avec le recul, je sais que je n’avais plus
du tout la même assurance qu’à mon arrivée en France. J’étais très malheureux, non
seulement en raison de mon refus délibéré de la vérité mais aussi à cause de la perte de
mes assises. La vérité et ma religion se livraient une lutte terrible en moi. Après deux ans
et demi de contact avec les chrétiens, j’en étais arrivé à ne plus supporter d’entendre
parler de l’Evangile, tellement cela me tourmentait. Quand je discutais avec eux, cela
finissait toujours par des disputes.
En dépit de mon refus d’entendre dorénavant l’Evangile, j’aimais passer du temps avec la
famille du pasteur. Le lundi 5 août était un jour comme tant d’autres chez eux. Ma
tristesse était bien visible, mon visage reflétant mes angoisses spirituelles. Aussi Betty, la
femme de Daniel, et sa fille Susan ont-elles trouvé normal de me parler de l’origine de
cette détresse: c’était à cause de mon refus de l’Evangile, ont-elles osé me dire; je serais
malheureux tant que je n’aurais pas accueilli Jésus-Christ comme mon Sauveur…
Cette fois-là, j’ai décidé que c’en était trop. Je leur ai dit que je ne voulais plus jamais
entendre parler ni de Jésus, ni d’eux ni de personne, et j’ai insisté pour qu’on me ramène
chez moi. Une fois arrivé à la maison, après avoir cherché vainement par plusieurs
moyens la paix de l’âme, j’ai pris le Coran et me suis mis à le lire. Cette lecture était
censée m’apaiser, conformément à la promesse du Coran lui-même, mais alors que les
paroles sortaient de mes lèvres, mon cœur restait sec, contrairement à l’habitude.
Il était une heure et demie du matin quand j’ai décidé d’aller dormir. Dans mon lit, j’ai
commencé à prier Allah comme je le faisais chaque nuit, récitant des passages du Coran
et des prières que je connaissais par cœur. Mais c’est le vide qui m’a entouré autant que
le silence. En dépit de toutes mes tentatives, je n’arrivais pas à trouver la paix du cœur à
laquelle j’aspirais tant en ce moment. Allongé sur mon lit, je me suis soudain redressé,
tremblant, envahi par une peur indescriptible: quelqu’un était entré dans la chambre. La
pièce tout entière se remplissait de sa présence réelle! Il était là, devant moi, sur les
côtés! Il était partout! Je me suis mis à trembler de tout mon corps, devenu totalement
engourdi. Poussé par une force invisible, je me suis écrié: «Qui es-tu?»
Soudain, le nom de Jésus s’est mis à résonner dans ma tête, puis dans tout mon être.
Mon corps tremblait, mon cœur battait fort. Pourquoi ai-je pensé à lui? Pourquoi son nom
s’est-il imposé à cet instant-là à moi? «Est-ce toi, Jésus?» lui ai-je spontanément
demandé, alors que je ne pensais absolument pas à lui au moment de me mettre au lit. Il
était de plus en plus évident, d’une évidence inouïe pour moi, que cette personne était
Jésus. Oui, il était là en personne! Comment ai-je su que c’était lui? Une seule
explication: c’est lui-même qui s’est fait connaître à moi. Il voulait bien se révéler à mon
pauvre cœur! Il voulait mettre fin à mes tourments et me montrer qu’il est le chemin du
salut. C’est lui qui est venu se faire connaître à moi comme le Seigneur vivant et me
sauver.
«Si c’est toi, Jésus, je t’accepte», ai-je ajouté. Une certitude inébranlable m’a alors
rempli: c’était bien le Seigneur Jésus! Le sentiment qui m’a envahi à ce moment-là est
indescriptible. J’ai su que Jésus est réellement d’un autre monde, du monde de Dieu, qu’il
est le vivant.
Cependant, je ne pouvais me résigner à ce que je venais de dire, si bien
qu’immédiatement après j’ai commencé à crier: «Non, non, non, je ne veux pas…» Je me
suis rendu compte que j’avais prononcé des paroles qui allaient bouleverser ma vie. Mais
je ne pouvais fuir le nom de Jésus: sa présence avait envahi la pièce et m’entourait de
toute part!
Dieu a alors mis dans mon esprit l’idée de téléphoner à Daniel, le pasteur. En titubant,
j’ai descendu l’escalier et me suis dirigé vers la pièce où se trouvait le téléphone, à
15 mètres de là. J’avançais tout en résistant, tout en criant: «Non, je ne veux pas, non,
non…» Mais une main posée contre mon dos me poussait malgré moi tout au long du
parcours vers l’appareil.
Il était deux heures du matin lorsque, tout tremblant, j’ai composé machinalement le
numéro: «Il faut absolument que je parle au pasteur!» ai-je dit à sa femme qui avait
décroché. Je n’ai donné aucun détail concernant la raison pour laquelle je leur demandais
à tous les deux de venir me voir au beau milieu de la nuit. Ils m’ont dit plus tard qu’ils
avaient pensé, en raison du ton de ma voix, que je faisais une dépression nerveuse et
que j’avais sans doute fait une bêtise.
J’étais assis au fond de la pièce lorsqu’ils sont arrivés. En voyant le pasteur, je lui ai sauté
dans les bras en sanglotant. J’étais incapable de m’arrêter. Je crois d’ailleurs que je n’ai
jamais autant pleuré de ma vie que ce jour-là! Alors qu’il me demandait ce qui se passait,
j’ai réussi à lui dire, entre deux sanglots: «Il faut que j’accepte Jésus.» Je lui ai répété
cela plusieurs fois. J’étais si ému que je n’avais plus de force dans les jambes. Daniel m’a
conduit vers une chaise et m’a fait asseoir. Je lui ai alors répété que je devais accepter
Jésus-Christ dans ma vie et je leur ai raconté ce qui venait de se passer. En entendant
cela, il a eu le visage illuminé par un sourire, et il lui a fallu de grands efforts pour ne pas
sauter dans mes bras. Je connaissais si bien le plan de Dieu pour le salut, l’œuvre qu’il a
accomplie pour sauver les hommes, et je voulais maintenant que cela devienne une
réalité dans ma vie!
Me connaissant, Daniel m’a posé la bonne question:
– Est-ce que tu crois que Jésus est le Fils de Dieu et Dieu véritable?
– Oui, je le crois, ai-je répondu. Je crois que Jésus est le Fils de Dieu!
– Jamel, crois-tu que Jésus-Christ est mort sur la croix pour le pardon de tes péchés, et
qu’il est ressuscité pour t’assurer la vie éternelle et le paradis?
– Oui, je le crois! Je crois qu’il est mort, et qu’il est mort pour mes péchés… Je crois au
Seigneur Jésus!
– A tous ceux qui l’ont reçu, a continué le pasteur, à ceux qui croient en son nom, il a
donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu20. Crois-tu qu’il veut faire de toi son enfant?
– Oh, oui, je le crois!
– Alors, bienvenue dans la famille de Dieu! Sache que Dieu t’a pardonné tes péchés parce
que tu as cru en Jésus, son Fils, le Sauveur et le Seigneur.
Nous nous sommes alors agenouillés dans la prière. Une paix insurpassable, que je
n’avais jusque-là jamais connue, a commencé à envahir mon cœur. La certitude que
Jésus est le Fils de Dieu, qu’il est la vérité, qu’il est vivant a envahi tout mon être. Pour la
première fois, je me suis adressé à Dieu comme à mon Père céleste, et cela grâce à
Jésus, le Seigneur qui a été crucifié et est ressuscité pour moi.
20 Voir Jean 1.12.
6. Jésus, le Seigneur de gloire
Peut-être êtes-vous surpris que je continue. Pourtant, il ne serait pas normal que mon
récit s’arrête ici. En effet, la rencontre cette nuit-là avec le Seigneur Jésus a marqué le
début d’une vie totalement nouvelle et la découverte d’un chemin nouveau, parcouru en
sa présence, éclairé de sa lumière. Avant d’évoquer cette vie nouvelle, je voudrais donner
des précisions sur celui qui l’a rendue possible, celui que j’ai découvert cette nuit-là au
bout de mon chemin. Je voudrais dire qui est Jésus pour le chrétien que je suis devenu
cette nuit-là et que je suis maintenant.
Divin Sauveur
Dès le lendemain, toutes les larmes que j’avais versées se sont transformées en un rire
et une joie impossibles à décrire. Et c’est bien normal, quand on sait par expérience que
Jésus est vivant! Il m’a fait l’immense grâce de venir me chercher dans mon ignorance,
dans mon tourment, dans mes ténèbres… Seul Jésus le Sauveur pouvait faire en sorte
que l’impensable devienne possible, que Dieu ouvre ses bras pour m’accueillir dans sa
grâce et son amour. Je le croyais simple prophète, il s’est révélé le Seigneur de ma vie.
Pendant trois ans, il n’a cessé de s’approcher et de se dévoiler à moi: d’homme dont je
connaissais seulement le nom, il s’est révélé, grâce à la Bible et au témoignage des
chrétiens,
homme
de
chair,
homme
attirant,
homme
merveilleux,
étonnant,
incomparable, unique, Fils de Dieu, mon Seigneur et mon Dieu! Ce qu’il a fait, ce qu’il a
dit, la façon dont il est mort, dont il a aimé, tout témoigne pour lui qu’il est bien Dieu…
Permettez-moi de prendre à mon compte une parole d’Augustin à propos des apôtres 21:
j’ai vu Jésus, et j’ai cru au Dieu qu’il révélait, au Dieu qu’il était. Voilà qui est, en réalité,
Jésus!
Jésus, la Parole de Dieu, «a révélé Dieu aux hommes et a présenté l’homme à Dieu»,
comme l’écrivait Irénée22; Jésus m’a révélé Dieu, et il m’a présenté à lui. Il est évident
que c’est lui qui distingue le christianisme de toutes les autres religions. C’est lui qui a fait
entrer les hommes dans le plan d’amour du Père. Plus encore, il leur a donné accès à la
vie même de Dieu. Tous ceux qui ont soif boivent et se désaltèrent; ils ont part à la vie
éternelle, qui n’est rien d’autre que la vie du FILS même, donnée pour nous, implantée en
nous, nous unissant à Dieu! Un tel horizon, de telles espérances ne sont tout simplement
pas concevables dans l’islam, dont les aspirations les plus profondes ne dépassent pas la
plus grossière des conceptions du paradis.
En réalité, Jésus n’est pas à comparer à Mohamed. Autant comparer l’océan à un
ruisseau, le soleil en plein midi à un lumignon! Jésus n’indique pas seulement le chemin
qui mène à Dieu, il est le chemin; il ne donne pas seulement les commandements, il
change les cœurs et procure la force nécessaire pour que l’homme puisse les accomplir.
Son message ne se limite pas à un appel à la soumission à Dieu, il est un engagement à
la vie dans une relation de Père à fils entre l’homme et son Dieu. Surtout, Jésus n’est pas
un simple prophète, il est le Fils même de Dieu, qui seul peut nous révéler le Père et
siège actuellement à sa droite, partageant avec lui la souveraineté du monde. Jésus n’est
pas seulement un homme, il est Dieu fait homme, Emmanuel23! Ce n’est pas associer à
Dieu un autre dieu que de proclamer Jésus Seigneur et Fils de Dieu. En tant que chrétien
je n’associe pas à Dieu une autre divinité, j’adore l’unique Dieu qui est Père, Fils et SaintEsprit, en accueillant humblement comme une vérité de foi ce que Dieu m’a révélé de luimême. A la suite du peuple d’Israël, je confesse: «Ecoute, Israël! L’Eternel, notre Dieu,
est le seul Eternel» (Deutéronome 6.4). Et avec les apôtres de Jésus Christ, j’attends «la
bienheureuse espérance, la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur
Jésus-Christ…» (Tite 2.13).
Une vie nouvelle
Vous constatez donc que je n’ai pas simplement changé de religion. Je me suis engagé
sur le chemin de la vie «dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est donné luimême pour moi» (Galates 2.20). Je n’ai pas troqué des règles religieuses pour d’autres ni
abandonné la loi islamique pour une autre loi. Je me suis détourné d’une religion pour
vivre une relation toute nouvelle avec Dieu par Jésus-Christ. Désormais, mon obéissance
au Seigneur, je la désire, je la cherche, non en vue d’obtenir quelque chose de lui en
retour, mais tout simplement pour lui plaire parce que j’ai déjà tout reçu de lui. Elle est
l’humble expression de ma reconnaissance pour son don ineffable. Pour le dire plus
précisément encore, mon obéissance est elle-même ce nouveau chemin qui conduit au
cœur même de Dieu d’où jaillissent, comme d’une source intarissable, la paix, la joie,
l’amour… bref, la vie divine! C’est d’ailleurs là le seul moyen pour une vie assurée de
l’amour de Dieu et en communion avec lui.
J’ai tout de suite compris, en lisant la Bible, que le projet de Dieu pour ceux qui croient
en son Fils n’est pas simplement de les sauver de la tyrannie du péché. En réalité, il veut
nous conduire jusqu’au cœur de son royaume où la joie, la paix, l’amour sont en
abondance. Là, il veut s’offrir à nous comme Père, afin que nous nous repaissions de lui
et qu’il nous désaltère, lui dont la vie, telle une eau jaillie d’une source éternelle, remplit
le cœur. Surtout, il veut nous transformer, par son Esprit qu’il a mis en nous, en nous
dépouillant de notre vie passée et de nos tendances au mal pour nous revêtir de sa vie
nouvelle. Il veut nous rendre semblables à son Fils Jésus-Christ et participants de sa
gloire. Voilà à quoi Dieu nous prépare en nous sauvant. Et c’est bien plus en adéquation
avec la nature divine, infiniment plus même, que le projet coranique pour ceux qui se
soumettent à Allah. Voilà pourquoi nous ne trouvons dans le Nouveau Testament aucune
loi politique ou religieuse mais une espérance sous forme d’impératif: «Soyez donc
parfaits comme votre Père céleste est parfait» (Matthieu 5.48).
Ainsi, c’est en compagnie de Jésus tel que la Bible le révèle et non tel que l’islam
l’imagine, ce Jésus qui fait sa demeure en moi par son Esprit et remplit ma vie de sa
sainte présence, que je me suis engagé sur cette nouvelle route où je ne suis pas seul. Il
a en effet voulu que tous ceux, hommes ou femmes, noirs ou blancs, qui le confessent
comme le Seigneur mort pour leurs péchés et ressuscité pour leur justification marchent
ensemble et constituent une nouvelle communauté, qui est l’Eglise. C’est pourquoi, tout
de suite après ma conversion, j’ai rejoint une église évangélique baptiste où j’ai pu
grandir dans la foi.
Un an après ma conversion, je me suis inscrit pour trois années d’études à l’institut de
théologie d’Algrange, qui forme des pasteurs. En effet, dès le lendemain de cette nuit
mémorable, il a été clair pour moi, de manière indiscutable, que le Seigneur voulait que
je me forme pour le servir dans le ministère. J’ai eu la certitude que Dieu m’avait sauvé
pour que je le serve. A l’institut, j’ai connu trois années de belles découvertes,
d’approfondissement de la foi et de croissance dans la connaissance du Seigneur Jésus.
Cela a aussi été trois années de recherche sur l’islam et le vrai visage de cette religion, et
cette recherche s’est prolongée jusqu’à aujourd’hui.
Après mes études de théologie, je me suis engagé dans la même église et j’ai épousé
Susan, la fille de Daniel et Betty. Depuis de nombreuses années, j’ai la joie immense
d’exercer le ministère pastoral dans la communauté que Dieu a utilisée pour me faire
connaître sa grâce, avec ma femme et nos trois enfants. Et c’est une vraie bénédiction
pour nous d’y côtoyer des hommes et des femmes désireux de mener une vie qui plaît à
Dieu, de marcher dans ses voies et de l’honorer.
Et ma famille?
«Et votre famille? Comment a-t-elle réagi?» vous demandez-vous peut-être. La première
difficulté que j’ai dû affronter juste après ma conversion, c’était en effet ma famille. Dans
mon enthousiasme, j’ai cru qu’il me serait facile, une fois en face d’eux, de leur dire la
vérité et même de les conduire vers le Seigneur Jésus. Mais les choses ne se sont pas
déroulées de cette façon. Un homme originaire du même endroit que moi au Maroc et
que j’avais rencontré à Paris, apprenant que je n’étais plus musulman, a dit à mes
parents, lors d’un voyage au pays, que j’étais devenu fou. D’autres informations stupides
et totalement erronées leur ont été communiquées et les ont mis dans un état
déplorable. Du coup, je n’ai pas pu leur dire quoi que ce soit, quand je suis retourné les
voir, un an après ma conversion. J’ai pu parler avec deux de mes frères, mais pas avec
mes parents.
C’est par téléphone, une fois de retour en France, que je leur ai annoncé la nouvelle. Elle
les a consternés, bien sûr. Ils ont été bien tourmentés, je l’ai su plus tard. Mais, par la
grâce de Dieu, au fil du temps, voyant que ma conversion n’a fait de moi ni un
dévergondé, ni un soûlard ni rien de ce qu’ils imaginaient mais, bien au contraire, que
mon amour pour eux est resté intact et que ma femme les aime d’un amour sincère, ils
ont fini par «accepter» ma démarche. Le Seigneur a ouvert le cœur de ma famille, et
deux de mes frères se sont convertis à leur tour! Les autres ont entendu et «vu»
l’Evangile, grâce à nos discussions et au film «Jésus», réalisé par Life Agapé, que nous
leur avons montré plusieurs fois.
Nous persévérons dans notre témoignage auprès d’eux. Notre prière est qu’ils se tournent
tous vers le vrai Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus.
21 «Ils ont vu l’homme (Jésus) et ils ont cru en Dieu.»
22 Contre les hérésies
23 Nom hébreu signifiant «Dieu avec nous»
7. Promesse!
«Heureux l’homme à qui le Seigneur ne tient pas compte de sa faute», dit la Parole de
Dieu (Psaume 32.2). Oui, il est heureux, celui qui se sait pardonné de Dieu dès
maintenant. Ce bonheur est donc pour moi qui ai reçu le pardon, par la grâce de Dieu
manifestée dans le Seigneur Jésus. Dorénavant, le ciel même m’est accessible, le cœur
de Dieu m’est ouvert, la promesse de la vie éternelle dans la présence du Seigneur m’est
acquise. Cette espérance, que dis-je? cette certitude glorieuse ainsi que la main de Dieu
posée sur ma vie me font avancer: Jésus-Christ, le Seigneur vivant, tout en marchant
avec moi et à mes côtés, sa lumière divine irradiant mon âme pour qu’elle lui ressemble,
m’attend au bout du chemin, les bras grand ouverts.
Ce bonheur, accompagné de toutes ces promesses, est pour vous aussi qui êtes en train
de me lire. Dieu vous l’offre, il vous invite à venir à Jésus-Christ son Fils et à croire qu’il
est mort pour vous, pour vous pardonner vos péchés. «Crois au Seigneur Jésus-Christ et
tu seras sauvé» (Actes 16.31): voilà la promesse de Dieu pour vous et pour tous! Faite
par Dieu, elle a été rendue possible car «Christ est mort pour nos péchés, conformément
aux Ecritures; il a été enseveli et il est ressuscité le troisième jour, conformément aux
Ecritures» (1 Corinthiens 15.3-4). Ces deux versets résument l’Evangile, qui est LA bonne
nouvelle de Jésus: nous avons péché contre Dieu et totalement échoué à le glorifier; il
est inévitable que notre péché soit suivi du châtiment prononcé par Dieu, le juste juge:
«Le salaire du péché, c’est la mort». Mais, parce qu’il nous aime, il ne pouvait se résoudre
à cette sentence. A cause de son grand amour et de sa bonté, il a envoyé Jésus, son Fils,
dans notre monde pour qu’il subisse à notre place le châtiment que nous méritions. Lui
qui n’a jamais commis de péché et ne devait donc pas mourir, il a subi la mort et a pris
sur lui le péché de tous ceux qui croient en lui.
Croyez en Jésus, le Fils de Dieu, pour le pardon de vos péchés, car «toute personne qui
croit en lui reçoit par son nom le pardon des péchés» (Actes 10.43). La confiance placée
en Jésus-Christ vous mettra sur un chemin nouveau, et vous vivrez une vie nouvelle. Lui
qui est mort pour vos péchés est ressuscité; il est vivant. Il vient faire sa demeure dans le
cœur de tous ceux qui croient en lui, et il le change en un cœur nouveau qui bat au
rythme de la vie de Dieu.
Annexes
A découvrir aussi
Aux éditions Ourania
Jésus et Mahomet, Mark Gabriel
Quelles différences et quels points communs entre les hommes les plus influents de tous les temps: Jésus, le fondateur du
christianisme, et Mahomet, le fondateur de l’islam? Elevé dans la religion musulmane, ancien professeur à l’Université AlAzhar (Le Caire, Egypte), Mark Gabriel nous invite en connaisseur à le suivre dans sa propre démarche et à comparer leur
vie et leur enseignement. – 320 pages
ISBN édition imprimée 978-2-940335-31-2
Un Dieu divisé?, Christopher Catherwood
On dit souvent que les fidèles des trois religions monothéistes (judaïsme, christianisme et islam) adorent le même Dieu:
celui d’Abraham, leur père dans la foi. L’auteur, historien, expose les points d’accord et les particularités de chacune d’elles,
mentionnant aussi les divers courants présents en leur sein. Il réfléchit à certaines questions que beaucoup se posent:
S’agit-il vraiment du même Dieu? N’y a-t-il réellement pas de différence entre les trois grands monothéismes? – 272 pages
ISBN édition imprimée 978-2-940335-36-7
Le Messie Jésus à la lumière des textes juifs, Risto Santala
Jésus, celui dont les chrétiens se disent les disciples, était juif. Ses tout premiers disciples étaient en majorité juifs. Les
chrétiens croient que leur Sauveur est le Messie attendu par le peuple juif. Risto Santala, pasteur luthérien finlandais, auteur
de plusieurs livres en hébreu moderne, s’attache à relever les points de contact ou de divergence entre le Jésus du
Nouveau Testament et les sources de la tradition juive. – 336 pages
ISBN édition imprimée 978-2-940335-14-5
Spiritualités à la carte?, Mark Mittelberg
Abus, scandales financiers, gourous... La spiritualité suscite la méfiance. On juge qu’elle peut être dangereuse. Faut-il, pour
autant, jeter le bébé avec l’eau du bain? Ne sommes-nous pas, de toute façon, des «êtres spirituels»? Devrions-nous
nous contenter des convictions que nous ont transmises nos parents ou de celles qui sont majoritaires dans notre
environnement? Mark Mittelberg propose un examen des différentes approches de la spiritualité et un certain nombre de
critères pour nous aider à faire un choix sage, qui soit le fruit d’une décision réfléchie, dans ce domaine. – 288 pages
ISBN édition imprimée 978-2-94033562-6
Table des matières
Préliminaires
Titre
Avertissement
Auteur et titre
Copyright
Dédicace
Préambule
Préface
Informations préliminaires
Introduction
Témoignage
1. En terre d’islam
2. Regard sur les chrétiens
3. Rencontre avec l’Evangile
4. Combat intérieur
5. Qui es-tu? Est-ce toi, Jésus?
6. Jésus, le Seigneur de gloire
7. Promesse!
Annexes
A découvrir aussi
Table des matières
Matthieu 7.8
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8
En effet, toute personne qui demande reçoit, celui qui cherche trouve et l’on ouvre à
celui qui frappe.
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Amos 5.4
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4
En effet, voici ce que dit l’Eternel à la communauté d’Israël: Cherchez-moi, et vous
vivrez!
[Retour au livre]
Philippiens 4.9
[Retour au livre]
9
Ce que vous avez appris, reçu et entendu de moi et ce que vous avez vu en moi,
mettez-le en pratique. Et le Dieu de la paix sera avec vous.
Reconnaissance et salutations
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Galates 1.14
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14
et j’étais plus avancé dans le judaïsme que beaucoup de ceux de mon âge parmi mon
peuple, car j’étais animé d’un zèle excessif pour les traditions de mes ancêtres.
[Retour au livre]
2 Timothée 3.16
[Retour au livre]
16
Toute l’Ecriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, pour convaincre, pour
corriger, pour instruire dans la justice,
[Retour au livre]
Jean 3.16
[Retour au livre]
16
En effet, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que
quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle.
[Retour au livre]
Romains 5.8
[Retour au livre]
8
Mais voici comment Dieu prouve son amour envers nous: alors que nous étions
encore des pécheurs, Christ est mort pour nous.
[Retour au livre]
Romains 10.9
[Retour au livre]
9
Si tu reconnais publiquement de ta bouche que Jésus est le Seigneur et si tu crois
dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité, tu seras sauvé.
[Retour au livre]
Genèse 2.16-17
[Retour au livre]
16
L’Eternel Dieu donna cet ordre à l’homme: «Tu pourras manger les fruits de tous les
17
arbres du jardin, mais tu ne mangeras pas le fruit de l’arbre de la connaissance du
bien et du mal, car le jour où tu en mangeras, tu mourras, c’est certain.»
[Retour au livre]
Romains 6.23
[Retour au livre]
23
En effet, le salaire du péché, c’est la mort, mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie
éternelle en Jésus-Christ notre Seigneur.
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Matthieu 5.43-44
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43
»Vous avez appris qu’il a été dit: ‘Tu aimeras ton prochain et tu détesteras ton
44
ennemi.’ Mais moi je vous dis: Aimez vos ennemis, [bénissez ceux qui vous
maudissent, faites du bien à ceux qui vous détestent] et priez pour ceux [qui vous
maltraitent et] qui vous persécutent,
[Retour au livre]
Jean 8.1-11
[Retour au livre]
Jésus et la femme adultère
1
2
Jésus se rendit au mont des Oliviers. Mais dès le matin il revint dans le temple et tout
3
le peuple s’approcha de lui. Il s’assit et se mit à les enseigner. Alors les spécialistes de
la loi et les pharisiens amenèrent une femme surprise en train de commettre un
4
adultère. Ils la placèrent au milieu de la foule et dirent à Jésus: «Maître, cette femme a
5
été surprise en flagrant délit d’adultère. Moïse, dans la loi, nous a ordonné de lapider
6
de telles femmes. Et toi, que dis-tu?» Ils disaient cela pour lui tendre un piège, afin de
pouvoir l’accuser. Mais Jésus se baissa et se mit à écrire avec le doigt sur le sol.
7
Comme ils continuaient à l’interroger, il se redressa et leur dit: «Que celui d’entre
8
vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle.» Puis il se baissa de
9
nouveau et se remit à écrire sur le sol. Quand ils entendirent cela, accusés par leur
conscience ils se retirèrent un à un, à commencer par les plus âgés et jusqu’aux
10
derniers; Jésus resta seul avec la femme qui était là au milieu. Alors il se redressa et,
ne voyant plus qu’elle, il lui dit: «Femme, où sont ceux qui t’accusaient? Personne ne
11
t’a donc condamnée?» Elle répondit: «Personne, Seigneur.» Jésus lui dit: «Moi non
plus, je ne te condamne pas; vas-y et désormais ne pèche plus.»]
Jésus lumière du monde
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Jean 8.11
[Retour au livre]
11
Elle répondit: «Personne, Seigneur.» Jésus lui dit: «Moi non plus, je ne te condamne
pas; vas-y et désormais ne pèche plus.»]
Jésus lumière du monde
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Luc 23.34
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34
[Jésus dit: «Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font.»] Ils se
partagèrent ses vêtements en tirant au sort.
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1 Pierre 2.23
[Retour au livre]
23
lui qui insulté ne rendait pas l’insulte, maltraité ne faisait pas de menaces mais s’en
remettait à celui qui juge justement,
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Actes 8.32
[Retour au livre]
32
Le passage de l’Ecriture qu’il lisait était celui-ci: Il a été conduit comme une brebis à
l’abattoir et, pareil à un agneau muet devant celui qui le tond, il n’ouvre pas la
bouche.
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Psaume 22
[Retour au livre]
Les souffrances et la gloire du Sauveur
1
2
Au chef de chœur, sur la mélodie de «Biche de l’aurore». Psaume de David. *Mon
Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné? Pourquoi t’éloignes-tu sans me
3
secourir, sans écouter mes plaintes? Mon Dieu, je crie le jour, et tu ne réponds pas, la
4
nuit, et je ne trouve pas de repos. Pourtant tu es le Saint, tu sièges au milieu des
5
louanges d’Israël. C’est en toi que nos ancêtres se confiaient: ils se confiaient en toi,
6
et tu les délivrais; ils criaient à toi, et ils étaient sauvés; ils se confiaient en toi, et ils
7
n’étaient pas déçus. Mais moi, je suis un ver et non un homme, la honte de
8
l’humanité, celui que le peuple méprise. Tous ceux qui me voient se moquent de moi,
9
ils ricanent, ils hochent la tête: *«Recommande ton sort à l’Eternel! L’Eternel le
10
sauvera, il le délivrera, puisqu’il l’aime!» Oui, tu m’as fait sortir du ventre de ma
11
mère, tu m’as mis en sécurité contre sa poitrine; dès ma conception j’ai été sous ta
12
garde, dès le ventre de ma mère tu as été mon Dieu. Ne t’éloigne pas de moi quand
13
la détresse est proche, quand personne ne vient à mon secours! De nombreux
14
taureaux sont autour de moi, des taureaux du Basan m’encerclent. Ils ouvrent leur
15
gueule contre moi, pareils au lion qui déchire et rugit. Mes forces s’en vont comme
l’eau qui s’écoule, et tous mes os se disloquent; mon cœur est comme de la cire, il se
16
liquéfie au fond de moi. Ma force se dessèche comme l’argile, et ma langue s’attache
17
à mon palais; tu me réduis à la poussière de la mort. Oui, des chiens m’environnent,
18
une bande de scélérats rôdent autour de moi; ils ont percé mes mains et mes pieds. Je
19
pourrais compter tous mes os; eux, ils observent, ils me regardent, *ils se partagent
20
mes vêtements, ils tirent au sort mon habit. Mais toi, Eternel, ne t’éloigne pas! Toi
21
qui es ma force, viens vite à mon secours! Protège mon âme contre l’épée, ma vie
22
contre le pouvoir des chiens! Sauve-moi de la gueule du lion et des cornes du
23
buffle! Tu m’as répondu! *J’annoncerai ton nom à mes frères, je te célébrerai au
24
milieu de l’assemblée. Vous qui craignez l’Eternel, louez-le! Vous tous, descendants
25
de Jacob, honorez-le! Tremblez devant lui, vous tous, descendants d’Israël! En effet,
il ne méprise pas, il ne repousse pas le malheureux dans sa misère et il ne lui cache
26
pas son visage, mais il l’écoute quand il crie à lui. Tu seras dans la grande assemblée
l’objet de mes louanges, j’accomplirai mes vœux en présence de ceux qui te craignent.
27
Les malheureux mangeront et seront rassasiés, ceux qui cherchent l’Eternel le
28
célébreront. Que votre cœur vive à perpétuité! Tous les peuples de la terre se
souviendront de l’Eternel et se tourneront vers lui, toutes les familles des nations se
29
prosterneront devant toi, car c’est à l’Eternel qu’appartient le règne: il domine sur les
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nations. Tous les grands de la terre mangeront et se prosterneront; devant lui
s’inclineront tous ceux qui retournent à la poussière, ceux qui ne peuvent pas
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conserver leur vie. Leur descendance le servira; on parlera du Seigneur à la
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génération future, et quand elle viendra, elle annoncera sa justice, elle annoncera son
œuvre au peuple à naître.
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Psaume 22.17-19
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Oui, des chiens m’environnent, une bande de scélérats rôdent autour de moi; ils ont
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percé mes mains et mes pieds. Je pourrais compter tous mes os; eux, ils observent,
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ils me regardent, *ils se partagent mes vêtements, ils tirent au sort mon habit.
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Esaïe 53
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*Qui a cru à notre prédication? A qui le bras de l’Eternel a-t-il été révélé? Il a grandi
devant lui comme une jeune plante, comme un rejeton qui sort d’une terre toute sèche.
Il n’avait ni beauté ni splendeur propre à attirer nos regards, et son aspect n’avait rien
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pour nous plaire. Méprisé et délaissé par les hommes, homme de douleur, habitué à
la souffrance, il était pareil à celui face auquel on détourne la tête: nous l’avons
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méprisé, nous n’avons fait aucun cas de lui. Pourtant, *ce sont nos souffrances qu’il
a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé. Et nous, nous l’avons considéré
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comme puni, frappé par Dieu et humilié. Mais lui, il était blessé à cause de nos
transgressions, brisé à cause de nos fautes: la punition qui nous donne la paix est
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tombée sur lui, et *c’est par ses blessures que nous sommes guéris. Nous étions tous
comme des brebis égarées: chacun suivait sa propre voie, et l’Eternel a fait retomber
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sur lui nos fautes à tous. Il a été maltraité, il s’est humilié et n’a pas ouvert la bouche.
*Pareil à un agneau qu’on mène à l’abattoir, à une brebis muette devant ceux qui la
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tondent, il n’a pas ouvert la bouche. Il a été enlevé sous la contrainte et sous le
jugement, et dans sa génération qui s’est inquiété de son sort? Qui s’est soucié de ce
qu’il était exclu de la terre des vivants, frappé à cause de la révolte de mon peuple?
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On a mis son tombeau parmi les méchants, sa tombe avec le riche, alors qu’il
*n’avait pas commis de violence et qu’il n’y avait pas eu de tromperie dans sa bouche.
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L’Eternel a voulu le briser par la souffrance. Si tu fais de sa vie un sacrifice de
culpabilité, il verra une descendance et vivra longtemps, et la volonté de l’Eternel sera
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accomplie par son intermédiaire. Après tant de trouble, il verra la lumière et sera
satisfait. Par sa connaissance, mon serviteur juste procurera la justice à beaucoup
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d’hommes; c’est lui qui portera leurs fautes. Voilà pourquoi je lui donnerai sa part
au milieu de beaucoup et il partagera le butin avec les puissants: parce qu’il s’est
dépouillé lui-même jusqu’à la mort et qu’il *a été compté parmi les criminels, parce
qu’il a porté le péché de beaucoup d’hommes et qu’il est intervenu en faveur des
coupables.
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Jean 10.18
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18
Personne ne me l’enlève, mais je la donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la
donner et j’ai le pouvoir de la reprendre. Tel est l’ordre que j’ai reçu de mon Père.»
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Actes 2.22-24
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22
»Israélites, écoutez ces paroles! Dieu vous a désigné Jésus de Nazareth en
accomplissant par lui, au milieu de vous, des miracles, des prodiges et des signes,
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comme vous le savez vous-mêmes. Cet homme vous a été livré suivant le projet
défini et la prescience de Dieu. [Vous l’avez arrêté,] vous l’avez fait mourir sur une
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croix par l’intermédiaire d’hommes impies. Mais Dieu a brisé les liens de la mort, il
l’a ressuscité, parce qu’il n’était pas possible qu’elle le retienne.
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Jean 3.16
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16
En effet, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que
quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle.
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Esaïe 64.5
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5
»Nous sommes tous devenus comme des objets impurs et toute notre justice est
pareille à un habit taché de sang, nous sommes tous aussi fanés qu’une feuille et nos
fautes nous emportent comme le vent.
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Jean 1.12
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12
Mais à tous ceux qui l’ont acceptée, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le
droit de devenir enfants de Dieu,
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Deutéronome 6.4
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4
»*Ecoute, Israël! L’Eternel, notre Dieu, est le seul Eternel.
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Tite 2.13
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13
en attendant notre bienheureuse espérance, la manifestation de la gloire de notre
grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ.
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Galates 2.20
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20
J’ai été crucifié avec Christ; ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi; et
ce que je vis maintenant dans mon corps, je le vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a
aimé et qui s’est donné lui-même pour moi.
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Matthieu 5.48
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48
Soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait.
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Psaume 32.2
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2
Heureux l’homme à qui l’Eternel ne tient pas compte de sa faute et dont l’esprit ne
connaît pas la ruse!
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Actes 16.31
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Paul et Silas ont répondu: «Crois au Seigneur Jésus[-Christ] et tu seras sauvé, toi et
ta famille.»
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1 Corinthiens 15.3-4
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3
Je vous ai transmis avant tout le message que j’avais moi aussi reçu: Christ est mort
4
pour nos péchés, conformément aux Ecritures; il a été enseveli et il est ressuscité le
troisième jour, conformément aux Ecritures.
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Actes 10.43
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43
Tous les prophètes rendent de lui le témoignage que toute personne qui croit en lui
reçoit par son nom le pardon des péchés.»
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