Courrier de l’environnement de l’INRA n° 63, août 2013 25 qui est le Grand hamster ou Hamster commun ? Cricetus cricetus (Linnaeus, 1758) Jean-Luc Pujol Seule espèce du genre Cricetus, le Hamster commun est un rongeur de taille moyenne. Il a un corps trapu (19,8-25,5 cm pour les mâles, 18,1-22,0 cm pour les femelles, avec un poids de 150 à 600 g) se prolongeant par une queue courte (3,1-5 cm) semée de poils courts. Ses oreilles sont petites et velues. Le Hamster commun possède des poches extensibles à l’intérieur des joues, appelées abajoues. Les pattes courtes et larges comptent cinq doigts chacune, bien que le doigt interne de la patte antérieure soit réduit et ne laisse aucune marque sur l’empreinte. Cette espèce se reconnaît facilement à son pelage bariolé : ventre noir, dos roux, avec des taches blanches sur le museau, les joues, la gorge et les flancs à l’arrière des pattes antérieures, extrémité des pattes blanche. Il compte seize dents1. Les mâles sont généralement plus gros que les femelles. Le Hamster commun peut être actif à toute heure du jour, mais son activité à l’extérieur du terrier est essentiellement crépusculaire ou nocturne. Rongeur fouisseur, il passe 95% de son temps dans son terrier. Il hiberne d’octobre à mars-avril et se réveille de temps à autre pour consommer ses réserves (il a stocké en moyenne 12 kg de provisions). Le sommeil débute lorsque la température de l’air atteint environ 10°C et que sa température corporelle descend à 4°C. Solitaire, il ne vit en couple que lors de la période d’accouplement. La reproduction a lieu d’avril à août. Polygame, le mâle visite les terriers de plusieurs femelles. La gestation dure vingt jours. La femelle met bas environ sept petits de 7 à 8 g qui s’émancipent au bout de trois semaines. La maturité sexuelle est atteinte vers 2-3 mois et il peut vivre 4 à 6 ans. Rongeur omnivore, ses réserves hivernales sont constituées de graines de céréales et de légumineuses mais c’est aussi un prédateur d’invertébrés et de petits vertébrés (campagnols, passereaux, lézards, couleuvres). 1. Codées I1/1, C0/0, P0/0, M3/3 dans les descriptions classiques. 26 Courrier de l’environnement de l’INRA n° 63, août 2013 Originaire des steppes, il se retrouve dans des prairies steppiques et paysage agricoles, surtout en Europe centrale (Roumanie, Bulgarie, Hongrie). Il évite les prairies très pâturées et les milieux humides. Il est présent du niveau de la mer jusqu’à une altitude maximale de 650 m. Le domaine vital du mâle contient en général des terriers de plusieurs femelles et sa superficie est comprise entre 700 et 1 000 m2. En revanche, les domaines vitaux des mâles entre eux et des femelles entre elles ne semblent pas se recouvrir. Le Hamster commun creuse deux sortes de terriers dont l’entrée est toujours oblique. Le terrier d’été est court et peu profond (moins d’un mètre), avec une seule chambre à provisions. Celui d’hiver est plus long et plus profond (jusqu’à 2 mètres sous la surface du sol) et comprend plusieurs chambres : une grande chambre centrale d’où partent plusieurs galeries de 5 à 8 cm de diamètre et un diverticule en cul-de-sac où le rongeur dépose ses excréments. Contexte d’évolution Le Grand hamster d’Alsace se nourrit essentiellement de végétaux (à plus de 80 %) et de petits animaux (insectes, escargots, batraciens, rongeurs...). Il consomme de nombreuses plantes sauvages telles que le Pied de Coq, la stellaire, la vipérine, diverses graminées... Il s’attaque aussi aux plantes cultivées (choux, maïs, blé, tabac, betteraves...). Les dégâts aux cultures peuvent devenir notables si des densités importantes surviennent. En Alsace l’espèce est inféodée aux milieux de culture, uniquement dans les zones à lœss non inondables. Il se complaît surtout dans les luzernières, mais celles-ci disparaissent peu à peu. Le Grand hamster d’Alsace se rencontre surtout dans les céréales d’hiver et très peu dans le maïs. Il fuit les zones humides. Il y a plusieurs causes à la disparition du Grand hamster d’Alsace. Lors des époques de pullulation il fut pourchassé – avec raison – de manière méthodique et avec des moyens chimiques puissants par les agriculteurs organisés en groupement de défense. Ces actions se sont poursuivies pendant plusieurs dizaines d’années alors qu’il n’y avait plus de réelle pullulation. Des destructions illégales, fruits d’actions individuelles attestées, se poursuivent encore de nos jours, avec de nouveaux produits chimiques. Elles sont très difficiles à évaluer. La mortalité routière n’est pas non plus négligeable. Les modifications de l’environnement détruisent aussi des milieux de vie propices aux hamsters : création de lotissements, création de zones d’aménagement concerté (ZAC), de nouveaux réseaux routiers, certains remembrements, l’enclavement de zones dû à des aménagements divers. Enfin, la modification du paysage agricole et des cultures n’est guère favorable au Grand hamster. On peut repérer trois évolutions très défavorables aux populations de ce rongeur : la régression de la culture de la luzerne et du trèfle (cultures très recherchées par le hamster), le développement du maïs et de la régression de certaines céréales, la régression de la surface toujours en herbe. En outre le Grand hamster fuyant l’eau, l’irrigation de surfaces de plus en plus importantes, notamment dans le Haut-Rhin, restreint les zones favorables. Pour en savoir plus Baumgart G., Hildwein G., 1998. Le Grand hamster (Cricetus cricetus). Situation actuelle et propositions d’actions à mener. Mémoire presenté aux pays membres de la Convention de Berne, 12 p., http://mapage.noos.fr/baumgart/rapport_baumgart_hildwein.pdf Crédit photographique Photo de G. Baumgart. Quéré J.P., Le Louarn H., 2011. Les rongeurs de France. Faunistique et biologie. Éditions Quae, Paris, 311 p. Savouré-Soubelet A., 2012. Le Grand hamster. Fiche pour l’inventaire national du patrimoine naturel. Muséum national d’Histoire naturelle, http://inpn. mnhn.fr/espece/cd_nom/61458/tab/fiche