INFORMATION AUTOUR DU D
É
PI
STAGE
DU CANCER DU SEIN
Les épines d’« Octobre Rose »
Service des études
UFC-Que Choisir
Septembre 2012
1 Service des études
Dépistage du cancer du sein
Septembre 2012
Synthèse
Pour les cisions qui concernent sa santé, le consommateur est souvent tributaire de la volonté de
son médecin. Participer ou non à un dépistage est un choix d’une autre nature, où le libre arbitre de
l’usager peut s’exprimer. C’est dans ce cadre que le droit à une information pertinente pour des choix
éclairés, conforté par l’article L.1111-4 du Code de la San publique
1
, prend tout son sens.
Dans ce cadre, à la veille du lancement de la vaste campagne de communication promouvant le
pistage du cancer du sein, baptie « Octobre Rose », l’UFC-Que Choisir a analyla qualité de
l’information donnée aux Françaises sur ce sujet, afin d’évaluer si elles étaient en mesure de choisir
librement et de manière éclairée de se faire ou non pister. Cette analyse s’are d’autant plus
cessaire qu’il existe une importante controverse scientifique autour de l’inrêt dupistage.
Depuis dix ans, le dépistage organisé du cancer du sein, généralisé pour les femmes de 50 à 74
ans, agite la communauté scientifique. D’une part, la réduction de la mortalité induite par le
dépistage serait moindre qu’initialement envisagée. D’autre part, ses inconvénients sont
désormais mieux connus, notamment le risque de traitement inutile. Au total, la balance
bénéfices/risques du dépistage par mammographie, considérée comme largement positive au
moment de son instauration, est aujourd’hui plus incertaine.
Au regard de cette controverse scientifique, qu’il n’appartient pas à l’UFC-Que Choisir de
trancher, la communication à l’œuvre pour inciter les Françaises à se faire dépister apparaît
incomplète et anachronique. L’information des femmes souffre en effet d’un triple biais :
- Une information partielle et obsolète, notamment sur le risque de sur-traitement ;
- Une communication vers les femmes qui prend la forme d’injonctions davantage que
d’information ;
- Des médecins mal informés, et intéressés financièrement à prescrire des
mammographies.
Les choses évoluent pourtant à l’étranger, la controverse a abouti à un changement de la
communication dans de nombreux pays (Canada, Danemark, Suède, etc.). Le Royaume-Uni va
même plus loin, à travers un réexamen des données scientifiques, qui sera la base d’une
réflexion sur l’opportunité de poursuivre ou non le dépistage par mammographie.
Sans prendre parti pour ou contre le dépistage, sujet scientifique, l’UFC-Que Choisir, partisane
d’une information pertinente pour des choix éclairés, demande au gouvernement, à l’instar des
exemples étrangers :
- De diligenter le réexamen des données scientifiques sur le dépistage du cancer du sein
par un collège d’experts indépendants ;
- Dans l’attente de la publication des conclusions du collège d’experts et tout en
maintenant la gratuité du dépistage, la campagne d’information actuelle doit être
objectivée, pour permettre à chaque femme d’évaluer les avantages du dépistage, mais
aussi les risques de sur-traitement qui pourraient en découler ;
- D’exclure l’indicateur « Dépistage du cancer du sein » dans la rémunération à la
performance des médecins ».
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« Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et
ce consentement peut être retiré à tout moment ».
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Dépistage du cancer du sein
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Contenu
Synthèse .................................................................................................................................... 1
I. Le dépistage organisé du cancer du sein controversé .................................................... 3
II. Une communication anachronique autour du dépistage du cancer du sein .............. 9
III. Médecins : Désinformation et prime au dépistage ..................................................... 17
Les demandes de l’UFC-Que Choisir ..................................................................................... 21
Annexe 1 : Le coût estimé du depistage organise du cancer du sein .................................. 23
Annexe 2 : Exemples de lettre d’invitation au dépistage du cancer du sein ........................ 24
Annexe 3 : Extraits du guide canadien d’aide à la prise de décision.................................... 26
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I. Le dépistage organisé du cancer du sein controversé
Le dépistage organisé du cancer du sein a été généralisé en France en 2004, sur la base
d’études scientifiques indiquant un rapport bénéfices-risques très favorable. Depuis, de nouveaux
travaux rendent difficile l’appréciation de l’intérêt du dépistage par mammographie. Les bénéfices
ont été surestimés par le passé, et les risques, hier peu étudiés, sont aujourd’hui mieux connus.
1. Depuis 2004, une généralisation du dépistage organisé du cancer du sein
aux femmes de 50 à 74 ans
Un dépistage à l’œuvre dans la plupart des pays développés
53 000 nouveaux cas de cancer touchent les femmes chaque année en France, ce qui en fait le
deuxième cancer le plus courant, après celui de la prostate. Il représente le tiers des nouveaux
cas de cancer chez la femme, et on estime à 11 500 le nombre de décès qui lui sont
annuellement imputables, soit près d’un décès féminin par cancer sur cinq.
La France, comme la plupart des pays développés, a fait le choix d’organiser un dépistage du
cancer du sein, pour les femmes en âge d’être concernées par ce cancer.
Figure 1 - Situation internationale du dépistage du cancer du sein
En 2010, ce dépistage a concerné en 2 360 000 femmes, soit 52 % de la population ciblée par le
programme : les femmes âgées de 50 à 74 ans.
Les caractéristiques du programme français de dépistage du cancer du sein
Les premières expérimentations d’un dépistage organisé du cancer du sein remontent, en France,
à 1989. Le programme national de dépistage a lui été instauré en 1994. Initialement limité à des
territoires pilotes, il a été progressivement étendu à une population plus large, jusqu’à sa
généralisation en 2004.
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30
40
50
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80
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Taux de dépistage du cancer du sein chez les femmes
de 50 à 69 ans
Comparaison internationale
UFC-Que Choisir - Données sources : OCDE, 2005-2010
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Le programme français de dépistage du cancer du sein présente les caractéristiques suivantes :
Une sollicitation de toutes les femmes de 50 à 74 ans, pour participer tous les deux
ans au dépistage du cancer du sein. Des courriers sont adressés à chaque femme
concernée, pour l’inviter à se rendre chez l’un des radiologues indiqués dans l’envoi. Des
campagnes de communication sont par ailleurs régulièrement organisées.
Une mammographie qui donne lieu à une double lecture. En effet, si le radiologue qui
procède à la mammographie estime le résultat « normal », un second radiologue
procédera à une nouvelle lecture des résultats, pour les confirmer.
Une prise en charge à 100 % par la solidarité nationale. Par ailleurs, les patientes
bénéficient du tiers-payant (dispense de l’avance des frais).
Un coût annuel de plus de 300 millions d’euros
Le dépistage organisé du cancer du sein représente un coût pour la collectivité, estimé par l’UFC-
Que Choisir à plus de 300 millions d’euros par an
2
.
Figure 2 - Estimation du coût du dépistage organisé du cancer du sein
2
Voir méthode de calcul en annexe.
Première
lecture
231 400 000
Seconde lecture
10 000 000
Biopsies
19 500 000
Coûts de
gestion
43 500 000
Coût du dépistage organisé du cancer du sein
en 2010
Coût total du dépistage : 304,4 millions d'euros
Estimation UFC-Que Choisir
1 / 29 100%