SEQUENCE - Pierre Reymond

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SEQUENCE : Cyrano et le jeu théatral
Problématique : Cyrano, un personnage de théâtre en représentation
Objectif
-
Connaissances : le comique
Mise en abîme
Le langage imagé
Bac : approfondissement du Commentaire et de l’écrit d’invention
Textes
Texte 1
-
Cyrano de Bergerac, La tirade des nez v.311- 366 -> le panache / le théâtre dans le… théâtre
Texte complémentaire : Savinien de Bergerac, Les états et Empire de la Lune -> La réalité
historique
-
La représentation : Rappeneau et Depardieu
o
BAC : Paragraphe de réflexion : rapporte entre le personnage historique / réel et le
personnage de fiction de Rostand
Texte 2
-
Cyrano de Bergerac, Acte II, scène 6 -> le quiproquo…
-
Texte complémentaire :
Victor Hugo - La Préface de Cromwell
Boileau - Art poétique - Texte
-
Document complémentaire : Représentation scénique de Rappeneau
BAC : Ecrit d’invention : Boileau et Hugo, à la table d’un bistroquet se querellent sur cette satanée
question des règles…
Texte 3
-
Cyrano de Bergerac, La tirade des non merci v.964- 1015 -> le panache / le refus de
« jouer » assez paradoxal !!!
Texte 4
-
Cyrano de Bergerac, La scène du balcon v.1440- 1480 -> le discours de la passion / le théâtre
dans le théâtre
Le Personnage de Bergerac
Le réel : Savinien de Cyrano de Bergerac
Savinien de Cyrano, dit de Bergerac, est un romancier, dramaturge et épistolier français, né à Paris en
1619.
Auteur d'une œuvre audacieuse et novatrice, qui l'inscrit dans le courant libertin de la première moitié
du XVIIe siècle, il est surtout connu aujourd'hui pour avoir inspiré à Edmond Rostand son plus célèbre
drame, Cyrano de Bergerac, qui, tout en reprenant des éléments de la biographie du poète, s’en écarte
par de nombreux aspects.
Biographie
La brève existence de Cyrano est peu documentée. Certains chapitres, et non des moindres, n’en sont
connus que par la préface de l’Histoire comique par Monsieur de Cyrano Bergerac, contenant les Estats
et empires de la Lune, publiée vingt mois après sa mortC 1. Sans Henry Le Bret, qui en rédigea les
quelques pages de nature biographique, alors qu’il venait d’entrer dans les ordres, nous ne saurions
rien de l’enfance campagnarde du libertin, de son engagement militaire, des blessures qu’il lui
occasionna, de ses prouesses de bretteur, des circonstances de sa mort, ni de sa prétendue conversion
finale.
L'homosexualité de Cyrano, dont l'hypothèse a été formulée pour la première fois explicitement par
Jacques PrévotNote 25, est aujourd'hui admise par tous les biographes et historiens.
En 1639, s'il faut en croire Le Bret, qui est l’unique témoin de ces événements, Cyrano s'engage dans
une compagnie du régiment des Gardes du roi (ou Régiment des Gardes françaises)2 :
« …j'ose dire que je l'arrêtai, parce qu'ayant achevé mes études, et mon père voulant que je servisse
dans les gardes, je l'obligeai d'entrer avec moi dans la compagnie de Monsieur de Carbon Castel Jaloux.
Les duels, qui semblaient en ce temps-là l'unique et plus prompt moyen de se faire connaître, le
rendirent en si peu de jours si fameux, que les Gascons, qui composaient presque seuls cette
compagnie, le considéraient comme le démon de la bravoure, et en comptaient autant de combats
que de jours qu'il y était entré. Tout cela cependant ne le détournait point de ses études, et je le vis un
jour, dans un corps de garde, travailler à une élégie avec aussi peu de distraction que s'il eût été dans
un cabinet fort éloigné du bruit. Il alla quelque temps après au siège de Mouzon3,Note 28, où il reçut
un coup de mousquet au travers du corps, et depuis un coup d'épée dans la gorge au siège d'Arras en
1640. »
L’élégie (en grec ancien ἐλεγεία / elegeía, signifiant « chant de mort ») fut une forme de poème dans l'Antiquité, avant de
devenir un genre poétique à partir de la Renaissance. Dans l’Antiquité, était appelé « élégie » tout poème alternant
hexamètres et pentamètres en distiques : ce sont les vers élégiaque
Le bretteur
Plus loin dans la préface, énumérant les amis de Cyrano (dont aucun n'est gascon…), Le Bret écrit :
« …. Je t'en particulariserais quelques combats qui n'étaient point des duels, comme fut celui où, de
cent hommes attroupés pour insulter en plein jour à un de ses amis sur le fossé de la porte de Nesle,
deux par leur mort et sept autres par de grandes blessures payèrent la peine de leur mauvais
dessein… »
« Monsieur de Bourgogne, maître de camp du régiment d’infanterie de Monseigneur le Prince de Conti,
puisqu’il vit le combat surhumain dont j’ai parlé et que le témoignage qu’il en rendit, avec le nom
d’intrépide qu’il lui en donna toujours depuis, ne permet pas qu’il en reste l’ombre du moindre doute,
au moins à ceux qui ont connu Monsieur de Bourgogne…. »
La cousine Madeleine
Au nombre des victimes du siège d'Arras, figure Christophe de Champagne, baron de Neuvillette,
capitaine d'une compagnie de chevau-légers, mort le 24 juin 16407,8,Note 39. Le 20 février 1635, il
avait épousé Madeleine Robineau (1609[Lien à corriger]-1657), cousine de Savinien du côté maternelA
7,A 8. Aucun document n'atteste une quelconque relation entre les deux hommes au cours du siège :
le baron était cavalier, Cyrano fantassinNote 40. Se sont-ils connus, dans les années précédentes, à
Paris, où la baronne menait grand train dans le monde ? Rien ne le suggère.
Devenue veuve, Mme de Neuvillette renonce à la vie mondaine et opère une radicale conversion, sous
la direction du baron Gaston de Renty, « supérieur » de la Compagnie du Saint-Sacrement
Cyrano de Bergerac (Rostand)
Auteur Edmond Rostand
Genre Comédie dramatique
Nb. d'actes
Cinq actes en vers
Date d'écriture 1897
Lieu de création en français
28 décembre 1897
Cyrano de Bergerac est l'une des pièces les plus populaires du théâtre français, et la plus célèbre de
son auteur, Edmond Rostand. Librement inspirée de la vie et de l'œuvre de l'écrivain libertin Savinien
de Cyrano de Bergerac (1619-1655), elle est représentée pour la première fois le 28 décembre 1897,
au Théâtre de la Porte-Saint-Martin, à Paris.
La pièce est difficile à jouer : elle fait intervenir un grand nombre de personnages, elle est longue, le
rôle titre est particulièrement imposant (plus de 1600 vers), les décors sont très différents d'un acte à
l'autre et elle comporte une scène de bataille. Le succès en était si peu assuré qu'Edmond Rostand luimême, redoutant un échec, se confondit en excuses auprès de l'acteur Coquelin, le jour de la générale,
pour l'avoir « entraîné dans une pareille aventure ». La suite des évènements démentit les craintes de
l'auteur : ce fut un triomphe ; non seulement la représentation fut saluée par vingt minutes
ininterrompues d'applaudissements, mais le ministre des Finances Georges Cochery vint dans la loge
épingler sa propre Légion d'honneur sur la poitrine de l'auteur en expliquant : « Je me permets de
prendre un peu d'avance. » Rostand reçut en effet officiellement la décoration quelques jours plus
tard, le 1er janvier 1898.
Le succès fut considérable, en France comme à l'étranger. Le personnage de Cyrano est devenu, dans
la littérature française, un archétype humain au même titre qu’Hamlet ou Don Quichotte (auquel il
tire son chapeau dans la pièce). Deux statues du personnage ont été érigées sur des places de Bergerac,
en Dordogne, quoiqu'il n'existe aucun lien entre cette ville et le véritable Cyrano
La pièce
Présentation
Cyrano de Bergerac est une pièce en 5 actes écrite presque entièrement en alexandrins. Edmond
Rostand la qualifie de comédie héroïque mais les analystes y reconnaissent de nombreuses influences
dont la principale est le théâtre romantique ou néo-romantique.
De la comédie héroïque, la pièce possède son sens de l'épique et la description d'un héros dont la vie
s'organise autour de l'amour et de l'honneur. Maurice Rostand y voit une œuvre qui exalte les valeurs
de l'héroïsme et qui donne à tous le « courage d'être des héros ».
Du romantisme, elle possède les caractéristiques du mélange des genres et des registres : on y côtoie
la farce et ses coups de pied26, les scènes d'amour et le pathétique. La langue alterne entre le registre
noble et le registre familier. L'alexandrin se développe sous sa forme classique dans la Tirade du nez
ou de celle des Non merci ou dans des répliques où le vers se désintègre. On passe brutalement de la
scène intimiste (duo de l'acte II scène 6, trio de l'acte III scène 7, le couvent ...) aux grandes réunions
collectives (l'hôtel de Bourgogne, la rôtisserie de Ragueneau, le siège d'Arras).
De la tragédie classique, la pièce conserve son découpage en 5 actes et un style qui rappelle parfois
Corneille mais elle s'en démarque par son refus des règles classiques : il n'existe ni unité de lieu, ni
unité de temps. L'unité d'action est toutefois respectée. Quant à la bienséance, elle est bafouée par
la présentation d'un duel et la mort de Cyrano sur scène
Personnages
Cyrano
La pièce est centrée sur Cyrano. Sur les 2 600 vers qui la composent, plus de la moitié sont prononcés
par lui35. D'après Maurice Rostand, la personnalité de Constant Coquelin, à l'aise dans les longues
tirades et moins à l'aise dans les scènes d'amour, a grandement influé sur le développement du
personnage36. C'est lui aussi qui est l'origine de l'habitude de donner ce rôle à des acteurs d'âge mûr,
alors qu'en 1640, le Cyrano historique n'avait que 21 ans.
Cette personnalité comporte de multiples facettes qui en font un personnage très complexe.
Commedia dell'arte
Cyrano, avec son chapeau, son masque, sa cape et son épée, ses rodomontades, a tous les ingrédients
qui peuvent faire de lui un héros de la Commedia dell'arte. Magali Wiéner-Chevalier37 signale que
Cyrano, dans la scène du duel, se réfère au personnage de Scaramouche. Elle y voit des analogies avec
Scapin ou le Capitan. Nombreux sont les critiques qui évoquent, à son sujet, ce personnage de
Matamore38,39 mais qui démontrent par ailleurs qu'il n'est pas que cela. Dans son livre, Cyrano à la
recherche du nez perdu, Francis Huster s'interroge sur les moyens à mettre en œuvre pour ne pas
limiter le personnage à cette seule facette40.
La commedia dell'arte est un genre de théâtre populaire italien où des acteurs masqués improvisent des
comédies marquées par la naïveté, la ruse et l'ingéniosité. Ce genre est apparu avec les premières troupes de
comédie avec masques, en 1528.
Héros romantique
Avec son mélange de pathétique et de sublime, Cyrano est considéré comme l'archétype du héros
romantique tel que le décrit Victor Hugo dans la préface de Cromwell. Grotesque par sa disgrâce
physique qui le range dans la catégorie des Quasimodo, il est sublime par son sens du dépassement,
sa bravoure et son sens du sacrifice. Cyrano est l'homme des contrastes : il allie le courage physique
(combat porte de Nesle, siège d'Arras) à la timidité (rendez-vous avec Roxane) . Malgré ses victoires
au combat, il est poursuivi par l'échec : c'est Christian qui récolte le baiser, fruit de la conquête de
Cyrano, c'est Molière qui récolte la gloire avec la réplique « Mais qu'allait-il faire dans cette galère ? ».
Edmond Rostand lui fait dire au sujet de son épitaphe : « Cyrano de Bergerac, qui fut tout et qui ne fut
rien ». Pour Raymond Trousson15, c'est toute la pièce qui est ainsi traversée par le thème de l'échec,
et Jules Harazti note la sympathie qu'éprouve Rostand pour ces « ratés de l'amour et de la gloire »49.
Cyrano, c'est aussi un assortiment de fanfaronnade et de pudeur sur ses souffrances50, alternant
l'énergie et la mélancolie51.
Idéalisme
Le personnage est aussi attachant par sa soif d'idéal et son refus des compromis52. Pour Susan Lloyd,
chez le personnage d'Edmond Rostand, la poursuite d'un idéal est plus importante que son
achèvement et la loyauté de Cyrano envers Christian serait autant due à son sens de l'honneur qu'à la
préférence d'un amour spirituel à un amour charnel : inconsciemment, Cyrano préfèrerait l'idéal à la
réalité53. Trousson15 parle d'un personnage généreux, idéaliste, en lutte contre le vulgaire et rappelle
la tirade « J'ai décidé d'être admirable en tout, pour tout ! »54. Il faut aussi citer Constant Coquelin, se
proposant à Rostand pour devenir son « Colporteur d'idéal ».
Le panache
Lors de la dernière scène, le rideau tombe sur ce dernier mot prononcé par Cyrano, « mon panache ».
Ce mot est très fortement associé au personnage. Magali Wiéner-Chevalier55 le définit comme la
capacité à être « vif, spirituel, poète même dans l'adversité ». Edmond Rostand lui-même développe
ce thème lors de son discours d'entrée à l'Académie française et le décrit ainsi :
« Le panache, n'est pas la grandeur mais quelque chose qui s'ajoute à la grandeur, et qui bouge
au-dessus d'elle. C'est quelque chose de voltigeant, d'excessif - et d'un peu frisé [...], le panache c'est
l'esprit de bravoure. [...] Plaisanter en face du danger c'est la suprême politesse, un délicat refus de se
prendre au tragique ; le panache est alors la pudeur de l'héroïsme, comme un sourire par lequel on
s'excuse d'être sublime[...] »
Et c'est toujours Edmond Rostand qui conseille aux élèves du collège Stanislas, lors d'une
représentation de Cyrano, d'avoir du panache.
Le panache n'est pas sans rappeler la figure d'Henri IV demandant lors des combats que l'on se rallie à
son panache blanc, figure évoquée d'ailleurs par Cyrano reprochant à de Guiche sa lâcheté58.
Le verbe
Cyrano prononce environ 1 600 vers dans la pièce. Tour à tour chroniqueur (la gazette), pasticheur (la
ballade du duel), séducteur (scène du balcon), captiveur (le voyage sur la lune), envoûteur (la scène du
fifre), Cyrano est, selon Patrick Besnier, un « homme-parole »60, qui transforme tout en mots et qui a
besoin d'un auditoire pour exister (Roxane ou de Guiche). C. Flicker signale l'importance de l'escrime
verbale dans toute la pièce : les duels se font autant par les mots que par l'épée. Mais elle signale aussi
le drame de Cyrano : son incapacité à livrer son âme autrement que par écrit. Elle parle de « tragédie
de la parole impossible »61.
Héros faustien
Le pacte passé entre Christian et Cyrano qui les lie jusqu'à leur mort évoque Faust62. À Christian,
Cyrano offre son esprit, tandis que Christian donne sa beauté aux paroles de Cyrano. Tous les deux y
perdent leur âme. Le pacte ne peut être rompu : Christian s'y essaie, en vain au début de l'acte III.
Même la disparition de Christian à la fin de l'acte IV ne libère pas Cyrano et il faut attendre la mort du
héros pour que les deux personnages soient réunis dans l'amour de Roxane.
Faust
Faust est le héros d'un conte populaire allemand ayant fait succès au XVIe siècle, à l'origine de nombreuses
réinterprétations.
Cette histoire relate le destin d'un savant, Faust, déçu par l'aporie à laquelle le condamne son art, contractant
un pacte avec le Diable, Lucifer, qui met à son service un de ses Esprits - dit Méphistophélès, lequel lui procure
un serviteur humain, l'étudiant Wagner, qui devient son famulus - et lui offre une seconde vie, tournée cette
fois vers les plaisirs sensibles, au prix de son âme. Dans la plupart des versions populaires du récit fantastique,
l’âme de Faust est damnée après sa mort, qui suit une longue période (24 ans précisent certains textes) durant
laquelle le Diable a exaucé la plupart de ses vœux
Homosexualité
Le fait que le personnage historique, Savinien de Cyrano de Bergerac, ait été homosexuel63, et les
rapports ambigus qu'entretiennent les trois personnages, permettent d'imaginer que le personnage
de Cyrano éprouve des sentiments amoureux pour Christian. Jean-François Gautier signale que l'on
trouve de tout dans les interprétations dont celle de la psychanalyse de l'homosexualité65.
Texte complémentaire
L’autre monde (incipit, 1657), S. de Cyrano de Bergerac,
L’Autre Monde ou les États et Empires de la Lune
1. Quelles hypothèses les amis du narrateur proposent-ils pour présenter la Lune ? En quoi sontelles burlesques ?
une lucarne du ciel par où l’on entrevoyait la gloire des bienheureux (l. 7-8),
la platine où Diane dresse les rabats d’Apollon (l. 9-10),
le soleil lui-même, qui s’étant au soir dépouillé de ses rayons regardait par un trou ce qu’on faisait au
monde quand il n’y était plus (l. 11-13)
= burlesque par le décalage entre le sujet astronomique sérieux, et la manière légère, voire grossière,
d’en parler en réduisant la Lune à une simple lucarne (l. 7), en ravalant les figures mythologiques à des
personnages triviaux :
-
Diane nettoie les vêtements de son frère,
…et le soleil est personnifié en voyeuriste.
Irrévérence libertine dans le traitement de la dimension sacrée et divine.
2. Comment le narrateur présente-t-il la lune ? Quelle figure utilise-t-il pour la définir ?
a. Chiasme
la lune est un monde comme celui-ci,
A/B
à qui le nôtre sert de lune (l. 17-18).
B/A
b. Quelle conception de l’homme cette hypothèse remet-elle en question ?
Remise en question de l’hypothèse anthropocentriste ; l’homme n’est pas le centre de l’univers
puisque la lune serait elle aussi un monde habité + image baroque du monde inversé.
3. En quoi le discours des amis et celui du narrateur s’opposent-ils ? Quel est le rôle des noms cités
par le narrateur
Amis = discours indirect et fantaisiste
Narrateur = discours direct et sérieux le narrateur se démarque en proposant des hypothèses plus
scientifiques avec le recours de noms de scientifiques reconnus :
Pythagore et Copernic défendent l’héliocentrisme (une théorie physique qui place le Soleil au centre
de l'Univers),
Épicure, Démocrite et Képler, l’idée selon laquelle il existerait d’autres mondes habités
Arguments d’autorité.
4. Comment interpréter le rire des amis ?
Rire d’incompréhension de ceux qui restent figés dans la pensée traditionnelle et refusent de
remettre en question le fondement de la pensée chrétienne selon laquelle l’homme est au centre
du monde.
Texte 1 : Cyrano de Bergerac, La tirade des nez v.311- 366
Questions de préparation :
-
Résumer en une ou deux phrase chaque scène de l’acte I jusqu’à la scène 4
Vers 311 à 364 : tirez de la tirade un portrait de Cyrano.
En quoi cette tirade possède-t-elle une double énonciation ?
Montrer que Cyrano se met en scène dans cette scène
Introduction
Acte I (« Une représentation à l’Hôtel de Bourgogne ») = acte d’exposition permettant de
présenter les pers, l’époque, les enjeux de l’intrigue…
-
sc 1 : mise en place de l’époque, du milieu, du monde du théâtre
sc 2 : apparition de Christian et présentation de Cyrano par ses amis
sc 3 : apparition parmi les marquis de de Guiche et Valvert, puis entrée en scè de Montfleury
sc 4 : apparition de Cyrano = scène centrale de cet acte qui permet au spectateur de découvrir
le pers principal et au héros de se mettre en scè avec panache.
4
moments dans cette scène :
- victoire de Cyr qui chasse Montfleury /
- altercation avec un bourgeois / un éloge de son nez énorme (se termine de façon triviale : coup de
botte) ;
- opposition avec le vicomte de Valvert se déroule en 2 tps : tirade des nez pour démontrer répartie
- puis duel (ils croisent le fer) qui sera poétique en même tps (ballade qui correspond aux étapes du
duel)
victoire de Cyrano qui blesse son adversaire
Remarque : progression dans ces oppositions : de l’acteur (statut social peu reconnu ds société du
XVIIe), au bourgeois, puis au noble (correspondant à l’état social de Cyr v.96) : panache de Cyr va
chercher plusieurs cibles dans cette scène et gravir les échelons de la société
Problématique : étudier comment cette tirade permet de mettre en avant le personnage de Cyrano.
I. Un jeu théâtral
1) une exposition en marche
a) un portrait en action
- exposition mise en place par les scènes 1 à 3 se poursuit en qq sorte dans cette tirade : le portrait de
Cyr fait par ses amis dans la scè 2 (v.101 - 119) est confirmé et développé « en situation »
« nez » v.315 placé à la rime : sujet de cette tirade (cause des railleries). Confirme description physique
qui avait été évoquée et ce que le spectateur peut remarquer des traits de son visage.
- « rimeur », « musicien » v.101 : c’est le cas ici. Versification travaillée de la tirade ; adjectifs pr les
tons vers les catégories littéraires et esthétiques : « emphatique » v.27, « dramatique » v.29, « lyrique »
v.31.
- « bretteur » v.101 = hô qui aime se battre à l’épée (ce sera le cas ; joute vbal pr le moment).
- « physicien » v.101 : « atome » v.46. Ts ces éléments complètent dc l’exposition.
- on découvre également un ê cultivé : réf à « Aristophane » v.22 (auteur grec de comédies du Ve siècle
avant Jésus-Christ), à la tragédie de Théophile de Viau, Pyrame et Thisbé (« Pyrame » v.40).
- « invention » v.48, « verve » v.53 : pers qui fait preuve d’esprit, de répartie.
Bcp d’éléments du portrait psychologique de Cyrano sont présentés ici.
b) la double énonciation
Tirade de Cyr prend place ds un moment particulier et peut avoir plusieurs destinataires :
- vicomte de Valvert : Tirade des nez répond à sa plate répartie. S’adresse à lui : « jeune
homme » v.1 (maniere un peu cavalière, pas de mention du titre), « mon cher » v.43 (ironie).
- Roxane qui suit cette joute depuis sa loge (sc 2). Cyrano de se met en valeur devant
celle qu’il aime, de lui montrer qu’il possède du panache, de l’esprit : qualités qui compense sa laideur.
- autres spectateurs présents sur scène, venus pr voir La Clorise (évoqués dans didascalie
au début de scène 4).
L’enjeu de cette tirade est de transformer un objet grotesque (son nez énorme) en image
sublime pour donner une image positive de lui-même.
Transition : Par cette tirade aux multiples destinataires qui permet de poursuivre le portrait du
locuteur, Cyr se met en scè : il devient acteur.
2) le théâtre dans le théâtre
a) un acteur à l’Hôtel de Bourgogne
- Cyr, après avoir chassé de scè Montfleury, et interrompu ainsi la représentation de La
Clorise, prend en qq sorte la place de cet acteur pr se mettre lui-même en scène.
- Cyrano est acteur : il monopolise la parole (tirade de plus de 50 vers). Il se lance ds une
improvisation puisqu’il va faire une variation sur un thème, celui de son « nez » v.4. Il va tenir différents
rôles, comme l’indique le gérondif « en variant »
v.315 « en variant le ton (diérèse).
- cette improvisation est un morceau de bravoure : tirade particulièrement bien écrite
qui sera récitée avec brio par l’acteur.
b) metteur en scène
- Cyr est également metteur en scène : indique manière de jouer les répliques des
différents interlocuteurs imaginaires qui s’adressent à Cyrano pr parler de son nez : « moi monsieur »
v.316, 323, 345, 351, « l’ami » v.337.
- présence de didascalies internes : 20 différentes pour indiquer sur quel ton doit être
prononcée la réplique (agressif / amical / descriptif / curieux/…). Annonce le ton puis joue le perso
pour illustrer.
Transition : à la fois auteur, acteur et metteur en scène, Cyr n’en oublie pas pr autant son altercation
avec Valvert : dominant le terrain, ses propos prennent les caractéristiques d’un duel verbal.
3) un duel verbal
- cette tirade se veut une réponse quasiment complète au manque de répartie de
Valvert -> antithèse vicomte (un seul vers, répétitions) – abondance et richesse des possibilités de
Cyrano
« un peu court » v.1 répond « bien des choses » v.2 (pluriel)
- à la tirade des nez proprement dite succède l’altercation plus directe avec Valvert :
« voilà » v.355 indique le changement. Présence de « VOUS » v.355, 356, … désignant l’interlocuteur
réel de Cyr.
- à l’accusation indirecte de stupidité illustrée par la tirade des nez succède l’accusation
directe. Chp lexical de l’esprit : « lettres », « esprit » v.356, 357, 358, « invention » v.360,
« plaisanteries » v.362, « verve » v.365.
- ces termes ne s’appliquent pas à Valvert, ce que montre le chiasme « lettres » /
« esprit » v.44-46 : utilisation de la négation (« vous n’en eûtes jamaiss » v.358, renforcée par l’adv
« jamais », négation restrictive « vous n’avez que » v.359 indiquant le manque d’esprit de Valvert).
- syllepse : fig de style consistant à employer un même mot ds 2 sens différents, le plus
svt ds un sens concret et figuré. C’est le cas ici avec « lettres » v.46 : employé d’ab ds sens figuré pr
désigner la culture puis ds un sens concret (« les trois qui forment le mot » v.358 - 359) évoquant les
lettres de l’alphabet.
- insultes : « ô le plus lamentable des êtres » v.357 (superlatif placé à la césure,
interjection semblant évoquer le mépris de Cyr), « sot » v.359 (mis en relief par les 2 pts qui renforcent
le fait que Cyr s’adresse à Valvert, placé à la rime, pt d’exclamation).
Valvert étant l’homme que de Guiche veut faire épouser à Roxane, la victoire de Cyrano est
d’autant plus appréciable…
le jeu théâtral qui se déploie ds cette tirade, à la fois mise en scène et duel, est l’occasion d’un morceau
de bravoure qui permet à Cyrano de s’illustrer. Conformément au caractère du perso, cette scène est
propice à l’utilisation d’un registre comique qui permet d’utiliser ttes les facettes de la verve de Cyr.
II. Une tirade comique
1) une tirade structurée
a) sur le plan de l’énonciation
- Cyr fait la demande et la réponse en même tps (annonce le ton employé et l’illustre
par les répliques adéquates). Sorte de parenthèse où le locuteur sble jouer avec lui-même : il exclut
son interlocuteur, lui confisque la parole, se récrée un interlocuteur plus spirituel capable de lui
donner la réplique.
- effet de dialogue, comme si qq’1 d’autre avait la parole (deux points après chaque
annonce du ton et guillemets encadrant les répliques).
b) sur le plan de la syntaxe
- 20 unités en 38 vers associant un ton et une remarque. Répétition très rythmique d’une
structure grammaticale : un adj annonce le ton (sauf pr la dernière variation introduite par un part
présent et occupant presque la totalité du v.40 : « parodiant Pyrame en un sanglot »). Répétition à la
fois (ds le thème du nez et ds la structure) et variété ds le choix des adj.
- variation ds l’alternance des modes : exclamatif (« admiratif » v.30, « emphatique »
v.27, « dramatique » v.29), interrogatif (« curieux » v.10, « lyrique » v.31, « naïf » v.32), impératif
(« prévenant » v.18, « tendre » v.20, « militaire » v.37).
- les 20 tons présentés sont très variés : ils qualifient des registres (« lyrique » v.31,
allusion au registre tragique avec « Pyrame » v.40), des registres de langue (« campagnard » v.35),
font allusion à des comportements (« agressif » v.4, « respectueux » v.33, « prévenant » v.18)…
c) sur le plan de la métrique
- rimes structurent ce passage : 2 mouvements. 1er mvt jusqu’au ton « pédant » v.22 :
les rimes suivies sont à cheval sur des énoncés différents (constitués en distiques la plupart du tps,
sauf pr « gracieux », « truculent » et « pédant »). Rôle structurant de la rime qui relie les unités entre
elles. 2d mvt : les rimes assurent la cohésion du distique ou bien l’énoncé ne s’étale que sur un vers.
- tirade structurée par les sonorités : rimes intérieures (« hé, ardé », « nez », « pointez »,
« voulez » v.35-38), assonances en [i] v.40, 42, allitérations en [p] et [k] v.5-10…
⇒ cette structure de la tirade va être propice au déploiement du comique qui va pouvoir
prendre de nombreuses facettes.
2) la stratégie du rire
a) les variétés de comique
- comique de mots : néologisme avec un terme savant ridicule formé sur le nom de
plusieurs animaux (« hippocampéléphantocamélos » v.23 : hippocampe, éléphant, chameau), termes
campagnards avec la prononciation et la syntaxe adéquates (« ardé », « c’est-y », « nanain » v.35,
« queuqu’ », « ben » v.36). Accent paysan renvoie au comique traditionnel (présent ds les comédies
de Molière notamment).
- comique de caractère : différents traits de la psychologie sont mis en avant (« naïf »
v.32, « curieux » v.10, « pédant » v.22…).
- on peut noter que aspect comique de la tirade sera renforcé lors de la représentation
par la mise en scè intégrant un comique de geste (mimer ce qui est dit, gestes d’exagération…).
b) un nez qui fait rire
Rire lié à la puissance de l’imagination de Cyr qui est capable d’associer son nez à plusieurs
images. Imagination s’appuyant sur deux figures de style : hyperbole et métaphore.
- hyperbole : exagération insistant sur aspect hors norme de ce nez. Accumulation et
gradation : « roc », « pic », « cap », « péninsule » v.320 (mises en valeur par le fait que le locuteur se
reprend avec « que dis-je » pr prsuivre la gradation). Hyperbole v.339 : « aucun vent » / « tt entier ».
- métaphore : permet une création poétique autour de cet objet banal qu’est le nez.
Devient un nez baroque (période à laquelle se déroule l’intrigue de Cyrano de Bergerac), protéiforme,
capable de prendre des aspects différents.
Les référents sont empruntés à quantité de domaines :
vie quotidienne (« écritoire », « boîte à ciseaux » v.323, « cheminée » v.329),
quatre éléments (air pr le ton « emphatique » v.339, terre pr le ton « descriptif » v.320, eau pr le ton
« dramatique » avec la « mer Rouge » v.341, feu pr le ton « truculent » v.329).
Caractère surprenant de ces associations provoque le rire. Capacité à rire de soi-même
- grotesque / héroï-comique: laideur devient un sujet poétique en qq sorte, prétexte au
déploiement de l’inventivité de Cyr. Le grotesque repose sur une ambivalence en étant svt associé au
pathétique, aux larmes.
⇒ le comique qui se déploie ds cette tirade ne doit pas occulter un aspect plus discret ms
néanmoins révélateur de la personnalité de Cyr : une émotion perceptible ds ses propos.
3) l’émotion derrière le rire
a) une parodie de Pyrame et Thisbé
- significatif que tirade des nez proprement dite se termine sur cette évocation v.40-42.
Tragédie, référence à la mort de Pyrame et de Thisbé. Amr impossible (cô le sera celui de Cyr pr
Roxane).
- évocation d’un visage défiguré : « traits » v.41, « a détruit l’harmonie » v.42.
Personnification du nez : réaction de honte devant ce qu’il a causé (« en rougit » v.42). Accusation
portée : « le traître ! ». Laideur de Cyrano est un objet de dérision (« parodiant » v.40 avec diérèse :
imiter pr faire rire).
- ms présence du terme « sanglot » v.40 placé à la rime : annonce le thème de la tristesse,
de la douleur. Émotion se laisse deviner derrière le rire.
b) le registre pathétique
- le rire ici est une manière d’éviter de souffrir (et de révéler par là de façon masquée
que ce nez est objet de souffrance) : on se moque de soi avant que les autres ne le fassent (
« Je me les sers moi-même […] /
Mais je ne permets pas qu’un autre me les serve » v.53-54).
Montrer qu’on ne souffre pas de la moquerie.
Conclusion
Tirade comique possédant une utilité dramaturgique : ni supprimable, ni déplaçable. Rôle majeur ds
l’acte d’exposition : scè qui permet au pers principal de se mettre en valeur, de faire oublier sa
laideur grâce à la maîtrise du langage. 1er contact avec le héros.
Cyrano de Bergerac - Texte 2 – L’aveu [v.759 – 803]
Une scène essentielle au milieu de l'acte II qui lance l'action. L'aveu de Roxane et sa demande à
Cyrano de protéger Christian vont lancer l'intrigue amoureuse.
Problématique: Comment dans cette scène qui révèle deux des caractères essentiels de la pièce,
celui de Roxane et celui de Cyrano, Rostand joue sur un double registre à la fois comique et
pathétique?
Plan:
I- Un quiproquo: une scène comique?
A-Roxane recrée une intimité passée
B- Roxane timide retarde l'aveu...
C-...et parle à demi-mots
II- Cyrano: amoureux déçu: une scène pathétique?
A- Cyrano utilise un langage galant et est impatient d'entendre l'aveu de Roxane
B-Une scène qui ressemble à un duo amoureux
C-Une cruelle déception pour Cyrano
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III- Roxane se sert de Cyrano pour protéger celui qu'elle aime.
A- Cyrano essaie sans succès de dissuader Roxane d'aimer Christian
B-Roxane use de son charme pour demander à Cyrano une terrible faveur
C-Mais son amitié pour Cyrano apparaît bien pâle à côté de son amour pour Christian.
I- Roxane favorise le quiproquo: une scène comique?
QUESTION : montrez que Roxane recrée une intimité passée
A-Roxane recrée une intimité passée
Roxane n'ose se confier directement à Cyrano elle a besoin de recréer leur intimité passée:
« Mais pour l'aveu que je viens faire,
Il faut que je revoie en vous le... presque frère,
Avec qui je jouais, dans le parc-près du lac !... »
Elle lui rappelle leurs jeux d'enfants, leur complicité : renaître cet ascendant car elle a un service à lui
demander mais Cyrano l'ignore pour l'instant:
« Le temps où vous faisiez tout ce que je voulais !... »
Elle jouait à l'époque à la maman avec lui, ce qui lui permettait d'exprimer sa tendresse pour son
cousin:
« Parfois, la main en sang de quelque grimpement,
Vous accourriez ! - Alors, jouant à la maman,
Je disais d'une voix qui tâchait d'être dure :
Elle lui prend la main.
"Qu'est-ce que c'est encore que cette égratignure ?"
Elle rejoue la scène de leur enfance puisqu'elle lui reprend la main et redit les paroles d'antan sur le
même ton comme une petite pièce de théâtre. ENCORE UNE FOIS MOTIF BAROQUE du THEATRE
dans le THEATRE
Alors le présent se superpose au passé, Cyrano, adulte, a la main blessée comme lorsqu'ils jouaient
enfants:
« Elle s'arrête stupéfaite.
Oh ! C'est trop fort ! Et celle-ci ! Cyrano veut retirer sa main. »
Ce qui permet à Roxane de jouer la scène passée au présent, elle passe insidieusement au
tutoiement et le gronde comme dans l'enfance :
« Hein ? à votre âge, encor ! -Où t'es-tu fait cela ? »
et lui donne des ordres (usage de l'impératif):
« Non ! Montrez-la ! »
« ROXANE, s'asseyant à une table, et trempant son mouchoir dans un verre d'eau :
Donnez ! » et « Laissez-moi votre main, voyons, elle a la fièvre »
Elle lui demande de raconter ses exploits:
« Et, dites-moi, -pendant que j'ôte un peu le sang,Ils étaient contre vous ? » et « ROXANE :Racontez ! »
Toute cette douceur a de quoi enivrer et abuser Cyrano qui est fou amoureux de sa cousine.
B-Roxane timide retarde l'aveu : Le Suspense
QUESTION : Montrez que l’aveu crée un phénomène d’attente
Roxane n'ose se confier promptement, elle a besoin de recréer une atmosphère d'intimité qui peut
abuser Cyrano. Ce faisant, elle retarde le moment de l'aveu et laisse Cyrano dans un doute qui
favorise son illusion d'être aimé.
A la première question de Cyrano, elle détourne la conversation:
« Mais tout d'abord merci, car ce drôle, ce fat
Qu'au brave jeu d'épée, hier, vous avez fait mat »
Elle se lance une seconde fois mais s'interrompt:
« Puis... je voulais... Mais pour l'aveu que je viens faire,
Il faut que je revoie en vous le... presque frère »
Les points de suspension montrent son hésitation à se confier, sa timidité. Et ce deuxième « mais »
retarde encore l'aveu.
Il faut attendre le vers 789:
« A présent j'ose,
Car le passé m'encouragea de son parfum !
Oui, j'ose maintenant. Voilà. J'aime quelqu'un. »
Mais l'aveu n'est pas encore entier: Roxane ne nomme pas celui qu'elle aime, elle le désigne par le
pronom indéfini « quelqu'un ».
Pour le malheur de Cyrano, trompé par la douce attitude de sa cousine, Roxane va à présent parler à
demi-mots et laisser Cyrano rêver qu'il est l'élu du cœur de la jeune femme.
C-...et parle à demi-mots: Le QUIPROQUO
En quoi peut-on parler de quiproquo et comment se construit-il ?
Roxane va donner de nombreux indices sur l'identité de celui qu'elle aime mais sans le nommer
durant 20 vers. Or tous les indices ambigus qu'elle donne peuvent laisser penser que Cyrano est
l'heureux élu:
Celui qu'elle aime ne le sait pas: Cyrano n'a jamais su que Roxane l'aimait
il va « bientôt le savoir s'il l'ignore » or Roxane a donné un rendez-vous en tête-à-tête à Cyrano pour
lui avouer un secret...
Celui qu'elle aime, l'aime aussi, sans jamais l'avoir dit mais cela se devine:
« Un pauvre garçon qui jusqu'ici m'aima Timidement, de loin, sans oser le dire... »
et « Mais moi j'ai vu trembler les aveux sur sa lèvre »
C'est aussi le cas de Cyrano qui aime en secret sa cousine depuis longtemps.
Celui qu'elle aime fait le même métier que Cyrano: « il sert dans votre régiment ! »et « Puisqu'il est
cadet dans votre compagnie ! » : une manière coquette de dire à Cyrano qu'il s'agit de lui ???...
Roxane est une précieuse et aime jouer avec les mots...
Enfin elle donne une série d'adjectifs élogieux qui peuvent faire penser à Cyrano:
« Il a sur son front de l'esprit, du génie,
Il est fier, noble, jeune, intrépide » On sait que Cyrano est aussi vaillant militaire qu'homme
d'esprit...
Jusqu'ici la scène peut faire penser à une déclaration d'amour de comédie, à un duo amoureux.
La jeune femme timide parle à demi mots et l'atmosphère est douce et tendre. Cyrano ne peut
qu'être abusé par le ton de Roxane.
COMIQUE de répétition « Ah... » : Mais ces « Ah! » expriment l'émoi et l'espoir.
II- Cyrano: amoureux déçu: une scène pathétique?
A- Cyrano, amoureux, utilise un langage galant et est impatient d'entendre l'aveu de Roxane
QUESTION : analysez le langage galant de Cyrano
Cyrano a un comportement amoureux depuis le début, il est prêt à faire sa déclaration à Roxane et
nourrit l'espoir d'être aimé en retour.
Dès l'arrivée de Roxane sur scène il lui sert un langage galant:
« Que l'instant entre tous les instants soit béni,
Où, cessant d'oublier qu'humblement je respire
Vous venez jusqu'ici pour me dire … »
Hyperbole: « l'instant entre tous les instants ». C'est, pour lui, le plus beau moment de sa vie que de
voir Roxane en tête-à-tête, à sa demande.
Il est trop heureux qu'elle se souvienne qu'il existe: humilité amoureuse « humblement je respire »
Puis:
« Je me suis donc battu, madame, et c'est tant mieux,
Non pour mon vilain nez, mais bien pour vos beaux yeux. »
Il lui dédie sa victoire en duel : attitude courtoise, on se bat pour sa dame
et parallélisme: « vilain nez/beaux yeux » et antithèse pour faire ressortir la beauté de Roxane.
Il meurt d'impatience d'entendre ce qu'elle vient lui dire et lui demande à deux reprises:
« Vous venez jusqu'ici pour me dire... me dire ?... »
« CYRANO :
Non. Laissez. Mais vous, dites la chose
Que vous n'osiez tantôt me dire... »
Les points de suspension sont une invitation à ce que Roxane achève la phrase de Cyrano par un aveu
amoureux.
B-Une scène qui ressemble à un duo amoureux:
QUESTION : Montrez la complémentarité des deux personnages, qu’est-ce que cela crée ?
Cyrano se laisse prendre au jeu de Roxane et y prend plaisir :
-Leurs répliques lorsqu'ils se souviennent de leur enfance sont symétriques et se complètent:
« Avec qui je jouais, dans le parc-près du lac !...
CYRANO :
Oui... Vous veniez tous les étés à Bergerac !...Cyrano n'a rien oublié, il aimait déjà surement Roxane.
ROXANE :
Les roseaux fournissaient le bois pour vos épées...
CYRANO :
Et les maïs, les cheveux blonds pour vos poupées ! Parallélisme.
ROXANE :
C'était le temps des jeux...: 6 syllabes
CYRANO :
Des mûrons aigrelets... il complète sa phrase 6 syllabes
ROXANE :
Le temps où vous faisiez tout ce que je voulais !...
CYRANO :
Roxane, en jupons courts, s'appelait Madeleine...Alexandrin/ Alexandrin.
ROXANE :
J'étais jolie, alors ? question
CYRANO :
Vous n'étiez pas vilaine. » Réponse galante litote
-Il lui donne la main avec docilité:
« Elle lui prend la main. Cyrano veut retirer sa main. »
Mais il entre dans le jeu:
« ROXANE, s'asseyant à une table, et trempant son mouchoir dans un verre d'eau :
Donnez !
CYRANO, s'asseyant aussi ». Il l'imite, entre dans son jeu, lui obéit.
Elle continuera à parler en lui tenant la main: « ROXANE, sans quitter sa main et ROXANE, achevant
de lui faire un petit bandage avec son mouchoir »
-Il prend plaisir à la voir si tendre:
« Si gentiment ! Si gaiement maternelle ! » et lui répond comme un enfant à sa maman:
« Où t'es-tu fait cela ?
CYRANO :
En jouant, du côté de la porte de Nesle. » Cyrano utilise, à son tour, le vocabulaire de l'enfance « en
jouant » alors qu'il ne s'agissait pas d'un jeu mais d'un vrai combat où il aurait pu perdre la vie.
Tout dans cette scène nous montre que Cyrano est pris au piège des apparences et vit pour sa part
une scène du duo amoureux, la femme qu'il aime lui prend la main et se remémore de tendres
souvenirs d'enfance avec lui.
C-Une cruelle déception pour Cyrano
Malheureusement il suffira d'un mot pour réveiller Cyrano de son rêve: « beau »
L'émoi de Cyrano est visible dans ses 8 « ah!... », garadation qui aboutit et chute finalement sur ce
mot : BEAU
« CYRANO, se levant tout pâle » Roxane souligne son trouble: « Quoi ? Qu'avez-vous ? »
Cyrano répète le mot fatal , incrédule: « Beau! » qui pour lui sonne comme la fin du rêve.
Il essaie de cacher son trouble à Roxane et sa peine touche le spectateur:
« Moi, rien... c'est... c'est... » Il ne trouve pas les mots et bégaie.
Mais Cyrano est fier et se ressaisit :
« Il montre sa main, avec un sourire. C'est ce bobo. »
Et c'est aussi cet aspect du personnage qui touche le spectateur. Cyrano est capable de sourire de lui,
de ses illusions même quand il est au comble de la souffrance. De même , il acceptera avec héroïsme
ce que va lui demander Roxane, achevant de le rendre sympathique et généreux aux yeux du lecteur.
La dernière phrase:
« CYRANO, la saluant :
Oh ! j'ai fait mieux depuis »
sous entend que la désillusion que vient de vivre Cyrano est pire encore que de se battre seul contre
cent hommes. Mais il n'en dit rien à Roxane.
La didascalie finale souligne le pathétique de la situation:
« Elle sort. Cyrano reste immobile, les yeux à terre. Un silence »Posture de tristesse qui ne peut
qu'émouvoir le spectateur.
Boileau, L’art poétique(1674)
Synthèses des règles classiques
Principes de L’Art poétique de Boileau (texte écho).
1. Exposition
Que dès les premiers vers, l'action préparée
Sans peine du sujet aplanisse l'entrée
Dès la scène d’exposition ou sur les 2 premières scènes l’intrigue, et le nœud de l’intrigue doivent
être introduites.
Le sujet n'est jamais assez tôt expliqué
L’action doit être présentée avec rapidité et vivacité.
2. Règle des 3 unités
Que le lieu de la Scène y soit fixe et marqué.
Sur la scène en un jour renferme des années.
Là, souvent, le héros d'un spectacle grossier,
Enfant au premier acte, est barbon au dernier
Qu'en un lieu, qu'en un jour, un seul fait accompli
Tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli
Unité d’Action, de Lieu, de Temps
3. Vraisemblance
Jamais au spectateur n'offrez rien d'incroyable
Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable
Nécessité de vraisemblance de l’action prônée par Boileau. Remarque en passant : La formule sera
reprise par MAUPASSANT dans sa célèbre préface à Pierre et Jean sur le roman réaliste…
4. Bienséances
Ce qu'on ne doit point voir, qu'un récit nous l'expose
Les yeux, en le voyant, saisiraient mieux la chose ;
Mais il est des objets que l'art judicieux
Doit offrir à l'oreille et reculer des yeux.
Par exemple on a reproché à CORNEILLE dans Le Cid (1636) d’avoir drogé à la règle classique des
bienséances en représentant sur scène l’affront que subit Don Diègue (le père de Rodrigue) du comte
(père de Chimène) : la gifle n’aurait pas dû être représentée sur scène…
Conformément au respect de la vraisemblance, de la morale, l'acteur ne doit pas choquer le
spectateur (pas de présence de sang sur la scène). De ce fait violence et intimité physique sont
exclues de la scène. Les batailles et les morts doivent se dérouler hors scène et être rapportés aux
spectateurs sous forme de récits. Quelques exceptions comme le suicide de Phèdre, ou la folie
d'Oreste dans Andromaque, chez Racine ou celle de Dom Juan chez Molière sont restées célèbres.
CONSULTER l’ARTICLE DE WIKIPEDIA :
http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A8gles_du_th%C3%A9%C3%A2tre_classique
HUGO rejette l’unité de LIEU et de TEMPS et garde l’unité d’ACTION
Cyrano de Bergerac - Texte 3 – La tirade des Non Merci ![v.964 –
1015]
Tableau
Acte II, scène 8, vers 965 à 1015
Axe Relevé
Procédé
Interprétation
Et que faudrait-il faire ?Grimper Questions
par ruse au lieu de s’élever par oratoires
force ?Dédier, comme tous ils le
font, / Des vers aux financiers ?
Il pose toute une série de questions pour
faire réfléchir son ami Le Bret et pour,
finalement, lui imposer son point de vue.
Pour un oui, pour un non, se
Exclamations
battre, – ou faire un vers !
Travailler sans souci de gloire ou
de fortune,
À tel voyage, auquel on pense,
dans la lune !
Dans la seconde partie (en dehors de la
répétition des « non, merci ! », Cyrano
laisse éclater son exaltation : il exprime ce
qu’il aime dans la vie (« faire un vers »,
« se battre », rêver).
Chercher un protecteur
puissant, prendre un patron,
Grimper par ruse au lieu de
s’élever par force ?
Dédier, comme tous ils le font,
Des vers aux financiers ? se
changer
Verbes à
l’infinitif
Il énumère des verbes à l’infinitif, comme
s’il s’agissait d’un mode d’emploi, une
recette de cuisine : il énumère tout ce que
certains font pour se faire publier. Dans la
deuxième partie, il énumère tout ce que
lui fait.
Chercher un protecteur
puissant, prendre un patron,
Grimper par ruse au lieu de
s’élever par force ?
Dédier, comme tous ils le font,
Des vers aux financiers ? se
changer en bouffon
Déjeuner, chaque jour, d’un
crapaud ?
Avoir un ventre usé par la
marche ?
Exécuter des tours de souplesse
dorsale ?…
D’une main flatter la chèvre au
cou
Avoir son encensoir, toujours,
dans quelque barbe ?
Enumération
Il évoque tous les cas possibles.
L’énumération est longue.
Se pousser de giron en giron,
Devenir un petit grand homme
dans un rond,
Et naviguer, avec des madrigaux
pour rames,
Faire éditer ses vers en payant ?
S’aller faire nommer pape par
les conciles
Travailler à se construire un
nom
Ne découvrir du talent qu’aux
mazettes ?
Être terrorisé par de vagues
gazettes,
Calculer, avoir peur, être blême,
Préférer faire une visite qu’un
poème,
Rédiger des placets, se faire
présenter ?
Et comme un lierre obscur qui
circonvient un tronc
Et s’en fait un tuteur en lui
léchant l’écorce,
Grimper par ruse au lieu de
s’élever par force ?Bref,
dédaignant d’être le lierre
parasite,
Lors même qu’on n’est pas le
chêne ou le tilleul,
Ne pas monter bien haut, peutêtre, mais tout seul !
Comparaison
ouverture
Non, merci
Anaphore
clôture
Symétrie dans la tirade puisque l’on
commence et l’on termine la tirade avec
deux métaphores au même thème.
Toutefois ces métaphores diffèrent du fait
qu’au début du passage l’une soit
péjorative tandis qu’à la fin l’autre soit
méliorative.
Cyrano s’emporte : les « non merci » sont
d’abord situés en début de vers, puis à la
fin, comme s’il s’emportait, comme si son
discours se déséquilibrait sous le coup de
la colère. L’avant-dernier constitue même
un contre-rejet : « non » en fin de vers, et
« merci » au début du suivant : la
structure en alexandrins explose sous
l’effet de la colère. La dernière
occurrence : répétition de « non merci » :
« Non merci ! Non merci ! Non merci ! ».
une peau /
Qui plus vite, à l’endroit des
genoux, devient sale ?Travailler
à se construire un nom /
Sur un sonnet, au lieu d’en faire
d’autres ? Non, /
Merci !
Enjambements La structure en alexandrins explose sous
l’effet de la colère.
Métaphores
« Oh ! pourvu que je sois
Dans les petits papiers du
Mercure François«
Discours direct Cyrano se moque de ceux qui se satisfont
+ ironie
d’un petit succès.
se changer en bouffon
Dans l’espoir vil de voir, aux
lèvres d’un ministre,
Naître un sourire, enfin, qui ne
soit pas sinistre ?
Non, merci ! Déjeuner, chaque
jour, d’un crapaud ?
Avoir un ventre usé par la
marche ? une peau
Qui plus vite, à l’endroit des
genoux, devient sale ?
Termes
dépréciatifs,
négatifs
Pour lui, tout faire pour être publié est
négatif. C’est se rabaisser. Il veut être
digne.
Devenir un petit grand homme
dans un rond
oxymore
L’adjectif « petit » contredit, annule
l’adjectif « grand » : ceux qui réussissent
en s’inclinant ne sont guère méritants.
« Dans un rond » : avec une fraise au cou,
avec un collier ou dans une pièce ronde ?
D’une main flatter la chèvre au
cou
Cependant que, de l’autre, on
arrose le chou,
Et donneur de séné par désir de
rhubarbe,
Avoir son encensoir, toujours,
dans quelque barbe
Proverbes
Finalement, ces personnes sont des
hypocrites : on ne peut pas être dans les
deux camps à la fois. Il reprend un
proverbe, un dicton populaire : il fait appel
au bon sens.
Mais
Conjonction
de
coordination
La tirade est coupée en deux : avant, il
énumère tout ce qu’il ne veut pas faire ;
après, il énumère tout ce qu’il fait.
chanter,
Rêver, rire, passer, être seul,
être libre,
Avoir l’œil qui regarde bien, la
voix qui vibre,
Mettre, quand il vous plaît, son
feutre de travers
Enumération
Les idées communes sont : la liberté, la
joie et l’imagination.
Libre
Champ lexical
de la liberté
La qualité première de Cyrano est qu’il
refuse de dépendre de
quelqu’un.[ouvertures :- il défie
Montfleury- il se bat en duel, alors que
c’est interdit- il refuse de travailler pour
de Guiche]
quand il vous plaît
Pour un oui, pour un non
sans soucis
Ne pas être obligé
Plan trouvé sur le web
I – La satire du monde littéraire du XVIIe siècle
Toute la 1ère partie : satire du monde littéraire, peuplé de créature soumises par le mécénat. Cette
première partie décrit tout ce que rejette Cyrano, et prend les allures d’un pamphlet adressé contre
la littérature de commande, voire, plus largement, contre la soumission morale de l’individu aux
exigences de la société.
A – Une tirade révoltée
Ses arguments : énumération, tous sous forme interrogative, servant à décrire point par point les
caractéristiques de la vie que refuse Cyrano. Toutes sont suivies d’un « non merci » dont la politesse
ne cache pas la radicalité. Le ton est donc polémique, le genre est celui du pamphlet, de plus en plus
virulent :
–
Cyrano s’emporte : les « non merci » sont d’abord situés en début de vers, puis à la fin,
comme s’il s’emportait, comme si son discours se déséquilibrait sous le coup de la colère. L’avantdernier constitue même un contre-rejet : « non » en fin de vers, et « merci » au début du suivant : la
structure en alexandrins explose sous l’effet de la colère (entorse à la versification très
caractéristique du Romantisme : « J’ai disloqué ce grand niais d’alexandrin », comme disait Hugo ). La
dernière occurrence : répétition de « non merci » : « Non merci ! Non merci ! Non merci ! ».
–
Cyrano emploie systématiquement l’infinitif, mode verbal impersonnel : façon de se détacher
totalement de ces attitudes qu’il dénonce. Il les présente comme des choix, que l’on peut faire, ou
non. De plus, l’infinitif accentue encore l’effet produit par l’énumération, et lui permet de brosser un
portrait de l’homme de lettres tel qu’il le refuse, et donc de proposer un texte descriptif,
typologique.
–
De plus, des infinitifs sont tous placés sous le régime du conditionnel, dans la première phrase
de sa tirade : « Et que faudrait-il faire ? ». Toute sa réponse est en réaction contre le conseil donné
par son ami Le Bret, qu’il interrompt : « Si tu laissais un peu ton âme mousquetaire, la fortune et la
gloire… ». Cyrano parle donc à la place de son ami, ce qui contribue davantage à le détacher de ce
portrait d’homme de lettres servile. Le conditionnel n’est plus ici le mode propre à exprimer le
conseil, mais le mode de l’irréel du présent : pour Cyrano, il n’est pas question de se conformer.
B. La satire de l’écrivain soumis, du poète de cour, selon Cyrano
Pour décrire le poète de cour, Cyrano emploie :
–
Métaphores issues du monde végétal : « lierre obscur »
–
Ou du monde animal : serpent, ou animal rampant : « « avoir le ventre usé par la marche »
–
Ou d’êtres humains connotés péjorativement,
o pour leur aspect ridicule : « bouffon », ou un acrobate, voire un clown : « exécuter des tours de
souplesse dorsale »
o pour leur aspect soumis : quelqu’un dont la peau des genoux « devient sale » : à force de
s’agenouiller, de s’humilier ; esclave, galérien , « avec des madrigaux pour rames »
o pour leur faiblesse : enfant : « giron » ;
o pour leur bêtise : « pape des imbéciles »
Quand il n’utilise pas de métaphore, il évoque des traits de caractère de l’écrivain soumis, qu’il
condamne :
o pour leur lâcheté : « être terrorisé par de vagues gazettes ».
o pour leur propension à la compromission :
§ recours à une expression populaire : « flatter la chèvre et arroser le chou »
§ « donneur de séné par désir de rhubarbe »
ð l’image du poète de cour, ou de l’écrivain protégé, est détruite par une accumulation d’analogies
péjoratives. Cyrano dresse le portrait d’un être soumis et lâche, qui se déshumanise à force de
compromissions. Car pour lui, c’est de cela qu’il s’agit, au-delà de l’accomplissement en tant
qu’écrivain : c’est de l’accomplissement en tant qu’homme qui parle dans cet extrait. Pour lui, qu’estce qu’un homme ?
II – Autoportrait d’un homme idéal, ou autoportrait idéalisé ?
La deuxième partie intervient clairement avec la conjonction de coordination « mais », qui annonce
la célébration d’un mode de vie en totale opposition à celui que Cyrano vient de décrire. Cette
opposition de fait d’abord par le style.
A.
Un style qui reflète de ce qui précède.
1.
Une deuxième partie fonctionnant comme le reflet de la première
Certes, on retrouve des procédés qui sont communs à la première partie mais qui présentent des
sens différents (sens antinomiques) :
– Il y a tout d’abord une énumération qui décrit le mode de vie de Cyrano et qui s’oppose à celle qui
décrivait le mode de vis des poètes :
« (…) chanter,
Rêver, rire, passer, être seul, être libre,
Avoir l’œil qui regarde bien, la voix qui vibre,
Mettre, quand il vous plaît, son feutre de travers »
ð Enumération plus riche, plus rapide, qui exprime l’exaltation de Cyrano, et les infinies possibilités
de ce mode de vie.
Enfin, métaphore qui présente le même thème que celle qui figure au début du passage : la
végétation : « Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles,
Si c’est dans ton jardin à toi que tu les cueilles ». Et :
« Bref, dédaignant d’être le lierre parasite,
Lors même qu’on n’est pas le chêne ou le tilleul,
Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul »
è symétrie dans la tirade puisque l’on commence et l’on termine la tirade avec deux métaphores au
même thème. Toutefois ces métaphores diffèrent du fait qu’au début du passage l’une soit
péjorative tandis qu’à la fin l’autre soit méliorative.
2.
Un reflet qui renvoie une image inversée de celle du poète de cour
Puis, dans cette deuxième partie on trouve des éléments qui sont complètement opposés avec la
première (éléments antinomiques).
• Les exclamations s’opposent aux interrogations de la première partie. Les exclamations sont
présentes afin de montrer une attitude joviale de Cyrano qui, après avoir traité de ce qu’il n’aime pas
(le mode de vis des poètes : cf. première partie), s’exprime de façon exaltée, passionnée, sur son
mode de vie.
• Enfin, la deuxième lourde opposition entre les deux parties est la liberté. la description du mode de
vie des poètes : image terne, de claustration VS celle que fait Cyrano sur son propre mode de vie : la
délivrance, l’évasion
ð champ lexical de la liberté : « libre » V.36, « quand il vous plaît » V.38, « Pour un oui, pour un non »
V.39, « sans soucis » V.40, « Ne pas être obligé » V.47.
Dans un second temps, on remarque que Cyrano se valorise lui-même. En effet, Cyrano conçoit son
mode de vie au travers de caractéristiques telles que la solitude
–
la franchise et le lyrisme : « N’écrire jamais rien qui de soi ne sortît »,
–
La solitude : « être seul »
–
la modestie : « modeste » / « Puis, s’il advient d’un peu triompher, par hasard »
–
le désintéressement : « Travailler sans souci de gloire ou de fortune » V.40. Cela caractérise
bien le personnage du fait que ce dernier soit de nature solitaire mais heureuse (son amour pour
Roxane le rend heureux), qu’il soit très franc (Cyrano de mâche pas ses mots et dit tout haut ce qu’il
pense, parfois au péril de sa vie), qu’il soit un rimeur doué et reconnu, qu’il soit un redoutable
bretteur, qu’il agisse avec modestie, simplicité (absence de prétention) et qu’il se moque de l’argent
(lors de la représentation de La Clorise, lorsque Cyrano interrompt la pièce afin d’empêcher
Montfleury de jouer, il lance sur la scène un sac de pièce, son propre argent, afin de dédommager les
spectateurs).
CONCLUSION
En conclusion, l’essentiel du texte se situe dans l’antithèse qui oppose les deux parties. En effet d’une
part, il y a le refus d’un mode de vie, celui des poètes, avec une satire, des rejets et une description
et d’autre part, il y a un mode de vie plaisant, celui de Cyrano, avec toutes les oppositions de la
première, de la seconde partie et avec un calque sur la personnalité du personnage.
Cette tirade a pour but de montrer des nouvelles facettes de la personnalité de Cyrano qui sont sa
marginalité (son refus d’appartenir et d’obéir à quelqu’un) et la simplicité de son mode de vie (sa
liberté), mais aussi, peut-être, sa vanité. Ce révolté que l’on peut éventuellement considérer comme
narcissique n’est pas sans rappeler l’Alceste du Misanthrope (et Le Bret tient le même rôle que
Philinte, celui du modérateur raisonnable) qui, lui aussi, préfère être seul contre tous, ne faire
aucune concession, adopter un mode de vie supérieur, quitte à se condamner à la solitude.
Cyrano de Bergerac, Texte 4
Étude de la scène du balcon, v.1440-1480
Introduction
Acte III = nœud de l’action. Scè 7 au cœur de l’acte III (qui cporte 14 scè) : scè importante.
- Acte III met en scè révolte de Christian qui ne supporte plus le pacte conclu avec Cyrano (II, 10)
- il veut parler à Roxane par lui-même, et non plus répéter les déclarations d’amr dictées par Cyrano
- Face à Roxane, Echec dans l’expression de sa passion : la jeune fê rentre chez elle.
- Cyrano propose à Christian de l’aider en se plaçant sous le balcon et en lui soufflant les bons mots
- ms peu à peu cette situation devient difficile, aussi profite-t-il de l’obscurité pr parler à sa place.
Scène 7 se décompose en 2 mvts :
- Cyrano apprivoise Roxane en utilisant le langage amoureux qu’elle souhaite entendre ;
- puis il adopte un langage amoureux différent, plus lyrique, plus direct, moins précieux
(cela correspond à l’extrait proposé).
Problématique : étudier quel est l’enjeu de cette déclaration amoureuse.
I. Une déclaration d’amour
1) un discours sincère
a) l’afflux des mots
- prise de pvoir du langage par Cyrano qui se déclare : alors que la scè était marquée
jusqu’à présent par des répliques assez brèves, traduisant bien un échange entre Cyrano / Christian et
Roxane, cet extrait repose sur 2 tirades de Cyr (une quinzaine de vers pr la 1ère, une vingtaine pr la
2de). Signe que la passion va le dominer.
- déséquilibre des répliques : Roxane provoque la déclaration de Cyr (v.1 : question
« Quels mots me direz-vs » ?). Puis 2 brèves interventions : 1er hémis du v.16 (pts de suspension car
interrompue par les propos de Cyr qui enchaîne à partir de sa remarque : « certes » v.16, « ce
sentiment » répondant à « amour ») et 1 vers et demi (v.37-38).
- au plur « mots » v.1 énoncé par Roxane, répond l’abondance de termes au déb de
réponse de Cyr : « Ts ceux, ts ceux, ts ceux » (rythme [2/2/2] soulignant cet afflux des mots qui sble
l’envahir ds un 1er tps ; hémis construit sur répétition).
b) la simplicité
- Cyr affiche sa volonté de ne pas tenir un discours précieux, cô cela avait été le cas
jusque-là : utilise la métaphore précieuse des « bouquets » v.3 et des fleurs pr rejeter un discrs
maniéré (négation « sans les mettre » v.3 ; les présente « en touffe » v.2 à la rime).
- spontanéité : « qui me viendront » v.2 (pas discrs construit, élaboré qui perdrait ainsi
de sa sincérité), « jeter » v.2 qui indique que cela ne sera pas ordonné, bien agencé.
- simplicité du discrs : formules simples cô le présentatif « c’est » (v.4, 17, 28, 30, 32…),
simplicité de certaines structures (« je vs aime » v.3, « je suis fou » v.4), retr de certains termes (« ts »
v.1, « tt » v.6, 7, 8, 14, 29…).
⇒ déclaration de Cyr se veut simple et sincère, ce qui va ê propice au déploiement du
registre lyrique.
2) le registre lyrique
a) l’expression de l’amour
- expression d’un sentiment personnel : marques de 1ère pers (v.2, 3, 4, 5…) qui innervent
le discrs de Cyr dès le déb. Forte présence du locuteur qui va s’exprimer.
- chp lexical de la passion amoureuse : vbe aimer (v.3, 4, 8), « amr » v.16, 18, 19
(anaphore), « cœur » v.5, « adoré » v.36 (sens fort).
- ponctuation affective : bcp de pts d’excla indiquant sa passion (v.7, 10, 15, 18…).
- expression des sensations : « j’étouffe » v.3 à la rime (sorte de suffocation provoquée
par la passion), « je frissonne » v.6 à la rime (opposition entre les 2 réactions traduit force de cet amr,
passant d’un extrême à l’autre), « doux » v.28 (instants suaves).
- déclaration traduisant ses sentiments : « sens-tu mon âme » v.27.
b) l’idéalisation de la femme aimée
- exprime sa passion envers « Roxane » v.6 : jeune fê est au centre de ses propos. Va la
présenter de man idéalisée : phénomène de cristallisation (celui qui aime voit en l’objet aimé de
nouvelles perfections).
- topos, clichés du langage amreux pr traduire cette sublimation de la fê aimée :
importance du regard (établissant un contact) avec le groupe nominal « chaque regard de toi » v.24
placé ds le 1er hémis (insistance sur l’aspect essentiel de tt regard qu’elle lui lance ; « toi » placé à la
césure).
- Cyr voit en tt ce que fait Roxane une occasion de la vénérer : cela est visible avec
l’anecdote de la coiffure du « douze mai » v.9 (détail montrant la passion de l’amant qui ne cesse
d’observer celle qu’il aime). Utilisation du motif de la lumière et de l’aveuglement avec l’image des
cheveux (thème traditionnel ds la poésie) : cliché de la chevelure comparée au soleil (v.12). Chp lexical
de la « clarté » v.11 (« soleil » v.12, « vermeil » v.13 faisant ici allusion à une couleur sblable à l’or
chaud, « feux » v.14, « ébloui » v.15).
⇒ passage reposant sur le registre lyrique et l’idéalisation de la fê aimée : l’expression
des senti de Cyr va entraîner l’émotion de Roxane qui va partager le trouble de celui qui
l’aime.
3) le trouble des amants
a) une émotion partagée
- la scè voit une progression ds l’expression de la passion : exaltation de Cyr qui se laisse
aller à révéler ses véritables sentiments. Pts d’excla se font plus fréquents vers la fin de sa 2de tirade :
indice d’une montée de l’exaltation amreuse (9 pts d’excla en 10 vers : v.28-37).
- motif de la folie renforce cette impression d’exaltation : « je suis fou » v.4 (adj placé à
la césure), « fureur » v.18 (sens étymologique du terme latin furor = folie). Passion extrême.
- émotion à son comble : didascalie « éperdument ».
- présence de termes exprimant le ht degré : adv « trop » v.4, 12, 28, 30, adv « tant »
v.31, adv « tellement » v.11.
- trouble visible d’un pt de vue métrique : vers disloqué marquant l’émotion.
Phénomènes de rejet (v.17-18 mettant en relief le terme « amr », v.24-25, v.35-36), d’enjambement
(v.25-26, 31-32, 36-37). Rythme particulier ds certains vers traduisant l’exaltation : v.28 [1/3/2//3/3],
v.30 [2/4//6].
- marque d’un certain trouble ds l’hésitation sur le choix des pronoms pers : Cyr débute
tirade avec « vs » (v.2, 3) puis utilise rapidement les marques de la 2ème pers du sing (v.4, 5, 8, 10…).
Puis retr au « vs » v.29 (3 fois ds ce vers). Phénomène surtt caractéristique à la fin de la 2de tirade : en
3 vers successifs, utilisation de 3 pronoms pers différents, sujets du vbe « trembler », placés ds 1ers
hémis pr évoquer Roxane : « elle » v.33 (cô s’il se parlait à lui-même), « vs » v.34 (sorte de distance
respectueuse), « tu » v.35 (proximité).
- la proximité des amants malgré la distance est symbolisée par le rapprochement des
pronoms pers : significatif ds le v.29 (marques de 1ère et 2ème pers du sing présentes chacune à 3
reprises : « je vs », « vs me », « moi, vs »).
- il va y avoir une contagion du bouleversement : l’émotion de Cyr devient celle de
Roxane également. Didascalie le montre : « d’une voix troublée » (chgment ds l’attitude de la jeune
fê). Chacune de ses répliques débute par l’affirmation « oui » v.16, 38 : signale qu’elle est conquise par
ses paroles. Reconnaît la vérité du sentiment de Cyr : « c’est bien de l’amr » v.16. Emprise de l’émotion
va se manifester ds l’utilisation de la conjonction de coordination « et » à 4 reprises v.38-39
(introduisant à chaque fois de crtes propositions qui marquent ses sensations). Réaction de Roxane
signale le pvoir des mots : victoire de Cyr. Émotion partagée révèle le sommet de ce passage : acmé,
apogée des sentiments.
b) la sensualité
- atmosphère propice : nuit tombée (« ombre » v.27, « soir » v.28), balcon qui permettra
à Christian de rejoindre Roxane (didascalie finale), présence de nature (« branches du jasmin » v.37,
« bleus rameaux » v.33, « branche pendante » ds la didascalie).
- réaction physique de Roxane traduit cette sensualité : image du « tremblement » v.36
(chp lexical : « elle tremble » v.33, « vs tremblez » v.34, « je tremble » v.38 : elle fait siennes les paroles
de Cyr). Présence des larmes : « je pleure » v.38 (signe d’une gde émotion). Métaphore de l’« ivresse »
v.40 (« enivrée » v.39) : sensualité de la passion.
- cela s’exprime par le baiser : un baiser réel donné par Cyrano à la branche de jasmin
(didascalie) qui représente par métonymie Roxane ; un baiser désiré (et qui sera obtenu III, 10)
demandé par Christian v.41 (à la rime).
⇒ la déclaration d’amr de Cyr, marquée par le lyrisme et l’émotion, conquiert Roxane qui
partage son trouble. Ces propos, derrière leur exaltation, laissent cependant deviner qu’en
parlant au nom de Christian, Cyr révèle ses propres blessures et les ctradictions du rôle qu’il
doit tenir.
II. Une déclaration à double voix
1) une parole masquée
a) la dualité de la parole
- Cyr parle au nom d’un autre qui se tient près de lui, sous le balcon (didascalie) :
Christian. C’est ce dernier qui aura le dernier mot de l’extrait v.41.
- le fait que Cyr se lance ds une déclaration à double voix (pr lui et pr Christian) est
perceptible ds la structure de 2de tirade : présence de tirets v.19, 24. Effet de dialogue au cœur même
de ses répliques. Dualité de la parole qui va souligner situation particulière ds laquelle il se trouve.
b) Cyrano se dévoile
En parlant au nom de Christian, Cyr parle en fait pr lui-même, ss que Roxane et son rival ne le
devinent. Indices renvoyant à ce qu’il vit (discrs à double sens qui repose sur la double énonciation :
seul le spectateur peut cprendre totalement ce qu’il dit) :
- « terrible et jaloux » v.17 : Cyr est en fait jaloux de Christian qui peut exprimer sa
passion à Roxane ss se cacher.
- motif du « sacrifice » v.23 (placé à la rime): thème développé v.20-21 (image de l’amant
qui pense d’ab au « bonheur » v.20, 23 de celle qu’il aime, capable d’enfouir son sacrifice ds le
silence avec « rien » à la rime : vraie marque d’amr, de dévouement). Or c’est ce que Cyr est en train
de faire : se sacrifier pr Roxane en lui faisant aimer Christian.
- anecdote avec détail sur la coiffure et mention précise de la date : « douze mai » v.9.
Indice : « l’an dernier » v.9 (or Christian ne la connaissait pas encore (v.44 à l’acte I, déclare ê à Paris
« depuis 20 jrs à peine » : précision qui prrait trahir Cyr et révéler son secret à Roxane et Christian).
- v.25-26 : « Commences-tu / À cprendre ? ». Phr qui peut ê cprise de 2 man : Roxane
peut croire que sentiments de Christian se dévoilent de plus en plus ; fait allusion à la situation de Cyr
qui parle de sa joie de pvoir enfin se déclarer de man directe.
- embrasse « éperdument l’extrémité d’une branche pendante » (didascalie) : geste qui
aurait pu le trahir car cela ne peut pas ê l’attitude neutre de qq’1 qui parle pr un autre (exprime sa
passion alors que Roxane ne peut pas le voir). Aveuglement de Christian qui ne cprendra les senti de
Cyr que ds IV, 7.
- « cette ivresse, c’est moi, moi, qui l’ai su causer » v.40 : insistance trop marquée sur
pronom « moi » avec répétition successive (fin 1er hémis, déb 2d hémis). Fierté de Cyr qui n’arrive tjrs
pas à réaliser ce qu’il a fait car « c’est moi » sous-entend moi, malgré ma laideur.
⇒ certain nbre d’indices révélant que cette déclaration, qui s’affiche comme celle de
Christian, est en fait un discours à double voix : Cyr s’exprime en son nom et révèle la
difficulté de cette situation.
2) une situation particulière
a) le drame de la situation
- on a affaire à un duo/trio : dialogue qui devait ê à 2 voix (Christian / Roxane) se fait
en réalité à 3 (en gardant cpdt l’image du duo). Cyr est conscient de cette situation particulière : peut
s’exprimer directement sans que Roxane ne le sache. Utilisation du système hypothétique : v.22 « s’il
se pvait […] que […] j’entendisse » (emploi de l’imparfait de l’indicatif + subj imparfait).
- certaine lucidité marquée par emploi du conditionnel : v.20-21 « je donnerai », « qd
même tu devrais ».
- cpdt, Cyr, même en ne formulant pas de gds désirs, n’en revient pas : « Ds mon espoir
même le moins modeste, / Je n’ai jams espéré tant ! » v.30-31. Réalité de ce qu’il vit ce soir-là mise
en évidence par la négation « jams » et par adv « même ». Litote : dire moins pr suggérer davantage
(= ds mon espoir le plus fou). Man de montrer que réalité dépasse ses espérances.
- réaction confirmée par v.28 : « c’est trop beau, c’est trop doux ! ». N’arrive pas à
réaliser (parallélisme ds construction de hémis avec répétition de « c’est »). Questions rhétoriques
v.25-27 s’inscrivent ds cette perspective : man de mettre en évidence que c’est une situation
exceptionnelle pr lui.
b) un baiser inaccompli
- Cyr fait avancer l’intrigue amreuse entre Roxane et Christian à ses dépends : Roxane
est de plus en plus éprise de cet amant qui parle si bien d’amr (« suis tienne » v.38). Fin de l’acte III
verra le mariage entre Roxane et Christian. Cyr œuvre paradoxalement pr un rival.
- dial retrouve à la fin sa vraie voix : celle de Christian qui complète les paroles de Cyr
(points de suspension v.41) avec « un baiser ! ».
- registre comique ds cette intervention : Christian fait passer le discrs de la noblesse à
la réalité triviale. Réclamation sans tact de Christian rappelle Cyr à la dure réalité : le héros chute du
sublime au grotesque.
- Christian profite du quiproquo : comique de situation car le rival obtient ce que Cyr ne
peut pas obtenir (III, 10). Signe d’inachèvement de la relation établie par la parole : fossé qui sépare
Cyr de Roxane à cause de sa laideur.
⇒ la situation particulière de Cyr parlant au nom de son rival et n’osant pas espérer trop
introduit une nuance pathétique ds ce passage marqué par le lyrisme et se finissant sur une
touche comique.
3) le registre pathétique
a) la mort
- évoquée à 2 reprises ds les propos de Cyr pr signifier qu’il a tt obtenu et qu’il n’attend
plus rien : « mourir » v.32, « la mort » v.39.
- négation restrictive : « ne […] que » v.31-32, 41. Signe d’un dépouillement : prêt à
accepter la mort.
- venue de la mort placée sous le signe du shait v.39 : emploi de « que », utilisation du
subj de shait « vienne », modalité exclamative.
b) la souffrance
- « fureur triste » v.18 : oxymore alliant énergie et souffrance. Signe que son amr secret
est une source de douleur.
- « terrible » v.17 : adj dont le sens peut évoquer qqch de désagréable, de pénible.
- distance marquée par « de loin » v.22 : souffrance car le contact direct ne peut pas
s’établir.
- contradictions du pers sont révélées par ces indices : bonheur (exprimé avec intensité)
et souffrance ds le non-dit de la déclaration amreuse.
Conclusion
Point culminant que représente scè 7 de l’acte III : le balcon la place sur le thème de l’élévation,
de l’exaltation ; elle propose le dial amreux le plus passionné de la pièce ; ce dialogue à trois constitue
l’un des ressorts dramatiques les plus forts de l’œuvre (mêlant comique et pathétique). Déclaration
d’amr de Cyr met en place 2 enjeux fondamentaux de la pièce : l’avancée de l’intrigue entre Roxane et
Christian (avec une scè de balcon propice au discrs amreux cô ds Roméo et Juliette de Shakespeare) et
la révélation intime du héros ds une envolée lyrique. Le pers de Cyr atteint ici une profondeur et une
humanité qui le rendent particulièrement touchant.
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