>LA CONQUÊTE DE L’ESPACE NOUVELLES MISSIONS SPATIALES POUR 2012 LE SOLEIL ET LA LUNE ONT... La planète Terre évolue sous l’influence constante du Soleil et de la Lune. Des programmes de la Nasa tentent de découvrir leurs secrets… PAR CHARLOTTE ALIX PHOTOGRAPHIES DE LA NASA L ÉRUPTION SOLAIRE Une image du Soleil prise par le Solar Dynamics Observatory. L’éruption du 22 janvier dernier (en haut) a projeté un nuage de plasma à la vitesse de 1 700 kilomètres par seconde. Conséquence ? Une tempête géomagnétique record depuis 2005. 2 sciences MARS 2012 e 13 mars 1989, le Québec se trouvait plongé dans le noir à cause… du Soleil. La cause ? Un orage géomagnétique. Éjectées par une éruption solaire, des particules énergétiques (plasma), guidées par des vents solaires, ont réussi à déjouer notre bouclier de protection – la magnétosphère – entraînant de graves perturbations dans le réseau électrique. Le Soleil n’est pas l’astre tranquille que l’on pourrait imaginer. Étoile variable, ses changements d’activité sont autant de menaces pour notre Terre. Or, du fait de notre dépendance aux technologies, nous sommes de plus en plus vulnérables à son influence. Satellites, GPS, trafic aérien, fréquences radio, forages pétroliers… tous peuvent être perturbés lors de fortes tempêtes magnétiques. Bien qu’observés depuis désormais longtemps les phénomènes dynamiques solaires et leurs incidences sur la planète Terre restent encore très énigmatiques. Lancé en 2010 par l’agence spatiale américaine (la Nasa), le programme scientifique Living With a Star (Vivre avec une étoile) prévoit d’envoyer dans l’espace plusieurs « stations météorologiques », afin de mieux les cerner. QUI TIRE LES FICELLES ? D’ailleurs, l’une de ces stations est d’ores et déjà en action : depuis deux ans, le Solar Dynamics Observatory (SDO), un satellite de dernière génération, photographie en très haute définition les taches solaires (zones d’intense activité), les éruptions et les vents solaires qui s’ensuivent, révélant les prémisses de tempêtes à un niveau de détail jamais atteint jusque-là. Grâce à ces différents clichés, la Nasa produit des cartes précises du magnétisme du Soleil, et tente de percer les mystères de la dynamique observée. Pour Madhulika Guhathakurta, l’astrophysicienne à la tête du programme Living With a Star, « le SDO offre la promesse de D sciences MARS 2012 3 >LA CONQUÊTE DE L’ESPACE TROIS MOIS DE MISSION Les sondes jumelles Grail vont commencer à scanner la Lune afin de cartographier sa structure interne, et déterminer son évolution thermique. Démarrage en mars 2012. LA LUNE ATTISE DE NOUVEAU LA CURIOSITÉ DE NOMBRE DE SCIENTIFIQUES. ...RENDEZ-VOUS AVEC LA TERRE révolutionner la physique du Soleil de la même façon que le télescope Hubble a révolutionné l’astronomie ». La chercheuse compare l’activité de cet astre à un spectacle de marionnettes : « Pour comprendre le mouvement des marionnettes, il faut pouvoir observer les ficelles – ici, les champs magnétiques à l’œuvre dans l’atmosphère du Soleil. Mais qui tire les ficelles ? Probablement le générateur d’énergie magnétique de l’étoile, qui se cache sous sa surface. » Grâce à l’imagerie héliosismique, une technique de pointe, le SDO peut mesurer les vibrations à la surface du Soleil pour sonder l’intérieur de l’étoile, de la même manière qu’un géologue utilise les ondes sismiques des tremblements de terre pour sonder l’intérieur de la Terre. L’objectif ultime est d’anticiper l’activité du Soleil, afin de mieux prévoir ses répercussions sur nos satellites, et donc sur nos systèmes de communication. Mais ce n’est pas tout… LE SOLEIL À SON MAXIMUM À la fin de l’été, le SDO sera rejoint par deux sondes envoyées dans le cadre de la mission Radiation Belt Storm Probes. Ceux-ci étudieront les changements que subissent les ceintures de radiation de notre magnétosphère – connues pour 4 sciences MARS 2012 « piéger » les particules énergétiques – lors des orages magnétiques. La période est bien choisie : après deux années de profond sommeil, notre étoile retrouve de sa vigueur. L’activité du Soleil, qui répond à un cycle d’environ onze ans, sera à son maximum en 2013. A près des décennies de désintérêt, la Lune suscite elle aussi la curiosité des scientifiques. La Chine souhaite y envoyer des hommes d’ici 2020. Quarante ans après la dernière mission Apollo, les États-Unis y ont de leur côté renoncé, ce qui n’empêche pas la Nasa de lancer de nouvelles missions pour mieux la comprendre. Par sa composition, la Lune s’apparente à une planète tellurique. Et c’est sans doute celle qui a le moins évolué au cours des derniers millions d’années, ce qui en fait un parfait témoin de l’évolution de la Terre. En orbite depuis le début du mois de janvier, deux sondes Grail vont commencer leur mission en mars 2012, en passant littéralement la Lune au scanner. « Notre objectif est de déterminer la structure interne de la Lune, et d’utiliser ces informations pour reconstituer son histoire, explique Maria Zuber, chef de la mission. Aujourd’hui, de nombreuses questions restent encore sans réponses. Pourquoi la face visible de la Lune estelle si différente de sa face cachée ? Pourquoi, comme nous le pensons, sa surface a-t-elle un jour fondu avant de se refroidir très rapidement ? Quelle quantité d’eau la Lune contient-elle ?… » Sur la Terre, les processus internes, comme les éruptions volcaniques et les tremblements de terre, ont façonné la surface. En étudiant l’intérieur d’une planète, les scientifiques espèrent mieux appréhender les forces qui ont opéré sur celle-ci au cours du temps. Pour Maria Zuber, la connaissance de la structure interne de la Lune constitue la pièce manquante du puzzle pour comprendre notre satellite, et, puisque celui-ci sert de témoin, la clé pour appréhender l’évolution des autres planètes telluriques : Mercure, Vénus, la Terre et Mars. Mais l’intérêt des Terriens pour la Lune n’est pas seulement scientifique. Ses ressources naturelles (silicium et uranium, notamment) aiguisent les appétits. D’autres encore voudraient y installer un champ de panneaux solaires. Tandis que les astronautes, eux, aimeraient pouvoir faire décoller des fusées depuis le sol lunaire. Des plans sur la comète qui nécessitent évidemment de mieux connaître notre voisine. N LES FAITS �BIEN QUE LA LUNE SOIT PLUS PROCHE DE NOUS, NOUS LA CONNAISSONS MOINS QUE MARS. �L’ACTIVITÉ SOLAIRE DEVRAIT ATTEINDRE UN NOUVEAU PIC Fusée Delta 2, EN 2013. du type de celle UNE LENTE ÉVOLUTION Vestige du passé, la Lune a peu changé depuis sa formation il y a 4,36 milliards d’années (selon les dernières études). Mieux la comprendre permettra donc de mieux cerner l’évolution des autres planètes telluriques, dont la Terre. qui enverra les deux sondes Grail dans l’espace. sciences MARS 2012 5