Comment prévenir les problèmes de pied ?
Introduction
1. Inspection régulière
2. Identification des patients à haut risque
3. Education pour les diabétiques, la famille et les acteurs de santé
4. Chaussage approprié
5. Traitement des pathologies non ulcératives
Podologie
Pathologies non ulcératives
Chez les personnes diabétiques, un examen des pieds doit être réalisé au moins une
fois par an et plus souvent chez celles ayant un risque élevé d'ulcération.
L'identification des patients à risque d'ulcération est l'aspect le plus important dans
la prévention des amputations.
L'éducation, partie intégrale de la prévention, doit être simple et répétitive.
L'éducation doit être ciblée à la fois vers les acteurs de santé et les personnes
diabétiques.
Introduction
Plusieurs études ont montré qu'un programme complet sur les soins des pieds comprenant
éducation, examen régulier des pieds et classification du risque podologique peut réduire
l'apparition de lésions du pied jusque chez 50% des patients.
Cinq éléments sont incontournables pour la prévention :
Inspection régulière et examen des pieds à haut risque
Identification des pieds à risque
Education du patient, de la famille et des acteurs de santé
Chaussage approprié
Traitement des pathologies non ulcératives
1. Inspection régulière
Les experts conseillent qu'un examen à la recherche de problèmes potentiels du pied soit
réaliau moins une fois par an chez tous les diabétiques et plus fréquemment chez ceux
ayant des facteurs de risque démontrés. Pour plus de détails, se référer au chapitre
correspondant des Recommandations Pratiques.
2. Identification des patients à haut risque podologique
Des études d'observation et d'intervention ont défini une série de facteurs de risque qui
peuvent facilement être identifiés par l'interrogatoire et l'examen clinique.
Facteurs de risque identifiables à l'interrogatoire et à l'examen clinique :
Antécédents d'ulcère/amputation
Absence de relations sociales
Absence d'éducation
Anomalie de la sensation de protection (monofilament)
Anomalie de la perception vibratoire
Aréflexie achilléenne
Callosités
Déformations du pied
Chaussage inapproprié
A la suite de l'examen clinique, il faut catégoriser le patient selon un système de
classification du risque. Malheureusement, il n'existe pas de système universel pour prédire
une ulcération future. Les experts impliqués dans le Consensus sur le Pied Diabétique
suggèrent actuellement d'adopter le système de classification suivant :
Système de catégorisation du risque
Catégorie Profil de risque Fréquence des bilans
1 Pas de neuropathie sensitive Une fois/an
2 Neuropathie sensitive Une fois tous les 6 mois
3 Neuropathie sensitive, signes d'artério-
pathie périphérique et/ou formations
des pieds
Une fois tous les 3 mois
4 Antécédent d'ulcération Une fois tous les 1-3 mois
3. Education pour les patients diabétiques, la famille et les acteurs de soins
Relativement peu de recherches ont porté sur l'effet spécifique de l'éducation sur l'incidence
des ulcères et des amputations. Bien que quelques études suggèrent que l'éducation
aboutisse à une réduction des ulcérations et des amputations, dans la plupart d'entre elles
l'éducation faisait en fait partie d'un programme détaillé de soins des pieds.
Qui éduquer ?
Il est recommandé que l'éducation, intégrée à un programme global de soins des pieds, soit
dirigée vers les catégories de patients à haut risque, en particulier quand les ressources
financières sont peu importantes. L'éducation doit concerner les professionnels aussi bien
que les patients. L'identification des pieds à risque et des lésions à un stade précoce est la
plus importante des responsabilités des soignants. Malheureusement, l'examen des pieds
est souvent négligé, malgré des recommandations claires. Jusqu'à 50% des patients
subissant une amputation auraient un examen du pied incomplet. En outre, selon une étude,
sur 23 sujets amputés sous le genou, 22 n'avaient jamais été informés de l'intérêt des
mesures préventives ou d'un traitement précoce.
Comment éduquer et qui devrait le faire ?
Le but de l'éducation est de modifier le comportement du patient quant à sa propre prise en
charge et d'augmenter son observance quant aux conseils sur les soins des pieds (c'est à dire
la prescription de chaussures). De plus, les patients diabétiques devraient identifier leurs
problèmes potentiels de pied et prendre alors la bonne décision (c'est à dire rechercher
l'aide d'un professionnel). L'éducation doit être simple, pertinente, logique et répétée. En
outre, les médecins et autres professionnels de santé devraient être éduqués
périodiquement et leur capacité de traiter le diabète renforcée, afin d'améliorer les soins
donnés aux sujets à haut risque podologique.
Actuellement, les données sont insuffisantes pour savoir quelle(s) technique(s) utiliser.
L'effet d'une séance d'éducation a été évalué dans deux études, donnant des résultats
contradictoires. Il a été montré que des séances d'éducation sur les soins des pieds sous
forme de conférences amélioraient les connaissances mais avaient peu d'effet sur une
véritable prise en charge personnelle de leurs pieds par les patients. Les programmes dont le
but est d'augmenter la motivation et les aptitudes et au cours desquels l'éducation est
délivrée en plusieurs séances dans le temps, semblent plus prometteurs. Ces programmes
aboutissent à des comportements plus appropriés des patients vis-à-vis de leurs pieds et,
comme le montre une étude, à une diminution du nombre de problèmes de pied nécessitant
un traitement.
Dans le meilleur des cas, l'éducation fait partie d'un programme global portant sur les pieds
et représente l'effort de toute un équipe, à la fois dans le public et à l'hôpital. Idéalement,
cette équipe doit être présente à la fois dans les centres de soins primaires et les structures
hospitalières spécialisées. L'éducation doit faire partie intégrante de tout contact avec le
patient au sujet de son diabète, notamment chez le patient à haut risque.
Dans de nombreux pays, les acteurs de soins primaires, les infirmières en contact avec les
diabétiques et les podologues devraient prodiguer l'éducation. Les techniques utilisées
dépendront des particularités locales. L'accent doit être mis plus sur une éducation
participative que sur une éducation normative, ex cathedra. Bien qu'existe un grand nombre
de techniques éducatives, il est probable que l'approche la plus efficace comprenne un
mélange de méthodes audio-visuelles, d'apprentissage actif et de lecture. En outre,
l'éducation peut être donnée à la fois en sessions individuelles et collectives. L'écrit devrait
être renforcé chaque fois par l'oral. Des brochures devraient être utilisées comme
complément à l'éducation personnelle.
L'éducation devrait être ciblée vers certains groupes et les budgets sont limités,
spécifiquement vers les sujets à haut risque. Des approches particulières sont nécessaires
pour les patients âgés qui, en raison de leur déficit visuel et de leur mobilité réduite, ne sont
pas toujours physiquement capables d'examiner leurs pieds quotidiennement. Dans ce cas,
l'aide d'un membre de la famille ou de professionnels de santé doit être envisagée. Le profil
socio-économique et culturel doit être également pris en compte quand, par exemple, des
chaussures sont conseillées ou prescrites. Il faut souligner qu'il est essentiel d'évaluer si le
patient a bien compris tous les messages, s'il est motivé pour agir et a les aptitudes
suffisantes pour se soigner lui-même.
En conclusion, il est très vraisemblable que l'éducation, faite d'une manière structurée et
organisée, a de la valeur dans la prévention des problèmes du pied chez le diabétique. Dans
le chapitre des Recommandations Pratiques sont décrites les questions qui doivent être
traitées dans l'éducation du patient à haut risque et de sa famille.
4. Chaussage approprié
Les chaussures protègent les pieds du diabétique des traumatismes, des températures
extrêmes et de la contamination. Les patients sans perte de la sensation de protection
peuvent choisir eux-mêmes leurs chaussures dans le commerce. Pour les patients avec
neuropathie et/ou ischémie, des impératifs supplémentaires de chaussage doivent être
satisfaits, notamment en cas de déformations (voir les chapitres Biomécanique et chaussage
et les Recommandations Pratiques).
5. Traitement des pathologies non-ulcératives
Il n'y a rien d'aussi banal qu'une lésion bénigne du pied chez le diabétique. Apparemment,
des lésions minimes peuvent aboutir à un ulcère et constituer la porte d'entrée d'une
infection rapidement ascendante ; ces lésions ne doivent jamais être sous-estimées. Les
patients à haut risque doivent être traités régulièrement par un spécialiste formé aux soins
du pied. En particulier, les callosités et les pathologies des ongles et de la peau doivent être
prises en charge. Au cas le patient ne peut se couper les ongles sans risque, le geste doit
être fait par des spécialistes entraînés. Il est crucial que les patients aient accès à des soins
podologiques de prévention adéquats, quel que soit leur statut socio-économique. Les
experts pensent qu'il est important d'aborder les points ci-dessous.
Hyperkératose (corne et callosité)
Elle survient aux points de pression et de friction et s'associe souvent à un chaussage
inadapté. Si elle est négligée ou traitée de façon inadéquate, un ulcère peut se développer.
Un débridement large et régulier à l'aide d'un scalpel est le traitement de choix. Les experts
déconseillent vivement l'usage d'agents kératolytiques ou de remèdes "spécialisés". Toute
callosité associée à un saignement, une décoloration ou une bulle doit être considérée
comme une urgence clinique. Les problèmes de chaussage doivent être discutés.
Mycoses (pied d'athlète)
Les mycoses cutanées peuvent être la porte d'entrée d'infections plus sévères. Le pied
d'athlète se présente sous la forme de multiples petites vésicules prurigineuses (le prurit
peut manquer en cas de neuropathie), d'une hyperkératose macérée avec des fissurations
interdigitales ou répartie en mocassin. Le traitement local est en néral efficace. En ce qui
concerne les infections mycosiques des ongles (onychomycoses), la technique à la potasse
peut être utilisée pour les diagnostiquer. Ces infections résistent au traitement local et une
thérapeutique générale antifongique doit être envisagée.
Verrues
Elles n'ont pas à être traitées à moins qu'elles soient douloureuses ou extensives car, en
général, elles guérissent au bout de deux ans environ, après quoi le patient est immunisé.
Plusieurs options thérapeutiques sont possibles (cryothérapie à l'azote liquide, application
locale d'acide salicylique, exérèse chirurgicale, décharge). L'état vasculaire doit toujours être
vérifié avant cryothérapie ou chirurgie et les "remèdes" caustiques sont à éviter. La rupture
tissulaire qui en résulte doit être traitée comme un ulre superficiel, par décharge.
Bulles
La cause d'une ampoule doit toujours être identifiée pour prévenir les récidives. Les bulles
de petite dimension peuvent être badigeonnées au moyen d'un antiseptique dilué et
protégées par un pansement stérile ou être évacuées. Les larges bulles sous tension doivent
être drainées. Grâce une incision en croix du toit de la bulle, le contenu peut être évacué et
la base de la lésion examinée. La bulle peut alors être remise en place et la lésion protégée
par un pansement stérile. Les ulcères ischémiques, les ulcères d'appui et les corps étrangers
peuvent souvent initialement se présenter comme une bulle. Si des bulles de grande
dimension s'infectent secondairement, le problème thérapeutique peut devenir ardu.
Déformations des ongles
Ongles incarnés (onychocryptose)
C'est souvent le résultat d'une mauvaise technique de coupe des ongles et un fragment
d'ongle s'il est laissé sur un bord peut ensuite pénétrer dans le sillon. Creuser un côté du
sillon pour enlever des débris est également une autre cause fréquente d'ongle incarné.
L'exérèse soigneuse du fragment d'ongle et la protection du sillon par une compresse
antiseptique adaptée peuvent contribuer à résoudre le problème, mais de nombreux cas
nécessitent un recours à la chirurgie. Si une exérèse partielle de l'ongle est nécessaire, il est
alors essentiel de s'assurer avec soin de l'état vasculaire, de contrôler l'infection et de suivre
l'évolution. Une matricectomie totale ou partielle du lit de l'ongle préviendra la repousse.
Epaississement (onychogryphose) et déformation des ongles (onychauxis)
Tout ongle épaissi, accompagné ou non d'une déformation, nécessite d'être désépaissi
régulièrement au moyen d'une meule électrique ou d'un scalpel, au risque que la chaussure
appuie sur cet ongle épaissi et cause un ulcère sous-unguéal. L'épaississement des ongles
s'associe souvent à une mycose. Des ongles négligés peuvent éventuellement entraîner des
traumatismes graves aux orteils voisins.
Références :
Peters EJG, Lavery LA. Effectiveness of the diabetic foot risk classification system of the
International Working Group on the Diabetic Foot. Diabetes Care 2001;24(8):1442-7
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