TD : CONTRATS 14/11/16
Séance 4
Doc 4: Civ. 1ère, 7 novembre 2000, Bull
Commentaire
Introduction
(Accroche) Le professeur René Savatier définissait la clientèle comme un “peuple
d’hommes et de femmes” propre à un professionnel. Cette vision traditionnaliste fut tour
à tour confirmée et contestée par la doctrine et la jurisprudence, notamment au regard
de la question épineuse de la cession de clientèle civile. La Cour de cassation, par l’arrêt
du 07 novembre 2000, met un terme à ces dissensions marquées.
(Faits) Dans le litige dont il est question, Messieurs Sigrand et Woesnner, tous deux
chirurgiens de leur état, s’associent pour la constitution d’une société civile de moyens.
Monsieur Woesnner met à disposition de son associé son cabinet professionnel et
s’engage par la signature d’une convention de cession de clientèle, datée du 15 mai 1991,
à lui céder la moitié de sa clientèle en contrepartie du versement d’une indemnité d’une
valeur de 500 000 francs, somme en partie déjà versée par son confrère. Le dant
contracte également une convention de garantie d’honoraires promettant à son confrère
un chiffre d’affaire annuel minimum.
(Procédure) M. Sigrand assigne son confrère en annulation de leur convention. A la date
du 02 avril 1998, la Cour d’appel fait droit à sa demande en prononçant la nullité du
contrat et par la même condamne M. Woessner à la restitution des sommes déjà perçues.
Celui-ci, demandeur, forme alors un pourvoi auprès de la Cour de cassation.
En l’espèce, la plus haute juridiction est amenée à se prononcer sur la licéité d’une
cession de clientèle médicale dans une situation la liberté de choix des patients ne
semblait pas respectée.
(Question de droit) La Cour de cassation est amenée à se prononcer sur le problème
suivant : la cession de clientèle médicale est-elle licite lorsque la liberté de choix du
patient n’est pas respectée ?
(Réponse et plan) Dans cet arrêt de rejet, qui constitue un revirement de jurisprudence,
la Cour de Cassation consacre la galité de la cession de clientèle (I), à la condition du
respect de la liberté de choix du patient (II).
A noter : ici il s'agit de chirurgiens donc de civils, le litige a lieu devant le Tribunal de
grande instance. (Ce ne sont pas des commerçants)
Dans l'arrêt, on ne sait rien sur le tribunal, on sait que c'est la cour d'appel de Colmar
donc 4 tribunaux de grande instance: Mulhouse, Strasbourg, Colmar et Saverne.
Plan
I. Consécration de la licéité de la cession de clientèle civile
(Attention à ne pas oublier la sous annonce, possibilité de la rédiger de façon scolaire
"nous allons étudier dans une première partie....puis dans une seconde partie....")
Si la jurisprudence a suivi un long chemin (ou si la jurisprudence a mis cent cinquante
ans) avant de reconnaître la validité de la cession de clientèle (A), cette réalité peut être
aujourd'hui détruite par un autre grand principe comme celui de la liberté de choix du
patient (B).
A. La cession de clientèle
2 idées directrices dans cette sous-partie:
1 Comment peut on vendre clientèle alors que c'est quelque chose qui ne dépend pas de
soi ?
Exemple du médecin qui vend quelque chose qu'il ne peut pas garantir, car il n'est pas
propriétaire des clients. Tout cela s'explique par le caractère extrêmement personnel de
la clientèle qui a un caractère à la fois économique et humain. On est dans l'ordre de
l'affectif il y a une relation de confiance (comme dans les relations entre client et
avocat)
1 Moyen de la clause de non concurrence et il y'a un droit de présentation.
Le médecin cédant, présente son successeur aux patients.
La question que l'on se pose ici est : Qu'est ce que la cession de clientèle? Peut- on
vraiment la céder?
En réalité on cède un droit de présentation pas une clientèle. On ne peut comparer une
clientèle médicale à celle d'une épicerie.
La clientèle est quelque chose d'incorporel. Il y a un antagonisme entre la définition de
clientèle et le fait de lui attacher un prix alors qu'il s'agit de quelque chose
d'ingérable.
Aujourd'hui le phénomène concerne surtout des spécialités car par exemple les
généralistes sont en nombre réduit donc pas de cession de clientèle.
Historique de la cession de clientèle: Avant réforme de 2016, l'article 1128 du code
civil prévoyait que les choses qui sont dans le commerce peuvent être objet de
cession. Donc la clientèle médicale étant civile, elle ne pouvait faire objet de
cession (jugement en date du 25 février 1846 par le Tribunal de la Seine).
Arrêt 7 mars 1956 / arrêt 4 janvier 1995
3 éléments en faveur des clauses non concurrence : acceptation du cédant, contrat
de service et contrat aléatoire qui dépend de la volonté de la clientèle qui fait
confiance au successeur.
B. Le défaut d'illicéité / La conformité de la cession de clientèle
La cession de clientèle est reconnue par la Cassation, depuis le 7 novembre 2000, comme
licite. Après une longue période de restriction, on donne une cohérence économique en
reconnaissant comme licite la cession de clientèle. Dans l'attendu de principe, le
vocabulaire est similaire à celui du fonds de commerce ; la jurisprudence rapproche
alors la clientèle civile à celle commerciale. Il est nécessaire de pouvoir donner une
certaine valeur à cette clientèle.
Le droit de présentation fait allusion au droit de présentation des notaires qui sont
nommés par le garde des sceaux. Pas de vente d'office mais droit de présentation du
successeur notifié au ministre de la justice qui demande combien il a payé l'office.
Il faut rappeler dans cette sous-partie que toute la seconde partie du pourvoi regarde ce
droit de présentation, argument qui selon la cour de Cassation est inopérant car
l'ensemble est illicite. Selon le pourvoi, il y a deux éléments licites: le droit de
présentation et la location/vente de matériel.
II. Condition de la licéité de la cession de clientèle civile
La liberté de choix du patient étant un principe fondamental en droit français (A), son
non respect entraîne la nullité de la cession pour caractère illicite de l'objet (B).
A. Liberté de choix du patient
En l'espèce, la liberté de choix du patient n'est pas sauvegardée selon la cour d'appel car
les médecins auteurs de la cession n'ont pas prévu cette liberté. En effet, la clientèle,
objet de la cession, passe automatiquement d'un médecin à un autre.
Dans l'arrêt analysé, la volonde cession des médecins ne respecte pas forcément la
volonté des patients et donc rompt le lien de confiance nécessaire entre patients et
médecins. Mais cette relation de confiance existe t-elle seulement entre médecin et
patients? La réponse n'est pas certaine (M.Pansier prend l'exemple de la confiance entre
client et son garagiste). Mais alors le débat de cette sous-partie est-il juste?
On peut avoir une relation de confiance même si le médecin nous est imposé (exemple de
la Grande Bretagne pour être remboursé il faut nécessairement être sur la liste du
médecin de quartier.) Le patient a une liberté mais elle peut dans certains cas le limiter
dans son choix car par exemple le remboursement attendu sera minoré ou totalement
exclu.
B. La sanction du caractère illicite de l'objet
Hier comme aujourd'hui le caractère illicite de l'objet du contrat empêche toute
tentative de le sauver par une autre technique. Mais cet arrêt n'empêche pas que le
caractère licite de la cession de clientèle civile demeure.
En l'espèce, la cession de clientèle médicale, objet du contrat, est considérée illicite.
L'objet est défini à l'article 1128 du code civil et son caractère illicite rend le contrat nul
de nullité absolue.
Même en Common Law, quand l'objet est contraire à la loi, le contrat est nul sans avoir à
demander au juge la nullité du contrat car la nullité prévue par la loi est
automatiquement sanctionnée.
La seconde branche du moyen tentait d'éviter la nullité du contrat pour cause illicite en
invoquant une cause partiellement licite car au fond la cession de clientèle est un droit
de présentation et une location de matériel médical. Comme dit in fine de la branche,
"l'obligation du contrat était pour partie pourvue d'une cause".
Selon la Cassation, l'argument de cette seconde branche n'est pas susceptible de faire
changer la solution c'est à dire qu'il est inopérant.
L'illicéité de l'objet pour non respect d'un principe général du droit entraîne la nullité du
contrat est donc même de la cause.
Illicéité du contrat l'emporte sur la renaissance de la cause sous une autre forme. L'objet
et la cause sont morts vont-ils un jour renaître comme le phœnix?
La cour d'appel statue souverainement sur le fait que la liberté de choix du patient n'est
pas respectée. On peut dire que la cession ne tient pas car il y a atteinte à un principe
fondamental de droit français qui est la liberté de choix du médecin (et en France le
médecin peut aussi refuser un patient, comme l'avocat qui peut choisir de ne pas
défendre un client).
En l'espèce dans le contrat y avait-il vraiment ou non liberté? On ne sait pas, d'après ce
que dit la partie qui formule le pourvoi, on a l'impression que les malades avaient une
totale liberté de choix. La Cassation ne contrôle pas, elle repose sa réponse sur
l'instruction de la cour d'appel, la demande est alors rejetée.
Séance 5: les nullités
Distinction entre nullité relative et nullité absolue.
Arrêt 12 novembre 2015
La nullité d'un contrat fondée sur l'absence de pouvoir du mandataire sociale, qui est
relative, ne peut être demandée que par la partie représentée.
Double scission: la nullifondée sur l'absence de pouvoir est relative (I), ne peut être
demandée que par la partie représentée (II).
I. Choix entre nullité relative et absolue / la qualification de la nullité
Le choix n'est plus un problème de délai mais de qui peut agir.
II. Conséquences
Arrêt 22 mars 2016
La Cour de Cassation fait de la pédagogie dans cet arrêt et explique sa jurisprudence et
l'historique.
cf. Cinquième paragraphe et sixième paragraphe.
Exemple : si je vous vends un stylo cassé à un euro, on peut contester que c'est une
vente à vil prix car neuf il coûte 180 euros.
Le vil prix est un prix qui n'a rien à voir avec celui véritable. (Il y a l'excessif, le
déraisonnable et ce qui est en dessous est le vil prix).
Il n'y a pas qu'un prix possible car il existe une marge.
La Cassation fait ce qu'on aimerait voir dans un commentaire d'arrêt; tout d'abord
l'historique des différentes chambres, avec les changements d'opinions, puis
l'explication.
On nous dit qu'il faut savoir si on protège un intérêt privé ou un intérêt général, car de
cette distinction dépend le type de nullité.
La Cour de Cassation choisit la même position car ce n'est pas l'existence d'un élément
essentiel (il y a un objet ou non, il y a une cause ou non), mais la nature de l'intérêt qui
importe.
On peut faire un plan logique:
I. Les raisons d'un choix
Comment on choisit
II. Les conséquences d'un choix
Nullité absolue ou relative
Pour la semaine prochaine: SEANCE 5, commentaire du document 6 (ou doc 5), en entier
de préférence.
Document 6:
La Cassation n'invoque pas une violation mais un manque de base légale.
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