« Foyer épileptique en miroir »: neuromonitoring durant 4 interventions par hémisphèrectomie fonctionnelle. ( EEG , Corticographie et analyses dipolaires ) D. Debatisse*, S. de Ribaupierre*, E. Pralong*, M.Maeder-Ingvar**,D.Freymond***, E. Roulet- Perez****, C. Pollo*,P.-A. Despland**, J.-G. Villemure*, Department of Neurosurgery*, Neurology ** ,Anesthesia***and Neuropediatric Unit****, CHUV, Lausanne, Switzerland Congrès neurosciences 2003 CHUV Abstract: Nous avons étudié par EEG, analyse dipolaire et neuromonitoring peropératoire ( EEG et Corticographie) 4 enfants souffrant d’épilepsie rebelle et opérés par hémisphérectomie fonctionnelle. À l’occasion de ce travail nous avons pu confirmer que les analyses mathématiques de l’EEG ( dipole analysis) sont complémentaires et d’une aide certaine à la compréhension des phénomènes épileptiques observés à l’EEG. De même, nous confirmons electrophysiologiquement l’efficacité du traitement par hémisphérectomie fonctionnelle dans certains types d’épilepsies pharmacorésistantes. Enfin, pour un des enfants ( cas 1) nous avons pu observer en peropératoire l’extinction du foyer en miroir. Cas 1: avant intervention et perop Introduction : Du point de vue expérimental, le foyer "en miroir" ou foyer épileptique secondaire, apparaît dans l`aire corticale homotopique controlatérale après un intervalle de temps variant entre quelques jours et quelques semaines de la création d`un foyer épileptique chronique. Le développement du foyer "en miroir" se fait en deux phases bien différenciées : la phase dépendante et la phase indépendante ou autonome. Dans la phase initiale, dépendante, le foyer secondaire montre une activité qui consiste en des ondes aiguisées synchrones avec celles du foyer primaire. La persistance de manifestations épileptiques après l`ablation du foyer primaire chez certain patients est la preuve du développement d’un foyer indépendant. Lors de cette phase, le foyer "en miroir" montre des modifications de l'activité neurale semblables a celles du foyer primaire (Morell, 1969). La transformation d’un foyer dépendant en un foyer indépendant nécessite l`intégralité des connexions calossales ainsi que celle des connexions cortico-thalamiques. En l`absence de ces dernières, le foyer secondaire reste dépendant, ne pouvant pas acquérir un caractère autonome. Vu le caractère bien souvent réfractaire des traitements dans ce type de situation, l’hémispherotomie fonctionnelle est et reste, une alternative au traitement des foyers épileptiques en miroir et ce avant que ceux-ci ne devienne indépendants. Discussion : Multiples Foyers Per Opératoire intra Average des pointes Pariétales gauche extra cor cor D. Debatisse Janv 2002 D. Debatisse Janv 2002 10 4 D. Debatisse Janv 2002 17 Fig 1. EEG standard 10-20 avec décharges paroxystiques subcontinues semblant prendre un point de départ frontal gauche Per Opératoire (end) Foyer pariétal? Average des pointes Frontales cor D. Debatisse Janv 2002 intra 11 Fig 3 Correspond au mean average des pointes pariétales gauche ( au dessus) périlésionnelles et en dessous le mean average des pointes frontales. Le modèles utilisé pour détecter les dipoles est un modèle réaliste ( IRM normale contrôle) cor D. Debatisse Janv 2002 5 Fig 2. nette difficulté à déterminer s’il existe un foyer péri lésionnel pariétal à l’occasion des décharges hypervoltées La technique opératoire neurochirurgicale : CHUV CENNAS Neurochirurgie DD 20 Fig 4 corticographie ( flèche rouge) et EEG controlatéral ( flèche bleu)en per opératoire en début et fin d’OP Fig. 1,2 EEG baseline préopératoire, Cas 2 Matériel et méthode : 4 enfants souffrant d’épilepsie rebelle et réfractaires au traitement médicamenteux ont bénéficiés d’un traitement chirurgical par isolation hémisphérique ( cas 1:Sturge Weber, cas 2: AVC, cas 3: Neurofibromatose et cas 4: Epilepsie reflexe auditive). La mise au point electrophysiologique pré , per et postopératoire comprenait: l’ EEG une Corticographie et des analyses dipolaires (EEG micromed digital system 10-20 montage et dipôle analysis Eemagine and ASA ANT ). A noter que durant toute l’intervention, une analyse visuelle du tracé EEG (controlatéral au site opératoire ( FP2,1; C4,3; T4,3; O2,1)) était effectuée.A différents temps opératoire, une corticographie sur l’hémisphère opéré permettait de quantifier l’évolution des phénomènes épileptiques liés à l’acte chirugical. Conclusion : Cette étude préliminaire nous a donc permis de nous pencher « une nouvelle fois » sur les mécanismes des foyers épileptiques (en miroir ou non, dépendant ou indépendant ). Nous avons pu grâce à la méthodologie utilisée ( neuromonitoring ipsilatéral au site opératoire:corticographie et controlatéral: EEG ) confirmer la notion « de foyers multiples interconnectés » . Ce type de neuromonitoring nous a permis d’observer en temps réel « l’extinction d’un foyer controlatéral » pour un des patients. Ces observations permettent de confirmer l’existence et le rôle primordial des voies interhémisphériques intervenant dans la genèse des foyers en miroir. Enfin, ce travail confirme l’efficacité du traitement chirurgical par hémisphérectomie fonctionnelle dans certain type d’epilepsie rebelle. La méthode d’analyse des signaux électrophysiologiques : Les méthodes de modélisation dipolaire, permettant d'estimer statistiquement la localisation et l'orientation des sources des signaux électroencéphalographiques (EEG), ont été appliquées aux paroxysmes intercritiques depuis plus de 20 ans et suggèrent que la genèse des paroxysmes intercritiques repose plus sur l'expression d'un réseau de structures anatomiques que sur l'activation d'une région très focale. La précision temporelle (de l'ordre de la milliseconde) est une caractéristique de l'approche électrophysiologique, par contre, la localisation des sources neuronales à l'origine des potentiels (EEG) enregistrés à la surface du scalp nécessite de résoudre un certain nombre de problèmes méthodologiques. Pour déterminer la configuration et le décours temporel des sources neuronales qui engendrent les distributions observées sur le scalp lors de l’ EEG il est nécessaire de passer par la résolution du problème direct associé qui donne la relation entre le potentiel et les sources neuronales actives, assimilées à des dipôles de courant. Ceci nécessite l'élaboration de modèles physico-anatomiques du phénomène : caractéristiques géométriques et de conductivité des milieux, approximation du type de source et décours temporel. Celle utilisée pour ce travail est le « realistic model » correspondant en l’utilisation de l’irm du patient comme « volume » de référence. L'hémisphérectomie fonctionnelle et l'hémisphérotomie consistent à déafférenter un hémisphère entier tout en laissant en place sa vascularisation. Le déficit préexistant (hémiplégie, hémianopsie) est peu ou pas modifié par l'intervention et les possibilités de marche sont conservées. La difficulté est de s'assurer du caractère strictement unilatéral des crises d'épilepsie et de l'intégrité de l'hémisphère controlatéral. Même s’il existe des événements paroxystiques sur l’hémisphères sain d’apparition récente, l’approche chirurgicale reste de mise et ce dans le délai le plus court après l’apparition du foyer en miroir en vue de stopper les mécanismes physiologiques faisant passer une foyer dépendant vers un foyer indépendant. Sont en général retenu pour ce type de chirurgie :l’ Encéphalite de Rasmussen,l’ Hémimégalencéphalie et dysplasies étendues, le Sturge Weber et diverses séquelles d'accidents ischémiques. Le foyer épileptique : scho scho CHUV CENNAS Neurochirurgie DD Fig. 5 EEG baseline préopératoire, 26 D. Debatisse Janv 2002 scho 27 D. Debatisse Janv 2002 28 Fig 7 Correspond au mean average des pointes. Le modèles utilisé pour détecter les dipoles est un modèle réaliste ( IRM normale contrôle) Fig 6 Correspond au mean average des pointes Cas 3 Fig 10 Correspond au mean average des pointes. Le modèles utilisé pour détecter les dipoles est un modèle réaliste ( IRM normale contrôle) Fig. 8 EEG baseline préopératoire, Fig. 9 EEG baseline préopératoire, Darb Cas 4 References: -R.A. Wennberg, L.F. Quesney, J.-G. Villemure, Epileptiform and non-epileptiform paroxysmal activity from isolated cortex after functional hemispherectomy, Electroencephalography and clinical Neurophysiology 102, (1997) 437-442. -C.E. Henry, W. Scovile, Suppression burst activty from isolated cerebral cortex in man, Electroenceph. clin. Neurophysiol. (1952), 4, 1-22. -J.-G. Villemure, C. Adams, H. Hoffman, W. Peacock, Hemispherectomy. In Engel ( Ed.) Surgical Treatment of the Epilepsies, Raven Press, New York, 1993,pp 511-518. -J. M. Shelag, F. Andermann, J.-G. Villemure, Th. Rasmussen, L.F.Quesney, Functional hemispherectomy: EEG findings, spiking from isolated brain postoperatively, and prediction of outcome, Neurology, 1991; 41: 1790-1794. -L. Musella, B. Wilder and R. Schmidt, Electroencephalographic activation with intravenous methohexital in psychomotor epilepsy, Neurology, 1971, 21, 594-602. -M. Steriade, F. Amzica, D. Contreras, Cortical and thalamic cellular correlates of electroencephalographic burst.suppression, Electroenceph. clin. Neurophysiol, 1994, 90: 1-16 - Steriade,M., Gloor,P., Llinas, R.R. , Lopes da Silva F.H and M.M. Mesulam, Basic mechanisms of cerebral rhythmic activities, Electroenceph. clin. Neurophysiol., 1990, 76, 481-508. - Serge,J.C.,Pierre-Louis and Frank Morrell. Epileptiform activity in chronically isolated cerebral cortex in humans. Electroenceph. Clin. Neurophysiol., 82 (1992) 248-254. - Hufnagel,A., Burr, W., Elger, C.E., Nadstawek, J. and Hefner, G., Localisation of the Epileptic Focus During Methohexital-Induced Anesthesia, Epilepsia, 33 (2): 271-284, 1992. Fig. 10 EEG baseline préopératoire,et analyse dipolaire sur les pointes et mean average D. Debatisse Janv 2002 32 « Dans la mesure où il est possible de rapporter l’épilepsie à une cause, celle-ci produit ses effets par l’intermédiaire d’un foyer épileptogène » (Cambier et al. 1989). La conception classique du foyer épileptogène est décrit comme une région du cortex dont les neurones sont le siège d’une activité électrique et biochimique anormale, transitoire ou permanente avec ou sans répercussion clinique associée. Ces neurones sont situés au sein de tissus altérés mais non détruits. Les anomalies à l’origine de ces perturbations peuvent être morphologiquement identifiables (accident vasculaire cérébral, sclérose hippocampique, traumatisme crânien).Chez l’animal,plusieurs méthodes expérimentales permettent de modifier de manière durable le comportement de neurones sains en leur conférant ainsi un caractère épileptique. La stimulation électrique locale et répétée de neurones corticaux peut induire une activité anormale qui persistant après cette stimulation (« kindling », embrasement). Des phénomènes de génération de crise spontanée ou déclenchée par une stimulation très faible sont alors observés, semblables à ceux enregistrés en électrodes profondes chez les malades. L’aptitude à générer des décharges paroxystiques peut s’étendre à des neurones aux alentours de la région originale, mais aussi à distance, vers des neurones en connexion synaptiques avec le foyer initial. Les neurones impliqués dans une activité épileptique possèdent la capacité de générer une activité de décharge dite paroxystique, avec ou sans faible excitation extérieure, par l’hypersynchronisation de la population neuronale du foyer. Ces activités peuvent se traduire par des pointes à l’EEG et l’ECoG. Ces décharges paroxystiques sont autosuffisantes, et surviennent de manière autonome, même après isolement du cortex épileptique de ses régions voisines et des structures souscorticales. Contrairement aux concepts plus anciens qui faisaient nécessairement intervenir les structures enfouies tels que les noyaux gris centraux comme point de départ des crises, le cortex serait nécessaire et suffisant pour fabriquer une crise, même généralisée (par exemple en tirant profit des nombreux relais cortico-thalamiques pour propager la crise à l’ensemble du cortex) (Loiseau & Jalon, 1984) Une alternance d’effets excitateurs, mais aussi inhibiteurs comme pourrait se manifester la présence dans l’EEG d’ondes lentes à la suite de pointes plus rapides, comme des corrélats de potentiels inhibiteurs hyperpolarisants au sein du foyer.de même, il existe la possibilité d’induire des foyers secondaires à distance, souvent dans le cortex contra-latéral au foyer initial. Cette propriété ets retrouvée dans notre tarvail pour le cas 1.Il existe donc à minima 2 facteurs dans la genèse de l’épilepsie (Loiseau & Jallon 1984) : Un facteur favorisant : l’altération d’un groupe limité de neurones donnant naissance à un foyer épileptogène à l’origine des crises ; Un facteur déclenchant : des influx excitateurs inhabituels ou la disparition d’influx inhibiteurs par des facteurs physiques, psychologiques et pour finir neurochimiques. Bancaud abandonne ainsi le terme de foyer au profit de zone épileptogène. « La définition même d’une zone épileptogène est difficile à donner et ne saurait se confondre avec une perturbation lésionnelle qui en est pourtant le facteur causal, en tout cas déterminant, le médiateur essentiel étant sans doute biochimique ».Bancaud relève ainsi la grande variabilité des zones épileptogènes (ZE) :La ZE est variable d’un malade à un autre présentant le même type de crises.Une ZE peut admettre chez le même sujet, et lors de crises différentes, une topographie variable dans le temps. Cette dilatation ou cette rétractation dans les limites d’une ZE répond probablement à une fluctuation du seuil d’excitabilité des structures préalablement excitées.P. Chauvel émet un certain nombre d’hypothèses concernant une nouvelle conception de la zone épileptogène qui le mèneront à parler de réseau épileptique (Chauvel et al. 1987). Dans cette hypothèse, la ZE est associée à la notion de foyer initial possédant des voies de propagation pluridirectionnelle. La répétition excessive de décharges épileptiques faciliterait les connexions fonctionnelles à l’intérieur d’un système déjà anatomiquement câblé, comme dans le phénomène d’embrasement expérimental. En diminuant le seuil d’excitabilité de structures sollicitées à distance, certaines voies deviendraient alors des voies préférentielles de propagation. La ZE perd alors son caractère focal et sera maintenant considérée comme multistructurale et munie de connexions internes hyperexcitables. Ainsi ,le foyer "en miroir" ou foyer épileptique secondaire, apparait dans l`aire corticale homotopique controlatérale et ce après un intervalle de temps variant entre quelques jours et quelques semaines de la création d`un foyer épileptique chronique ( en expérimental). Le développement du foyer "en miroir" se fait en général en deux phases bien différenciées : la phase dépendante et la phase indépendante ou autonome. Dans la phase initiale, dépendante, le foyer secondaire montre une activité « synchronisées » avec celles du foyer primaire, activité qui parait refléter le bombardement synaptique synchrone et excessive venu par des voies calossales de ce dernier (d'ou le nom de foyer " en miroir "). On peut donc transposer ce modèle de « réseau inter hémisphérique par voies calossales » pour le patient case 1.