5
La maturation de la régulation immunitaire est largement régie
par l’exposition à des micro-organismes. Les animaux axéniques
présentent des réponses immunitaires excessives à une immunisation,
alors qu’une régulation immunitaire normale ou une tolérance orale
n’apparaît pas chez eux. Ce phénomène n’est pas nécessairement asso-
cié à une infection, car les microbes auxquels nous sommes exposés
sont généralement des micro-organismes commensaux et non des
agents pathogènes.
Dans une certaine mesure, la controverse sur le rôle des infec-
tions dans la survenue ultérieure d’allergies est aussi due à la défini-
tion clinique variable de l’allergie. Ainsi, les râles sibilants et l’asthme
ont souvent été pris comme critères, bien qu’ils ne soient pas toujours
d’origine allergique. Si l’hypothèse selon laquelle des micro-organ-
ismes commensaux sont les stimulants normaux de la maturation
vers une réponse immunitaire équilibrée est pertinente pour les mani-
festations pathologiques impliquant les IgE, elle ne l’est pas pour
l’obstruction bronchique récidivante elle-même. Dans les pays pau-
vres, les râles sibilants dus à une hyperréactivité bronchique peuvent
être fréquents malgré la faible prévalence de tests cutanés positifs aux
pneumallergènes.
Les résultats combinés d’études épidémiologiques, cliniques et
expérimentales chez l’animal suggèrent qu’une large exposition à des
micro-organismes commensaux non pathogènes au début de la vie est
associée à une protection non seulement contre les allergies impli-
quant les IgE, mais probablement aussi contre le diabète de type 1 et
les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin. Ce qui n’a rien à
voir avec «l’hygiène» au sens habituel du terme.
L’expression «hypothèse de l’hygiène» est malheureuse, car elle
prête à confusion. Personne ne remettrait sérieusement en question
les progrès considérables en termes de santé publique accomplis grâce
à l’hygiène, ni n’appellerai de ses vœux de graves infections infantiles
juste pour diminuer l’incidence du rhume des foins. Il serait préférable
de parler de «l’hypothèse du défaut de microbes», car cette expression
aurait le mérite de souligner la possibilité de prévenir, voire de traiter
plusieurs maladies à médiation immunologique par des associations
de micro-organismes probiotiques non pathogènes et d’antigènes qui
en dérivent.