LÉGISLATION, DÉONTOLOGIE, ÉTHIQUE Présentation de l’UE CM n°1 C. Lallier – UE 1.3 – Année 2015-2016 Présentation de l’UE 1.3 Compétence 7: Analyser la qualité et améliorer sa pratique professionnelle En lien avec les valeurs et les règles professionnelles, la législation, l’éthique SEMESTRE 1 : 2 ECTS et SEMESTRE 4 : 3 ECTS Objectifs du Semestre 1 • Distinguer les notions de droit, de déontologie, de morale et d’éthique • Caractériser et comparer les conceptions philosophiques de l’être humain • Identifier les valeurs de la profession infirmière, intégrer les règles professionnelles et les mettre en lien avec la pratique • Connaitre les droits des patients et savoir adapter sa pratique dans le respect de ceux-ci Plan des cours • Introduction • Distinction entre droit et déontologie, morale et éthique • Concepts-clés • Conceptions utilitaristes et soin • La dignité • La responsabilité Introduction Pourquoi aborder des conceptions philosophiques? • • • • Comment l’homme est-il considéré? Evolution de la médecine Evolution des pratiques soignantes Evolution de la relation soignant-soigné Paternalisme / droits du patient Pourquoi étudier la législation, la déontologie, l’éthique? Les professions médicales et paramédicales sont encadrées par des normes et des valeurs qui constituent un socle permettant d’orienter les actions, de guider les choix, les décisions. Pourquoi parler d’éthique dans le domaine du soin? Selon Emmanuel Kant (1784-1804), 3 grandes questions se posent à l’homme : • Que puis-je savoir ? • Que dois-je faire ? • Que m’est-il permis d’espérer ? Que dois-je faire ? C’est la question fondamentale de l’éthique dans le cadre du soin • Se pose lorsque nous sommes confrontés à un dilemme (en lien avec une décision difficile à prendre) Distinction entre 4 instances • Le droit: Il s’intéresse uniquement à la conformité des actes au regard de la loi mais pas aux mobiles (raisons) qui nous poussent à agir dans la légalité • La déontologie : C’est l’ensemble des règles qui régissent une profession donnée, elle est l’intermédiaire entre la loi et la morale • La morale : Elle donne un cadre qui permet la cohésion sociale. Relative à un jugement de valeur sur les comportements humains, elle se rapporte à la question du bien et du mal, de ce qui est acceptable ou inacceptable. • L’éthique : Elle intervient là où l’on a repéré les limites légales, morales et déontologiques pour une situation donnée. Après une phase de questionnement, suivie d’une analyse de la situation sous tous ses aspects, la décision la plus juste possible devra être prise. Distinction entre droit et morale • Le droit est respecté lorsqu’une action est conforme à ce qui est prescrit du point de vue de la loi sans forcément tenir compte des mobiles intérieurs de l’individu : on peut être légaliste (respecter totalement la loi) tout en étant menteur, méprisant, lâche… • La morale, elle, s’intéresse aux mobiles intérieurs qui ont dicté l’action, elle est plus exigeante… Distinction entre déontologie et morale • La déontologie s’appuie sur des règles précises (textes de loi, codes, chartes, protocoles…) et concerne les devoirs et les obligations en lien avec une profession • La morale ne se limite pas au respect des devoirs professionnels. Les devoirs qu’elle implique sont dictés par des valeurs et normes propres à chacun. Distinction entre morale et éthique • Morale : du latin mores : mœurs (manière dont vivent les hommes) Elle s’intéresse surtout aux actes des hommes en fonction de normes données • Ethique : du grec éthos qui signifie « mœurs » mais également êthos qui signifie « lieu » Elle s’intéresse donc aux actes mais aussi aux circonstances qui ont accompagné l’acte (lieu, contexte…) Que se passe-t-il quand on enfreint les règles ? Instance Conséquences de l’infraction Morale Réprobation de moi-même (remords) ou d’autrui Déontologie Réprobation< Blâme < sanction juridique Droit Sanction juridique Concepts et conceptions philosophiques • • • • • L’homme Le libre-arbitre Le cure et le care Le respect La personne sur le plan juridique sur le plan philosophique (selon Kant) • La distinction entre personne et sujet Le mythe de Prométhée Il constitue l’un des fondements de l’humanisme occidental • Vulnérabilité première de l’homme • Supériorité grâce à son intelligence technicienne, à ses vertus morales La vulnérabilité de l’être appelle le soin • Ce mythe nous rappelle la vulnérabilité intrinsèque de l’homme : nourrisson, handicapé, vieillard… • Tout homme est potentiellement vulnérable, soumis aux aléas… • Risque moral pour le soignant: ne voir qu’un corps objectiver réifier Conceptions dualistes de l’homme • Selon Platon: Distinction entre l’âme et le corps. L’âme éternelle est supérieure au corps périssable et mortel. L’homme doit surtout prendre soin de son âme. • Selon Descartes: Ce que nous enseignent nos sens est soumis à l’épreuve du doute « Je doute donc je pense donc je suis » Substance pensante / corps-mécanisme Descartes met en avant le sujet pensant. Il conçoit l’homme comme capable de s’autodéterminer Remise en cause du déterminisme de l’homme Pose la question de la capacité de l’homme à choisir librement ses actions Le libre-arbitre Définition : Le libre-arbitre est l’aptitude à décider d’agir par soi-même, sans contrainte. A l’inverse de l’animal, l’homme n’est pas déterminé par ses seuls besoins. Il est capable d’actes gratuits : altruisme Le libre-arbitre implique que l’homme est responsable de ses actes Sans cette liberté de choix, on pourrait excuser tout acte, même criminel… Plus de notion d’acte juste ou injuste et plus de notion de devoir moral Si l’homme est capable de s’autodéterminer, il est considéré comme autonome L’homme autonome se gouverne lui-même, il est en capacité de juger ce qui est bon pour lui Confusion fréquente entre perte d’autonomie et dépendance Le cure et le care En anglais, deux verbes désignent l’acte de soigner : • To cure: aspect thérapeutique et technique du soin, dans le but d’éradiquer la maladie • To care: englobe les soins de maintien de la vie, le « prendre soin », l’attention, le souci que l’on a de l’autre et de son bien-être… « L’attention consiste à assurer une vigilance, à prévenir –on ne va pas attendre qu’une personne âgée se déshydrate pour lui donner à boire- et représente un savoir faire discret. Le travail du care efface ses propres traces et il faut lui accorder une forme de reconnaissance toute particulière. Sur une base technique, il n’a pas de prix, car il s’appuie sur la qualité de l’âme. Sa valeur marchande est inestimable ». Pascale Molinier (Professeur à l’Université Paris XIII) Notions voisines du care La sollicitude : soins attentifs, affectueux envers autrui (Larousse). Souvent synonyme de bienveillance… La compassion: sentiment de pitié qui nous rend sensible aux malheurs d’autrui (Larousse) L’agapê : peut se traduire par l’amour du prochain Une notion incontournable Le respect : sentiment de considération envers quelqu’un, qui porte à le traiter avec des égards particuliers (Larousse) Selon Kant, • la personne inspire le respect. • il y a dans le respect une force qui maintient à distance, contrairement à l’amour. • Le respect est le sentiment moral car il vient de la raison • tous les hommes, et seulement les hommes, doivent être respectés, sans exception. « Le respect ne s’adresse jamais qu’à des personnes et en aucun cas aux choses. Ces dernières peuvent éveiller en nous de l’inclination et, si ce sont des animaux […] même l’amour, ou encore la crainte, comme la mer, un volcan, une bête féroce, mais jamais le respect ». Kant E., Critique de la raison pratique. La personne La personne sur le plan juridique : En France, tout être humain, né et vivant est considéré comme une personne, peu importent ses capacités cognitives ou relationnelles Avant sa naissance, l’être humain n’est donc pas considéré comme une personne « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie" (art. L2211-1 du code de la santé publique). Distinction entre sa vie et la vie est importante (a permis de légaliser l’interruption de grossesse) Approche philosophique de la personne : Rappel: Platon et Descartes considéraient l’âme et le corps comme deux entités bien différentes (dualisme) Selon Descartes, « Seule la force de la raison fait l’homme » Que se passe-t-il si l’homme n’a pas, ou plus, sa raison? La démence ou « perte de l’esprit » pourrait alors remettre en cause la condition de personne à part entière Risque de « réification » Approche de la personne selon Kant: Les êtres doués de raison sont des personnes, à l’inverse des animaux « Les êtres raisonnables sont appelés personnes, parce que leur nature même, en fait des fins en soi, c'est-à-dire quelque chose qui ne peut pas être simplement employé comme moyen, quelque chose qui, par conséquent, met une limite à la faculté de « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen. » Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs En aucun cas une personne ne peut être utilisée comme un moyen Distinction entre personne et sujet: Selon Kant, il faut distinguer ce qui a un prix, d’une valeur relative ( un objet ) de ce qui a une dignité, d’une valeur intrinsèque. Seul l’homme est porteur de cette valeur parce qu’il est doué de raison. L’homme en tant qu’être de raison est digne parce qu’il porte en lui la loi morale En effet, selon Kant, « L’existence de la loi morale en l’homme est ce qui lui confère sa dignité. » Donc, toute personne est habitée par une instance morale mais, seul le sujet, a conscience de la présence de cette instance en lui C’est donc l’esprit qui donne au sujet pensant la Alors, que se passe-t-il si l’homme n’a pas, ou plus, sa raison? Pour Kant, la loi morale ne se trouve pas dans la raison en tant que faculté, elle s’y trouve de manière innée sous forme de principes priori Toute personne doit être considérée comme telle, même si elle n’est pas, ou plus, un sujet pensant Les caractéristiques de la loi morale, selon Kant : • Elle est universelle, absolue et innée • Elle nous donne des impératifs catégoriques qui sont universels et sans exceptions : « Tu ne mentiras pas » Pour décider qu’une action est morale ou pas, je dois me demander si elle est universalisable Si je ne peux pas vouloir que mon action devienne universelle, je dois la rejeter