42
Vol. 22 No. 3 2011
Quiz FMH
Question 3
Indiquez une complication à long-terme
particulièrement rare (environ 1:1 000 000)
mais grave, irréversible et souvent fatale de
la rougeole.
Question 4
Indiquez à quel âge sont vaccinés les en-
fants suisses (dont les parents ne s’oppo-
sent pas à la vaccination) contre la rougeole
(vaccin vivant atnué), selon les recom-
mandations actuelles.
Présentation du cas
Madame B. a pféré ne pas vacciner ses
enfants contre la rougeole, la rubéole et les
oreillons. Elle vous consulte aujourd’hui
avec sa fille Emilie, âgée de 11 ans, habi-
tuellement en bonne santé, qui présente
depuis 24 heures environ l’exanthème ty-
pique de la rougeole: des grosses maculo-
papules confluentes de couleur rouge-vin
apparues d’abord dans la région rétro-auri-
culaire puis au visage et enfin sur le tronc
et les extmités.
Question 1
La lésion cutanée caracristique de la
rougeole est le plus souvent précédée de
prodromes briles. Indiquez 3 prodromes
typiques de la rougeole. N.B.: n’indiquez
pas la fièvre ni naturellement l’exanthème
crit ci-dessus (typique du stade exan-
thématique et non prodromique de la
maladie).
Question 2
Quand est-ce que la rougeole est particu-
lièrement contagieuse?
Quiz FMH 44
43
Vol. 22 No. 3 2011 Quiz FMH
gouttelettes lorsqu’une personne éternue
ou tousse). Les virus de la rougeole peuvent
rester en suspension dans l’air sous forme
d’aérosols infectieux (particules 5 μm de
diamètre) jusqu’à 2 heures après leur émis-
sion. Le médecin traitant qui reçoit une
suspicion de rougeole à son cabinet devrait
chaque fois que cela est possible mettre en
œuvre les mesures de prévention contre
les infections à transmission par voie -
rienne, afin que les autres patients, leurs
accompagnateurs et le personnel de santé
ne s’infectent pas dans les salles d’attente
et de consultation (dernière consultation de
la joure, pas dattente en salle d’attente,
port d’un masque chirurgical, etc.).
La contagiosité élevée et précoce de la rou-
geole (4 jours avant léruption cutanée ca-
ractéristique) signifie que toute suspicion
doit être considérée par le médecin traitant
comme une flambée potentielle et doit être
déclarée nominativement dans les 24 heures
aux autorités sanitaires cantonales.
L’anamnèse de contage est primordiale:
s’agit-il d’un cas sporadique ou Emilie/sa
maman ont-elle connaissance dautres cas?
Lors d’un cas isolé, la confirmation au labo-
ratoire est nécessaire car la triade «fièvre,
exanthème maculo-papuleux et toux/
rhinite ou conjonctivite» n’est pas suffisam-
ment spécifique pour exclure d’autres dia-
gnostics (par exemple galérythème in-
fectieux ou 5ème maladie, rubéole, scarlatine,
roséole, certaines infections aux entérovi-
rus, notamment au virus Coxsackie, et aux
Réponse 1
toux
conjonctivite
taches de Koplik
Réponse 2
La rougeole est particulièrement conta-
gieuse pendant les prodromes. La trans-
mission du virus rougeoleux (période de
contagiosité) est possible dès le 4ème jour
avant le but de lexanthème cutané et
jusqu’à 4 jours après l’apparition de celui-
ci. Il est admis qu’après le 2ème jour après
l’éruption cutanée, la contagiosité est for-
tement diminuée.
Réponse 3
La panencéphalite sclérosante subaiguë
(PESS)
Réponse 4
Selon le plan de vaccination suisse1), 2
doses d’un vaccin combiné contre la rou-
geole, les oreillons et la rubéole (ROR) sont
recommandées, la première dose à l’âge de
12 mois et la deuxième dose entre 15 et 24
mois.
Commentaires du spécialiste
Simone Graf et Virginie Masserey
Office fédéral de la santé publique
Question 1
Le virus de la rougeole fait partie des para-
myxovirus2). Lorsque, inha, il pénètre
dans les voies respiratoires supérieures et
inférieures et se multiplie dans les épithé-
liums respiratoires et les ganglions lympha-
tiques, sans causer dans un premier temps
de lésions ou de symptômes. Durant la
période d’incubation, les virus envahissent
lentement dautres tissus lymphoïdes, y
compris la rate. Les virus pénètrent ensuite
dans la circulation sanguine et sont dissé-
minés vers de nombreux épithéliums. Les
premiers prodromes apparaissent alors:
rhume, fièvre et toux. La conjonctivite est
également très souvent présente. De
grandes quantités de virus sont présentes
dans les sécrétions respiratoires, ce qui les
rend hautement contagieuses. Le diagnos-
tic peut être évoqué durant cette phase de
prodromes, en particulier si l’anamnèse
sugre un contact avec un cas de rou-
geole. Il faut encore attendre un ou deux
jours pour voir apparaître des signes plus
spécifiques tels que les taches de Koplik
(de petits points blancs tapissant la face
interne des joues, sur le fond rouge de la
muqueuse buccale), qui précède de peu
l’exanthème maculo-papuleux caractéris-
tique. Lexanthème résulte de la réponse
immunitaire à médiation cellulaire . Celle-ci
est nécessaire afin de freiner la proliféra-
tion des virus, en particulier dans le tissu
pulmonaire. Chez les patients dont le sys-
tème immunitaire est sérieusement altéré,
le rash est souvent absent.
Question 2
La rougeole est une des maladies virales les
plus contagieuses. Elle se transmet essen-
tiellement par voie aérienne (projection de
Figure 1: Déroulement d’un épisode de rougeole3)
44
Vol. 22 No. 3 2011
Quiz FMH
festations sont insidieuses: troubles du
comportement, détérioration progressive
des capacis intellectuelles, ataxie et
mouvements myocloniques. La maladie est
le plus souvent fatale et il n’existe pas de
traitement.
La prévention de la rougeole par la vaccina-
tion a conduit à une réduction de l’inci-
dence de la PESS4). En effet, la réduction de
l’incidence de la maladie précède de
quelques années l’abaissement du nombre
de nouveaux cas de PESS. De plus, le géno-
typage des virus isolés dans les cas de
PESS ne suggère pas que des virus vacci-
naux puissent être à l’origine de la PESS.
Question 4
En Suisse, la vaccination contre la rougeole
est recommandée depuis 1976 aux enfants
de 12 mois. Avant cet âge, son efcacité
n’est pas optimale en raison de la présence
dans le sang du nourrisson d’anticorps
maternels qui le neutralisent. Il s’agit d’un
vaccin vivant atténué et sans adjuvant qui
engendre une immunité par les mes
mécanismes que l’infection, mais sans les
risques de complications associés à la
maladie. Les effets indésirables sont bien
connus, généralement bénins et peu fré-
quents. Ce vaccin est cependant contre-
adénovirus, ou encore allergies dica-
menteuses). La détection d’anticorps IgM
spécifiques de la rougeole au moyen d’un
test ELISA sur un échantillon rique
constitue l’examen de choix. La recherche
de lARN viral par RT-PCR dans un plève-
ment de liquide oral ou un frottis de gorge
est une alternative au test ELISA, particu-
lièrement utile dans les 3 premiers jours
suivant le début de l’exanthème.
Il s’agit ensuite d’éviter autant que possible
la transmission. Emilie ne devra pas retour-
ner en collectivité avant le 5ème jour après
le début de lexantme. Comme les
contacts interpersonnels sont particulière-
ment intenses au sein du ménage et que la
fratrie n’est pas vaccie, il est probable
que celle-ci se trouve déjà en période d’in-
cubation et peut devenir contagieuse à tout
moment. Cest pourquoi, pour interrompre
les chaînes de transmission, l’autorité can-
tonale peut prononcer une éviction scolaire
(ou institutionnelle: crèche, jardin d’enfant,
etc.) pendant 18 jours (durée maximale
d’incubation), à compter du jour de surve-
nue de l’exanthème chez Emilie. Il en irait
de même pour ses parents, s’ils sont non
immuns (nés après 1963*, sans antécé-
dents confirs de rougeole et non vacci-
nés avec 1 dose)**. Des évictions profes-
sionnelles pourraient être pronones par
le médecin cantonal si leurs fonctions les
mettent en contact avec des personnes à
risque accru de complications (par exemple
de jeunes enfants, des personnes immuno-
supprimées ou des femmes enceintes).
La confirmation du diagnostic déterminera
la suite des mesures. Le vaccin en préven-
tion secondaire peut être propo aux
personnes non immunes qui ont eu des
contacts avec Emilie durant la riode de
contagiosité si l’administration de la pre-
mière dose est possible dans les 72 heures
après la première exposition. Si cela n’est
pas envisageable (trop tardif, contre-indi-
cations), l’administration d’immunoglobu-
lines pourra être considérée (femmes en-
ceintes, nourrissons, maladies du système
immunitaire) dans les 6 jours suivant lex-
position ou, le cas échéant, l’éviction pro-
fessionnelle ou institutionnelle (délai de
72h dépassé ou refus du vaccin).
Question 3
Comme pour d’autres infections virales
touchant les voies respiratoires, les surin-
fections bactériennes tels que la pneumonie
ou l’otite moyenne aiguë font partie des
complications relativement fréquentes de la
rougeole (5–10% des cas). Lencéphalite est
beaucoup plus rare (1 cas sur 1000 à 3000
infections rougeoleuses), alors que la pa-
nencéphalite sclérosante subaiguë (PESS)
est heureusement, extrêmement rare.
Cette affection dégénérative progressive
du système nerveux central est due à une
infection persistante du cerveau par le vi-
rus rougeoleux2). Elle touche généralement
les adolescents et les jeunes adultes et est
caractérisée par un long temps de latence
(en moyenne 7 ans; au minimum 1 mois et
au maximum 27 ans2)) entre l’infection et le
début des signes neurologiques. Les mani-
* On consire que l’immunité acquise après infec-
tion ou vaccination (2 doses) protège pendant toute
la vie, et comme la circulation du virus de la rou-
geole était généralisée avant l’introduction de la
vaccination (recommane depuis 1976), les per-
sonnes nées en 1963 et avant ont une probabili
très élee d’avoir déjà eu la rougeole.
** Critères pouvant être utilisés pour définir un anté-
cédent de rougeole confirmé ou certain: cas confir-
au laboratoire, lien épidémiologique avec un cas
confirmé au laboratoire, cas diagnostiqué clinique-
ment par un médecin dans un contexte épidémique,
diagnostic attesté dans un dossier médical. En cas
de doute, il est préférable de considérer la personne
comme n‘ayant pas eu la rougeole.
45
Vol. 22 No. 3 2011 Quiz FMH
indiqué chez les personnes immunopri-
mées ou souffrant dallergie à l’un de ses
composants, ainsi que chez les femmes
enceintes.
La vaccination ROR (rougeole, oreillons,
ruole) est recommandée depuis 1985,
avec une seconde dose introduite en 1996.
Elle fait partie des vaccinations de base. Le
calendrier actuel comprend donc deux
doses d’un vaccin ROR, à 12 et 1524 mois
(la 2ème dose peut être administrée dès 1
mois après la 1ère dose).
Pour les nourrissons à haut risque (préma-
turés, bébés en crèche, nourrissons expo-
sés à des épidémies ou qui vivent dans des
régions où la rougeole est endémique dans
cette classe d’âge), la première dose de
vaccin est conseile entre 9 (voire 6 mois)
et 11 mois. Dans cette situation, il suft de
donner la 2ème dose entre 12 et 15 mois
pour que la vaccination ROR soit complète.
Un rattrapage est recommandé pour toute
personne e après 1963*, n’ayant pas
encore une vaccination complète et n’ayant
pas eu de manière certaine** la rougeole.
Le coût de la vaccination ROR est pris en
charge par l’assurance obligatoire des
soins à tout âge.
L’efficacité de la vaccination est élevée
(93–95% des personnes vaccinées dévelop-
pent des anticorps après une dose, 98%
après deux doses). Du fait d’une contagio-
sité élevée, l’immunité de groupe permet-
tant l’interruption de la circulation du virus
et ainsi lélimination de la rougeole ces-
site cependant une couverture vaccinale de
95% avec deux doses dès l’âge de 2 ans.
Afin déliminer la rougeole selon lobjectif
de l’OMS pour l’Europe d’ici à 2015, un
large soutien et des efforts coordonnés
sont requis: une stratégie nationale est en
voie d’élaboration et devrait être lancée
avant la fin de 2011.
Références
1) Ofce fédéral de la santé publique, Commission
dérale pour les vaccinations. Plan de vaccination
suisse 2011. Directives et recommandations.
Berne: Office fédéral de la santé publique, 2011.
2) Centers for Disease Control and Prevention. Epide-
miology and Prevention of Vaccine-Preventable
Diseases. Atkinson W, Wolfe S, Hamborsky J, eds.
12th ed. Washington DC: Public Health Foundation,
2011.
3) Recommandations pratiques et procédures de
prise en charge et contrôle de la rougeole dans le
canton de Genève, Geve – direction générale de
la santé – Service épimiologie et maladies trans-
missibles. Etat: juin 2008.
4) OMS. Comité consultatif mondial sur la sécuri
des vaccins. Panenphalite scrosante subaig
et vaccination antirougeoleuse. Releépimio-
logique hebdomadaire no. 2, 13 janvier 2006.
http://www.who.int/wer/2006/wer8102.pdf.
Correspondance
Dr Virginie Masserey Spicher
Cheffe de section
Département fédéral de l’intérieur DFI
Office fédéral de la santé publique OFSP
Division Maladies Transmissibles
Section Programmes de vaccinations et
mesures de contrôle
Schwarztorstrasse 96
CH-3007 Berne
virginie.masserey@bag.admin.ch
www.bag.admin.ch
1 / 4 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !