BI Français 4/5
Janvier 2014
Introduction: Voila un éditorial récent du Courrier Internationale qui traite le sujet des immigrés en
France, du point de vue d’un américain. Lisez l’article, en soulignant les mots inconnus, et résumez
chaque paragraphe dans une phrase ou deux, de vos propres mots. Puis répondez aux questions à la fin
de l’article dans votre journal intime.
Date limite : lundi le 27 janvier.
Pourquoi les Français n’ont rien à craindre de
l’immigration
Un Américain enseignant la philosophie dans une université parisienne s'étonne de trouver en France un
discours politique et intellectuel sur les dangers de l’immigration. Il livre son témoignage en tant
qu'"étranger privilégié".
THE NEW YORK TIMES, JUSTIN E.E. SMITH, 20 JANVIER 2014
Scène de rue dans le quartier de la Goutte d'or à Paris (Miguel Medina/AFP)AFP
De Paris On peut difficilement passer plus d’une journée en France sans entendre quelqu’un affirmer
que les minorités ethniques constituent le plus gros problème du pays et que la présence d’immigrés
compromet l’identité même de la France. Une conviction généralement exprimée sans aucunement tenir
compte de la responsabilité historique du pays, en tant que puissance coloniale, pour la présence d’anciens
sujets de ses colonies en métropole, et sans vouloir admettre que la France sera dorénavant une mosaïque
ethnique, et qu’il revient autant aux Français qu’aux immigrés de faire en sorte que cette diversité
fonctionne.
Résumez :
Depuis un an, je vois constamment de jeunes Noirs se faire interpeller et contrôler à la gare du Nord
pratique qui, contrairement à ce qui se passe à New York, ne soulève ici pratiquement aucun débat.
“J’espère que vous êtes bien vacciné, m’a lancé un chauffeur de taxi en passant par un quartier noir.
Maintenant, il n’y a plus besoin d’aller en Afrique pour attraper une maladie tropicale.”
Résumez :
"La France n’existe plus"
A propos des minorités ethniques vivant dans la capitale, des Français que je ne connaissais pas m’ont à
plusieurs reprises fait remarquer : “Ce n’est plus la France. La France n’existe plus.” Il y a derrière
pratiquement tous les échanges sociaux le présupposé permanent que l’on peut établir une division claire
et significative entre les individus qui composent la vraie France et les imposteurs.
Résumez :
En tant qu’Américain enseignant dans une université canadienne, je suis arrivé ici en 2012 pour prendre
un poste dans une université française à Paris. J’observais depuis longtemps avec un intérêt modéré
l’histoire, la culture et la vie politique françaises, mais je n’étais jamais resté très longtemps dans le pays et,
lors de mes précédents séjours, je n’avais jamais prêté attention aux profonds clivages qui marquent ici
tant d’aspects du quotidien. Lorsque des inconnus inquiets du destin de leur pays s’adressent à moi, je
m’efforce de répondre patiemment.
Résumez :
Mon accent américain ne leur échappe pas mais ne suffit pas à les décourager, car j’appartiens à une autre
catégorie d’étranger : je ne suis pas perçu comme un “immigré” mais plutôt comme un “expatrié”, venu de
son propre gré pour des raisons probablement futiles, et non par nécessité économique ou pour assurer
ma survie ou ma liberté. Cette distinction n’est pas simplement un préjugé de l’homme de la rue : elle est
inscrite jusque dans la procédure des bureaux français de l’immigration, où doivent se rendre tous les
étrangers pour obtenir leur carte de séjour, mais où les Maliens et les Congolais sont dirigés vers une pièce,
et les Américains et les Suédois vers une autre.
Résumez :
Présomption d’égalité
Pour les premiers, la procédure a des allures de mise en quarantaine et l’attitude des fonctionnaires
s’apparente à celle de gardiens de prison ; pour les seconds, un passage au bureau de l’immigration
ressemble davantage à une cérémonie d’accueil et tout, dans nos échanges avec les fonctionnaires, évoque
une présomption d’égalité. L’égalité est bien entendu l’un des principes fondateurs de la République
française, et pourtant les critiques de la philosophie des Lumières, qui est à la base de la Révolution,
savent depuis longtemps qu’il y a deux poids deux mesures : lorsque l’on parle d’égalité, soulignent-ils, il
est entendu qu’elle ne vaut qu’entre égaux.
Résumez :
Pendant le plus clair de l’histoire de la République française, la ligne de démarcation entre égaux et
inégaux a été déterminée par la dynamique de l’empire colonial. En France continentale, l’égalité était en
principe absolue, mais dans les colonies, c’était une valeur qu’il fallait cultiver : pour être pleinement
considéré comme un égal, un sujet des colonies devait démontrer par ses mœurs et ses goûts qu’il
incarnait parfaitement l’identité française.
Résumez :
Avec la contraction de l’empire et la réorientation du nationalisme français vers une logique non plus
territoriale mais culturelle, la distinction entre égal et inégal est passée de l’échelle mondiale au niveau
local. Les francophones du monde entier ont alors commencé à affluer en métropole, avec le statut non
plus de sujets coloniaux mais de simples étrangers.
Résumez :
Le fait que ces sujets inégaux se soient établis en France est bien entendu étroitement lié à l’héritage
historique de l’impérialisme français : ce n’est pas par caprice que les Africains francophones choisissent
de venir en France, mais parce qu’une longue tradition a imposé la culture française dans leur pays
d’origine. Je suis devenu philosophe en grande partie parce que, comme bien d’autres, j’imaginais que cela
me permettrait de m’élever au-dessus du marais trouble de l’attachement local, de la loyauté ethnique et
provinciale et d’étreindre le monde dans son ensemble, d’être un vrai cosmopolite.
Résumez :
Une xénophobie alimentée
L’histoire montre pourtant que, par leur éducation philosophique, bon nombre de philosophes finissent
par s’attacher plus encore à leur identité nationale ou ethnique. Cette tendance semble particulièrement
répandue dans l’Europe d’aujourd’hui, et plus encore en France. Beaucoup d’Américains imaginent que la
philosophie française est dominée par des penseurs abscons comme Jacques Derrida, qui s’était fait une
réputation de séduire d’innocents disciples par des proclamations en forme de koan.Mais une sous-espèce
bien plus dangereuse du philosophe français est l’“intellectuel public”, dont les déclarations, par
l’intermédiaire des médias français, sont parfaitement compréhensibles, d’une simplicité confinant au
simplisme, et souvent totalement irresponsables. 
Résumez :
Prenez par exemple le philosophe autoproclamé Alain Finkielkraut qui, dans son dernier livre à
succès, L’Identité malheureuse, affirme tout de go que l’immigration détruit l’identité culturelle française.
Il déplore le “métissage” de la France – terme souvent repris par l’extrême droite dans ses slogans, au sens
de “bâtardisation”. L’auteur, dont le père était un immigré polonais et rescapé d’Auschwitz, et qui tout au
long de sa carrière a fait la part belle à ce qu’il appelle le “devoir de mémoire”, prétend défendre les valeurs
des “Français de souche”. Il alimente ainsi la xénophobie qui sévit en France et qui a été exacerbée, ici
comme dans d’autres pays d’Europe, par le climat d’incertitude économique. 
Résumez :
Qu’est-ce qui peut bien justifier cette distinction entre expatriés et immigrés, ou les difficultés réservées à
ces derniers lorsqu’ils tentent de s’établir dans un nouveau pays ? Les Européens nativistes, comme
Finkielkraut, disent souvent craindre d’être “envahis” par un groupe ethnique issu de pays ou de régions
économiquement désavantagées. La plupart d’entre nous peuvent s’accorder à dire que, même s’il n’existe
aucun droit absolu à préserver la pureté de sa culture, il y a tout au moins un véritable avantage à vivre
parmi des gens qui partagent beaucoup de valeurs et traditions communes.
Résumez :
Il y aurait par exemple quelque chose à perdre si en Islande une vague massive d’immigration débouchait
sur un changement démographique si radical que les Islandais se retrouvaient en minorité dans ce pays
insulaire jusqu’alors homogène et cela constituerait une perte pour le pays lui-même comme pour ceux
d’entre nous qui, sans y vivre, tiennent à ce que nous pourrions assimiler à l’équivalent culturel de la
biodiversité.
Résumez :
Or, rien qui ressemble de près ou de loin à un bouleversement d’une telle ampleur ne se produit en
Europe, pas même dans les pays qui ont connu la plus forte immigration, comme la France et la Grande-
Bretagne. Outre l’avantage réel qu’il y a à vivre parmi des gens qui partagent nos valeurs et traditions, il y
a aussi ce que le philosophe Michael Dummet définit dans son important ouvrage On Immigration and
Refugees [De l’immigration et des réfugiés] comme le droit de vivre en citoyen de première classe. Ce droit,
précise-t-il, dépend en partie de la conduite d’un Etat, et en partie du comportement de son peuple.
Résumez :
Que le droit des immigrés à être des citoyens de première classe s’oppose ou pas au droit des premiers
habitants à la préservation culturelle repose largement sur la politique de l’Etat et sur l’opinion publique.
Même si le nombre d’immigrés en Europe était beaucoup plus élevé, ce serait une illusion de supposer que
les immigrés mènent un effort concerté pour modifier le caractère du pays dans lequel ils sont venus.
Parler d’“occupation” ou d’“invasion” est analogue, et correspondrait en fait bien plus justement au
mouvement initial des Etats Européens dans leurs anciennes colonies, mouvement qui, une fois de plus,
représente un facteur crucial dans les tendances et schémas migratoires actuels vers l’Europe. 
Résumez :
L’immigration en Europe, tout comme par exemple dans le sud-ouest des Etats-Unis ou à l’intérieur de
l’ex-Union soviétique, est dictée par des rapports historiques profonds et des schémas d’échanges entre les
pays d’origine des immigrés – dans le cas de la France, surtout l’Afrique du Nord et la Françafrique
subsaharienne et les lieux de destination.
Résumez :
Politiques migratoires
Depuis la fin de la Renaissance, l’Europe entretient des échanges permanents – humains, financiers,
matériels et culturels avec la sphère extra-européenne et pourtant, quelques siècles après la grande
expansion mondiale de la fin du XVe siècle, un mythe s’est installé dans toute l’Europe, qui voudrait que
les nations européennes se constituent entièrement de l’intérieur, que leurs cultures soient le fruit du
terroir et soient inscrites depuis la nuit des temps sur un bout de terre immuable. 
Résumez :
C’est cette conception de la constitution d’une nation qui a mené à la fracture fondamentale qui distingue
aujourd’hui encore la politique migratoire européenne de celle des Etats-Unis. L’approche américaine de
l’immigration est arrimée à des circonstances historiques liées à l’appropriation d’un continent, et c’est
cette même histoire d’appropriation qui continue à induire un sentiment de honte chez la plupart des
Euro-Américains qui pourraient autrement être tentés de se présenter comme des indigènes.
Résumez :
L’Amérique doit reconnaître son identité hybride et construite, puisque les seuls qui puissent
raisonnablement prétendre au statut d’indigènes sont ceux-là mêmes que cette nouvelle identité visait à
déplacer. Mais en Europe, aucun déplacement de ce type n’intervient dans la mémoire historique : les
Européens peuvent plus facilement s’imaginer être leurs propres indigènes et, par là même, imaginer
l’impact démographique du monde extra-européen sur le continent comme le signe avant-coureur d’un
hypothétique déplacement total. L’angoisse nativiste des Européens repose sur des valeurs que l’on ne
saurait railler ou balayer d’un revers de main. 
Résumez :
L’exaltation du terroir
Elles ne sont pas totalement étrangères aux divers mouvements visant à défendre les traditions locales :
l’exaltation du terroir et du “slow food”, la suspicion à l’égard des multinationales. Mais comme la vénérée
tomate et tant d’autres produits de diverses cuisines européennes, l’identité culturelle européenne est
également le résultat de très anciens réseaux d’échanges internationaux. Depuis des siècles, ces réseaux
servent surtout à l’enrichissement de l’Europe au détriment du reste du monde, et c’est ce déséquilibre qui
explique en grande partie les schémas migratoires actuels. L’Europe n’a jamais été autonome et le rôle
qu’elle a tenu dans le monde l’a certes enrichie mais lui a aussi légué une responsabilité unique envers
l’immense partie de la planète dont elle a tiré sa prospérité. 
Résumez :
J’observe la situation actuelle à partir d’une position privilégiée, en ma qualité d’étranger à part : je ne suis
pas de ceux que l’on soupçonne d’être venus pour consommer des ressources et menacer une tradition,
mais plutôt de ceux qui sont censés célébrer ces traditions et acquiescer passivement aux sentiments des
indigènes. Le privilège, pour moi, ne tient pas simplement au fait que je ne suis pas la cible de
discrimination, mais aussi au fait que je suis capable d’apprendre beaucoup de choses auxquelles je
n’aurais pas accès si j’avais un autre type d’accent ou une peau plus foncée. Et même si ce que j’entends
dans les rues est décourageant, ce n’est en réalité qu’un écho du discours de la classe politique et de
supposés intellectuels, qui préfèrent imputer l’instabilité du psent et l’incertitude de l’avenir aux
membres les plus impuissants de la société française.
Résumez :
Justin E. E. Smith enseigne l’histoire et la philosophie à l’université Paris Diderot (Paris 7).
Votre travail : dans votre journal intime, répondez à ces questions (un à deux paragraphes détaillés
chacune) :
1. Résumez le point de vue/le message de l’auteur.
2. Considérez son opinion et ses évidences. Etes-vous d’accord ? Pourquoi, ou pourquoi pas ?
3. Aviez-vous déjà considéré la question du traitement des immigrés, en France ou aux Etats-Unis ?
Pourquoi, et comment ? Ca touche à votre vie, ce sujet ? Expliquez comment.
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