Avec la contraction de l’empire et la réorientation du nationalisme français vers une logique non plus
territoriale mais culturelle, la distinction entre égal et inégal est passée de l’échelle mondiale au niveau
local. Les francophones du monde entier ont alors commencé à affluer en métropole, avec le statut non
plus de sujets coloniaux mais de simples étrangers.
Résumez :
Le fait que ces sujets inégaux se soient établis en France est bien entendu étroitement lié à l’héritage
historique de l’impérialisme français : ce n’est pas par caprice que les Africains francophones choisissent
de venir en France, mais parce qu’une longue tradition a imposé la culture française dans leur pays
d’origine. Je suis devenu philosophe en grande partie parce que, comme bien d’autres, j’imaginais que cela
me permettrait de m’élever au-dessus du marais trouble de l’attachement local, de la loyauté ethnique et
provinciale et d’étreindre le monde dans son ensemble, d’être un vrai cosmopolite.
Résumez :
Une xénophobie alimentée
L’histoire montre pourtant que, par leur éducation philosophique, bon nombre de philosophes finissent
par s’attacher plus encore à leur identité nationale ou ethnique. Cette tendance semble particulièrement
répandue dans l’Europe d’aujourd’hui, et plus encore en France. Beaucoup d’Américains imaginent que la
philosophie française est dominée par des penseurs abscons comme Jacques Derrida, qui s’était fait une
réputation de séduire d’innocents disciples par des proclamations en forme de koan.Mais une sous-espèce
bien plus dangereuse du philosophe français est l’“intellectuel public”, dont les déclarations, par
l’intermédiaire des médias français, sont parfaitement compréhensibles, d’une simplicité confinant au
simplisme, et souvent totalement irresponsables.
Résumez :
Prenez par exemple le philosophe autoproclamé Alain Finkielkraut qui, dans son dernier livre à
succès, L’Identité malheureuse, affirme tout de go que l’immigration détruit l’identité culturelle française.
Il déplore le “métissage” de la France – terme souvent repris par l’extrême droite dans ses slogans, au sens
de “bâtardisation”. L’auteur, dont le père était un immigré polonais et rescapé d’Auschwitz, et qui tout au
long de sa carrière a fait la part belle à ce qu’il appelle le “devoir de mémoire”, prétend défendre les valeurs
des “Français de souche”. Il alimente ainsi la xénophobie qui sévit en France et qui a été exacerbée, ici
comme dans d’autres pays d’Europe, par le climat d’incertitude économique.
Résumez :
Qu’est-ce qui peut bien justifier cette distinction entre expatriés et immigrés, ou les difficultés réservées à
ces derniers lorsqu’ils tentent de s’établir dans un nouveau pays ? Les Européens nativistes, comme
Finkielkraut, disent souvent craindre d’être “envahis” par un groupe ethnique issu de pays ou de régions
économiquement désavantagées. La plupart d’entre nous peuvent s’accorder à dire que, même s’il n’existe
aucun droit absolu à préserver la pureté de sa culture, il y a tout au moins un véritable avantage à vivre
parmi des gens qui partagent beaucoup de valeurs et traditions communes.
Résumez :
Il y aurait par exemple quelque chose à perdre si en Islande une vague massive d’immigration débouchait
sur un changement démographique si radical que les Islandais se retrouvaient en minorité dans ce pays
insulaire jusqu’alors homogène – et cela constituerait une perte pour le pays lui-même comme pour ceux