Couverture : peinture originale de Hugo Berthus
Notre histoire commence ici…
C’est au cours d’ateliers de marionnettes, que j’animais pour des
enfants d’écoles primaires à Gonesse, que j’ai découvert le théâtre
d’ombres.
L'ombre est mystère et onirisme, elle porte en soi tant d'histoires...
J'ai écrit un conte marin et j'ai voulu que l'ombre incarne cet univers des
océans, univers de la nuit, chargé de toutes nos peurs d'enfants et
d'adultes...
J'ai imaginé que mon théâtre d'ombres puisse se prolonger dans la
réalité physique des marionnettes, que le rêve se matérialise.
L’histoire du petit Requeteau, m’est venue à l’oreille une nuit comme une
chanson, une chanson qui s'invente : « Papa, pourquoi je ne suis pas un
petit poisson » répétait un petit requin à son père, le père ne comprenait
pas, le père grondait. Les adultes des océans ressemblaient à ceux de
Saint-Exupéry et s’entêtaient à ne voir qu’un éléphant dans un
chapeau…
Les enfants, dans leur détresse aussi, m’ont inspiré ce conte, je
voudrais leur dire qu’il faut qu’ils soient fiers de ce qu’ils sont. Enfant,
les histoires m’ont aidée à me sentir moins seule.
Requeteau est ce compagnon de solitude.
Véronique Lallemant
Atelier de Marionnettes dirigé par V. Lallemant
pour la Compagnie Cyclone.
Ecole Marie Curie à Gonesse
A mille lieues...
Ce qui m’a tout de suite intéressé dans cette création, c’était de
pouvoir mettre en valeur le texte à travers trois techniques de jeu (le conte,
l’ombre et les marionnettes sur table, dite « portées »), l’ensemble dans un
espace divisé en trois parties, trois lieux, trois atmosphères. Le devant de
la scène évoque tour à tour le port et un vieux gréement, le théâtre
d’ombres, le voyage de notre héros et la table, l’antre de la pieuvre.
Lorsque j’ai intégré le projet en juillet 2007, quelques jalons avaient
déjà été posés. Le texte écrit, les silhouettes d’ombres réalisées ainsi que les
marionnettes, mais il fallait amener du mouvement, de la vie. La
consigne était que Véronique devait pouvoir tout faire toute seule !
Nous avons recherché alors des manipulations adéquates, des
rythmes variés ainsi que des gestes précis et efficaces. La table fut
transformée en un décor 3d, les marionnettes réajustées, la gestuelle
affinée et le système de projection de diapositives avec miroir maîtrisé.
Le choix de la narration par un personnage de vieux marin, interprété
par la comédienne, évoque instantanément le climat propice à
l’imagination du spectateur. Pour travailler ce rôle, nous nous sommes
inspirées d’archétypes (bougon, ronfleur, malicieux) et d’accessoires
stylisés. Ceux-ci se transforment à l’évocation d’un geste, en longue vue
ou en voile pour le journal ou en petits poissons pour la pipe. Le narrateur
fait ainsi le lien entre les différents chapitres, donnant rythme au
spectacle ! Ici, il plante le décor d’un port, là, l’atmosphère d’un orage,
donnant vie par un jeu de lumière à telle ou telle évocation. Les
différentes tailles des ombres, les mouvements chorégraphiques
n’admettent pas l’improvisation.
...sous les mers
L’ombre du vieux marin apparaît de temps en temps à l’écran, faisant
et défaisant son décor comme dans un théâtre d’ombres ambulant. Les
atmosphères diverses sont traduites par des changements de diapositives
colorées, le rose pour un climat joyeux, le bleu nuit pour l’apparition du
père, le violet pour les profondeurs de l’océan…
Le personnage que l’on attend, espère ou redoute : la pieuvre marabout,
n’apparaîtra réellement qu’en marionnette de bois et d’organza.
Les marionnettes portées ont nécessité une manipulation spécifique
pour chacune, parfois antinomique et une approche empirique pour les
deux. Il a fallu que Véronique s’adapte et enregistre corporellement une
gestuelle dissociée ainsi qu’un transfert des voix. Quelle gymnastique !
Un travail sur le caractère des personnages a aussi été fouillé à travers les
voix, éraillée et poivrote de la vieille pieuvre et enfantine du requin (vite
enjoué ou boudeur). Le clou étant la chanson de Billie Holiday reprise par
la pieuvre : un « Summertime » pathético-comique !!!
Dans la mise en scène, nous avons enfin tenue compte de l’attention
qu’un enfant pouvait supporter, en adjoignant des moments interactifs,
ainsi qu’en ménageant des instants de suspens, de « frayeur » (telle
qu’on aime en avoir à cette âge), des clins d’œil clownesques et des
chansons. Toutes les recettes adéquates pour concocter un cocktail de
saveurs, promptes à plaire à ce public ainsi qu’aux plus grands.
Le texte, exigeant quant à sa dialectique et son vocabulaire, souligne
la profondeur d’un propos interrogatif quant à notre regard sur nous-
même ou sur l’autre.
Carole Aït-Haddad
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