composantes excitatrices et inhibitrices de cette conductance,
pour les réponses PREF et NULL. Mes travaux sur la rétine de
tortue ont donc été conçus pour préciser la connectivité à l’ori-
gine des réponses DS des cellules ganglionnaires. Ces travaux
s’appuient sur des mesures en voltage imposé au niveau des
entrées excitatrices et inhibitrices, une méthode que nous avons
aussi appliquée à l’analyse des réponses fonctionnelles dans le
cortex visuel in vivo (3). Pour résumer, le résultat le plus important
concerne le fait que l’entrée excitatrice sur les cellules ganglion-
naires en réponse au mouvement est systématiquement plus
grande pour le stimulus préféré. Cela caractérise un modèle du
type excitatory PREF model, et va à l’encontre d’un calcul de la
DS au niveau des dendrites des cellules ganglionnaires.
Cependant, l’histoire n’est pas aussi simple : plus récemment, en
utilisant une technique similaire, Taylor et Vaney (4) ont montré
que dans la rétine du lapin (qui a comme celle de la tortue un
pourcentage élevé de cellules ganglionnaires DS), pour certains
neurones, la sélectivité à la direction semble avoir la même ori-
gine que chez la tortue (excitatory-PREF model),alors que pour
d’autres, l’entrée inhibitory-NULL presynaptic DS est dominante,
tandis que chez d’autres encore, une interaction postsynaptique
entre excitation et inhibition a été observée.
Cependant, le traitement présynaptique de la DS apparaît suffi-
sant dans de nombreux cas. Nous avons proposé un modèle de
connectivité (5) centré sur l’intégration synaptique dans les den-
drites, en particulier (mais pas exclusivement) ceux des cellules
cholinergiques starburst amacrines (figure 2). Malgré leur symé-
trie radiale, ce type de cellules représente un candidat potentiel
dans la DS, parce que la DS est fortement dépendante de la voie
cholinergique, et que ces cellules apparaissent étroitement liées
aux cellules ganglionnaires DS. En particulier, le modèle prédit
que les récepteurs GABAAimportants pour la DS sont situés sur
les dendrites de ces cellules, et s’appuie sur les capacités de
shunts des récepteurs au GABAApour fournir la non-linéarité
nécessaire au calcul de la DS. Des résultats récents de Denk et
al. (2002), fondés sur l’imagerie du calcium dans les cellules
starburst amacrines, semblent conforter ce modèle, montrant
qu’en effet les réponses aux sommets des dendrites à des stimuli
en mouvement sont DS.
Que nous dit ce modèle sur le traitement de l’information dans
les neurones en général, en particulier dans le cortex ? Considé-
rons la cascade d’entrées le long d’un dendrite d’un neurone cen-
tral générique. La performance du modèle de la DS rétinienne
suggère qu’une directionalité similaire peut exister pour des neu-
rones non rétiniens, au niveau des afférences le long de chaque
branche. Nous suggérons qu’avec des paramètres biophysiques
plausibles, le soma d’une cellule plus générale verra une réponse
directionnelle venant de ces entrées synaptiques sur la branche
dendritique. Spécifiquement, pour un ensemble donné d’entrées
au cours du temps le long d’une branche dendritique, la réponse
synaptique au niveau du soma sera maximale quand la séquence
des entrées se fera du distal vers le proximal, après le travail clas-
sique de Wilifred Rall. À l’opposé, si le même ensemble d’entrées
est inversé dans le temps, il sera probablement beaucoup moins
efficace pour dépolariser le soma. Comme dans le cas de la DS
rétinienne, le résultat net serait que les branches dendritiques
fonctionneraient autrement que comme de simples intégrateurs
d’entrées indépendants du temps. Ces branches seraient en fait
des filtres spatio-temporels non linéaires.
En conclusion, il faut rappeler que pour le traitement de l’infor-
mation, les neurones rétiniens présynaptiques aux cellules gan-
glionnaires ne communiquent pas en général via des potentiels
d’action. Par conséquent, la découverte que la DS survient avant
la cellule ganglionnaire par une opération fonctionnelle non
linéaire ne nécessitant pas la génération d’un potentiel d’action.
Ces résultats ont des implications particulières pour les réseaux
de neurones de type “connectiviste”, habituellement fondés sur
le seuil de génération du potentiel d’action comme unique élé-
ment non linéaire. ■
Je remercie Manuel Levy pour la traduction française du texte
original.
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Découvertes
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La Lettre du Neurologue - n° 1 - vol. VII - janvier 2003 17