©1995 - Institut Laue-Langevin
Supraconducteurs et neutrons à
Grenoble
Figure 1. Supraconducteur en lévitation au-dessus d’une
surface magnétique.
EDF perd 10 % de l’électricité produite parce que le
métal des lignes électriques s’échauffe lors du passage du
courant. Ce phénomène appelé effet Joule, utile parfois
(radiateur électrique), est souvent très nuisible. Peut-on
l’éviter ? Oui et non. On connaît depuis 1911 des métaux
qui deviennent conducteurs parfaits (supraconducteurs)
mais seulement à des températures trop basses1 pour être
réellement utilisables.
La presse s’est fait largement l’écho de la découverte
inattendue de matériaux nouveaux, supraconducteurs à
des températures nettement plus accessibles2, et de la
bataille acharnée des chercheurs pour aller encore plus
haut. Pour cela il était indispensable de comprendre leur
structure (l’arrangement des atomes) et c’est là que les
neutrons sont intervenus !
Qu'est-ce qu'un supraconducteur ?
Quand le courant électrique circule dans un
conducteur normal, il y a perte d'énergie et dégagement
de chaleur à cause de sa ‘résistance électrique’. Le
cuivre, meilleur conducteur connu à température
ambiante, a une résistance non négligeable et c’est
pourquoi EDF essaye de limiter les pertes en construisant
d’énormes et inesthétiques lignes à très haute tension.
Avec les supraconducteurs la basse tension suffirait,
car eux n'ont pas de résis______électrique et il n'y aurait
donc pas de perte d'énergie. Hélas les très basses
températures sont coûteuses !
De nouveaux matériaux.
En 1986, G. Bednorz et K.A. Müller de Zurich
découvraient une nouvelle classe de matériaux dont
certains deviennent supraconducteurs à une température
beaucoup plus haute, supérieure à celle de l'air liquide.
Ce dernier est encore froid (–190!°C), mais il peut être
produit et stocké de façon assez peu coûteuse.
La figure 1 montre un supraconducteur froid flottant
sur une surface magnétique. Dès que le champ de force
magnétique pénètre le supraconducteur, des courants
électriques y prennent naissance et créent des forces
1!Inférieures à -250 ºC
2!Des températures de –238!°C (BaLaCuO), –183!°C
(YBa2Cu3O7) ont été successivement atteintes. Le record
actuel est –148!°C.
opposées qui repoussent la surface magnétique. Un
véhicule glissant ainsi sans frottement sur une surface
magnétique, plutôt que sur des roues, nécessiterait
beaucoup moins d'énergie pour se déplacer.
Les supraconducteurs à "haute température" ont donc,
à l'évidence, toutes sortes d'applications potentielles. Ils
sont déjà présents dans les scanners à résonance
magnétique nucléaire (RMN) qui remplacent de plus en
plus les rayons X dans les hôpitaux pour l’examen en
profondeur du corps humain. Il faudra sans doute des
années pour développer des trains à sustentation
magnétique et des lignes électriques sans perte.
La recherche de nouveaux supraconducteurs.
Ces nouveaux supraconducteurs n’ont pas été
découverts par hasard mais grâce aux idées et théories
issues de la recherche fondamentale.
Figure 2. Température de la transition supraconductrice
(Tc) du YBaCuO selon sa composition en oxygène (x).
Ce sont des mélanges de quatre atomes (par ex:
Yttrium, Barium, Cuivre, Oxygène) dont les propriétés
sont étonnamment sensibles à de faibles variations de la
structure cristalline. La figure 2 montre, par exemple,