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EXAMEN
DU
MÉMOIRE
faceret, » avec les autres indications de mouvements qui se trouvent dans
le texte (1), on est endroit de conclure que les Romains suivaient une ligne,
une zone et ne la traversaient pas, et que César marchait en suivant la limite
du territoire des Lingons ou une zone étroite renfermant cette limite et ne
la franchissait pas. Si l'acception de quum, adverbe de temps, est exacte, et
elle doit l'être, le mouvement de Vercingétorix se trouve ainsi déterminé,
quant à sa durée, par la marche des Romains suivant la frontière des Lingons,
et la rencontre ne peut avoir eu lieu entre les deux armées que sur un point
voisin de cette frontière.
Les bords de la Vingeanne, à Praulhoy, sont à 24 kilomètres de la fron-
tière orientale du territoire lingon, à près de 38 kilomètres de l'enclave
mandubienne, à près de 58 kilomètres de la limite méridionale. Cette contrée
ne peut donc satisfaire aux conditions si péremptoirement indiquées par le
texte.
Le membre de phrase : « Circiter milita passnum X ab Romanis, trinis
castris Yercingelorix consedit » a été traduit par :
«
Vercingétorix vint asreoir
trois camps à environ dix mille pas des Romains. »
M. Beaudement et M. Louandre ont traduit : « Vercingétorix, en trois
journées de marche, vint s'établir à dix mille pas des Romains,
K
Ces deux interprétations ont été longuement discustées ; nous laisserons
de côté la question philologique ou grammaticale, en faisant remarquer seule-
(1) Ou voit en effet, au
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chapitre du premier livre, que César ne permit pas aux Helvétiens
de « faire
voyage
par la province. » Pour traverser une province, il faut suivre une ligne, ainsi
cet exemple vient à l'appui de notre premier énoncé.
Au chapitre 10, il est écrit que les Helvétiens font voyage par les terres des Séquanes et des
Eiiuens peur aller chez les Santons (per ayrum
Sequanorum
et
Mduoram
in
Santonum
fines
iter
facerej. Trois pays contigus forment incontestablement une ligne, et il y a nécessité de faire
voyage par cette ligne pour arriver dans la troisième contrée.
Le chapitre li offre encore un exemple
:
les Helvétiens avaient essayé de faire voyage par la
province (iter per
provinciam,
per vim Tentassent].
Au VIP livre, César quitte la Loire pour aller rejoindre Labienus, c'est encore une ligne à
parcourir ; « il commença de faire voyage vers les Senones. • (Iter in
Senones
facere instituitj
Lorsque le général historien décrit un mouvement par lequel une armée quitte un côté d'une
ligne pour occuper l'autre, il emploie les expressions : traverser, franchir, sortit, conduire.
On en trouve des exemples livre I", chap. 12, 13 et 14 ; livre H', chap. 19 et 23 ; livre IIP,
chap.
11 ; livre IV", chap. 1".