Evaluation de l`application du référentiel d`organisation du

Inspection générale
des affaires sociales
Inspection générale
de l’administration
2013-182R
N°14063-13128-01
Jean-François BENEVISE Sophie DELAPORTE Maximilien BECQ-GIRAUDON
Inspecteur général
des affaires sociales
Inspectrice générale
de l’administration
Inspecteur de
l’administration
Evaluation de l’application du référentiel
d’organisation du secours à personne et de
l’aide médicale urgente
Établi par
RAPPORT DEFINITIF
- Juin 2014 -
2 IGAS, RAPPORT N°2013-182R / IGA N°14063-13128-01
IGAS, RAPPORT N°2013-182R / IGA N°14063-13128-01 3
SYNTHESE
[1] En octobre 2013, les ministres chargés de la santé et de l’intérieur ont demandé aux
inspections générales des affaires sociales (IGAS) et de l’administration (IGA) d’évaluer
l’application du référentiel du 25 juin 2008 relatif à l’organisation du secours à personne et de
l’aide médicale urgente (SAP-AMU), sous l’angle de l’effectivité de sa mise en œuvre, de
l’efficacité de la réponse opérationnelle et de l’efficience du dispositif aujourd’hui.
[2] Outre une centaine d’entretiens nationaux et l’exploitation des données disponibles, la
mission a effectué six visites de terrain et adressé des questionnaires aux cinq réseaux
directement concernés. 66 réponses ont été reçues de la part des préfets, 26 des directeurs
généraux d’ARS, 77 des services d’incendie et de secours (SIS), 63 des services d’aide médicale
urgente (SAMU) et des directions de leurs établissements et 8 des présidents de conseil général.
*
[3] Services publics aux identités fortes, également légitimes, SAMU et SIS interagissent au
quotidien dans les prises en charge urgentes de patients et de victimes. Les premiers mobilisent,
au titre de l’aide médicale urgente (AMU), un dispositif de régulation médicale et de
médicalisation p-hospitalière fondés sur une appréciation médicale du « juste soin ». Les
seconds, acteurs centraux du secours à personne (SAP), déclinent leur doctrine du « porter
secours » dans un cadre de réponse formalisé et standardisé.
[4] Les deux services réalisent une part significative de leur activité en commun, hors
permanence des soins ambulatoire (PDSA). Ils font face à une pression à la hausse de leur
activité sous l’influence d’évolutions sociétales : vieillissement de la population, développement
de l’hospitalisation à domicile, croissance des demandes non urgentes, extension des tâches
« indues » (pour les SDIS, transports simples et interventions médico-sociales ; pour les SAMU,
carences d’autres acteurs sanitaires et établissement de certificats de décès).
[5] Les transformations de l’offre de soins ont un impact sur le fonctionnement des services,
que ce soit la diminution programmée du nombre de médecins installés, l’évolution plus
favorable du nombre d’infirmiers ou la filiarisation des prises en charge qui accroît les temps de
transport.
[6] Au fil du temps, les pouvoirs publics ont dû opérer des ajustements dans les interventions
respectives des SAMU et des SIS, d’abord par voie de circulaires, puis par une voie négociée
entre représentants des professionnels sous l’égide des administrations centrales concernées, à la
demande du plus haut niveau de l’Etat.
[7] Le référentiel SAP-AMU, publié par arrêté du 24 avril 2009, contient plus de 160
prescriptions, portant sur le traitement des appels, la réponse aux demandes ou encore la mise en
œuvre d’une démarche qualité ambitieuse. Il pose trois principes destinés à remédier aux
dysfonctionnements antérieurs :
la reconnaissance de la légitimité de l’envoi immédiat de moyens sapeurs-pompiers
dans les situations dites de « départ réflexe », incluant les urgences vitales et les
événements survenant sur la voie publique ou dans un lieu public ;
la reconnaissance de la pertinence de la régulation médicale de tout appel de
secours à personne ou d’aide médicale urgente, quel que soit le numéro d’urgence
composé par l’appelant : régulation a posteriori en cas de départ réflexe, a priori
dans tout autre cas ;
l’affirmation du principe selon lequel le doute profite à l’appelant.
4 IGAS, RAPPORT N°2013-182R / IGA N°14063-13128-01
[8] Face à cette nouvelle relation bipartite, qui rompt avec le cadre tripartite promu depuis
2004, les transporteurs sanitaires privés ont sollicité du ministère de la santé l’élaboration d’un
référentiel spécifique, signé le 9 avril 2009. Ce document souligne notamment qu’en leur qualité
de professionnels de santé, ils ont vocation à participer à la prise en charge des urgences vitales
sur demande du SAMU et présente le référentiel SAP-AMU comme complémentaire du leur.
1 BILAN DE LA MISE EN ŒUVRE DU REFERENTIEL
[9] Les réponses aux questionnaires de la mission font ressortir un bilan d’application du
référentiel contrasté suivant les départements et les sujets.
[10] Les départs reflexes et la régulation médicale sont bien intégrés dans les pratiques, même
si certains SAMU se plaignent du caractère parfois tardif ou non systématique de la mobilisation
de la régulation médicale.
[11] S’agissant des outils techniques, les fonctionnalités téléphoniques de transfert d’appel et
de conférence à trois sont assurées dans la quasi-totalité des services ; la priorisation des appels
entrants n’est en revanche pas généralisée. Le déploiement du réseau de radiocommunications
ANTARES est plus lent que prévu (67 SIS et 47 SAMU équipés au 1er décembre 2013). Dans
environ la moitié des départements, les systèmes d’information des deux services semblent ne
pas partager d’informations en temps réel. Les travaux de cadrage technique des logiciels de
sécurité civile menés sous l’égide de l’AFNOR-INFOCERT font débat entre les ministères.
Enfin, la géolocalisation des moyens n’est disponible que dans moins de 20% des services.
[12] Les modalités de réponse envisagées par le référentiel sont inégalement mises en œuvre :
la réponse secouriste est considérée par tous les acteurs comme globalement bien
maîtrisée par les sapeurs-pompiers. Trois éléments du référentiel ne sont toutefois
utilisés que dans 50 à 75% des départements : les bilans simplifiés, l’information
spécifique du CRRA pour la clôture des dossiers et la justification médicale de
l’envoi d’un VSAV en dehors de son secteur opérationnel ;
les dispositions relatives aux infirmiers sapeurs-pompiers, qui occupent une place
importante dans le référentiel, sont faiblement appliquées et font l’objet de
divergences. Le projet de protocoles nationaux de soins d’urgence et d’antalgie
établis conjointement par les représentants des urgentistes et des soignants sapeurs-
pompiers a échoué. Les SIS qui mettent en place de tels protocoles estiment tous
qu’ils respectent le décret d’actes des infirmiers alors que 65% seulement des
SAMU répondants partagent ce point de vue ;
dans la réponse médicale, l’articulation n’a pas encore été trouvée entre médecins
sapeurs-pompiers (MSP) et médecins correspondants du SAMU (MCS). Moins de
30% des SIS et SAMU échangent leurs listes de médecins (MCS et MSP). Le
ministère chargé de la santé a omis d’associer les responsables des sapeurs-
pompiers à la réflexion sur l’accès aux soins urgents en moins de 30 minutes et ne
fait suffisamment pas le lien entre le dispositif des MCS et la politique territoriale
de soutien à l’installation des médecins.
[13] La formalisation des relations financières entre établissements de santé et SDIS doit
progresser afin d’assurer, comme le prévoit le référentiel, la rémunération de trois types
d’intervention du SDIS en dehors de ses missions sur demande du SAMU (appui logistique
régulier à un SMUR, évacuations par indisponibilité ambulancière, appui aux relevages-
brancardages simples). A titre d’exemple, seuls 57% des SDIS et 31% des SAMU répondants
mentionnent une convention d’appui logistique. Pour les autres, il n’est pas possible de savoir si
un tel appui n’existe pas ou si les acteurs estiment qu’une prestation entre deux services publics
ne doit pas être facturée.
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[14] Plus largement, les orientations posées par le référentiel en matière d’efficience trouvent
peu de traductions concrètes. La démarche qualité, ambitieuse, est médiocrement mise en
œuvre. Le suivi des indicateurs est lacunaire. Les axes de progrès prévus par le référentiel ont
été peu suivis.
[15] La mise en œuvre du référentiel relatif à la réponse ambulancière à l’urgence pré-
hospitalière est encore moins avancée : moins d’un tiers des départements bénéficient d’un
coordonnateur ambulancier (15 financés par la profession, 5 sur fonds publics et 8 de façon
mixte).
[16] Par ailleurs, la signature des conventions interservices n’est pas généralisée. 25
départements ne semblent pas dotés d’une convention SAMU-SIS postérieure à l’adoption du
référentiel. Parmi eux, une dizaine fonctionne encore sous le régime d’une convention tripartite
antérieure. Le dispositif prévu (conventions SAMU-SDIS et SAMU-ambulanciers et protocole
tripartite) n’est complet que dans deux départements, l’Ille-et-Vilaine et le Maine-et-Loire. Mais
les relations peuvent être solides et inclure tous les acteurs, même en l’absence de telle ou telle
convention.
[17] Des situations de blocage sont identifiées dans une quinzaine de départements : onze cas
entre le SAMU et le SIS, pour des raisons financières le plus souvent, et cinq entre le SAMU et
les transporteurs sanitaires privés, pour des motifs spécifiques.
2 ANALYSE DES RESULTATS EN TERMES D’EFFICACITE ET
D’EFFICIENCE
[18] La mise en œuvre du référentiel a permis de dynamiser les relations entre SDIS et
SAMU, de clarifier les rôles et de formaliser les pratiques. Des initiatives locales positives sont
recensées, depuis l’élaboration d’algorithmes de traitement jusqu’au logiciel commun avec
délégation à l’autre service de la possibilité d’engager ses moyens.
La clef de l’efficacité réside dans une compréhension partagée du champ et des limites
des départs réflexes comme de la régulation médicale
[19] Sur le périmètre des départs réflexes, quatre dysfonctionnements ressortent : ajout de
motifs non prévus (accident vasculaire cérébral, douleurs thoraciques, chute de hauteur),
caractère trop flou de certaines rubriques du référentiel (détresse respiratoire, altération de la
conscience, personne restant à terre après chute), difficultés sur les urgences vitales à domicile -
antérieurement prises en charge par les transporteurs sanitaires -, étendue trop large du critère
relatif à la voie publique, aux lieux publics et aux établissements recevant du public.
[20] Sur le dernier point, dans plusieurs départements, SDIS et SAMU ont, d’un commun
accord, décidé de circonscrire le critère géographique soit en lui ajoutant un critère de gravité,
soit en instaurant une régulation médicale préalable pour certaines catégories d’appels (faits
survenant dans un établissement recevant du public, un EHPAD ou sur un stade), soit en
répartissant les interventions entre sapeurs-pompiers et transporteurs sanitaires privés en
fonction du lieu.
[21] Par ailleurs, la qualité de la régulation médicale est interrogée par plusieurs SDIS
répondants en raison de difficultés pour joindre le Centre 15, voire le médecin (près de 20% des
SIS) et de l’hétérogénéité des pratiques des médecins régulateurs.
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