
n Revue Marocaine de Rhumatologie n
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sévérité est variable. Elle se manifeste
initialement par une toux sèche, une
dyspnée, voire un syndrome de détresse
respiratoire aiguë dans les stades avan-
cés avec fibrose pulmonaire diffuse. Le
scanner thoracique permet de mettre en
évidence une pneumopathie interstitielle
non spécifique. Les explorations fonc-
tionnelles respiratoires rechercheront
une diminution de la capacité de diffu-
sion du monoxyde de carbone (DLCO),
voire un syndrome restrictif, et le lavage
broncho-alvéolaire montrera une alvéo-
lite lymphocytaire [2,3,6,9]. Parfois, le
SAS à anti-PL12 peut se présenter sous
forme d’une pneumopathie interstitielle
non spécifique isolée (29,4 %) selon une
large série européenne [3]. De fait, le
clinicien doit être capable de rechercher
les anticorps anti-PL12 dans ce contexte.
La sévérité de l’atteinte pulmonaire et la
présence d’une hypertension artérielle
pulmonaire (complication rare de ce
syndrome) conditionnent le pronostic
du SAS à anti-PL12 et justifient une sur-
veillance des malades à la recherche de
cette atteinte pulmonaire [3,6,10,11].
Par ailleurs, la présence des anticorps
anti-PL12 au cours du SAS peut être
exclusive [3,12], ou dans certains cas,
être associée à d’autres anticorps rentrant
dans le cadre d’un « Overlap syndrome ».
Autrement dit, le SAS à anti-PL12 peut
se présenter sous la forme d’un syn-
drome de chevauchement avec d’autres
connectivites notamment le syndrome de
Gougerot-Sjögren dont le diagnostic est
basé sur des arguments cliniques, immu-
nologiques et histologiques [8,13]. Cette
situation a été observée chez 23,5 % des
cas, ce qui suggère que cette association
n’est pas fortuite, mais son mécanisme
physiopathologique reste mal connu [3].
La possibilité d’une réaction croisée entre
les auto-antigènes ARNt synthétases et
les auto-antigènes Ro/SSA retrouvé dans
le Gougerot, a été exclu car il n’y a pas de
similitudes reconnues entre ces 2 types
d’antigènes. Notre patiente avait tous les
critères en faveur du syndrome de Gougerot-
sjögren : cliniques (xérophtalmie, xéros-
tomie, test de Shirmer pathologique),
immunologiques (anticorps anti-Ro/
SSA positifs), et histologiques (sialadé-
nite stade IV de Chisholm et Masson),
ce qui a permis de poser le diagnostic.
L’évolution sous traitement est marquée
le plus souvent par une réponse aux
corticoïdes donnés initialement à raison
de 1 mg/kg par 24 heures équivalent
prednisone. La décroissance du traite-
ment est lentement progressive et guidée
par l’état respiratoire (clinique, radio-
graphique et aux explorations fonction-
nelles), et aussi par les manifestations
extra-respiratoires (articulaire et muscu-
laire). Le traitement doit être prolongé,
mais la dose seuil suffisante pour empê-
cher un rebond pulmonaire ou extra-
pulmonaire varie selon les patients [9].
Chez notre patiente, une réapparition des
arthralgies, voire des arthrites a été notée
lors de la dégression de la corticothéra-
pie. Il est souvent nécessaire d’adjoindre
un immunosuppresseur à titre d’épargne
cortisonique. Cependant, la réponse au
traitement par ces immunosuppresseurs
semble hétérogène, car il y a peu de
données sur l’évolution à long terme, et
aucun facteur prédictible d’évolution n’a
été démontré [3,14,15]. Des études plus
larges avec un suivi prolongé sont néces-
saires pour trouver les meilleurs para-
mètres au moment du diagnostic pour
déterminer le pronostic de ces patients.
CONCLUSION
Le syndrome des antisynthétases à
anti-PL12 est une entité rare au sein
des syndromes des antisynthétases. Il
possède des particularités cliniques et
biologiques qui sont nettement moins
connues vu la rareté des données de la
littérature concernant ce syndrome.
Notre cas illustre une myosite de
chevauchement entre syndrome des
antisynthétases à anti-PL12 et syndrome
de Gougerot-Sjögren. L’association à
cette connectivite est décrite dans la
littérature, avec une fréquence qui
n’est pas négligeable. Ce qui sug-
gère que cette association n’est pas
fortuite, mais le mécanisme étiopatho-
génique reste à élucider. L’évolution
est variable sous traitement, et il n’y
a pas de facteurs prédictibles d’ag-
gravation. Un suivi plus prolongé et
le recueil d’autres observations sont
nécessaires pour évaluer plus précisé-
ment le pronostic de ce syndrome.
Déclaration d’intérêt
Les auteurs déclarent ne pas avoir de
conflit d’intérêt.
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Chevauchement entre syndrome des antisynthétases à anti-PL12 et syndrome de Gougerot-Sjögren
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