CEDIS – SPIDIS / Spiritualité dans les institutions sociales / Armin Kressmann / Lausanne 2009
Esprit avec majuscule, ou avec minuscule ?
Le même mot. Selon qu’on l’écrive avec une grande ou avec une petite lettre, il
nous entraîne dans des paysages tout à fait différents. Mais il y a une incertitude :
les grandes constructions de l’esprit humain ne méritent-elles pas une majuscule ? Et
l’incognito de l’Esprit, qui discrètement sort du lot, ne serait-il pas plus adéquatement
saisi par la minuscule ?
La question laisse supposer un imbroglio, trop difficile pour y voir clair et en
disséquer les composantes. Dans les histoires que la Bible raconte, la différence est
nette. Ici, l’Esprit Saint ou divin, qui continue à faire briller l’étoile du matin pendant
la journée, puis au soir de l’humanité et de chacun des croyants, qui les anime, les
soutient et les renouvelle : l’Esprit les envahit sans même qu’ils le remarquent. Là,
l’esprit de tout un chacun, assorti de plus ou moins de génie, d’intelligence,
d’inventivité, mais toujours prêt à des entreprises pour le meilleur et pour le pire. Il
ne faut pas le confondre avec l’Esprit, même si l’esprit ne saurait exister sans lui.
Alors, quel degré de parenté ? Dieu est au ciel, l’homme sur la terre, constate la
Bible sobrement.
Question saugrenue, celle du titre ? Pas forcément. Il va de notre auto-évaluation
que nous aimerions naturellement aussi positive que possible. L’homme et sa raison
sont-ils à même de remplacer ce que, avant la période dont nous sommes les
enfants et qu’on appelle éclairée, on a appelé « Dieu », plus tard « Transcendance »
ou « Altérité » ? Dieu et l’homme : même combat ? Capable des plus grands exploits
bénéfiques comme des plus grandes horreurs, l’espèce est constamment placée
devant la question de savoir si elle veut vraiment jouer au Dieu ou se contenter d’un
rôle plus modeste, plus adéquat. Rappel apparemment inutile, vu les nombreuses
Tours de Babel, mais si nécessaire ! Envers et contre tout.
Klauspeter Blaser